Soigner les plus fragiles - Clinic n° 06 du 01/06/2019
 

Clinic n° 06 du 01/06/2019

 

Équipe et Espace

Parties du constat que les personnes en situation de handicap manquaient cruellement de structures capables de prendre en charge leur santé bucco-dentaire, Sandra Zalinski et Laurence Williamson ont créé leur centre d'odontogie au sein de la clinique Saint-Léonard, tout près d'Angers. Un centre et une équipe emplis d'humanité.

Tout a commencé au CHU d'Angers, quand les deux praticiennes se sont retrouvées dans l'incapacité de pouvoir assurer une prise en charge régulière des...


Parties du constat que les personnes en situation de handicap manquaient cruellement de structures capables de prendre en charge leur santé bucco-dentaire, Sandra Zalinski et Laurence Williamson ont créé leur centre d'odontogie au sein de la clinique Saint-Léonard, tout près d'Angers. Un centre et une équipe emplis d'humanité.

Tout a commencé au CHU d'Angers, quand les deux praticiennes se sont retrouvées dans l'incapacité de pouvoir assurer une prise en charge régulière des patients en situation de handicap. « La file d'attente était de 3 ans pour un rendez-vous au fauteuil et même de 4 ans pour qu'un adulte puisse bénéficier d'une anesthésie générale » se souvient Laurence Williamson. Elles décident alors de se joindre à la clinique Saint-Léonard pour répondre à l'appel à projet lancé par l'Agence régionale de santé pour une meilleure prise en charge de ces patients. Quelques mois de travaux plus tard, le centre d'odontologie ouvre ses portes au cœur du Village Santé Angers Loire. Entièrement dédié aux personnes les plus fragiles, il est officiellement inauguré en mars 2017 et accueille des patients qui viennent parfois de bien plus loin que la région Pays de la Loire.

Gaieté, fonctionnalité et confort maximal

« Quand nous sommes arrivées, il n'y avait pas de pôle dentaire au sein de la clinique et les locaux que nous occupons aujourd'hui étaient vides » raconte Laurence Williamson. Les deux praticiennes ont donc eu carte blanche pour dessiner un lieu qui convienne exactement à leur projet.

Aidées par un cabinet d'architectes, elles ont créé des espaces dans lesquels fauteuils roulants et brancards peuvent non seulement entrer aisément mais aussi se croiser.

Une grande zone d'accueil dessert 3 cabinets et 2 salles d'attente, dont les décors muraux et le mobilier ont en commun de véhiculer rêves et gaieté. Ici des fauteuils aux couleurs acidulées, là des stickers représentant papillons, plumes ou montgolfières, un peu plus loin des citations pleines de sagesse. Au fond de la salle d'attente principale, un espace très coloré a été pensé pour les enfants, avec un écran et des jeux mis à leur disposition. « Certains adultes ayant un fort retard mental aiment aussi aller jouer ou se poser dans cette zone » fait remarquer Laurence Williamson. Une salle d'attente plus petite et surtout plus calme permet aux patients qui le souhaitent de s'isoler un peu. « Nos patients âgés et ceux traités en cancérologie, surtout lorsqu'ils ont une atteinte faciale visible, l'apprécient particulièrement » note Sandra Zalinski.

De l'importance de l'équipement

Pour les 3 cabinets de consultation, les praticiennes ont choisi des units Planmeca équipés de fauteuils qui se replient entièrement et leur permettent de soigner les patients assis dans d'imposants fauteuils roulants ou allongés sur des brancards. Si les cabinets sont spacieux, c'est aussi pour pouvoir accueillir les aidants des patients pendant les soins. Les patients agités sont rassurés par la présence de leur accompagnant. « Lorsqu'on prend en charge des patients dyscommunicants, il est important que leur accompagnant soit là pour faire le lien avec nous » explique Laurence Williamson. Grâce aux plafonniers Zénium Henry Schein, les praticiennes déclenchent des distractions visuelles et auditives à la demande et il y en a pour tous les goûts. Choisies pour leurs vertus apaisantes, des huiles essentielles sont aussi diffusées dans les salles de soins.

