Utilisation de la CFAO directe en secteur esthétique : une facette en une seule séance - Clinic n° 10 du 01/10/2016
 

Clinic n° 10 du 01/10/2016

 

Congrès ADF 2016 Notre sélection de conférences

AVANT-PREMIÈRE

Stéphane Cazier*   Christian Moussally**  

La CFAO et, en particulier, la CFAO directe étant encore peu répandues, nous avons souhaité mettre en avant cet outil par deux séances complémentaires (C78 et C80) qui auront lieu au cours du congrès de l’ADF 2016. La séance du matin consistera à réaliser, sous forme de travaux pratiques, une facette en céramique à partir d’empreintes optiques et de modèles issus d’un cas clinique réel. L’après-midi, cette même situation clinique sera réalisée en direct sur patient....


La CFAO et, en particulier, la CFAO directe étant encore peu répandues, nous avons souhaité mettre en avant cet outil par deux séances complémentaires (C78 et C80) qui auront lieu au cours du congrès de l’ADF 2016. La séance du matin consistera à réaliser, sous forme de travaux pratiques, une facette en céramique à partir d’empreintes optiques et de modèles issus d’un cas clinique réel. L’après-midi, cette même situation clinique sera réalisée en direct sur patient. Les participants qui le souhaitent pourront ainsi voir immédiatement la mise en pratique de l’enseignement qu’ils auront reçu.La réalisation de facettes est une thérapeutique minimalement invasive qui n’est pas encore le traitement couramment privilégié lors de besoins prothétiques. Cela, bien souvent par méconnaissance du protocole opératoire ou par crainte d’échec de la part des praticiens…

Pourtant, ces restaurations partielles en céramique permettent de corriger les anomalies de forme dans la zone esthétique en respectant les principes de la préparation tissulaire a minima. Jusqu’à présent, la réalisation conventionnelle d’une facette nécessitait deux séances de soins et l’intervention d’un prothésiste spécialisé. Aujourd’hui, avec la CFAO directe (système CEREC Omnicam, Sirona), il est possible de réaliser ce type de restauration en une seule séance. En effet, les évolutions de ces dernières années permettent de proposer aux patients des soins prothétiques d’une extrême fidélité au projet esthétique, et en toujours moins de temps.

Analyse initiale

Parmi les anomalies de forme, la présence d’une incisive latérale en « grain de riz » (riziforme) se prête particulièrement bien à ce type de thérapeutique. En effet, ces dents sont souvent isolées, voire symétriques, et peuvent tout à fait être traitées de façon unitaire. Dans ce contexte, la CFAO directe s’avère être un outil particulièrement adapté.

Bien souvent, la prise en charge de ces situations cliniques est pluridisciplinaire. Lors de l’association avec un traitement d’orthodontie, la communication des projets thérapeutiques (set-up et wax-up) de chacun est fondamentale pour l’optimisation du traitement. L’orthodontiste doit aménager un espace prothétique mésio-distal compris entre 6 et 7 mm, en harmonie avec les autres dents du secteur incisivo-canin [1]. L’incisive latérale présentant une anomalie de forme doit également être dans la position la plus palatine possible qui soit compatible avec l’occlusion pour assurer sa préservation tissulaire. Enfin, la dent doit être à mi-distance entre la canine et l’incisive centrale, très légèrement distalée. De cette façon, il sera plus aisé de positionner de façon optimale le zénith de la future restauration (fig. 1).

Pour parfaire l’intégration parodontale, ou pink esthetic, il est parfois nécessaire de réaliser une gingivoplastie d’harmonisation des collets. Différents outils sont à la disposition du praticien : laser, bistouri électrique, bistouri à lame froide ou fraise d’éviction gingivale.

Alternative thérapeutique

Dans certains cas et en fonction de certains paramètres cliniques, en particulier l’âge du patient et/ou le contexte économique, le praticien peut être amené à réaliser une restauration directe en composite. Cette solution à court ou moyen terme n’empêchera pas la réalisation ultérieure d’une facette en céramique et s’avérera même d’une aide précieuse (fig. 2).

