Prothèse supra-implantaire impactée : à propos du système Axiom® 2,8 mm - Implant n° 4 du 01/11/2016
 

Implant n° 4 du 01/11/2016

 

DOSSIER CLINIQUE

J. Perrin / H. Plard / J. Lambert / P. Limbour  

Résumé

L'implant Axiom® 2,8 est un implant de faible diamètre qui permet de traiter les édentements étroits tels que agénésie ou proximités radiculaires. La particularité de ce système réside dans l'assemblage prothétique qui n'est ni vissé ni scellé mais impacté directement dans l'implant.

Summary

Impacted prosthesis on implant: About the Axiom 2.8 mm system

The Axiom® 2.8 mplant is a small-diameter implant that treats the narrow gaps as agenesis or root proximities. The particularity of this system is the prosthetic assembly that is not screw retained or cemented but impacted directly into the implant.

Key words

impacted prosthesis, small dimater implant, Axiom® 2.8

Le remplacement d'une dent absente par une prothèse implanto-portée s'est imposé comme la thérapeutique de choix depuis de nombreuses années. Cette solution présente beaucoup avantages : confort, esthétique, pérennité du traitement et préservation des dents adjacentes contre l'édentement.

Cependant, la mise en place d'implants est parfois contre-indiquée en raison d'un manque d'espace ou d'une insuffisance du volume osseux. Des systèmes implantaires avec des diamètres d'implants réduits ont été mis au point pour intervenir a minima dans ces espaces étroits.

Dans cet article, les indications, les limites, les taux de survie et le protocole de traitement utilisant des mini-implants sont détaillés.

Le système Axiom® (Anthogyr) est ensuite décrit et son utilisation illustrée à l'aide d'un cas clinique concernant le remplacement d'une incisive mandibulaire absente par une couronne impactée sur un implant Axiom® 2,8.

Mini-implants

Indications et limites

D'après Davarpanah et al. [, ], les diamètres implantaires sont généralement classés de la manière suivante :

– diamètre standard de 3,75 à 4,5 mm ;

– diamètre réduit de 3 à 3,5 mm ;

– diamètre large de 4,8 à 7 mm.

Les mini-implants représentent ceux dont le diamètre est inférieur à 3 mm.

Seules les indications [, ] en prothèse implantaire unitaire seront abordées ici, les autres applications, telles que les supports d'attachements axiaux en prothèse amovible, ne seront pas exposées.

Le champ d'application des mini-implants est relativement réduit. Ils sont indiqués :

– dans le cadre d'espaces mésio-distaux réduits (remplacement d'incisives mandibulaires et latérales supérieures) ;

– dans les cas de crêtes étroites souvent liées à l'agénésie de ces mêmes incisives, ce qui permet d'éviter les chirurgies d'épaississement notamment par greffe osseuse par exemple (fig. 1 et 2) ;

– dans les situations où soit l'espace osseux interradiculaire soit le diamètre prothétique cervical est limité.

Les systèmes de mini-implants les plus anciens commercialisés sont monolithiques, l'implant ainsi que le pilier formant une seule et unique pièce. L'implant doit être posé au plus proche de l'axe de la future couronne. Le pilier, c'est-à-dire la partie supra-gingivale, peut être éventuellement retouché. Cependant, dans les cas d'espaces réduits, ces retouches sont limitées et difficiles à réaliser. Les indications de ces implants monoblocs sont donc limitées.

Des mini-implants bicomposants, avec implants et piliers indépendants, ont été ensuite mis au point pour palier les limites des implants monoblocs. Il est donc possible, comme dans les systèmes implantaires de diamètre plus élevé, de choisir des piliers adaptés à chaque situation (angulation, diamètre et hauteur). Enfin, la gestion du profil d'émergence est facilitée par le choix plus large des composants prothétiques.

Bibliographie et taux de survie

Dans une étude rétrospective de 12 ans sur 3 321 mini-implants (diamètre de 1,8 à 3 mm), Shatkin et Pettroto obtiennent des taux de survie de 94,7 % en prothèse fixée unitaire [].

Une méta-analyse récente réalisée sur 22 études montre des taux de survie identiques entre mini-implants et implants standard []. Les études portent sur une utilisation des mini-implants non seulement en prothèse fixée mais également comme supports de prothèses amovibles complètes et partielles.

Parmi les études récentes, les taux de survie rapportés des mini-implants seraient compris entre 94 et 100 %. Une seule étude ancienne datant de 1989 montre un taux de survie plus limité, inférieur à 90 %. Pour certains auteurs, les progrès accomplis tant au niveau du traitement de l'état de surface implantaire que des techniques chirurgicales ou prothétiques concernant ce type d'implant expliqueraient l'amélioration des taux de survie implantaire.

Selon la littérature médicale récente, concernant les indications précédemment citées, l'emploi des mini-implants représenterait donc une solution pérenne en prothèse fixée unitaire.

Prothèse supra-implantaire impactée et système Axiom® 2,8 mm

De forme cylindro-conique, cet implant présente un apex implantaire étroit qui permet de résoudre les situations cliniques de proximité radiculaire. Il existe en trois longueurs, 10, 12 et 14 mm.