Les portes des cabinets, peintes en bleu, rouge et vert, accentuent la gaieté des lieux tout en aidant les patients souffrant d'une déficience à s'orienter plus aisément. Et les patients ont partout accès au MEOPA. De façon générale, tout ce qui facilite l'accès aux soins de ces patients fragiles et augmente leur confort est mis en œuvre. « Une des spécificités de notre activité au fauteuil est que le temps passé en bouche est très réduit. Nos patients ne sont pas toujours coopérants et, s'ils sont atteints de troubles autistiques envahissants, il faut faire encore plus vite. On a donc un gros travail de préparation en amont » précise Laurence Williamson.

Attenant aux salles d'attente, un point hygiène a été prévu pour inviter les patients à se brosser les dents dans la bonne humeur. C'est là aussi que les assistantes enseignent le brossage et toutes les bases de l'hygiène orale à ceux qui en ont besoin.

Chaque patient est accueilli avec sa spécificité

Le centre d'odontologie de Saint-Léonard accueille aussi bien les personnes en situation de handicap (moteur, cognitif ou psychique) que les enfants en échec de soins dans les cabinets d'omnipratique, les personnes atteintes de maladie neurodégénérative, les patients traités pour un cancer de la cavité buccale ou encore les personnes âgées dépendantes. Écouter et prendre en charge chacun dans la douceur et le respect de sa pathologie, tel est le credo de l'équipe. À commencer par les deux praticiennes à l'origine du projet, qui sont épaulées depuis juillet 2018 par une troisième et jeune praticienne à temps plein : Constance Gan.

Trois assistantes, deux secrétaires et une aide-dentaire complètent le personnel qui, de 8 h 30 à 18 h 30 du lundi au vendredi, œuvre ici dans un bel esprit de communauté et d'échange. « Il est très agréable de sentir qu'on n'est pas tout seul face à des situations et des histoires de vie souvent difficiles » témoigne Laurence Williamson. De fait, les familles des patients sont parfois démunies et l'équipe doit leur apporter une réponse à la fois humaine et professionnelle. La gratitude et les retours très positifs des patients et de leur famille, soulagés par la prise en charge offerte par le centre, soutiennent les efforts de l'équipe au quotidien. « Il est arrivé plusieurs fois que des patients aphasiques nous disent merci. C'est très gratifiant » relate Sandra Zalinski avec émotion.

L'intérêt du bloc opératoire

L'implantation dans la clinique offre un avantage de taille : avoir accès au bloc opératoire 4 demi-journées par semaine et pouvoir y opérer jusqu'à 4 patients par demi-journée. Cet accueil en hospitalisation de jour s'accompagne qui plus est d'une prise en charge rapide et extrêmement bienveillante. « Nos patients sont prioritaires partout, chez les anesthésistes comme au bloc » se réjouit Laurence Williamson. Infirmières, aides-soignantes, brancardiers, anesthésistes... tout le monde est conscient que de nombreux patients du centre d'odontologie ne savent pas attendre et demandent une attention particulière. Les équipes qui interviennent au bloc, tout comme les trois praticiennes et leurs assistantes, se sont formées à l'hypnose médicale. « Le plateau technique qui permet la prise en charge sous anesthésie générale représente pour nous un vrai plus » reconnaissent en chœur les praticiennes. Chez les patients spastiques, il est par exemple impossible de poser une couronne autrement que sous anesthésie générale. Même s'ils cherchent à coopérer, certains patients atteints d'un handicap moteur cérébral ne parviennent pas à ouvrir la bouche assez longtemps. Constance Gan, qui pratique majoritairement la pédodontie, utilise le bloc opératoire pour soigner les enfants qui ne peuvent pas être pris en charge au fauteuil parce qu'ils requièrent une multitude de soins ou souffrent d'un trop grand stress. « On a beaucoup de demandes et le bloc est toujours plein. »

Des évolutions sont-elles prévues ?

« Nous allons nous équiper d'une caméra de prise d'empreinte, pour pouvoir prendre les empreintes au bloc et usiner et poser des couronnes dans l'heure. Cela évitera de devoir rendormir certains patients » précise Laurence Williamson. Et l'équipe envisage d'intégrer un quatrième praticien, à temps partiel, de façon à utiliser le fauteuil laissé vide pendant les vacations au bloc.

Catherine BigotON AIME

Le confort d'accès du centre, avec un accueil en rez-de-chaussée et 5 places de stationnement PMR situées juste devant la porte d'entrée. Les patients et leurs accompagnants se garent facilement, arrivent sans stress et peuvent entrer directement, sans passer par l'accueil de la clinique.