Étapes thérapeutiques

Empreintes optiques de la situation initiale et wax-up numérique

L’empreinte optique consiste en l’acquisition, au fauteuil, du volume d’une ou de plusieurs dents par un système optique couplé à un ordinateur [2]. Pour cela, le praticien « survole » les volumes à enregistrer avec une caméra 3D. Les dispositifs actuels effectuent un enregistrement en couleur, permettant une reproduction fidèle de la situation intrabuccale. L’absence de pâte à empreinte s’avère particulièrement intéressante lorsque le matériel orthodontique (attaches, arcs ou contentions) est encore en place.

Le praticien enregistre les deux arcades du patient (fig. 3) puis il lui demande de serrer les dents en position d’intercuspidie maximale et enregistre les faces vestibulaires des dents en occlusion. Ici également, l’absence d’un matériau (cire ou silicone) interposé entre les arcades permet une plus grande précision dans l’enregistrement de l’occlusion.

La limite souhaitée de la future restauration est ensuite tracée sur le maître modèle virtuel. Le logiciel de conception assistée par ordinateur (CAO) calcule alors une proposition de restauration en s’appuyant sur sa base de données numériques (fig. 4). L’anatomie qu’il propose prend en compte l’anatomie des dents voisines, la position de la dent à restaurer sur l’arcade et la position des dents anta?gonistes. Le praticien peut ensuite prendre la main pour modifier à sa convenance cette modélisation, à l’aide d’outils numériques, en fonction de ses objec?tifs de traitement. Pour une restauration unitaire, la réalisation de ce wax-up numérique ne prend que quelques minutes. Les praticiens ont l’habitude de réaliser ces étapes en présence du patient, qui apprécie grandement d’être ainsi impliqué dans son traitement. Dans certains cas, en particulier lors de restaurations de plus grande étendue, l’articulateur virtuel, simulateur fonctionnel numérique, permet d’affiner l’anatomie palatine de la future restauration. Pour cela, il est nécessaire d’enregistrer la totalité des arcades dentaires du patient pour garantir une simulation la plus proche possible des mouvements fonctionnels du patient.

Simulation du sourire (smile design)

Il existe de nombreux logiciels de simulation esthétique. La plupart consistent en une superposition de masques sur une image en 2 dimensions. Les logiciels permettant une simulation en 3D semblent les plus pertinents. Ils permettent, en effet, de tenir compte de l’émergence des dents à restaurer et donnent une représentation plus réaliste du projet modélisé.

À partir d’une photo du patient pris de face, en train de sourire, et après avoir indiqué quelques points de référence sur cette photo, le logiciel transforme l’image en 2D en une image tridimensionnelle et y incruste le wax-up numérique (fig. 5 et 6). Cet outil requiert un temps supplémentaire mais permet d’aborder les lignes du sourire avec précision, en particulier pour les reconstructions plurales. Il est très facile d’échanger alors ces informations avec les différents intervenants (patient, correspondants) sous forme d’une capture d’écran ou d’un fichier PDF-3D (Adobe).

Réalisation d’un mock-up

Toutes ces étapes de simulation numérique (wax-up, articulateur virtuel et smile design) peuvent être finalisées par l’élaboration d’un mock-up usiné par une machine-outil à commande numérique (MCXL Premium, Sirona). Pour cela, un logiciel de fabrication assistée par ordinateur (FAO) calcule l’ensemble des actions mécaniques (trajectoires des outils, vitesses de rotation des fraises, mouvements du support de matériau, etc.) nécessaires à l’élaboration de la restauration [3]. Ces actions sont spécifiques au matériau sélectionné et à la machine-outil utilisée. Pour la réalisation d’un mock-up numérique, il est possible d’utiliser des blocs de polyméthacrylate de méthyle (PMMA) (Telio CAD, Ivoclar Vivadent ; CAD Temp, Vita) ou de composite usinable (Cerasmart™, GC ; Brilliant Crios, Coltène ; Lava™ Ultimate, 3M ESPE) (fig. 7 et 8). Pour obtenir un rendu réaliste, le mock-up peut être caractérisé à l’aide de produits de maquillage composites (Optiglaze™ Color, GC) (fig. 9).