Le protocole chirurgical est classique et très simple, limité à l'utilisation de différents forets. Il sera décrit en détail dans le cadre du cas clinique présenté dans la dernière partie de cet article.

L'implant Axiom® 2.8 est un implant bicomposant. Sa particularité réside dans la mise en place des composants prothétiques par impaction. En effet, contrairement à l'usage classique en prothèse implantaire, l'assemblage pilier-implant n'est pas réalisé par transvissage. Pour ce système, il n'existe ni tournevis ni clé dynamométrique [, ].

L'assemblage implant-suprastructure se fait grâce à un instrument impacteur pneumatique : le Safe Lock® (fig. 3 et 4). Cet instrument se connecte à un micromoteur conventionnel afin de délivrer des impulsions permettant de mettre en place le pilier ou la prothèse par impaction. Il ne sert qu'à impacter les piliers et les couronnes d'usages, les transferts d'empreintes et les prothèses temporaires sont mis en place manuellement.

Cet implant est doté d'une connectique de type cône morse avec platform switching intégré. En revanche, il ne possède pas de système d'indexation.

Le pilier ou la prothèse unitaire monolithique s'insère en force dans l'implant, générant ainsi une friction importante entre les parois assemblées, ce qui permet la rétention du dispositif prothétique. La connexion est dite active par opposition aux assemblages passifs où la vis de transfixation assure l'essentiel de la rétention du pilier ou de la prothèse transvissée.

La dépose des capuchons ou plots de cicatrisation est possible grâce à un instrument spécifique, une clé de préhension, qui vient se visser à l'intérieur de ceux-ci (fig. 5).

Pour déposer le pilier ou la prothèse implantaire (temporaire ou d'usage), l'absence de vis impose le recours à une pince ou à un davier, en effectuant de légers mouvements latéraux.

Concernant les piliers prothétiques, trois hauteurs gingivales sont disponibles (2,5, 4,0 et 5,5 mm). Pour compléter les piliers droits, trois infrastructures angulées sont disponibles (7, 15 et 23o).

L'assemblage implanto-prothétique peut se faire de deux façons :

– soit la prothèse est collée ou scellée sur le pilier, au laboratoire, et l'ensemble est impacté ensuite en bouche, dans l'implant, en utilisant l'instrument impacteur (fig. 6) ;

– soit le pilier est impacté dans l'implant, puis la couronne est scellée ou collée directement dans la cavité buccale (fig. 7).

La connectique par cône morse apporte plusieurs avantages à la reconstruction implanto-prothétique sur les plans à la fois mécanique et biologique [].

La résistance mécanique de la connexion implant-pilier est augmentée par rapport à la connexion passive réalisée sur la plateforme implantaire (configuration dite à plat).

Du fait de l'emboîtement caractéristique de ce type de liaison par un réel cône morse (conicité de 3o) et non une simple connexion conique, les micromouvements du pilier dans l'implant sont très limités durant la fonction.

Il existe une meilleure transmission des forces occlusales à l'implant et, par conséquent, à l'os péri-implantaire.

Sur le plan biologique, la diminution du hiatus pilier-implant renforce l'étanchéité de l'assemblage, permettant d'espérer un maintien des tissus mous péri-implantaires.

Enfin, l'efficacité de la connexion par cône morse permet d'utiliser des implants de faible diamètre sans compromettre la pérennité de la reconstruction implanto-prothétique [], répondant ainsi au concept du « more bone, less titanium » et d'éviter les apports osseux dans les situations cliniques de crêtes résorbées ou étroites [].

Cas clinique

Une patiente consulte pour le remplacement de 41, extraite après un échec endodontique (fig. 8).

L'imagerie révèle une crête osseuse très atrésique à la suite de la résorption postextractionnelle, contre-indiquant la mise en place d'un implant, y compris de très faible diamètre.

Le plan de traitement intègre donc une reconstruction pré-implantaire, suivie au bout de 4 mois de la pose de l'implant. Il est convenu qu'une couronne provisoire sera mise en place 3 mois après la chirurgie implantaire.

La reconstruction de la crête est classiquement assurée par une greffe osseuse d'origine ramique, apposée sur le site et maintenue en place par deux vis d'ostéosynthèse. Le greffon est protégé par une membrane Bio-Gide® (Geistlich) (fig. 9 à 12).

Les suites opératoires sont discrètes et, cliniquement, la situation apparaît favorable pour l'insertion d'un mini-implant (fig. 13).

Au bout de 4 mois, une réentrée du site permet la mise en place d'un implant Axiom® 2,8 de 12 mm de longueur. Les séquences chirurgicales de mise en place sont simples, rapides et précises. Deux forets de 2 et 2,6 mm sont utilisés. Il est conseillé de forer 1 mm de plus que la longueur de l'implant. Après le passage de chaque foret, une jauge adaptée permet le contrôle de l'axe implantaire (fig. 14). Un taraud permet de limiter la contrainte de l'implant dans les zones osseuses de forte densité. La position du col est légèrement infracrestale en proximal et crestale en vestibulaire (fig. 15). Le couple final de serrage est de 40 Ncm. Un plot de cicatrisation en résine PEEK est enfoncé manuellement dans le puits implantaire (fig. 16).

