Je ne suis pas enseignante mais j’ai des étudiants - Clinic n° 10 du 01/11/2010
 

Clinic n° 10 du 01/11/2010

 

C’EST MON AVIS !

Olivia GROSS NICLAS  

J’ai l’habitude de me définir comme une militante. Ce substantif magnifique exprime la force de l’agir et de la conviction. Mon action en tant que « patient formateur » répond bien à ma vision du militantisme.

Je suis mère d’un garçon atteint de dysplasie ectodermique anhidrotique et présidente de l’association concernée par cette pathologie et les pathologies voisines. La dysplasie ectodermique fait des chirurgiens-dentistes nos alliés naturels, nos compagnons de...


J’ai l’habitude de me définir comme une militante. Ce substantif magnifique exprime la force de l’agir et de la conviction. Mon action en tant que « patient formateur » répond bien à ma vision du militantisme.

Je suis mère d’un garçon atteint de dysplasie ectodermique anhidrotique et présidente de l’association concernée par cette pathologie et les pathologies voisines. La dysplasie ectodermique fait des chirurgiens-dentistes nos alliés naturels, nos compagnons de route. Mais il se trouve que ces compagnons, dans un certain nombre de situations, ont failli. Ils ont notamment traité de nombreuses femmes pour leurs agénésies sans jamais les relier à un syndrome, lien qui aurait permis de les informer du risque qu’elles avaient de voir naître dans leur famille des garçons avec la forme complète de la maladie. Ils sont nombreux aussi à refuser de traiter ces enfants, sans doute par crainte de mal faire. C’est parce que j’ai fait dans le passé certains constats négatifs qu’il est impératif pour moi de tenter d’y remédier.

M’investir dans la formation initiale m’a semblé un moyen de réparer ces lacunes liées à l’ignorance et au manque d’investissement personnel. Je donne depuis 6 ans des cours dans un certain nombre de facultés dentaires. Ma mission est d’insister sur le rôle majeur et passionnant qui incombe au praticien dans le diagnostic des maladies rares. Pour que plus personne ne passe par là où tant de familles sont passées alors que cela aurait pu être facilement évité. Sept cent cinquante syndromes ont une composante oro-dento-faciale. Les chirurgiens-dentistes doivent se sentir concernés tant par leur rôle de diagnosticien que par les gènes impliqués dans ces syndromes, car les thérapeutiques vont varier en fonction de ces derniers puisqu’ils génèrent des conséquences cliniques particulières.J’attire notamment l’attention des étudiants sur le fait qu’en odontologie pédiatrique, ou dans le cas du handicap mental, le patient n’est pas uniquement celui qui est installé dans le fauteuil mais aussi sa famille entière. La réalisation du traitement dépend de l’adhésion de la famille. Le cours que je propose est délivré, selon les facultés, soit en santé publique, soit en soins spécifiques, soit en odontologie pédiatrique, soit en biologie fondamentale. Cette année, le sujet est tombé à l’examen de Paris Descartes et j’en ai co-corrigé les copies !

Dans la lignée de la faculté de Nantes, qui la première a cru à cette forme d’enseignement atypique, d’autres facultés ont accueilli ce cours et je ne les en remercierai jamais assez. Car je suis sûre (cela a été étudié et prouvé) que ma manière de faire cours parle aux étudiants, qu’ils se rappellent dans le temps de ce qui a été dit et que cela les motive à approfondir certaines disciplines.