Le transfert de l’univers virtuel vers la bouche du patient permet une validation complète du projet sur les plans esthétique et fonctionnel. Dans le cas de restaurations de plus grande étendue, une validation phonétique doit également être réalisée (sons S et F). À ce stade, des « dernières retouches » en bouche sont toujours possibles.

Aménagement parodontal

Lorsqu’une gingivoplastie doit être réalisée, le mock-up sert également de gabarit d’éviction gingivale. L’utilisation d’un laser permet de respecter avec précision le contour cervical modélisé. Notre choix se porte sur un laser diode de 445 nm de longueur d’onde (SIROLaser Blue, Sirona). L’énergie lumineuse étant véhiculée par une fibre optique de 320 µm de diamètre, le champ visuel au niveau de l’extrémité travaillante est largement dégagé, ce qui facilite le geste et augmente sa précision. L’effet du laser étant essentiellement une « vaporisation » du tissu gingival, les suites opératoires sont quasiment nulles et la cicatrisation est excessivement rapide.

Réalisation d’une empreinte optique du mock-up validé

Avant de commencer la préparation de la dent en vue de la restauration d’usage, il est important d’enregistrer, par empreinte optique, le mock-up stabilisé sur sa dent support. Pour cela, une colle à faible pouvoir adhésif, par exemple une colle auto-adhésive (RelyX™ Unicem, 3M ESPE), est parfaitement indiquée. Cette empreinte optique servira de référence pour les étapes suivantes de CAO.

Les empreintes optiques de l’arcade antagoniste et de l’occlusion peuvent également être réalisées à ce stade du traitement.

Prise de teinte et clé en silicone

La teinte de masse des dents est enregistrée avant le début des soins. La dent présente alors son état d’hydratation normal. Nous avons pris l’habitude d’utiliser directement les blocs de céramique à la place d’un teintier. De cette façon, lorsqu’un bloc polychrome est indiqué, nous pouvons également évaluer le niveau de dégradé souhaité.

Enfin, une clé en silicone est réalisée en bouche, mock-up en place. Elle servira de contrôle pour la réduction de la dent.

Préparation de la dent

La préparation de la dent se fait à travers le mock-up collé, par la technique de la réduction contrôlée (fraises à butées ou fraises boules de diamètre spécifique) [4].

La clé en silicone est découpée au niveau de la dent préparée, dans le plan sagittal. Elle sert de gabarit pour contrôler la réduction pelliculaire homothétique de la face vestibulaire de la dent (fig. 10). Les éventuels résidus de mock-up sont ensuite éliminés à l’aide d’une curette du type mini-CK6. L’utilisation d’une colle à faible pouvoir adhésif facilite cette étape.

Les finitions sont réalisées à l’aide d’une fraise de fine granulométrie (bague rouge) et d’un instrument de sono-abrasion (SONICflex®, KaVo) muni d’inserts diamantés (inserts n° 97 et 98, KaVo).

Dans le cas de la restauration d’une incisive en grain de riz, il est important de poursuivre la préparation de la dent vers la face palatine pour permettre de « refermer » les diastèmes.

Réalisation de l’empreinte optique de la dent préparée

Les données numériques de l’empreinte optique du mock-up sont dupliquées dans le répertoire du maître modèle virtuel (fig. 11). La zone correspondant à la dent préparée est alors découpée numériquement (fig. 12). Il suffit ensuite de venir compléter l’empreinte découpée, par l’enregistrement des seules informations qui diffèrent, à savoir la dent préparée et son environnement immédiat. Le praticien peut ainsi se concentrer sur l’enregistrement de tous les détails de la préparation, dans un temps très court (moins de 1 minute) (fig. 13).

Conception assistée par ordinateur

Dans la mesure où le projet esthétique a été validé aussi bien virtuellement qu’en bouche, il n’est pas nécessaire de recommencer ces étapes lors de la conception de la facette d’usage. L’étape de CAO se limite donc au fractionnement du modèle virtuel de travail (mise en die numérique), au tracé des limites de la préparation et à la reproduction, véritable « copier-coller » de la forme du mock-up. Il est toujours possible d’utiliser les outils logiciels à la disposition du praticien pour affiner les caractérisations de la face vestibulaire de la future facette. Cependant, il faut garder à l’esprit que certains ajustages de forme, par exemple le positionnement des lignes de transition, peuvent se faire très simplement et très rapidement lors de l’essayage de la facette usinée en bouche. Il faut donc rester raisonnable sur ces derniers ajustages numériques et ne pas perdre inutilement du temps à cette étape.

