Prendre en charge le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil en odontologie - Clinic n° 03 du 01/03/2012
 

Clinic n° 03 du 01/03/2012

 

SANTÉ PUBLIQUE

Isabelle PRIME  

Chargée d’enseignement au diplôme universitaire des troubles fonctionnels oro-faciaux (Paris Descartes)
Centre Médical Veille-Sommeil 59, avenue de Villiers – 75017 PARIS 47, rue Aristide Briand – 61200 ARGENTAN

Le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) est un problème de santé publique. Il atteint la santé et la qualité de vie des patients. Il impacte la sécurité au travail et la vigilance au volant. Si vous n’êtes pas déjà concerné, vous le serez. En tant qu’omnipraticien, orthodontiste, parodontiste, occlusodontiste, endodontiste… vous aurez à dépister le trouble ou à intervenir dans la prise en charge des troubles ventilatoires obstructifs du sommeil. Vous êtes novice ? Alors, s’il vous en dit, butinez dans cet abécédaire. Il vous donnera peut-être envie d’aller plus loin à la découverte d’un trouble « à la croisée des chemins ».

A comme articles

De nombreux articles et ouvrages ainsi que des formations courtes ou longues, théoriques et pratiques sont à la disposition des praticiens. Vous pourrez donc acquérir les connaissances les plus adaptées à vos besoins.

B comme bruxisme

Dans la classification internationale des troubles du sommeil de 2005 [1], le bruxisme de sommeil appartient à la catégorie des troubles moteurs liés au sommeil..

En matière de bruxisme et d’apnées du sommeil, des études attirent l’attention.

Les données de la fréquente association entre le SAHOS et le bruxisme de sommeil [2] incitent à se poser la question de la présence du trouble ventilatoire avant toute prise en charge de bruxisme de sommeil par orthèse. En effet, une étude de Gagnon et al. [3] de 2004 portant sur 10 patients présentant un ronflement et/ou un SAHOS conclut que les événements ventilatoires pendant le sommeil peuvent être aggravés par le port d’une orthèse communément utilisée pour le bruxisme de sommeil.

En 2006, une étude de Landry et al. [4] signale que la pose d’une orthèse d’avancée mandibulaire (OAM) a permis la réduction de l’indice de bruxisme de sommeil pendant le sommeil. Il s’agit d’un port sur une donnée courte, avec 13 patients, et le phénomène s’est produit aussi avec un type d’orthèse « classique » sur cette période courte mais de façon moindre qu’avec l’orthèse d’avancée mandibulaire. L’étude de Landry-Schönbeck et al. [5] de 2009 confirme cette notion. Celle de Franco [6], de 2011, même si son objectif est très différent des autres, trouve une diminution de l’indice d’activité rythmique des muscles masticateurs pendant le sommeil.

Le phénomène n’est pas encore élucidé. À suivre donc…

Quoi qu’il en soit, d’un point de vue clinique, l’on sait que la prise en charge du SAHOS par orthèse d’avancée mandibulaire peut être compliquée par le bruxisme. Tout d’abord, le bruxisme peut avoir usé les dents, avec potentiellement en corollaire un manque de rétention de l’orthèse d’avancée mandibulaire. Ensuite, les forces engendrées au sein de l’appareil manducateur peuvent causer des fractures des systèmes de liaison des orthèses et/ou une sensibilité musculo-articulaire (muscles masticateurs et articulations temporo-mandibulaires). Enfin, si le bruxisme a contribué au développement d’un algo-dysfonctionnement de l’appareil manducateur (ADAM), le recours à une orthèse d’avancée mandibulaire devra parfois être différé.

Pour conclure, lors de l’anamnèse des patients qui sont atteints de bruxisme, n’hésitez donc pas à vous poser la question d’un SAHOS et, lors de l’anamnèse des patients apnéiques, n’hésitez pas à vous poser la question d’un bruxisme.

