Hygiénistes : l’urgence des urgences - Clinic n° 01 du 01/01/2014
 

Clinic n° 01 du 01/01/2014

 

De bouche à oreille

Encore une fois, notre profession est attaquée de toutes parts. Les médecins nous jalousent, le bon peuple ne nous comprend pas et l’État veut mater une profession trop indépendante et trop libre. Pour nous défendre face à ce dernier, de loin le plus dangereux, la profession monte au créneau en ordre dispersé, représentée par des syndicats aux idées limitées, l’un tendant au jeunisme, l’autre obsédé par les tarifs de responsabilité, un troisième ayant fait de...


Encore une fois, notre profession est attaquée de toutes parts. Les médecins nous jalousent, le bon peuple ne nous comprend pas et l’État veut mater une profession trop indépendante et trop libre. Pour nous défendre face à ce dernier, de loin le plus dangereux, la profession monte au créneau en ordre dispersé, représentée par des syndicats aux idées limitées, l’un tendant au jeunisme, l’autre obsédé par les tarifs de responsabilité, un troisième ayant fait de l’insulte et de la calomnie son fonds de commerce. Au milieu de cette cacophonie surnage un syndicat majoritaire par habitude, constitué de confrères dévoués et faisant de grands sacrifices pour essayer de défendre notre métier. Hélas, ils se trouvent confrontés à des fonctionnaires brillants, formés à la dialectique, vicieux, fourbes et manipulateurs. L’état (sans majuscule) a bien compris la faille de notre défense et y engagera toutes ses forces jusqu’à atteindre son but : assurer un meilleur accès aux soins en faisant payer les professionnels de santé.

Cependant, parmi les mesures répressives, humiliantes et coûteuses qui arrivent, il en est une contre laquelle la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) s’oppose d’une manière stupide et ridicule : l’apparition des hygiénistes. Cette attitude incompréhensible trouve ses sources dans la volonté d’une partie de la profession, installée dans des zones fortement concurrentielles, de ne pas perdre les miettes de revenus générés par des sous-actes.

Or, sans ces spécialistes, soit nous décidons d’assurer correctement la prévention, la prophylaxie carieuse et parodontale, et nous y passons les deux tiers de notre temps. À chacun ensuite de trouver une méthode de rémunération adaptée. Les patients qui auront alors besoin de vrais soins, de traitements globaux, n’auront plus qu’à se tourner vers des pays dans lesquels ces soins sont pratiqués, et qui, eux, savent déléguer le bricolage. Soit nous continuons à faire un peu de tout et pas mal de n’importe quoi, pour finir épuisés à la fin d’une journée occupée à se disperser… et fort peu rentable, aussi bien en termes financiers qu’en efficacité pour le patient.

Alors qu’en fait, nos 6 années d’études devraient nous permettre de réaliser des traitements complexes, de diagnostiquer et soigner des maladies de la bouche et des dents sérieuses. Vouloir réaliser à tout prix des actes d’une simplicité enfantine, pouvant être appris en quelques mois par n’importe quel bricoleur (j’ai connu un charcutier qui faisait des détartrages parfaits à son épouse dentiste), est une attitude puérile, passéiste et contre-productive. Et vouloir les conserver pour des raisons économiques n’appelle qu’un commentaire : venez donc travailler dans des zones sous-médicalisées !

Mesdames et messieurs de la CNSD, redescendez sur terre et rangez-vous à l’avis d’un praticien qui travaille avec une hygiéniste dans son cabinet : elles sont l’avenir de notre profession, le seul moyen de maintenir un niveau de revenus correct et de bien soigner la totalité de la population.