Un engagement qui a du sel - Clinic n° 01 du 01/01/2014
 

Clinic n° 01 du 01/01/2014

 

Passions

ANNE-CHANTAL DE DIVONNE  

Engagé depuis 4 ans au côté de l’AOI dans un programme de fluoration du sel au Laos, le groupe Salins prévoit aussi d’appuyer l’AOI dans une action similaire à Madagascar. Dominique Dupeux, directeur de projets du Groupe, explique l’enjeu de cet engagement pour l’un des principaux saliniers européens.

Qu’est-ce qui motive une entreprise comme Les Salins à soutenir l’AOI ?

Nous travaillons depuis plusieurs années avec l’Aide odontologique internationale sur la fluoration du sel au Laos où nous avons mené une action. Nous avons décidé de repartir sur ce projet mais en le formalisant au travers de la Fondation Salins qui a été créée en février 2013. Cette fondation, présidée par le président des Salins Hubert François, est placée sous l’égide de la Fondation de France.

Quels sont les objectifs de cette fondation ?

L’un des objectifs est de soutenir des actions en matière de santé. On oublie trop souvent que le sel est un élément indispensable de la vie. On oublie aussi que le sel a été reconnu comme vecteur préférentiel pour l’apport d’iode. La loi française autorise à ajouter de l’iode dans le sel depuis 1957 et du fluor depuis 1987. Le législateur a estimé qu’un apport régulier et quotidien en sel est la meilleure façon d’apporter une dose de fluor pour lutter contre la carie. Il nous a donc semblé naturel de soutenir des programmes portés par l’AOI – pionnière dans ce domaine – visant à apporter du fluor aux populations.

Comment se manifeste concrètement votre soutien au Laos ?

Nous avons envoyé un technicien sur place chargé de concevoir un atelier de fluoration du sel, de l’arrivée des matières jusqu’au conditionnement du sel fluoré, et d’identifier les équipements nécessaires et les bons fournisseurs. Nous attendons maintenant l’arrivée du malaxeur prévu pour le mélange du fluor au sel. La fondation s’est aussi engagée à fournir une partie du fluor. C’est un produit relativement cher sur le marché.

Allez-vous aussi intervenir sous d’autres latitudes ?

Oui, à Madagascar. Pour le moment, l’AOI a été mandatée par l’OMS pour faire un diagnostic de la situation en matière de fluoration du sel dans le pays. Le diagnostic sera très vite fait. Une opération de fluoration du sel lancée il y a une quinzaine d’années est tombée en désuétude. L’analyse des sachets toujours marqués « sel fluoré » a montré qu’il n’y avait pas de fluor. L’objectif est donc de se remettre au travail avec le gouvernement pour promouvoir le sel fluoré, réinciter les producteurs et les aider. C’est une œuvre de longue haleine. L’AOI est porteuse du projet. Notre soutien n’est pas encore arrêté. Mais nous sommes quasiment certains d’agir car le programme laotien se déroule bien. Il est cependant nécessaire qu’une vraie solidarité se crée autour du projet, comme au Laos où les universitaires étaient parties prenantes.

Quel retour pouvez-vous attendre de cette opération pour l’entreprise ?

Notre idée est de ne pas rester en cercle fermé mais de montrer que nous sommes une entreprise responsable qui participe à la santé dans le monde. Nous voulons aussi rappeler que la fluoration du sel est une recommandation en France et qu’elle participe à un bon niveau d’apport en fluor de la population. On a tendance à l’oublier !

La Fondation Salins mène-t-elle d’autres actions ?

Nous intervenons en faveur du patrimoine matériel et immatériel lié à l’activité salicole en France et à l’étranger (savoir-faire, bâtiments remarquables…). Un troisième volet de notre action concerne la protection de la bio-diversité dans les zones de marais salants. À Aigues-Mortes par exemple, nous occupons 10 000 hectares sur lesquels beaucoup d’oiseaux viennent se nourrir et nicher loin de la présence humaine. Nous devons les protéger. Notre fondation dispose d’une enveloppe de 100 000 euros. La Fondation de France veille à ce que nos actions soient bien d’intérêt général. Avec l’AOI, je pense que nous sommes partis pour travailler ensemble pendant plusieurs années.

Fluoration du sel au Laos : un programme de longue haleine

L’accès à un niveau de fluor optimal n’est pas naturel au Laos. Seule une faible partie de la population a accès au dentifrice fluoré à cause de son coût, de sa qualité variable et de sa disponibilité aléatoire. En 2005, le ministère laotien de la Santé s’est engagé en faveur de la fluoration du sel, d’un contrôle de qualité des dentifrices et de programmes de prévention en milieu scolaire. Un partenariat privé/public a été mis en place entre l’hôpital Mahosot et l’université des sciences médicales de Vientiane, les producteurs de sel laotien, l’AOI, le groupe Salins, l’OMS, l’UNICEF, Bleu Sel et la Food and Drugs Quality Control Center. La Thaïlande, le Vietnam, la Corée et la France ont aussi été impliqués dans le projet. Le bilan du projet pilote 2009-2012 a montré que les principaux objectifs de production et de commercialisation ont été atteints : techniques de mélange, fabrication d’un mélangeur, équipement du site pilote, achat du fluor, contrôle de qualité de la production de sel iodé et fluoré, formation des techniciens, distribution, communication. Le ministère laotien de la Santé a donc décidé d’étendre le programme à deux nouveaux producteurs de sel et de préparer un décret. De nombreux défis liés aux compétences techniques limitées des producteurs, à l’approvisionnement en fluor et à la communication sur le sel fluoré restent à relever pour réaliser cette extension.