C comme critères

La définition du SAHOS repose sur des critères de l’Académie américaine de médecine du sommeil [7,8]. Ils sont au nombre de trois (A ou B + C) :

• le premier (A) est la somnolence diurne excessive non expliquée par d’autres facteurs ;

• le deuxième (B) est la présence de 2 signes ou symptômes d’une liste de 6 (ronflements sévères et quotidiens, sensations d’étouffement ou de suffocation pendant le sommeil, sommeil non réparateur, fatigue diurne, difficultés de concentration, nycturie – plus d’une miction par nuit –) non expliqués par d’autres facteurs. On y trouve les ronflements sévères et quotidiens ;

• le troisième, le critère C, polysomnographique ou polygraphique, ne peut être absent de la définition du SAHOS (+ C). Il s’agit d’un index d’apnées-hypopnées (IAH) obstructives du sommeil ≥ 5.

Cela concerne l’adulte.

Les critères standardisés recommandés dans le rapport d’un groupe de travail de l’Académie américaine de médecine du sommeil avaient pour objectif de faciliter la comparaison entre les études et non de fournir des guidelines pour la clinique. Pourtant, les cliniciens sont encouragés à les prendre en considération [7] et ils figurent dans les recommandations pour la pratique clinique du SAHOS de l’adulte [8].

D comme…

… dormir

Nombreux sont les patients apnéiques qui ont souvent envie de dormir dans la journée (somnolence diurne excessive). Et pourtant, la veille comme chaque soir, ils se sont endormis « comme une masse ». Ils se sont seulement réveillés pour aller aux toilettes. Il n’empêche que le matin, ils ont une impression de sommeil non réparateur. Pour certains, la somnolence peut même aller jusqu’à se produire en mangeant ou en conduisant, bref dans des situations qui habituellement ne sont pas propices à l’endormissement…

Pour autant, la somnolence diurne est-elle l’apanage du SAHOS ?

Non, somnolence diurne n’égale pas SAHOS. Il y a bien d’autres causes d’hypersomnie, par exemple le syndrome des mouvements périodiques des membres pendant le sommeil. Il est également source de microéveils (courts et non conscients). S’ils ne réveillent pas consciemment le dormeur, ils « fragmentent » son sommeil. La qualité du sommeil est altérée.

… dépistage

Les milliers de chirurgiens-dentistes voient des milliers de patients. Et si votre patient avait un SAHOS sans le savoir ? Lors des bilans de santé et des examens cliniques, pensez donc à poser des questions. Et n’oubliez pas que les enfants aussi sont touchés.

Le patient évoquera peut-être un sommeil peu réparateur ou une grande fatigue, voire une dépression. Son conjoint décrira peut-être des ronflements quotidiens et sévères, des pauses respiratoires suivies d’une reprise bruyante ou d’un éveil. Si ce n’est déjà fait, vous lui poserez des questions sur son type de ventilation (nasale, orale, mixte ?). Vous poserez d’autres questions sur la nuit – mictions répétées pendant la nuit ?, sueurs ?, nuit agitées ?– mais aussi sur la veille – fatigue au réveil ?, céphalées matinales ?, endormissement « en masse » le soir ?, somnolence dans la journée ?, endormissements involontaires ?, troubles cognitifs (mémoire, attention) ? Vous noterez une surcharge pondérale (abdomen, cou…). Vous apprécierez le volume et la posture de la langue, le volume amygdalien, la longueur du voile du palais. Si vous disposez pour ce patient d’une téléradiographie de profil, vous préciserez une rétromandibulie, une rétromaxillie, la position de l’os hyoïde…

Les signes seront un peu différents chez un enfant. Un parent vous parlera par exemple d’une énurésie, de troubles d’attention de son enfant. Il évoquera une hyperactivité plutôt qu’une somnolence…

Au moindre doute, n’hésitez pas à référer le patient à un praticien des troubles du sommeil.

… différer

Avant de poser une orthèse d’avancée mandibulaire, un bilan bucco-dentaire et, plus généralement de l’appareil manducateur, est réalisé. Il est souvent nécessaire de temporiser dans l’attente des soins et des prothèses dentaires nécessaires per se et pour l’optimisation de la prise en charge. Des avis de confrères spécialistes ou aux orientations spécifiques (orthopédie dento-faciale, parodontie…) peuvent être demandés. Il faudra parfois bousculer les délais de rendez-vous pour permettre une pose rapide.

E comme Élise

Élise pourrait avoir un SAHOS. Elle doit bénéficier d’un enregistrement pendant son sommeil pour le savoir. Elle a un peu peur de dormir à l’hôpital… Elle s’enquiert des conditions de l’examen.

