Le local professionnel : ce qu’il faut savoir - Clinic n° 01 du 01/01/2011
 

Clinic n° 01 du 01/01/2011

 

CABINET

GÉRER

PATRIMOINE

Bail professionnel ou commercial, SCI, TVA, fiscalité foncière, impôt sur les sociétés… Voici tout ce qui préoccupe le praticien qui vient de trouver le bon local, au bon endroit, avec la bonne surface. Décodage.

Chaque praticien connaît le prix de l’immobilier au mètre carré dans sa région et il saura juger les propositions qui lui sont faites. Discussion, négociation, il sait faire. Mais ensuite ? C’est à ce stade que débute le parcours du combattant. Essayons de le jalonner. Qui va signer le compromis ou la réservation ? Le praticien, s’il acquiert seul, ou un des associés, s’ils acquièrent par le biais d’une collectivité. Mais lors de cette signature, ils feront écrire qu’ils pourront « se substituer à une personne morale ou physique » à la signature définitive. Car, entre ces deux signatures, il conviendra de créer une société civile immobilière (SCI). Elle a son indication dans 98 % des situations. La société se crée avec un minimum de deux associés, pas nécessairement praticiens eux-mêmes. Il faut co­mpter de trois semaines à un mois pour constituer une SCI, en s’en remettant à un conseil, pas obligatoirement notaire. Le coût est de l’ordre de 1 500 à 2 000 €, honoraires et frais de formalités compris.

C’est cette SCI qui sera l’acquéreur lors de la signature définitive qui, elle, nécessite impérativement le passage chez le notaire, habituellement le sien et celui du vende­ur. Ils se partagent les tâches et… les honoraires. Pour exister, donc acquérir, cette SCI doit être immatriculée au greffe du tribunal de commerce et des sociétés. Son livret de famille se dénomme K–bis.

La SCI ne concerne pas le Conseil de l’Ordre. Celui-ci exigera en revan­che communication du bail qu’elle concédera au praticien, à une société civile de moyens (SCM) ou à une société d’exercice libéral (SEL). Ce bail re­lèver­a soit des textes et lois propres aux baux professionnels, soit de ceux des baux commerciaux. Les professions libérales peuvent dorénavant être soumises à l’un ou l’autre. Ce sont les parties contractantes qui en décident, sachant que lorsque la SCI est détenue par les praticiens, il est habituellement conclu un bail professionnel.

Cette acquisition s’opérera grâce à un financement concédé soit à la SCI, soit à chacun des associés, ceux-ci apportant immédiatement le montant qui leur est prêté à la SCI afin qu’elle règle le vendeur. Actuellement, les emprunts contractés par la SCI sont conseillés sur une durée maxi-male (15-20 ans), quel que soit l’âge du praticien, du fait de taux de crédit très raisonnables et de la perspective d’inflation à moyen terme. Un endettement long dans les conditions actuelles facilitera en outre la cession de parts à un associé ou successeur, le moment venu.

Quant au financement des travaux d’aménagement intérieur, nous conseillons le plus souvent de les faire supporter par le locataire (praticien ou SCM) parce qu’ils seront déductibles et contribueront, de plus, à diminuer le poids des cotisations sociales. Bien que l’emprunteur ne soit pas le même que pour les murs, dans cette hypothèse, il est d’usage de monter les dossiers de financement simultanément, auprès du même établissement, pour éviter une surenchère de garanties. Autant un financier apprécie de prêter pour l’achat de murs, autant il est préoccupé pour les travaux intérieurs. La vraie tracasserie du praticien commence maintenant. Elle est fiscale et le praticien n’a pas compétence pour trancher. Il s’agit de savoir si la SCI opte pour la TVA. Cette réflexion est de rigueur si on acquiert un local neuf ou si on fait construire. Elle n’a pas d’intérêt si le local est ancien (plus de 5 ans) lorsqu’on exerce une profession dont les honoraires ne sont pas assujettis à la TVA. C’est le cas du médecin et du chirurgien-dentiste, ce qui les distingue d’un vétérinaire dans ce type de réflexion. Il faut, en la matière, interroger son conseil (expert-comptable, conseil en gestion) car l’option peut être porteuse d’économies, d’autant que le traitement de cette option vient d’être aménagé.

Et puisqu’on se retrouve dans le labyrinthe des comptables, on en profite pour se poser une autre question. La SCI doit-elle opter pour le régime IS, celui de l’impôt sur les sociétés, identique à celui des SEL, plutôt que voir les loyers fiscalisés dans le régime des revenus fonciers ?

Sans être exhaustif, disons que ce régime IS concernera des locaux peu enclins à beaucoup se valoriser à l’avenir ou ceux qui sont consacrés à un groupe significatif de praticiens (à partir de quatre, selon nous) parce qu’ils feront l’objet de cession de parts de société à des successeurs ou associés nouveaux et que le bien immobilier restera durablement dans la SCI.

Mon conseil

Isabelle VASSIA, Juriste

L’acquisition des murs du cabinet est un acte de gestion patrimoniale personnelle qui doit satisfaire prioritairement les objectifs professionnels. C’est souvent le local – son emplacement et sa surface – qui permet de trouver un associé ou un successeur. Dans un groupe d’associés, une surface qui ménage des mètres carrés individuels est gage d’une bonne entente.

La SCI sera, elle aussi, déterminée par les caractéristiques de l’occupant final. Le praticien seul acquerra souvent avec son conjoint. Si le local est destiné à un groupe de praticiens, il sera sage de prévoir une répartition du capital proportionnellement à la contribution de chacun au futur loyer. Il sera utile que les statuts prévoient qu’en cas de départ d’un praticien, celui-ci ne puisse pas s’opposer à la vente de ses parts de SCI afin d’éviter d’être en présence, ultérieurement, d’un associé de la SCI dont les intérêts sont différents de ceux des autres, ce qui compromet tant les engagements de travaux que l’évolution du loyer.

N’oublions pas, dans certains cas, l’indication d’étudier le démembrement temporaire de propriété : la comptabilité du cabinet acquiert l’usufruit, le ou les praticiens acquièrent la nue-propriété. Ce dispositif est source d’économie fiscale pour les deux contractants mais constitue un engagement durable, d’un minimum de 15 années.