Amélogenèse imparfaite héréditaire, prémolaire et revascularisation - Clinic n° 05 du 01/05/2017
 

Clinic n° 05 du 01/05/2017

 

LE CAS CLINIC

Frédéric COURSON*   Alice MODOLO**   Martin GLORIFET***   Andrei MITU****  

Sofia, 15 ans, est suivie pour une amélogenèse imparfaite héréditaire (fig. 1 et 2). Elle vient très irrégulièrement aux rendez-vous et présente une hygiène insuffisante. Elle se plaint de douleur à la mastication au niveau de la deuxième prémolaire inférieure gauche (35).

Prise en charge thérapeutique

Cette patiente, suivie depuis longtemps dans le service, a déjà subi l’extraction de la 36, qui ne pouvait être conservée, et ses molaires temporaires ont été recouvertes de coiffes pédodontiques préformées (fig. 3, 4 et 5).

Après la perte de la dent temporaire, la 35, dont la couronne est affectée par la maladie, se nécrose rapidement. Elle est immature (stade 8 de Nolla (fig. 6)). Il est décidé de réaliser un traitement de revascularisation (fig. 3). L’objectif de cette technique est, après désinfection canalaire, de recruter des cellules souches et d’obtenir un processus de guérison/revascularisation intracanalaire.

Séquences thérapeutiques

Après anesthésie locale et mise en place d’un champ opératoire, la première étape consiste à réaliser une désinfection canalaire. La pâte antibiotique autrefois préconisée peut être abandonnée. Lors de cette désinfection canalaire, un rinçage à l’hypochlorite de sodium (à faible concentration : 1,5 %) est possible, suivi par une solution physiologique saline puis de l’EDTA et un séchage avec des pointes de papier. Le suintement lors de cette première étape ne permet pas un remplissage optimal du canal à l’hydroxyde de calcium (fig. 7). Une seconde étape est alors nécessaire.

Entre 2 et 4 semaines plus tard, après renouvellement de l’hydroxyde de calcium, ce scellement temporaire est enlevé, on réalise un rinçage à l’EDTA qui permet de libérer des facteurs de croissance dentinaire qui pourront interagir avec les cellules souches recrutées apicalement. Pour cela, un saignement est provoqué avec une lime Hedström au niveau péri-apical (fig. 8). Après hémostase, un ciment tricalcique du type MTA (mineral trioxyde aggregate, ProRoot®, Dentsply) est placé au niveau de la jonction amélo-cémentaire. Une obturation temporaire au ciment verre ionomère vient coiffer hermétiquement l’ensemble (fig. 9 et 10). Deux mois plus tard, lors de la réalisation d’une coiffe composite par moule en polycarbonate (Frasaco), on peut objectiver la guérison parodontale (fig. 11). Au sein du canal, on note un remplissage avec un tissu proche des tissus parodontaux. On ne note toutefois pas pour l’instant d’élongation radiculaire mais un épaississement des parois canalaires est visible 6 mois après (fig. 12 et 13).

Alternatives thérapeutiques

Un traitement classique d’apexification est réalisable. À la place du MTA, il est également possible d’utiliser de la Biodentine® (Septodont).

À lire

Galler KM, Krastl G, Simon S, Van Gorp G, Meschi N, Vahedi B et al. European Society of Endodontology position statement: revitalization procedures. Int Endod J 2016; 49:717-723.

Simon S. La revascularisation canalaire : le point en 2015. Clinic 2015;36:67-71.

À retenir

La prise en charge des patients atteints d’amélogenèse imparfaite héréditaire est complexe. Elle fait intervenir des compétences dans plusieurs domaines et à long terme. Des complications en cours de route sont possibles, d’autant plus que l’hygiène bucco-dentaire est souvent imparfaite chez ces patients. Le traitement des dents permanentes immatures nécrosées par la technique de revascularisation est une option thérapeutique intéressante mais son protocole doit être strictement respecté.