Reconstruire quand il faut - Clinic n° 07 du 01/07/2012
 

Clinic n° 07 du 01/07/2012

 

RECONSTITUTIONS…

Contrairement à certains, je ne suis ni un inconditionnel des inlay-cores, ni un aficionado des reconstitutions en composite et tenons fibrés : pour moi, chaque restauration a ses indications et contre-indications.

Le bon vieux titane

S’il est naturel d’abandonner – à supposer qu’on y ait touché un jour – les infâmes screw-posts en laiton doré, l’emploi de tenons métalliques pour les restaurations coronoradiculaires directes ne me semble pas une hérésie dans certaines situations. Je veux parler des pertes de volume moyen sur les molaires, lorsque plusieurs parois sont encore assez hautes. Les risques de fractures radiculaires sont minimes, voire inexistants dans ce cas. Plutôt que l’acier, le titane, inaltérable, s’avère un excellent compromis. J’aime particulièrement le système Unimetric de chez Maillefer. Il fait appel à deux forets : un de type Largo pour la désobturation, l’autre conique pour la mise en forme du canal (fig. 1). Tous deux présentent sur le manche une petite collerette qui sert de jauge et permet de parfaitement situer la tête du tenon. Même si les Unimetric sont filetés, il est bien sûr hors de question de les visser dans le canal (fig. 2 et 3). Un scellement ou, mieux, un collage avec un système automordançant à prise duale assure une fixité remarquable en un minimum de temps et de manipulations. Le filetage est surtout intéressant pour le démontage éventuel de la restauration. Même lorsque le tenon a été collé, il peut être dévissé dans le sens inverse des aiguilles d’une montre pour le retirer complètement.

Tenons fibrés

Parmi la multitude de tenons en fibres de verre ou de quartz disponibles sur le marché, la tentation est grande de choisir les moins chers. Cela n’est pas impertinent, mais si vous voulez vraiment vous simplifier la vie, il me semble préférable d’opter pour un système non seulement performant mais dont le conditionnement est le plus pratique possible. Je n’ai pas trouvé mieux que les UniCore® de la société Ultradent.

Ces tenons cylindro-coniques en fibre de quartz existent en quatre tailles : 0,8 mm, 1 mm, 1,2 mm et 1,5 mm. Ils sont vendus groupés dans des étuis de couleur (fig. 4). À l’intérieur de chaque étui se trouvent plantés dans de la mousse blanche les cinq tenons de la même taille et un foret correspondant. Celui-ci est très original. Outre l’excellente capacité de coupe de ses lames hélicoïdales, il possède une extrémité travaillante qui pénètre la gutta sans difficulté, dispensant le plus souvent de foret de désobturation. Près du manche, les lames sont précédées d’une surface diamantée. Celle-ci abrase la partie haute de la cavité et facilite grandement l’évasement coronaire et l’accès au canal. Enfin, cerise sur le gâteau, les tenons sont recouverts à l’origine d’une couche de silane qui assure la liaison avec le composite de reconstitution (fig. 5).

Adhésif tout-terrain

Pour coller un tenon fibré dans une cavité endodontique et faire adhérer le composite de restauration à la dent, un adhésif à prise duale est recommandé. En complément de son très plaisant XP Bond®, système classique de type M & R2 – c’est-à-dire avec mordançage –, la société Dentsply propose un activateur que l’on doit mélanger avec le premier produit dans un petit godet (fig. 6). Celui vendu dans le coffret est très pratique : il possède un couvercle rouge orange qui se rabat pour éviter la prise prématurée du mélange à la lumière ambiante. J’apprécie particulièrement la consistance et le pouvoir couvrant très agréables de cet adhésif, ainsi que son odeur. Selon le fabricant, il n’est pas nécessaire de frotter intensément les surfaces dentinaires pour former la couche hybride. En revanche, il est indispensable de le laisser en place au moins 30 secondes avant de faire s’évaporer le solvant à la mouflette.

