Intérêts des distractions ostéogéniques alvéolaires dans la gestion des défauts osseux verticaux mandibulaires - Implant n° 4 du 01/12/2018
 

Implant n° 4 du 01/12/2018

 

Chirurgie pré-implantaire

Les réhabilitations des pertes de substances verticales mandibulaires sont parmi les plus difficiles à aborder en chirurgie pré-implantaire. Elles posent plusieurs problèmes tels que la procidence du nerf alvéolaire et le recouvrement tissulaire. Dans les résorptions maxillo-mandibulaires, Cadwood et al.[] décrivent, en cas de résorption importante de la crête osseuse mandibulaire postérieure, une...


Résumé

Résumé

Les réhabilitations des pertes de substances verticales mandibulaires sont parmi les plus difficiles à aborder en chirurgie pré-implantaire. Plusieurs techniques de reconstruction sont disponibles. La plupart des techniques sont limitées par un apport vasculaire faible et une quantité minimale de tissus mous. L'ostéogenèse par distraction est utilisée depuis la fin des années 1990 sur l'os alvéolaire. Cette méthode offre de nombreux avantages, notamment le gain simultané de tissus mous et de tissus durs. La littérature actuelle suggère qu'une distraction ostéogénique donnerait d'excellents résultats dans le traitement des atrophies alvéolaires. Le traitement des atrophies alvéolaires mandibulaires par greffons autologues pose le problème de la couverture du greffon par les tissus mous. L'objectif de cet article est de mettre en évidence l'application de l'ostéogenèse par distraction dans la prise en charge des atrophies verticales osseuses alvéolaires. Il est illustré par deux cas traités au sein du service de chirurgie maxillo-faciale et stomatologie de l'hôpital Pitié-Salpêtrière.

Les réhabilitations des pertes de substances verticales mandibulaires sont parmi les plus difficiles à aborder en chirurgie pré-implantaire. Elles posent plusieurs problèmes tels que la procidence du nerf alvéolaire et le recouvrement tissulaire. Dans les résorptions maxillo-mandibulaires, Cadwood et al.[] décrivent, en cas de résorption importante de la crête osseuse mandibulaire postérieure, une superficialisation du nerf alvéolaire inférieur dans les classes IV à VI. Cette résorption a pour conséquence d'entraîner, dans la région antérieure, une superficialisation des insertions musculo-tendineuses des muscles de la face. Ainsi, les techniques de greffes additives, telles que les greffes d'apposition, sont à risque d'exposition du fait des contraintes musculaires et des insertions tendineuses. Il est donc nécessaire d'avoir recours à des mesures de plastie parodontale.

L'utilisation de la distraction alvéolaire permet de surseoir aux contraintes de recouvrement tissulaire et d'exposition des greffons.

La capacité de la distraction ostéogénique alvéolaire à régénérer l'os et les tissus mous en fait une alternative intéressante aux méthodes conventionnelles de régénération osseuse car elle permet une augmentation osseuse verticale concomitante à l'augmentation tissulaire. Elle permet d'obtenir des résultats esthétiques et fonctionnels optimaux[].

Historique

En 1954, Ilizarov ouvre la voie à l'ostéogenèse par distraction. Grâce à des corticomies osseuses bien définies, il réussit à allonger sur plus de 40 cm des os des extrémités en conservant l'enveloppe des parties molles et sans transplantation de substance spongieuse. Les fragments étaient distractés à raison de 1 mm par jour par un fixateur externe. Il constate alors qu'un cal se forme dans la région interfragmentaire pendant une période de latence d'environ 3 à 7 jours. Ce cal est ensuite expansé dans le sens de la traction à la même vitesse que la distraction externe. L'ossification se déroule après la période de consolidation, environ pendant 12 semaines[].

Au début des années 1990, les systèmes de distraction osseux ont fait leur apparition en chirurgie orale et maxillo-faciale. Diner et Vazquez[] introduisent un système de distracteur miniaturisé pouvant être implanté sous la muqueuse buccale. Contrairement au principe classique de la distraction, il n'exige aucune fixation transcutanée (fixateur externe)[].

