Ehpad, Restos du Cœur, chirurgiens-dentistes nomades - Clinic n° 02 du 01/02/2018
 

Clinic n° 02 du 01/02/2018

 

RENCONTRE

ACTU

ACD  

Jean-Michel Madignier (Gaillard, 74) et une petite équipe de chirurgiens-dentistes savoyards se déplacent dans des Restos du Cœur et des Ehpad pour soigner gratuitement des personnes qui ne peuvent se rendre dans les cabinets dentaires. Ces praticiens, réunis au sein de l’association IDEAH (International Dental Education and Action for human Health), interviennent bénévolement.

Nomade. C’est ainsi que Jean-Michel Madignier définit son activité de chirurgien-dentiste trois demi-journées par semaine. Après avoir voyagé en Inde et au Sénégal pour soigner, ce praticien savoyard voulait aller à la rencontre des personnes qui, en France même, ne peuvent pas se rendre dans un cabinet dentaire. « Pourquoi faire tant de kilomètres quand les besoins sont si importants ici ? » s’interrogeait-il. La rencontre de Robert Vinciguera, coordinateur des Restos du Cœur de Haute Savoie et chirurgien-dentiste en retraite, est décisive. En juin 2013, il commence à soigner une demi-journée par semaine dans le Resto du Cœur de Cluses. « Les personnes ne peuvent pas aller chez le dentiste pour différentes raisons, des barrières linguistiques et culturelles, l’absence de sécurité sociale… Beaucoup souffrent. Nous leur offrons la possibilité d’être soulagées rapidement ». Des bénévoles du Resto apprennent les bases de l’aide dentaire pour l’accompagner auprès des patients, prendre les rendez-vous, accueillir.

Deux Restos du Cœur, neuf Ehpad

Petit à petit, Jean-Michel Madignier, rejoint par d’autres chirurgiens-dentistes, souvent des jeunes actifs et des retraités qui partagent avec lui l’envie de soigner bénévolement, étend cette activité hors cabinet. « Notre but est de pallier une carence », explique-t-il. Désormais, des soins sont donnés dans 2 Restos du Cœur le samedi matin, à Cluses et à Annecy, ainsi qu’aux résidents de 9 Ehpad de la région. « En Ehpad, c’est du soin de confort, de service. Les personnes ne veulent pas faire de travaux dentaires. Elles veulent surtout qu’on les laisse tranquilles. Quand il y a un problème, il faut le résoudre tout de suite. Ce sont donc des petites extractions de dents qui gênent, des réparations de prothèses au fauteuil, des crochets à resserrer, graver des prothèses pour qu’elles soient reconnues par les aides-soignants… » Pour Jean-Michel Madignier, il n’est pas question de se faire rémunérer par l’ARS pour cette activité : « c’est du service comme certains distribuent de la nourriture aux Restos du Cœur ou font de l’alphabétisation », explique-t-il. Trois praticiens se relaient pour assurer les soins dans les Ehpad les mercredis après-midi.

Des mallettes portatives

Dans ces différents lieux de soins, un matériel conçu par la société suisse BRP pour des hygiénistes itinérants est déployé lors de chaque séance de soins. Sont rangés dans deux mallettes : fauteuil, valise de soins, moteur de retouche de prothèse et matériel de base (fraises, daviers stériles, résine de rebasage, miroirs sondes). Il suffit d’une prise de courant pour faire fonctionner un micro-compresseur ou un micro-aspirateur. Depuis, un distributeur français a référencé le matériel. Selon les cas, l’équipement reste rangé sur place ou est acheminé par le praticien qui effectue la vacation. « Nous respectons toutes les normes standard d’un cabinet dentaire, les protocoles de traçabilité, d’asepsie, de stérilisation. Tout le matériel utilisé est rapatrié chaque jour à mon cabinet pour y être stérilisé. Nous avons une convention avec le conseil de l’Ordre qui valide nos activités et auquel je transmets un rapport d’activité. Et nous n’avons jamais eu aucun problème », raconte Jean-Michel Madignier.

L’association IDEAH (International Dental Education and Action for human Health) qui a été constituée autour de ces projets fonctionne uniquement avec des dons privés d’associations, de patients du ?cabinet de Jean-Michel Madignier informés de cette action, de fournisseurs, de chirurgiens-dentistes… Aujourd’hui, l’initiateur de ces projets exerce 4 jours par semaine dans son cabinet. Une demi-journée en nomade dans un Resto du Cœur et une autre demi-journée dans une Ehpad. Il lui restait encore une troisième demi-journée disponible dans la semaine. Le praticien grenoblois la consacre à soigner les prisonniers à la maison d’arrêt de Bonneville.