Le logiciel indique, sous la forme de zones colorées, l’intensité des contacts proximaux de la future restauration avec les dents voisines. Ce point peut également être ajusté à ce stade.

Choix du matériau restaurateur

Dans le secteur antérieur, notre choix se porte le plus souvent sur un bloc de céramique feldspathique renforcée à la leucite (Empress® CAD, Ivoclar Vivadent). Ces blocs peuvent présenter un dégradé de saturation et de translucidité intéressant pour reproduire l’aspect naturel d’une dent (fig. 14). Après avoir noté la translucidité des bords libres des autres dents antérieures dans la bouche du patient, le positionnement optimal de la future facette dans ces blocs polychromes nous permet d’optimiser le résultat esthétique final. Dans d’autres situations, lorsque on a besoin de propriétés mécaniques plus fortes, les vitrocéramiques à base de disilicate de lithium (e.max® CAD, Ivoclar Vivadent) représentent un réel intérêt clinique.

Fabrication assistée par ordinateur

Lorsque l’anatomie de la future restauration convient au praticien, le logiciel de FAO, qui permet de créer le processus d’usinage virtuel de la restauration, affiche une prévisualisation de la facette telle qu’elle sera usinée. Lors de l’utilisation de blocs polychromes, le positionnement de la restauration au sein du bloc de matériau permet d’ajuster le niveau de translucidité du bord incisif. Un positionnement oblique par rapport aux différentes strates de matériau apporte encore plus de réalisme à la future restauration (fig. 15).

Usinage de la facette

La restauration est réalisée dans une machine-outil à commande numérique par fraisage du bloc de céramique sélectionné à l’aide de fraises diamantées (fig. 16). Ce processus d’usinage dure entre 8 et 20 minutes en fonction de la taille de la restauration, du positionnement de la restauration dans le bloc et du mode d’usinage.

Pour la réalisation d’une facette, nous recommandons le mode d’usinage en deux étapes. Dans un premier temps, la restauration est usinée dans des dimensions supérieures d’environ 150 µm à la taille finale. C’est une sorte de « dégrossissage ». Dans un second temps, un jeu de fraises de plus fine granulométrie et de plus petits diamètres réalise l’usinage final. Ce mode d’usinage permet non seulement de réduire considérablement la formation d’écailles de céramique (chipping) au niveau des fines limites de la restauration mais aussi d’obtenir un niveau de détail élevé aussi bien pour l’extrados que pour l’intrados [5]. En revanche, le temps d’usinage est presque doublé.

Notons cependant que même s’il paraît logique de rechercher le maximum de précision dans l’anatomie de ces restaurations, des retouches manuelles de l’extrados après usinage sont parfois plus simples et rapides à réaliser.

En fin d’usinage, la facette reste parfois fixée à son support par une fine languette de céramique (point de séparation) (fig. 17) qu’il faut éliminer manuellement.

Essayage de la facette

La facette est alors placée sur la dent préparée pour vérifier sa parfaite adaptation et ajuster éventuellement les contacts proximaux. Les macrogéographie et microgéographie peuvent être affinées à ce moment-là. C’est une étape pour laquelle il est important de prendre son temps, en analysant l’intégration de la restauration dans le sourire sous différents angles et distances d’observation.

Maquillage de la facette

Pour parfaire son intégration esthétique, la facette doit être caractérisée par l’application de produits de maquillage et d’une glaçure.

Bien qu’il existe des matériaux composites spécifiques (Natural Die Material, Ivoclar Vivadent) permettant de réaliser des supports « carottes » de la teinte dentine de la dent préparée, dans la mesure où le patient est toujours présent au cabinet, il est préférable de réaliser directement le maquillage en bouche. Cette étape nécessite une bonne coopération du patient qui doit rester bien immobile et éviter de venir toucher la restauration en cours de maquillage avec sa langue. Une goutte de liquide de glaçure est déposée sur la préparation et dans l’intrados de la facette, puis celle-ci est déposée délicatement sur la préparation. Le liquide permet de transmettre la teinte de la dent support à la facette, comme le fera ensuite la colle composite, moyen d’assemblage. L’utilisation d’un bloc polychrome simplifie beaucoup cette étape de maquillage. L’effet de translucidité du bord libre est renforcé par l’utilisation d’un produit de maquillage bleu ou lavande. Les fêlures d’émail sont simulées par l’utilisation du produit de maquillage blanc appliqué en très fines stries verticales.