Dans une étude de cas de 2004, Ley et Cranin[] ont démontré que le principe de distraction ostéogénique était applicable à l'os alvéolaire et permettrait de traiter les mandibules atrophiées.

Phases de la distraction ostéogénique

Le principe de la distraction du cal en orthopédie s'applique à la distraction de l'os alvéolaire[]. Histologiquement, il existe différentes phases de la formation du tissu du cal pendant la période de distraction verticale.

L'incision doit être décalée dans le fond du vestibule, avec une dissection minimale du périoste crestal et lingual afin d'assurer une bonne vascularisation à proximité du site d'ostéotomie [fig. 1 et 2]. L'ostéotomie doit être réalisée avec une irrigation abondante pour éviter l'échauffement[].

Fixation du distracteur

Le distracteur est conformé et adapté au relief osseux puis fixé dans la position désirée [fig. 3 et 4].

Le distracteur est ensuite retiré et l'ostéotomie complète est réalisée [fig. 5].

Puis le distracteur est repositionné sur l'endroit prédéterminé [fig. 6].

L'ostéotomie est contrôlée en activant le distracteur sur 2 mm. On s'assure de n'avoir aucun conflit entre la tige d'activation et les pointes cuspidiennes des dents antagonistes[].

Phase de latence

Glowacki et al.[], dans une étude réalisée en 2004 sur 20 porcs, ont démontré qu'après distraction ostéogénique, l'os présentait le même degré de stabilité, avec une période de latence de 0 ou 4 jours. D'autres études sur des animaux soutenant cette idée ont montré une solidité osseuse et une formation du cal pour une durée de latence de 0 et 7 jours dans le modèle du mouton[]. Une période de latence plus courte a été suggérée comme suffisante pour le stade précoce du processus de guérison, car les os cranio-faciaux ont un riche apport vasculaire[].

Pendant cette période, le caillot initialement formé histologiquement est converti, en 3 jours, en tissu de granulation qui devient de plus en plus fibreux en raison de la présence de collagènes, et de plus en plus vascularisé par l'apparition de nouveaux capillaires[].

Phase de distraction

Cette phase est caractérisée par l'application de forces de traction sur les segments osseux progressivement séparés l'un de l'autre. La distraction prolonge le processus normal de réparation osseuse et entraîne la néo-formation de tissu osseux dans l'intervalle interfragmentaire.

Cette phase dure généralement 1 à 2 semaines[]. La traction modifie le développement normal du processus de régénération. Un microenvironnement dynamique est créé avec la formation de tissu parallèle au vecteur de distraction. Il y a augmentation et prolongation de l'angiogenèse et de la prolifération accrue de fibroblastes en forme de fuseau[].

Entre le 3e et le 5e jour de distraction, des capillaires envahissent le cal mou. Les ostéoblastes et chondroblastes apparaissent. Durant la 2e semaine, les trabécules osseux primaires se forment et les ostéoblastes secrètent du tissu ostéoïde le long des fibres de collagène, tissu qui se calcifiera à la fin de la semaine. L'intervalle de distraction fonctionne comme une zone de croissance qui reste ouverte jusqu'à la fin de la distraction. Radiologiquement, la zone interfragmentaire, pauvrement minéralisée, est radioclaire. La majeure partie de cette phase est réalisée par le patient et en ambulatoire[].

Taux de distraction

La loi de contrainte-tension, proposée par Ilizarov[], recommande un taux de distraction de 1 mm par jour comme taux optimal de régénération osseuse pendant l'ostéogenèse de distraction. La distraction quotidienne aligne les fibres de collagène en faisceaux parallèles qui canalisent les vaisseaux et les cellules périvasculaires dans des compartiments longitudinaux[].

