Tomber pour se relever - Clinic n° 09 du 01/10/2015
 

Clinic n° 09 du 01/10/2015

 

Passions

Marie Luginsland  

Un parcours sans faute. À 21 ans et au seuil de sa 3e année de dentaire à l’université Paris Descartes, Camille Poulain-Ferarios, 50 fois médaillée aux championnats de France de ski nautique, 23 fois aux championnats d’Europe et d’Afrique et vice-championne du monde, enchaîne les succès français et internationaux avec la même aisance que ses années universitaires. Un talent pour l’organisation et une discipline inflexible lui permettent de vivre sa passion de sportive de haut niveau parallèlement à ses études.

Comment vous est venue cette passion alors que pour votre génération la glisse se conjugue plutôt avec le surf, la planche à voile ou le kite-surf ?

Dès l’âge de 9 ans, à force d’observer mes parents qui pratiquaient le ski nautique, j’ai été prise de l’envie irrésistible d’essayer moi aussi. Cela m’a immédiatement plu et mes parents m’ont alors trouvé un club en Seine-et-Marne.

Quelles sensations vous ont séduite dans ce sport alors que vous pratiquiez déjà natation, escalade, handball, cirque, tennis, tennis de table et ski alpin ?

Il est vrai que pour aucun autre sport je n’ai autant accroché que pour le ski nautique. Il procure un mélange de vitesse et de glisse dans un cadre toujours magnifique, ce qui malheureusement n’est pas possible dans de nombreux sports, le tennis de table par exemple !

Vous avez commencé très jeune et, très tôt, vous avez affronté la compétition, et ce au niveau international. Qu’avez-vous tiré de cette expérience ?

Un jour, l’entraîneur m’a parlé d’une compétition réservée aux moins de 9 ans qui avait lieu à Annecy. J’ai terminé deuxième. Et, depuis, je n’ai plus arrêté la compétition. Cela m’a donné l’occasion de beaucoup voyager et, surtout, m’a fait acquérir l’esprit sportif. C’est une école de la vie. On s’entraîne dur, on tombe mais on se relève. Si l’on perd, on se relève et on félicite ses adversaires.

Existe-t-il des liens entre ce sport et la pratique dentaire à laquelle vous vous formez désormais ?

Je pense que ces deux activités nécessitent beaucoup d’entraînement. Plus on pratique et plus on améliore ses performances. Le ski nautique, comme l’odontologie, est très exigeant et requiert précision et perfectionnisme. Quand nous exécutons des figures, le bateau va à 30 km/h environ, mais quand on effectue des sauts il va à 54 km/h (57 km/h pour les hommes). Aussi, quand nous sautons le tremplin, nous atteignons nous-mêmes une vitesse de 90 à 100 km/h. Autant dire qu’il vaut mieux ne pas faire d’erreur. En dentisterie, je n’en suis qu’à mes débuts et je sais que j’ai encore beaucoup à apprendre.

Votre sport, comme beaucoup d’autres, n’est pas sans risques. Ne craignez-vous pas que des fractures puissent être fatales à votre futur exercice professionnel ?

Il y a 3 ans, j’ai fait une très mauvaise chute. Une fracture puis deux opérations ont nécessité plusieurs mois de rééducation et de marche avec des béquilles. Toutefois, je ne me suis jamais blessée aux mains ou aux poignets. Je n’ai pas spécialement peur. Dans notre sport, les blessures les plus courantes concernent les genoux et les chevilles.

Alors que le ski nautique semble être un sport en perte de vitesse auprès des jeunes, vos condisciples sur les bancs de la fac sont-ils au courant de votre passion et, surtout, de votre palmarès ?

Il est vrai que le ski nautique, qui n’est pas une discipline olympique, n’est pas vraiment médiatisé. Cela crée d’ailleurs un problème de notoriété. La fédération a essayé d’y remédier cette année en organisant un championnat d’Europe open à Choisy-le-Roi. Mais ce sport, qui est onéreux (coût de l’essence et du bateau), subit la concurrence des autres sports de glisse. La plupart des étudiants ne savent pas que je le pratique. Mes amis me charrient parfois et à ceux qui sont intéressés, j’envisage de faire découvrir mon sport dès que cela sera possible au regard de mon programme.

Question programme, justement, comment menez-vous de front votre entraînement de sportive de haut niveau avec les études très exigeantes d’odontologie ?

J’ai jusqu’à présent bénéficié d’un emploi du temps favorable grâce à l’intervention du doyen de ma faculté qui m’a permis de choisir ma série de cours le matin, afin de pouvoir m’entraîner l’après-midi. L’hiver, je consacre ce temps à ma préparation physique. Le ski nautique a l’immense avantage d’être une discipline estivale et la saison des championnats se déroule généralement de mai à septembre, ce qui est jusqu’à présent compatible avec mon calendrier universitaire.

Une carrière sportive doublée d’une carrière médicale vous semble-t-elle possible à long terme ?

Je sais que de nombreux sportifs choisissent ou alors s’expatrient aux États-Unis où ils bénéficient de bourses universitaires qui leur permettent de suivre des études tout en continuant leur sport. Pour ma part, je n’ai jamais envisagé cette option. Du reste, il est clair pour moi que j’interromprai ma carrière sportive le jour où elle portera préjudice à mes études. Car toute petite déjà, je savais que je voulais embrasser une carrière médicale. Et, au lycée, je me suis dit que je voulais devenir dentiste.

Camille Poulain-Ferario est lauréate pour la faculté de chirurgie dentaire du Trophée de l’engagement étudiant 2015 qui récompense un étudiant pour son engagement individuel associatif ou sportif dans chaque UFR de l’université Paris Descartes.