Le contrôle de l'ostéo-intégration est réalisé 3 mois après la chirurgie. La validation des tests cliniques et l'imagerie (fig. 17 à 19) [] autorise le passage vers l'étape prothétique.

Une empreinte de situation implantaire est réalisée afin de mettre en place une prothèse provisoire (fig. 19).

Le transfert d'empreinte pour empreinte dite repositionnée ou « à ciel fermé » est inséré manuellement dans l'implant (fig. 20 et 21). Du fait de la connexion par cône morse, il n'existe pas de transfert transvissé pour technique d'empreinte emportée ou « à ciel ouvert » dans le système Axiom® 2.8.

Après traitement de l'empreinte (fig. 22) au laboratoire, une prothèse provisoire en résine acrylique est réalisée sur un pilier temporaire (fig. 23).

Son profil transgingival est concave afin de modeler au mieux les tissus mous péri-implantaires [, ].

La prothèse temporaire est assemblée au pilier provisoire en dehors de la bouche de la patiente, puis l'ensemble est mis en place dans l'implant sans utiliser de ciment de scellement (fig. 24 et 25).

Après maturation des tissus mous durant 6 mois (fig. 26), l'empreinte pour la réalisation de la prothèse d'usage débute par l'enregistrement du profil d'émergence obtenu grâce à la prothèse temporaire (fig. 27 à 30) [, ].

Après traitement de cette empreinte, le pilier d'usage est choisi selon les conditions cliniques spécifiques au cas traité. L'armature de la couronne est réalisée en disilicate de lithium (IPS e.max®, Ivoclar Vivadent) par méthode pressée puis stratifiée.

Pour l'assemblage de la prothèse d'usage, le collage au laboratoire a été retenu afin de supprimer les difficultés liées au collage dans la cavité buccale.

Après essayage et validation clinique des points de contact, de la forme ainsi que de la couleur de la couronne en présentant uniquement la suprastructure coronaire sans le pilier, la prothèse est ensuite collée sur l'infrastructure (colle Multilink Hybrid Abutment®, Ivoclar Vivadent).

L'ensemble est finalement impacté dans l'implant, toujours sans avoir recours à du ciment de scellement.

L'assemblage, hors de la cavité buccale, du pilier ainsi que des prothèses temporaire et d'usage permet de ne pas utiliser d'agent d'assemblage sur le site clinique et d'éviter les manœuvres délicates de retrait des excès de colle dans des espaces réduits et difficiles d'accès. La solution retenue s'apparente aux solutions « no cem » [] qui reposent sur l'utilisation de piliers et de prothèses télescopées ne nécessitant pas l'utilisation de ciment de scellement.

La seule limite de ce protocole d'assemblage est le réglage des points de contact et de la longueur précise du bord libre prothétique au laboratoire, qui n'est pas très aisé, imposant des impactions successives sur le modèle de travail. De même, l'essayage final de la couronne s'avère délicat puisque les phases de mise en place par impaction et retrait à l'aide d'une pince risquent d'abîmer le matériau cosmétique. Cela représente probablement l'écueil principal des reconstructions implanto-prothétiques monolithiques impactées. Certains ont recours au scellement sur le pilier impacté directement dans la cavité buccale pour pallier cet inconvénient [].

Comme pour toute prothèse implanto-portée, un soin particulier est apporté au contrôle de l'occlusion (fig. 31).

Enfin, les mesures d'hygiène proximales sont enseignées à la patiente (fig. 32 et 33).

Conclusion

L'utilisation d'un système implantaire associé à une connexion active par cône morse permettant l'impaction permet de s'affranchir des vis d'assemblage. Cela autorise, en toute sécurité, l'utilisation de ces mini-implants, au diamètre implantaire réduit, dans les situations de reconstruction prothétique implanto-portée à réaliser dans des sites où l'espace mésio-distal ainsi que le volume osseux résiduel s'avèrent très limités.

Les auteurs remercient Anaïs Marguerite de la société Anthogyr pour sa disponibilité et ses conseils avisés.

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Jérémie Perrin
Docteur en chirurgie dentaire
Ancien assistant hospitalo-universitaire
Praticien attaché (sous-section Prothèses)

Hervé Plard
Docteur en chirurgie dentaire
Assistant hospitalo-universitaire (sous-section Prothèses)

Julien Lambert
Prothésiste dentaire

Patrick Limbour
Docteur en chirurgie dentaire
MCU-PH
Responsable de la sous-section Chirurgie buccale et implantologie
Pôle d'odontologie et de chirurgie buccale
CHU de Rennes
2, place Pasteur
35033 Rennes cedex 9

LIENS D'INTÉRÊTS : les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.

Remerciements : Les auteurs remercient Anaïs Marguerite de la société Anthogyr pour sa disponibilité et ses conseils avisés.

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