Un taux croissant (2 mm/jour) entraîne une union fibreuse ou un affaiblissement osseux. L'augmentation du taux de distraction est associée non seulement à une formation osseuse médiocre, mais aussi à de graves contractures des tissus mous et à des problèmes nerveux[].

Un taux décroissant (0,5 mm/jour) entraîne une consolidation prématurée[].

Phase de consolidation

La consolidation est la période, après la fin de la distraction, lorsque les fragments sont stabilisés dans leur position finale. Le distracteur est utilisé comme un dispositif de fixation rigide. Cette période varie de 8 à 12 semaines. Pendant cette période, la minéralisation du cal se produit dans l'espace osseux[].

Phase de remodelage

Elle permet la restitution ad integrum de la pièce osseuse distractée. Elle commence à partir de la remise en charge fonctionnelle de la pièce osseuse distractée jusqu'au complet remodelage. Pendant cette phase, le cal osseux distracté est renforcé par de l'os lamellaire aux fibres parallèles. La structure du néo-tissu osseux cortico-spongieux interfragmentaire est à la fin de cette période comparable à l'os préexistant. Cette phase dure au moins un an[].

Les 6 règles d'or de la distraction ostéogénique

1. Préserver une bonne vascularisation du fragment à distracter par des décollements a minima du périoste.

2. La fixation du fragment à distracter doit être rigide pour éviter tout mouvement parasite compromettant la stabilité du montage.

3. Respecter une période de latence de 4 à 7 jours.

4. Distraction lente et progressive avec un taux de distraction continue de 1 mm/jour.

5. Phase de consolidation 8 à 12 semaines.

6. Phase de remodelage avec l'utilisation la plus physiologique du fragment distracté afin d'optimiser une ossification complète.

Situations cliniques

Deux situations cliniques de distraction ostéogénique alvéolaire mandibulaire antérieure et postérieure, réalisées dans le service de chirurgie maxillo-faciale et stomatologie de l'hôpital la Pitié-Salpêtrière, sont détaillées.

Situation clinique 1

Présentation du patient

Il s'agit d'un patient de 30 ans pris en charge en septembre 2015 à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière pour séquestrectomie et avulsions de 31, 32, 33, 35 et 36, dans les suites d'une nécrose alvéolaire post-embolisation d'une malformation artério-veineuse [fig. 7].

Le patient présente une atrophie alvéolaire mandibulaire postérieure sévère [fig. 8] et est gêné par le volume de sa prothèse amovible. Il est décidé de réaliser une distraction ostéogénique alvéolaire en secteur 3 afin de corriger l'atrophie sévère liée à la perte du fragment alvéolaire. Les bénéfices attendus de cette intervention sont à la fois de corriger l'effondrement de la dimension verticale, de limiter le volume de fausse gencive et d'améliorer la phonation et la contenance salivaire du patient. Le gain de hauteur ostéo-muqueux souhaité est d'environ 15 mm, afin d'éviter un différentiel trop important entre ses dents naturelles et sa réhabilitation implanto-prothétique.

Procédure

Au bloc opératoire, sous anesthésie générale, un distracteur mandibulaire est posé. L'incision horizontale est réalisée à la jonction de la gencive attachée et libre s'étendant le long de l'étendue du défaut de 31 à 36, en respectant le pédicule du foramen mentonnier [fig. 9].

Un lambeau muco-périosté permet d'exposer l'os et le bord basilaire mandibulaire. À cette étape, il est fondamental de veiller à ne pas dépérioster la crête osseuse et la muqueuse linguale garante de la vascularisation du fragment alvéolaire à distracter.

Le distracteur KLS Martin® est ensuite conformé et adapté [fig. 10].

Une ostéotomie en U est réalisée après avoir fixé au préalable le distracteur et réalisé les différents pré-forages nécessaires au bon repositionnement du distracteur.

Les plaques du distracteur sont positionnées de part et d'autre du foramen mentonnier.

Le distracteur est déposé le temps de terminer la section osseuse du bord lingual. Il est nécessaire de veiller à ne pas entraîner de plaie et/ou de section de la muqueuse linguale [fig. 11].

