Prends ça dans les gencives !

J’ai découvert l’existence de ces fraises grâce à la fréquentation d’un groupe sur Facebook intitulé Restorative implant practice excellence : full protocol. Des praticiens de tous les coins du globe y publient des séquences de traitement dans tous les domaines de notre activité. Le niveau est plutôt élevé, mais sans extravagance et toujours dans un climat de grande gentillesse. J’ai pu y voir les prouesses d’un jeune praticien polonais, Maciek Czerwinski, qui présentait l’utilisation de ces fraises qu’il a mises au point. Les GingiBurs sont des instruments en acier qui s’emploient sans spray sur turbine - et non contre-angle multiplicateur - car, pour être efficaces, ils doivent tourner entre 300 000 et 500 000 tr/min. En regardant la photo du coffret - 3 fraises boules et 3 fraises cylindriques à l’extrémité très fine -, j’ai remarqué qu’elles étaient fabriquées en Allemagne par Frank Dental. Comme c’est auprès de cette société que je me fournis en fraises transmétal, j’ai interrogé son représentant français qui a pu me faire parvenir le coffret de 6 instruments que j’avais vu sur Internet.

Des résultats étonnants

J’avais essayé il y a très longtemps des fraises coniques, en céramique blanche, conçues pour le même usage : l’ablation par frottement et l’hémostase par la chaleur de couches superficielles de gencive, pour dégager la paroi cervicale d’une cavité profonde par exemple. Malgré les éloges publiés dans une certaine presse, je n’ai jamais pu obtenir le moindre résultat satisfaisant avec ces instruments. Les images présentées par notre jeune confrère montraient des coupes nettes, franches et une absence totale de saignement après utilisation des GingiBurs. Le premier essai effectué avec ma turbine n’a pas été très concluant, mais j’ai décidé de persévérer. C’est qu’il ne faut pas hésiter à plonger dans la gencive, et cela plusieurs fois, pour qu’elle se volatilise sous l’effet de la rotation à grande vitesse. La pointe de l’instrument noircit d’ailleurs légèrement, alors que la muqueuse blanchit en raison de la chaleur dégagée. On peut craindre un peu pour l’os, mais celui-ci ne semble pas affecté outre mesure d’après mes observations quelques jours après l’intervention. Dans certains cas, le résultat est spectaculaire : le dégagement est bien réel et le saignement très contenu.

Ca marche bien… ou pas

Lorsque la gencive est saine, elle demeure exsangue suffisamment longtemps pour réaliser un collage, sans crainte de voir le champ opératoire contaminé par une goutte de fluide. Mais quelquefois, ce n’est pas aussi sûr. Il est parfois nécessaire d’attendre plusieurs minutes avant d’obtenir l’hémostase, voire, si cela ne compromet pas l’issue du traitement, d’appliquer un gel de chlorure d’aluminium pour être plus tranquille. Même si la technique demande une certaine maîtrise ou un apprentissage pour en optimiser les résultats, ces GingiBurs se révèlent en tout cas largement supérieures aux fraises en céramique. Le prix du coffret n’est pas excessif pour 6 instruments dont les 2 formes et 3 tailles différentes seront choisies en fonction de la situation. On peut soit plonger la petite boule dans le sulcus selon l’axe de la dent, soit orienter horizontalement la fraise cylindrique pour éliminer une papille interdentaire. Si je devais formuler une critique, en plus des résultats un peu inconstants que j’ai obtenus, c’est vis-à-vis du petit coffret en aluminium qui abrite ces fraises : joli et pratique sur le plan de travail, il l’est moins en raison de sa matière, qui contre-indique la plongée telle quelle dans un bac à ultrasons, et de sa forme avec des angles vifs qui ne facilitent pas l’emballage pour la stérilisation.