Les enregistrements pendant le sommeil ne sont pas tous des enregistrements du sommeil. Par ailleurs, ils sont bien loin de tous nécessiter de dormir ailleurs que… dans son lit. Selon l’avis du praticien, Élise bénéficiera donc d’une polysomnographie (avec enregistrement et caractérisation du sommeil) ou d’une polygraphie ventilatoire, ambulatoire ou non.

Si le praticien pense qu’Élise a un SAHOS isolé, sans autre trouble du sommeil, Élise bénéficiera sans doute d’une polygraphie ventilatoire ambulatoire. Elle ira se faire poser des capteurs (dans un cabinet privé ou à l’hôpital) et rentrera dormir chez elle. Le lendemain, elle rapportera le matériel et répondra à un questionnaire sur la qualité de sa nuit. Ensuite, un praticien formé à la lecture des tracés de polygraphie contrôlera et corrigera le codage effectué par le logiciel d’enregistrement.

Si vous prenez en charge Élise, son médecin pourra vous adresser ce compte rendu. L’on y trouve des quantifications telles que le nombre d’apnées obstructives et centrales, le nombre d’apnées mixtes, l’index d’apnées-hypopnées et l’index d’apnées-hypopnées et de limitations de débit, la durée des épisodes de ronflement, le pourcentage de saturation oxyhémoglobinée lors de l’enregistrement, la position dans laquelle surviennent les événements respiratoires anormaux…

F comme femme

La prévalence du SAHOS est plus importante chez les hommes que chez les femmes mais le pourcentage de femmes touchées augmente après la ménopause.

G comme Gary

Gary ronfle. Un de ses amis lui a dit que les orthèses étaient efficaces sur les ronflements. Il vient vous consulter pour savoir s’il serait possible de lui en réaliser une.

Anamnèse, examen clinique, radiographies… Vous concluez : c’est oui. Mais laquelle ? Quand ?

Dans cette situation, la première question à se poser ne serait-elle pas celle de la présence d’un SAHOS associé ? Un ronfleur peut cacher un apnéique.

Un enregistrement pendant le sommeil permet de connaître l’index d’apnées-hypopnées. En tout état de cause, un praticien formé à la pathologie du sommeil sera consulté.

H comme HAS

En 2008, la Commission d’évaluation des produits et prestations de la Haute autorité de Santé (HAS) a rendu un avis positif pour le remboursement d’une première orthèse dans des indications précises. Ce n’est plus la seule à être remboursable.

Le premier arrêté relatif à l’inscription d’une orthèse d’avancée mandibulaire a été publié au Journal officiel du 31 octobre 2008. [9]

Le remboursement de la prestation du praticien qui met en œuvre l’orthèse n’a pas été prévu.

I comme…

… index d’apnées-hypopnées

L’index d’apnées-hypopnées regroupe le nombre par heure d’apnées et d’hypopnées. La « définition polygraphique » des hypopnées, qui durent elles aussi au moins 10 secondes, est moins univoque que celle des apnées.

… intensité

L’intensité du SAHOS de l’adulte se définit à partir de la valeur de l’index d’apnées-hypopnées (léger : entre 5 et 15 événements/h ; modéré : entre 15 et 30 événements/h ; sévère : 30 et plus événements par heure) ou de la somnolence diurne (légère, modérée ou sévère), décrite de façon pratique. Le niveau de sévérité est défini par la composante la plus sévère. [8,7]

J comme jargon

Pour communiquer avec ses confrères, il est préférable d’apprendre la « langue du sommeil » ou, en tout cas, celle du SAHOS. La prise en charge du SAHOS par un odontologiste ne peut être une pratique isolée. Elle se fait en « haute pluridisciplinarité ».

K comme Karl

Karl a 35 ans. Il n’a aucun problème de santé mais il est inquiet parce que lors de l’enregistrement pendant le sommeil, on lui a quand même trouvé un index d’apnées-hypopnées de 2 par heure de sommeil. Il a noté que c’était « obstructif ».