À la fin des ostéotomies, le segment est mobilisé. De cette manière, le segment de transport est créé. On a pris soin de placer les ostéotomies verticales à distance des dents adjacentes à l'édentement.

Le distracteur est ensuite repositionné et fixé au moyen de vis d'ostéosynthèses de diamètre 1,5 mm et de longueur 6 mm, placées dans les orifices de pré-forages réalisés en début d'intervention [fig. 12].

On vérifie le mouvement de translation verticale du segment de transport sans perturber la muqueuse, et le distracteur est fixé. Un soin particulier a été apporté à la fermeture du site opératoire.

Le patient est sorti à J-0 avec contrôle post-opératoire et panoramique satisfaisant [fig. 13].

Cinq jours après l'intervention, la distraction débute à raison d'un tour (0,5 mm) matin et soir, soit 1 mm/jour.

La distraction est poursuivie jusqu'à J 15, puis la distraction est arrêtée.

Au panoramique de contrôle [fig. 14], on obtient une hauteur satisfaisante de 15 mm de gain osseux.

Trois mois plus tard, après contrôle par CBCT de la distraction, il est décidé de retirer le distracteur et de poser dans le même temps 5 implants Zimmer-Biomet® TSV.

On note la présence de lacunes osseuses vestibulaires à la dépose du distracteur, imputées à l'exposition précoce du matériel sans surinfection [fig. 15].

Cinq implants Zimmer-Biomet® sont posés (dimensions : 4 de 4,1 × 16 mm en positions 32, 33, 34 et 35, et 1 de 4,1 × 13 mm en position 36) de façon concomitante à la dépose du distracteur.

Il est décidé de combler les lacunes osseuses vestibulaires au moyen de particules d'hydroxyapatite d'origine bovine (Geistlich Bio-Oss®) taille S. Une membrane de collagène résorbable d'origine porcine (Bio-Gide Geistlich® 25 mm × 25 mm) est placée sur le site [fig. 16 et 17].

Après l'ablation des porte-implants, les vis de couvertures sont mises en place pour un protocole en deux temps avec poursuite du comblement des lacunes par la xénogreffe.

Une radio panoramique finale est réalisée [fig. 18].

Résultats

Un scanner de contrôle est réalisé à distance. Il montre une parfaite ostéo-intégration des 5 implants [fig. 19].

Une mise en fonction avec greffe de gencive en « poncho » est entreprise pour augmenter la hauteur de gencive attachée autour des 3 premiers implants.

Après cicatrisation, la phase prothétique est entreprise, comprenant l'empreinte au plâtre (Snow White) et aux silicones. Après plusieurs essayages, la prothèse transvissée sur les 5 implants est posée (laboratoire Delepierre) [fig. 20 à 27].

Situation clinique 2 : cas clinique antérieur mandibulaire

Présentation du patient

Il s'agit d'un patient ayant présenté une tuméfaction symphysaire d'apparition progressive.

Le scanner trouve une masse ostéolytique soufflante mesurée à 5 × 3 × 4 cm centrée sur la symphyse mandibulaire, évoquant un améloblastome. Une mandibulectomie interruptrice et une reconstruction par lambeau libre de crête iliaque sont réalisées au sein du service de stomatologie et chirurgie maxillo-faciale de la Pitié-Salpêtrière [fig. 28].

Quelques mois après, une nouvelle intervention est réalisée. Elle consiste en la pose d'un distracteur alvéolaire en région symphysaire, afin de faciliter par la suite la réhabilitation implantaire. En effet, bien que la première phase de reconstruction osseuse du bord basilaire par lambeau libre de crête iliaque fut un succès, l'indice couronne/implant était supérieur à 1 pour 3, ce qui représentait un manque de 20 mm de hauteur osseuse.

Il a donc été décidé de poser un distracteur alvéolaire afin de diminuer le futur volume prothétique, tout en améliorant la contenance salivaire et la phonation du patient par la création d'un nouveau rempart ostéo-muqueux.