Composite de restauration

Plusieurs options sont possibles pour reconstituer la partie coronaire de la dent. On peut coller le tenon avec un composite autoadhésif et automordançant, puis réaliser l’obturation avec n’importe quel composite photopolymérisable, en commençant plutôt par un matériau assez fluide qui noiera sans bulles la partie émergée du tenon. Mais si la cavité est très volumineuse, cette manière de faire ne sera pas forcément avantageuse. Lorsque la configuration de la dent la rend susceptible de se fracturer, plusieurs auteurs recommandent l’utilisation d’un tenon fibré sous-dimensionné noyé dans le composite qui remplit l’espace canalaire. Pour ce faire, les fabricants ont mis au point une nouvelle catégorie de composites fluides à prise duale. Parmi eux, j’aime particulièrement le ParaCore® (Coltène Whaledent). Celui-ci est disponible en teinte dentine ou blanche (fig. 7). Dans les deux cas, mais surtout le blanc, son opacité est intéressante car elle permet de parfaitement distinguer le matériau de la dent et, lors du fraisage, d’éviter de laisser des surplombs, notamment dans les régions proximales très profondes (fig. 8). Il existe deux conditionnements : en cartouches de 25 ml pour pistolet mélangeur ou en petites seringues de 5 ml. La première présentation est beaucoup plus économique mais exige l’utilisation d’un pistolet supplémentaire qui encombrera un peu plus les meubles de rangement. La petite seringue, grâce à l’utilisation d’un embout très fin, permet d’injecter le produit directement dans le canal. On y introduit ensuite le tenon fibré puis on complète le remplissage de la couronne de la même manière. La bonne fluidité du matériau, qui ne coule cependant pas trop une fois en place, est l’un de ses atouts majeurs. Avec lui, pas la peine d’utiliser un moule ou une préforme pour amorcer la morphologie du moignon. Son temps de prise chimique, de l’ordre de 4 minutes, est tout à fait confortable et n’oblige pas à se presser énormément. N’oubliez pas, une fois sa dureté acquise, de l’exposer à la lumière pour obtenir le degré de conversion optimal. La texture du ParaCore® sous la fraise est un régal qui accroît son intérêt par rapport à d’autres produits plus tendres.

Un système complet

Je ne terminerai pas ce tour d’horizon des systèmes de tenons radiculaires sans vous parler de celui que j’utilise depuis au moins 20 ans : les tenons Normatec de la société parisienne Tecalliage. Je les affectionne particulièrement en raison d’abord de leur forme : cylindro-conique, avec un équilibre parfait entre la partie conique et celle cylindrique (fig. 9). Dans d’autres marques, le cône est trop long ou trop pointu et, finalement, la rétention beaucoup trop faible. Les forets à lames hélicoïdales sont en acier inox d’excellente qualité. Le système Normatec se décline en huit modèles et cinq tailles. Par modèle, j’entends le type d’usage. Nous avons des tenons en plastique à empreintes, des tenons calcinables légèrement sous-dimensionnés par rapport aux premiers, des tenons en acier éventuellement pour clavettes, en or, en titane, en fibres de verre et de carbone, et même des screw-posts en titane.

Les tenons à empreintes sont souples et non pas rigides et cassants comme dans certaines marques plus connues. Ils n’existent qu’en une seule longueur, suffisante pour n’importe quel type de dent, et possèdent une tête en T qui assure la rétention du matériau à empreinte tout autour. Pour la prise d’empreinte en mordu, ils peuvent s’avérer un peu trop longs et doivent être coupés à la fraise. Je réalise ensuite quelques petites entailles pas trop profondes dans le plastique, de manière à créer de nouvelles rétentions, et le tour est joué (fig. 10). L’avantage des tenons en plastique souple, c’est qu’on peut les utiliser pour des couronnes provisoires à tenon sur molaires lorsque l’axe de la racine est différent de celui de la couronne.