Il est considéré comme « normal » d’avoir quelques événements ventilatoires de ce type pendant le sommeil. Lors de la ventilation, il existe naturellement une dépression inspiratoire. Elle provient de la pression négative intrathoracique engendrée par le diaphragme, qui est le muscle inspiratoire principal. Les muscles dilatateurs des voies aériennes supérieures (VAS) viennent la contrecarrer. Lors du sommeil, globalement, plusieurs paramètres changent. L’activité tonique des muscles respiratoires et des muscles dilatateurs de ces voies aériennes diminue en moyenne et ces derniers sont moins efficaces. Les résistances au passage de l’air s’accroissent. Tout concourt à ce que le débit aérien diminue. Aux conditions physiologiques peuvent s’ajouter des facteurs propices à la limitation du débit aérien tels que la morphologie cranio-cervico-faciale (une rétrusion mandibulaire, associée éventuellement à une rétrusion maxillaire, contribue à diminuer le calibre des voies aériennes supérieures) ou une surcharge pondérale.

Puisque Karl ronfle de façon sévère et quotidienne et que sa mandibule est en rétroposition, il sera prudent de lui expliquer les problèmes que pourrait poser une surcharge pondérale et se reposer régulièrement la question d’un SAHOS.

L comme Louise

Louise est très somnolente depuis quelque temps. Elle ronfle beaucoup. Elle va aller consulter pour savoir si elle a un SAHOS. Elle n’en a finalement pas. Son problème de somnolence vient de ce qu’elle ne consacre plus assez de temps au sommeil alors qu’elle est une grosse dormeuse.

Pour son ronflement, il lui est proposé un geste de chirurgie ORL. Elle va réfléchir.

M comme…

… mixte

L’apnée est définie comme un arrêt du débit aérien naso-buccal pendant au moins 10 secondes. Lors d’une apnée obstructive, les efforts ventilatoires persistent. Le sujet essaie d’inspirer mais l’air ne peut plus passer. Lors d’une apnée centrale, il n’y a pas d’efforts ventilatoires. Les apnées dites mixtes, quant à elles, commencent comme une apnée centrale et se terminent avec des efforts ventilatoires.

La pression positive continue (PPC) et les orthèses d’avancée mandibulaire ne sont pas efficaces sur les apnées centrales.

… monobloc

Les orthèses d’avancée mandibulaire peuvent se réaliser sous forme de monobloc ou de biblocs. Elles agissent en dégageant les voies aériennes : l’avancée de la mandibule tracte également la langue et le voile du palais. Dans le cas des orthèses biblocs, les parties maxillaire et mandibulaire sont solidarisées par un système de liaison – tel qu’une bielle de Herbst – autorisant partiellement certains mouvements mandibulaires. Il existe différents types d’orthèses ; pour l’essentiel, ils maintiennent ou poussent la mandibule en position avancée.

N comme nez

Les aspects délétères de l’obstruction nasale se retrouvent dans l’ensemble des dimensions du SAHOS.

O comme orthèse et Oscar

Oscar est chef d’entreprise. Il se déplace régulièrement à l’étranger. Il a lu que les orthèses d’avancée mandibulaire sont efficaces sur les ronflements et le SAHOS. Il a un SAHOS sévère qu’il n’a pas choisi de traiter pour l’instant malgré les conseils de son pneumologue et de son cardiologue. Il ronfle beaucoup. Ne voudriez-vous pas lui poser une orthèse d’avancée mandibulaire ?

La stratégie de prise en charge d’un SAHOS est méthodique. Si la présence d’un SAHOS est avérée, les décisions des modalités se prendront en fonction de l’intensité du trouble, de la santé du patient, de son poids, etc., de façon pluridisciplinaire.

Oscar vient de revoir son pneumologue. Il va débuter un traitement par pression positive continue après avoir fait faire une exploration des voies aériennes supérieures. Parallèlement, il va se mettre au régime pour perdre un peu de poids. Ensuite, il reviendra peut-être vous voir pour faire réaliser une orthèse d’avancée mandibulaire à porter lors de ses déplacements si son pneumologue n’y voit pas d’inconvénient.

P comme…

… pression positive continue

La ventilation en pression positive continue (on dit communément : PPC) est parfois appelée CPAP (prononciation : SIPAP), pour continuous positive airway pression. L’air sous pression, et non de l’oxygène comme le pensent certains patients, agit comme une attelle mécanique. Il dilate les voies aériennes supérieures et permet ainsi d’éviter les obstructions complètes ou partielles itératives qui caractérisent le SAHOS. La pression positive continue favorise également la rythmicité respiratoire par une action locale sur les récepteurs oropharyngés [10].