Procédure

Le distracteur KLS Martin® en région symphysaire est placé au cours de cette intervention.

L'incision horizontale est réalisée de la 47 à la 37 en muqueuse libre, en préservant le pédicule vasculo-nerveux mentonnier [fig. 29].

Le distracteur est ensuite conformé et adapté au relief osseux afin d'épouser au maximum les contre-dépouilles de la mandibule. Le distracteur est positionné en fonction du vecteur de distraction souhaité. Celui est fixé par 6 vis d'ostéosynthèse de 1,5 mm sur le bord alvéolaire, et de 2,0 mm sur le bord basilaire [fig. 30 à 32].

Une fois le distracteur en place, on amorce alors l'ostéotomie en U au piézotome. Il est important de signaler que les traits verticaux de l'ostéotomie doivent être divergents afin de faciliter l'ascension du fragment alvéolaire. Si cette étape n'est pas respectée, le fragment risque d'être bloqué par les contre-dépouilles osseuses lors de l'ascension de celui-ci. Après la réalisation de la majeure partie de l'ostéotomie, le distracteur est déposé afin de terminer la section du fragment osseux [fig. 33].

Une mobilisation douce permet de s'assurer de la section complète et franche du fragment osseux à distracter. Il faut veiller à ne surtout pas léser la muqueuse linguale lors de ce geste car elle est la seule garante de la vascularisation du fragment alvéolaire.

Le distracteur est remis en place, en s'assurant de la bonne concordance entre les pré-trous réalisés en début d'intervention et les œillets d'ostéosynthèse du dispositif. On termine ensuite l'ostéosynthèse du dispositif. Une activation de quelques millimètres est réalisée pour s'assurer du bon fonctionnement du distracteur [fig. 34].

Enfin, la fermeture de la voie d'abord est faite, en laissant traverser le mandrin d'activation du distracteur.

La distraction débute à J 4 à raison d'un demi-tour par jour matin et soir (pendant 20 jours) [fig. 35].

On notera un blocage du distracteur à 15 jours, soit un gain de 15 mm du fait des contre-dépouilles osseuses.

Deux mois après la fin de la distraction, le CBCT de contrôle indique une ossification en cours permettant la programmation des implants dentaires.

Lors de la dépose du distracteur, on constate une parfaite consolidation du foyer de distraction et un gain de 15 mm de hauteur osseuse [fig. 36 à 38].

Après 3 mois de consolidation, une nouvelle intervention est programmée sous anesthésie générale, afin de déposer le distracteur [fig. 10 et 11] et de poser 8 implants Zimmer-Biomet® : 7 implants de 4,1 × 13 mm et 1 implant de 4,7 × 11,5 mm en position 36 avec avulsion concomitante de la 36 [fig. 39].

À 3 mois, le contrôle de l'ostéo-intégration est excellent. La mise en fonction est réalisée ainsi que les étapes prothétiques par les Docteurs B. Pomes et N. Ajzenberg [fig. 40 à 42].

Discussion

Les techniques les plus courantes pour traiter les atrophies alvéolaires mandibulaires étendues sont les greffes d'apposition (2D et 3D) autologues. Certains auteurs ont recours à la régénération osseuse guidée utilisant, ou non, des membranes armées.

Un des principaux inconvénients de ces techniques est le taux de résorption et d'exposition du greffon avant la pose de l'implant.

De plus, en cas de prélèvement osseux, on note la présence de douleurs au niveau du site donneur (iliaque et mentonnier surtout) et une faible quantité osseuse à disposition sur les sites donneurs intra-oraux[].

Parmi les autres techniques de réhabilitation des défauts alvéolaires postérieurs mandibulaires de grandes étendues, nous avons :

Les ostéotomies segmentaires sont utilisées en combinaison avec des greffes interpositionnelles dans l'espace créé par l'ostéotomie et dans la position désirée pour obtenir un gain de crête vertical. Or cette technique dépend du maintien de la vascularisation du périoste des fragments osseux[] et de la laxité des tissus mous disponibles.

