Accompagner les praticiens - Clinic n° 08 du 01/09/2014
 

Clinic n° 08 du 01/09/2014

 

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Anne-Chantal de Divonne  

L’accompagnement des chirurgiensdentistes dans leur exercice est une mission que s’est donnée l’Assurance maladie il y a 8 ans, parallèlement à son activité de contrôle. Dans ce cadre, la mise en place de la CCAM a suscité une organisation particulière en Île-de-France, comme l’explique Marie-Françoise Chamodot-Cantin.

« En Île-de-France, les deux pôles « Relations avec les professionnels de santé » et « Contrôle contentieux » sont distincts. Ainsi, un même chirurgien-dentiste conseil ne s’occupe pas du même praticien dans deux activités bien différentes, l’accompagnement et le contentieux. Car, d’un côté, il s’agit d’apporter une aide et, de l’autre, il peut y avoir des sanctions », explique Marie-Françoise Chamodot-Cantin qui coordonne l’action des deux entités et veille à la cohérence des programmes. Une mission transversale exercée sans liens hiérarchiques directs. Car les quelque 33 chirurgiens-dentistes conseils de la région (8 500 praticiens environ) sont placés sous l’autorité du médecin conseil de chacun des 8 départements d’Île-de-France.

Comment les chirurgiens-dentistes conseils d’Île-de-France ont-ils aidé à la mise en place de la CCAM ?

C’est un accompagnement spécifique car il s’agit d’aider les chirurgiens-dentistes à s’approprier ce nouvel outil de travail. Sous l’égide des commissions paritaires locales, les 8 chirurgiens-dentistes conseils « référents » (1 par département), qui ont beaucoup travaillé en amont sur la CCAM, ont présenté, avec les responsables syndicaux, la CCAM aux praticiens libéraux, hospitaliers ou des centres de santé qui se sont déplacés pour les réunions organisées dans chaque département.

Nous avons également formé les étudiants de 4e et 5e années de la faculté de Paris Diderot à l’utilisation de la CCAM afin de leur permettre d’avoir connaissance du codage à utiliser lors de leur éventuel exercice de remplaçant dès cet été.

Puis, depuis le mois de juin et jusqu’au 30 septembre, 2 praticiens conseils assurent une permanence sur la plateforme téléphonique mise en place pour répondre aux questions techniques, expliquer les rejets… Un relais sera ensuite assuré localement. Car il reste du travail. À la mi-juillet, seul le quart des praticiens d’Île-de-France a basculé dans la CCAM. Notre intérêt est que tous s’approprient bien ce nouvel outil de codage et de facturation qui représente un profond changement pour eux. Une bonne connaissance de la manière de coder, d’associer les actes entre eux et de la prise en charge des actes par l’Assurance maladie évitera des contentieux ultérieurs !

Quelles autres campagnes d’accompagnement avez-vous menées ?

Les autres campagnes sont très différentes. Nous prenons rendez-vous avec les praticiens et nous leur proposons un éclairage particulier sur une pratique. Le premier et seul objectif mis en place au niveau national pour les chirurgiens-dentistes concernait les indications des inlay-cores. Les campagnes sont ensuite devenues régionales. Dans notre région, les thèmes ont porté sur la prescription d’antibiotiques, la réglementation médico-sociale, l’accompagnement des patients diabétiques avec le programme Sophia, la prise en charge bucco-dentaire des personnes âgées en EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), le dossier médical et l’interrogatoire médical en odontostomatologie, mais aussi les prescriptions sur le fluor et la prise en charge bucco-dentaire des patients sous antivitamine K (AVK).

Quelle est la campagne en cours ?

L’interrogatoire médical est une campagne pérenne. Nous en menons aussi une autre sur un thème conventionnel « Grossesse et santé bucco-dentaire ». Les chirurgiens-dentistes ont déjà bénéficié d’une campagne sur ce thème. Nous ayant dit qu’ils voyaient peu les femmes enceintes, nous avons aussi rendu visite à 1 200 gynécologues et nous rencontrons maintenant les sages-femmes pour les sensibiliser à l’importance du suivi bucco-dentaire pendant la grossesse. Dans toutes nos démarches, nous nous appuyons sur des référentiels de la Haute Autorité de santé.

Les praticiens sont-ils réceptifs ?

Chaque année, nos praticiens (10 équivalents temps plein) rencontrent quelque 1 500 chirurgiens-dentistes dans le cadre de l’accompagnement. Ils sont choisis en fonction de leur profil par rapport à la question traitée. Lors des rencontres, nous leur apportons un profil de leur activité. Nos propositions de rendez-vous sont rarement refusées mais lorsqu’elles le sont, les raisons invoquées sont liées au manque de temps ou d’intérêt du thème proposé. C’est le choix de 4,5 % des praticiens. Le service médical garde aussi à leurs yeux, peut-être, une image de contrôle !

Pouvez-vous observer les effets de ces campagnes ?

Contrairement au domaine médical, les effets de ces campagnes de prévention ne sont généralement pas très mesurables dans l’année. Sur certaines campagnes de prescription, notamment celle relative aux prescriptions d’AINS, on a quand même pu voir et mesurer certaines modifications comportementales.

D’autres formes d’accompagnement ?

Nous projetons aussi d’accompagner les praticiens sur la conduite à tenir pour la prévention des infections associées aux soins à la suite des recommandations du ministère de la Santé. Il ne s’agit pas de visites de cabinet que seuls l’Ordre et éventuellement l’Agence régionale de santé sont habilités à faire, mais de se rendre dans les cabinets pour expliquer aux praticiens quelles sont les normes en la matière.

Un pôle à part, le contentieux

Le contrôle d’un chirurgien-dentiste peut être déclenché de deux façons. Soit par les réclamations et les plaintes d’assurés ou les signalements des caisses d’Assurance maladie, soit par l’analyse de requêtes issues des bases de remboursement qui mettent en évidence des atypies et des anomalies potentielles. Le service pourchasse surtout la fraude et les actes de qualité non conformes aux données actuelles de la science. Ainsi, si on démontre la répétition volontaire de fraudes comme des actes acquittés mais non réalisés ou des actes réalisés au-delà du besoin en soin des patients, plusieurs actions sont possibles : saisine disciplinaire, saisine de chambre disciplinaire de première instance du conseil régional de l’Ordre, voire action pénale.

D’autres voies contentieuses en fonction des anomalies rencontrées sont également utilisées, telles que les pénalités financières ou le déconventionnement.

En 2010, il y a eu 58 praticiens repérés, 8 saisines ordinales et 3 pénales. En 2011, 37 praticiens repérés, 3 saisines ordinales et 3 pénales. La moyenne des peines est de 3 mois d’interdiction de donner des soins aux assurés sociaux.