La pression positive continue constitue le traitement de référence. À partir d’un index d’apnées-hypopnées obstructives de 30/h ou d’une somnolence sévère, il est systématiquement proposé au patient. Son efficacité sur l’index d’apnées-hypopnées n’est plus à démontrer. La bonne prise en charge du patient dépend toutefois de l’application du traitement qui pose parfois problème lorsque l’appareil est mal toléré (bruit de la machine, irritations cutanées dues au masque, fuites oculaires ou buccales avec érosions cornéennes ou sécheresse buccale, position de sommeil, gêne nasale…).

… pharynx

C’est au niveau du pharynx que se produit le collapsus du fait de la présence de parois compliantes.

… poids

La prise en charge du surpoids fait partie intégrante de celle du SAHOS. Plus généralement, les règles hygiéno-diététiques portent sur la consommation de tabac et d’alcool, et discutent le maintien de certains médicaments tels que les benzodiazépines.

Q comme qualité de vie

Le SAHOS a un impact sur la qualité de vie des patients.

R comme…

… radiofréquence

La radiofréquence (courant électrique), administrée par des électrodes, engendre des lésions intratissulaires (cornets inférieurs, voile du palais, langue…) qui permettent une réduction de volume et une rigidification des tissus.

Les gestes sur les tissus mous, en particulier sur le voile du palais, ont surtout pour objectif de réduire les ronflements simples ou associés au SAHOS. Ils peuvent toutefois être prépondérants dans la prise en charge d’un SAHOS léger à modéré.

La collaboration avec le médecin oto-rhino-laryngologiste, qui évalue également l’obstruction nasale, est importante.

… régime alimentaire

Le régime alimentaire est destiné à combattre la surcharge pondérale. D’une part, une augmentation du volume abdominal impose un travail supplémentaire au diaphragme, qui doit refouler ce volume, et l’on peut assister à une diminution du flux aérien ; d’autre part, le poids des tissus cervicaux lors du décubitus tend à fermer la filière pharyngée, qui peut se collaber ; enfin, il peut se produire des infiltrats graisseux des espaces péripharyngés et une augmentation du volume lingual qui diminuent, eux aussi, le calibre des voies aériennes supérieures.

S comme…

… somnolence

L’évaluation de la somnolence peut se faire au cours de l’anamnèse par des questions ou en faisant remplir au patient un questionnaire d’Epworth. Ce score est très utilisé en pratique. Sa traduction n’est pas validée en français. Ses questions portent sur le risque de somnoler ou de s’endormir dans des circonstances variées de la vie quotidienne. Il existe d’autres tests de somnolence comme les tests itératifs de latence d’endormissement (TILE) ou le test de maintien d’éveil (TME), qui nécessitent de poser des capteurs, ou encore le test d’OSLER (Oxford sleep resistance), fondé sur la répétition de tâches, qui permet de s’assurer de la vigilance du sujet.

… secondaires

Les effets secondaires des orthèses d’avancée mandibulaire relevés dans la littérature médicale portent sur la salivation (hypersialie, sécheresse buccale), les muscles et les articulations (gêne, douleur, sensibilité, bruits articulaires…), les dents (sensibilité, fractures, descellement de prothèses…), l’occlusion (béance, sensation d’inconfort occlusal le matin…), les tissus mous, et cette liste n’est pas exhaustive. Le patient doit être informé, avoir compris les explications et signer un consentement éclairé. Certains effets sont transitoires.

Le suivi du patient permet de l’accompagner et de pallier certains problèmes. Mais, parfois, le port de l’orthèse d’avancée mandibulaire peut être remis en question et discuté avec le patient et l’équipe médicale.

… stratégie thérapeutique

La stratégie thérapeutique s’organise entre les médecins du sommeil (quelle que soit leur spécialité initiale), les oto-rhino-laryngologistes, les pneumologues, les odontologistes généralistes ou orthodontistes, les chirurgiens maxillo-faciaux, les médecins nutritionnistes, les diététiciens, les comportementalistes, les éducateurs en santé… et se décide et/ou se met idéalement en œuvre, après discussion et approbation des modalités thérapeutiques, dans la coordination entre les acteurs de santé. Un patient doit pouvoir bénéficier de plusieurs types de prises en charge. Celles-ci peuvent s’appliquer soit conjointement, soit successivement. Le seul objectif est de lui permettre de trouver une réponse individualisée à son trouble avec la notion de qualité de vie à restaurer et/ou à maintenir.