La latéralisation et la transposition du nerf alvéolaire inférieur n'impliquent qu'un site opératoire. Cette technique sans greffon permet une prédictibilité du résultat.

La latéralisation et la transposition du nerf alvéolaire inférieur sont des procédures chirurgicales qui repositionnent le nerf afin de placer l'implant sans augmentation osseuse. Cette procédure augmente le risque de neuropathies, telles que la paresthésie, l'hypoesthésie et l'anesthésie du nerf alvéolaire inférieur[].

Au-delà des troubles sensitifs transitoires ou définitifs, cette technique implique d'importantes compensations prothétiques. Ces dernières s'accompagnent d'un rapport index/couronne/implant défavorable, et surtout d'une maintenance péri-implantaire plus difficile. Enfin, des répercussions sur la phonation et la contenance salivaire sont souvent rapportées par les patients en cas de compensation prothétique importante sur pilotis à la mandibule.

Dans une étude de cas[] présentant 10 cas de distractions alvéolaires antérieures mandibulaires, les auteurs concluent que l'ostéogenèse obtenue par distraction verticale alvéolaire s'est révélée être une technique fiable et prévisible. Le gain osseux vertical peut atteindre plus de 10 mm. Le gain osseux atteint à la fin de la distraction est stable. La qualité de la régénération osseuse est équivalente ou proche de l'os natif, et compatible avec la mise en place de l'implant. Le risque d'infection du site chirurgical est faible.

Bien que l'utilisation clinique de l'ostéogenèse par distraction n'ait cessé d'augmenter depuis sa découverte il y a plus d'un siècle[], nous n'avons pas de mesures quantitatives pour évaluer le degré de succès ou d'échec de cette technique. Mofid et al.[], dans une revue de 3278 cas de DOA, ont noté un taux plus faible de complications à mesure que l'expérience des chirurgiens augmentait.

Conclusion

L'utilisation de la distraction ostéogénique dans les réhabilitations des atrophies alvéolaires verticales sévères maxillo mandibulaires s'avère être une technique de choix. Son intérêt est double. Elle permet à la fois un gain osseux progressif important (supérieur à 10 mm), mais surtout un gain tissulaire concomitant. Elle limite le recourt à l'utilisation d'un deuxième site opératoire. Son efficacité est cependant liée à la compréhension du patient, qui est pleinement acteur de la réussite du protocole. En effet, l'acte chirurgical délicat décrit dans cet article ne pourra être efficace que si le patient active lui-même tous les jours, à raison de deux à trois fois par jour, son distracteur. Ainsi, il est fondamental qu'une information claire, loyale et appropriée soit fournie et comprise par le patient (loi Kouchner 04/03/2002[]).

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Auteurs

Mickael Samama

Chef de clinique en chirurgie orale

Co-directeur du D.I.U. de réhabilitation orale implantaire

Co-directeur du D.I.U. de chirurgie reconstructrice pré et péri-implantaire orale

Service de chirurgie maxillo-faciale et stomatologie Hôpital Pitié-Salpêtrière
Paris

Iris Haddad

Docteur en chirurgie dentaire

Diplômée du D.I.U. de réhabilitation orale implantaire

Service d'odontologie Hôpital Pitié-Salpêtrière
Paris

Alice Guyon

Chirurgien Oral

Co-directrice du D.I.U. de Réhabilitation orale implantaire

Co-directrice du D.I.U. de chirurgie reconstructrice pré et péri-implantaire orale

Service d'odontologie Hôpital Pitié-Salpêtrière
Paris

Patrick Goudot

Chef de Service stomatologie et de chirurgie maxillo-faciale Hôpital Pitié-Salpêtrière
Paris

Benjamin Pomes

Praticien ospitalier

Co-directeur du D.I.U. de réhabilitation orale implantaire

Service d'odontologie Hôpital Pitié-Salpêtrière
Paris