Lorsque le maquillage de la facette est terminé, celle-ci est prélevée délicatement à l’aide d’une précelle munie de fines fraises diamantées à son extrémité et placée sur un support de cuisson. Il est alors possible d’appliquer la glaçure par pulvérisation d’un spray à la surface de la facette maquillée. Cette technique permet de réaliser le maquillage et le glaçage en une seule cuisson. L’ensemble est mis dans un four à céramique où la température est portée progressivement aux environ de 800 °C. Les produits de maquillage et la glaçure fusionnent alors avec la céramique sans qu’il y ait de variation de teinte entre le maquillage appliqué en bouche et le résultat final après cuisson. Cette étape prend environ 15 minutes.

Après refroidissement de la facette, un dernier essayage en bouche avec un gel de glycérine coloré try-in, simulant le matériau d’assemblage, permet une ultime validation de la restauration.

Assemblage par collage de la facette

Le traitement de surface de l’intrados de la facette est réalisé par application d’un gel d’acide fluorhydrique à 5 % pendant le temps indiqué par le fabricant : 1 minute pour la céramique feldspathique renforcée à la leucite. Il faut ensuite rincer abondamment (pendant 1 minute au moins) l’intrados pour éliminer le gel de mordançage et les sels qui se sont formés par réaction de l’acide fluorhydrique sur la phase vitreuse de la céramique. Ce rinçage peut s’effectuer dans une cuve à ultrasons remplie d’eau claire pendant 3 minutes. Le contrôle de l’absence de restes de gel de mordançage est favorisé par sa coloration rouge intense.

La facette est ensuite parfaitement séchée. Parfois, des agrégats issus de la réaction de l’acide fluorhydrique sur la phase vitreuse de la céramique persistent sous forme de dépôts blancs crayeux. Dans ce cas, il faut rincer de nouveau abondamment ou appliquer un gel d’acide orthophosphorique, puis rincer et sécher encore une fois [6].

Une fine couche de silane est appliquée sur l’intrados. Le chauffage entre 80 et 100 °C permet d’améliorer la polycondensation du silane sur la céramique à phase vitreuse [7]. Cette température est généralement celle observée au voisinage immédiat du four à céramique ouvert en position d’attente (stand-by). Il suffit donc de placer la facette à cet endroit pendant 1 minute. Notons qu’il existe aussi maintenant des propositions « tout en un » permettant de mordancer et d’appliquer le silane en même temps (Monobond® Etch & Prime, Ivoclar Vivadent). Le produit est appliqué en frottant pendant 20 secondes. Il est laissé en place pendant 40 secondes puis la restauration est simplement rincée et séchée.

Au niveau du support dentaire, parce qu’on est essentiellement en présence d’émail, le choix se porte sur un système adhésif amélo-dentinaire avec prémordançage du type MR2 ou MR3 (mordançage et rinçage en 2 ou 3 étapes), associé à une colle composite duale ou un composite photopolymérisable fluidifié par chauffage. Le champ opératoire (digue) est un prérequis fondamental pour la qualité et la pérennité du collage [8]. La notion d’adhésion implique non seulement une bonne valeur d’adhérence (force) mais aussi une étanchéité (absence d’infiltration) permettant un bon pronostic du joint collé. Le gel d’acide orthophosphorique de mordançage est appliqué sur l’ensemble de la préparation pendant 30 secondes. En cas de présence de zones dentinaires au niveau de la préparation, le temps de mordançage à leur endroit doit être réduit à 15 secondes. Le rinçage doit être abondant pour éliminer ici également les résidus d’acide et les sels formés par la réaction de l’acide orthophosphorique sur les tissus minéralisés. Le séchage de la préparation doit être délicat pour éviter de déshydrater les éventuelles zones de dentine. L’application de l’adhésif se fait avec un geste de brossage pour le faire pénétrer dans les anfractuosités créées par le mordançage. On prendra alors soin d’éliminer les excès d’adhésif et de bien faire s’évaporer tous les solvants à l’aide de la soufflette et de la canule d’aspiration avant de photopolymériser.