Le cadre de la prise en charge n’est pas rigide. Les thérapeutiques peuvent également être remises en question en fonction de la tolérance du patient et de la façon dont il les applique. Ainsi, un patient jeune pourra avoir suivi un régime alimentaire, arrêté de fumer, bénéficié d’une orthèse d’avancée mandibulaire, adopté un traitement positionnel et décider plus tard d’une chirurgie maxillo-faciale. Ainsi encore, une patiente plus âgée, ayant perdu du poids, intolérante à la pression positive continue, pourra bénéficier d’une orthèse d’avancée mandibulaire.

T comme titration

Si la mesure de la propulsion mandibulaire maximale active fait partie du bilan initial de l’appareil manducateur, une telle avancée n’est pas toujours requise. En pratique, les orthèses biblocs font l’objet d’une titration (avancée progressive) avec confrontation entre les résultats cliniques et la tolérance du dispositif. Une fois l’équilibre atteint, il faut réadresser le patient à son praticien médical pour faire effectuer un enregistrement polygraphique de contrôle.

U comme Ursula

Ursula se fait équiper de capteurs pour une polygraphie ventilatoire. Le praticien va lui poser une canule de pression nasale, une thermistance buccale, des détecteurs de mouvements thoraciques et abdominaux (sangles), un oxymètre, des capteurs électrocardiographiques. D’autres types de montage sont possibles.

V comme…

… vérifier

L’efficacité du traitement par orthèse d’avancée mandibulaire se vérifie par un enregistrement pendant le sommeil. Celui-ci doit pouvoir être comparé à l’enregistrement initial.

En pratique, le patient sera aussi revu tous les 6 mois pour un bilan de l’appareil manducateur, ou plus souvent si le praticien le trouve souhaitable. Ce suivi est indispensable. Il est d’ailleurs stipulé dès le premier arrêté de 2008 lors de l’inscription d’une première orthèse d’avancée mandibulaire à la liste des produits et prestations remboursables [9].

… Victor

Victor est un jeune adulte. Il bénéficie d’une pression positive continue depuis plusieurs années. Cela lui a changé la vie mais il sait qu’une chirurgie d’avancée maxillo-mandibulaire serait possible pour lui et il ne se voit pas continuer à utiliser une pression positive continue. Bien sûr, cela changera son visage mais il est prêt à l’assumer.

W comme Walter

Walter se demande qui va décider que le traitement va se faire par orthèse d’avancée mandibulaire et qui va la prescrire.

On l’aura compris, la décision ne sera jamais prise isolément par le chirurgien-dentiste. Quelles que soient son indication et sa place dans la stratégie thérapeutique, la décision d’orthèse sera donc soit faite par le médecin qui a diagnostiqué le trouble, soit discutée en équipe avec le chirurgien-dentiste. Celui-ci est ensuite le maître d’œuvre de l’orthèse d’avancée mandibulaire et communique avec le ou les praticiens impliqués dans la prise en charge du patient.

X comme Xavier

Xavier a un index d’apnées-hypopnées obstructives de 38/heure de sommeil. Il se demande s’il peut bénéficier à la fois d’une pression positive continue et d’une orthèse d’avancée mandibulaire qu’il utiliserait dans certains cas précis.

Sur le plan médical, l’option va être discutée avec le médecin qui met en œuvre la pression positive continue. Seule la pression positive continue sera prise en charge par la caisse d’assurance maladie et l’assurance complémentaire du patient.

Y comme Yves et Yvonne

Il n’y a pas que les hommes qui ronflent !

Z comme Zoé

Zoé, 5 ans, est là pour un bilan dentaire. Vous avez regardé l’agencement des arcades. Vous avez posé des questions. Zoé dort mal. Elle ronfle. Elle n’est pas toujours attentive en classe. En rentrant de l’école, elle est facilement énervée.

Et si, dans un premier temps, vous lui conseilliez une consultation chez l’oto-rhino-laryngologiste ?

