CFE : les professionnels libéraux ne paieront pas plus ! - Clinic n° 04 du 01/04/2014
 

Clinic n° 04 du 01/04/2014

 

Juridique

Audrey UZEL  

Cabinet Houdart et associés – Avocat au barreau de Paris

Les professionnels libéraux peuvent respirer : ils ont échappé à une augmentation de la cotisation foncière des entreprises (CFE) pour 2014 ! En effet, par la décision n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a censuré le projet du gouvernement.

Petit rappel. La CFE est venue remplacer la taxe professionnelle en 2011. Elle constitue l’une des deux composantes de la contribution économique territoriale (CET) avec la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Contrairement à la taxe professionnelle, dont elle reprend l’essentiel des règles, la CFE est basée uniquement sur les biens soumis à la taxe foncière. En d’autres termes, elle n’est assise que sur la valeur locative des biens immobiliers utilisés par le contribuable pour les besoins de son entreprise. Les équipements, biens immobiliers et recettes ne sont plus imposés. Cette taxe est due dans chaque commune où le professionnel dispose de locaux et de terrains.

La mesure envisagée. Par la rédaction de l’article 76 de la loi de finances pour 2014, le gouvernement souhaitait donner la possibilité aux communes de majorer la CFE applicable aux seuls professionnels libéraux exerçant en bénéfices non commerciaux (BNC). Pour justifier cette mesure, le gouvernement entendait prendre en compte les facultés contributives plus importantes des titulaires de ces BNC dont les charges externes sont en moyenne plus faibles et qui dégageraient ainsi, à chiffre d’affaires ou montant de recettes équivalent, une valeur ajoutée plus élevée. Pour schématiser, il était considéré que les professionnels libéraux percevaient des revenus plus importants que les professionnels soumis au régime des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Une motivation à la Robin des Bois en quelque sorte ! Avec cette mesure, les professionnels libéraux soumis à BNC pouvaient craindre une hausse d’imposition de 40 % au titre de la CFE.

Cette mesure était-elle juridiquement justifiée ? L’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen prévoit que « pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable ; elle doit être également répartie entre les citoyens, en raison de leurs facultés ». Ainsi, les différences de revenus peuvent justifier une imposition différente. En conséquence, au regard de cette disposition, la motivation du gouvernement paraît pertinente…

La censure du Conseil constitutionnel. Le rôle du Conseil constitutionnel est de vérifier que les lois votées ne sont pas contraires à la Constitution et aux principes qu’elle protège. Concernant la mesure prévue à l’article 76, il s’appuie sur un principe essentiel du droit (issu de l’article 13 précité) : l’égalité devant l’impôt. Cette égalité repose sur l’objet de l’impôt. Or, comme rappelé précédemment, l’objet de la CFE est de taxer la valeur locative des biens immobiliers professionnels. La CFE ne repose pas sur les revenus professionnels. Il est donc inégalitaire, pour le calcul de la CFE, d’envisager un barème différent entre les professionnels soumis au régime BNC et ceux soumis au régime BIC. La censure du Conseil constitutionnel est importante : il considère que la mesure « constitue une rupture caractérisée de l’égalité devant l’impôt ».

Les effets de la décision. Par cette décision, le Conseil constitutionnel garantit que les modalités de calcul de la CFE ne seront pas modifiées pour 2014. En conséquence, le montant de la CFE ne devrait pas augmenter par rapport à 2013.

À RETENIR

Le Conseil constitutionnel, s’appuyant sur l’objet de la CFE qui vise à taxer la valeur locative des biens immobiliers professionnels, censure le gouvernement qui souhaitait mettre en place un barème différent entre professionnels soumis à BNC et ceux soumis à BIC. En l’absence de modification des règles de calcul, la CFE ne devrait pas augmenter par rapport à 2013.