Aujourd’hui, les adhésifs dits universels simplifient l’étape de séchage après le mordançage (moins sensible au dessèchement pour la dentine). Notons également que pour la situation clinique présentée ici, si la dent n’a pas de lésion, le support essentiellement amélaire est bien plus propice à une bonne adhésion.

L’intrados de la facette est séché minutieusement et le composite de collage est appliqué. La facette est mise en place et les excès majeurs de matériau d’assemblage sont éliminés. Un flash de photopolymérisation permet de figer les excès persistants. Ceux-ci peuvent alors être éliminés à l’aide d’une curette du type mini-CK6 ou d’une lame de bistouri n° 12. La surface glacée de la facette facilite grandement l’élimination de ces excès. La photopolymérisation est ensuite complétée à l’aide d’une lampe appropriée. Un gel de glycérine est placé au niveau du joint de collage pour parfaire sa polymérisation superficielle (couche inhibée par l’oxygène).

Étapes de finition

Après dépose de la digue, les limites de la facette peuvent être polies à l’aide de pointes montées en silicone de granulométrie décroissante. Les faces proximales sont polies à l’aide de bandes abrasives métalliques de fine granulométrie. Le brillantage final est obtenu avec une pâte diamantée appliquée à la brossette rotative. On peut alors retirer le cordonnet rétracteur s’il a été nécessaire. L’occlusion est contrôlée et éventuellement ajustée. La préservation d’une grande partie de la face palatine simplifie beaucoup cette étape.

Résultat final

Le résultat esthétique est évalué au moins 48 heures après, ce qui permet aux dents d’avoir récupéré leur état d’hydratation normal et à la gencive de retrouver sa position initiale. Le suivi de ces restaurations fait totalement partie du succès de leur réalisation même si, le plus souvent, le contrôle ne confirme que la satisfaction du patient et du praticien par la bonne intégration dans le temps de ces restaurations adhésives en céramique.

Conclusion

La réalisation d’une facette par CFAO directe est une solution de remplacement très séduisante de la méthode conventionnelle. Elle permet au praticien de s’affranchir des étapes délicates de temporisation et de communication des teintes avec le prothésiste. Elle nécessite cependant une bonne connaissance de l’outil numérique, des biomatériaux utilisés et des techniques de maquillage.

À l’instar de la dentisterie adhésive en général, le respect du protocole est garant du succès clinique de ce type de restauration.

Bibliographie

  • [1] Magne P, Belser U. Restaurations adhésives en céramique sur dents antérieures. Approche biomimétique. Paris : Quintessence international, 2003.
  • [2] Moussally C, Courday L, Attal JP. L’empreinte optique. Alternatives 2007;33, 2007:23-32.
  • [3] Tapie L, Lebon N, Attal JP. La chaîne numérique en CFAO dentaire en prothèse conjointe. Structuration de la chaîne de production. Reali Clin 2015;26:263-273.
  • [4] Gurel G. Les facettes en céramique. De la théorie à la pratique. Paris : Quintessence international, 2005.
  • [5] Boitelle P, Fromentin O, Mawussi B, Tapie L, Vennat E. Évaluation de l’adaptation des restaurations prothétiques fixées réalisées par CFAO et facteurs de variation : revue de littérature. Cah Prothèse 2013;161:1-17.
  • [6] Magne P, Casicione D. Influence of post-etching cleaning and connecting porcelain on the microtensile bond strength of composite resin to feldspathic porcelain. J Prosthet Dent 2006;96:354-361.
  • [7] Fron H, Tirlet G, Attal JP. Les silanes : mieux les connaître pour mieux les utiliser. Inf Dent 2009;91:2-7.
  • [8] Lasserre JF, Leriche M. Les facettes de céramique collée. Un pas décisif dans la restauration du sourire de nos patients. Le fil dentaire 2007;23:46-50.