Conclusion

La prise en charge du SAHOS implique différentes disciplines. Pour communiquer et travailler ensemble, un ensemble de connaissances complémentaires et communes est nécessaire. Votre niveau d’implication (prévention, dépistage, prise en charge par orthèse d’avancée mandibulaire…) guidera vos choix. Ces quelques pages auront peut-être donné aux nouveaux venus dans le SAHOS l’envie d’aller plus loin !

BIBLIOGRAPHIE

  • [1] American Academy of Sleep Medicine. International classification of sleep disorders. Diagnostic and coding manual. Westchester : American Academy of Sleep Medicine, 2005.
  • [2] Ohayon MM, Li KK, Guilleminault C. Risk factors for sleep bruxism in the general population. Chest 2001 ; 119 : 53-61.
  • [3] Gagnon Y, Mayer P, Morisson F, Rompre PH, Lavigne GJ. Aggravation of respiratory disturbances by the use of an occlusal splint in apneic patients : a pilot study. Int J Prosthodont 2004 ; 17 : 447-453.
  • [4] Landry ML, Rompré PH, Manzini C, Guitard F, de Grandmont P, Lavigne GJ. Reduction of sleep bruxism using a mandibular advancement : an experimental controlled study. Int J Prosthodont 2006 ; 19 : 549-556.
  • [5] Landry-Schönbeck A, de Grandmont P, Rompré PH, Lavigne GJ. Effect of an adjustable mandibular advancement appliance on sleep bruxism : a crossover sleep laboratory study. Int J Prosthodont 2009 ; 22 : 251-259.
  • [6] Franco L, Rompré PH, de Grandmont P, Abe S, Lavigne GJ. A mandibular advancement appliance reduces pain and rythmic masticatory muscle activity in patients with morning headache. J Orofacial Pain 2011 ; 25 : 240-249.
  • [7] Sleep-related breathing disorders in adults : recommandations for syndrome definition and measurement techniques in clinical research. The Report of an American Academy of Sleep Medicine Task Force. Sleep 1999 ; 22 (5): 667-89.
  • [8] Escourrou P. et al. Quelle approche clinique et quelle procédure diagnostique pour le SAHOS ? Recommandations pour la pratique clinique (RPC) du syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) de l’adulte. Rev mal Respir 2010 ; 27 (suppl . 3): 1-178.
  • [9] Arrêté du 28 octobre 2008 relatif à l’inscription de l’orthèse d’avancée mandibulaire ORM des laboratoires Narval SA au chapitre 4 du titre II de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l’article L. 165-1 du Code de la Sécurité sociale.
  • [10] Meurice JC, Paquereau J. Troubles respiratoires au cours du sommeil. In : Billiard M, Dauvilliers Y. Les troubles du sommeil. Paris : Masson, 2005 : 129-149.

SITE CONSEILLÉ

www.sfrms.org

LECTURES COMPLÉMENTAIRES

• Chabolle F, Fleury B.

ORL et troubles du sommeil. Paris : Société française d’ORL et de chirurgie de la face et du cou, 2006. 363 p.

Information Dentaire 2009 ; 25.

• Revue d’Ortopédie Dento-Faciale 2009 ; 43 (3).

• Billiard M.

Le sommeil normal et sa pathologie. Paris : Masson, 1998.

• Billiard M., Dauvilliers Y.

Les Troubles du Sommeil. Paris : Elsevier Masson, 2012. 514 p.

• Recommandations pour la pratique clinique (RPC) du syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) de l’adulte. Rev mal Respir 2010 ; 27 (suppl . 3) : 1-178

• Weitzenblum E, Racineux JL.

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil. Paris : Masson, 1999.

ÉVALUEZ-VOUS !

TESTEZ VOS CONNAISSANCES SUITE À LA LECTURE DE CET ARTICLE EN RÉPONDANT AUX QUESTIONS SUIVANTES :

1 Sans enregistrement pendant le sommeil, peut-on conclure à la présence d’un syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil ?

• a. oui ; • b. non

2 Lors des apnées obstructives et des apnées centrales, le débit aérien naso-buccal s’arrête pendant au moins 5 secondes.

• a. vrai ; • b. faux

3 Lorsqu’un patient est somnolent dans la journée :

• a. il faut conclure à la présence d’un syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil ;

• b. il faut aussi penser à la présence d’un syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil.

• Découvrez la suite du questionnaire et les bonnes réponses sur notre site Internet www.editionscdp.fr, rubrique Formation continue