Collage d’un onlay en céramique - Cahiers de Prothèse n° 154 du 01/06/2011
 

Les cahiers de prothèse n° 154 du 01/06/2011

 

DÉTOURS CLINIQUES

Ahd Zaghba*   Hicham Soualhi**   Amal El Yamani***  


*Médecin dentiste spécialiste en prothèse fixée
**Professeur d’enseignement supérieur Assistant
***Professeur d’enseignement supérieur
****N 142 Hay Nahda cité Barid
Rabat, Maroc
E-mail : Ahd-zaghba@hotmail.com

Résumé

Les inlays-onlays en céramique peuvent être définis comme des pièces prothétiques destinées à traiter une perte de substance dentaire. Ils sont principalement indiqués dans les restaurations des dents postérieures de moyenne à grande étendue. Le collage de ces restaurations indirectes est incontestablement la clé de leur réussite et de leur intégration. Le choix entre les différents types de collage ne doit pas être aléatoire, il doit tenir compte des propriétés rétentives des préparations, de la proximité pulpaire et des systèmes céramiques utilisés. Actuellement, le respect des protocoles de collage est bien codifié et peut être facilement mis en œuvre en pratique quotidienne.

Le but de cet article est d’en décrire le protocole temps par temps, appliqué à la réalisation d’un inlay sur une prémolaire maxillaire.

Summary

Ceramic onlay bonding : clinical procedure step by step

Ceramic inlays and onlays can be defined as prosthetic components designed to restore the tooth structure loss. The main indications are the restoration of medium and larde extended cavities of porterior teeth. The bonding of these indirect restorations is defenitly the key to their success and integration. The choice among different bonding systems should not be random, it should take account of retaining properties of the preparation, the proximity to the pulp and the used ceramic system. Currently, bonding procedures are codified and can be easily followed and implemented in daily practice.

Key words

ceramic inlay-onlay, bonding, indirect restoration

Introduction

Les patients souhaitent désormais des restaurations durables et esthétiques même pour les dents postérieures, ce qui a conduit progressivement à une évolution des pratiques dentaires vers des soins à forte composante esthétique.

La demande esthétique grandissante a favorisé l’émergence des restaurations cosmétiques directes et indirectes. Les restaurations indirectes restent, dans ce cas, la solution de choix. Qu’elles soient en céramique ou en composite, elles assurent la préservation de l’état de surface, de la forme anatomique, de l’intégrité marginale et de l’occlusion ainsi que la diminution des sensibilités postopératoires [1]. Ainsi, les inlays-onlays peuvent être définis comme des pièces prothétiques assemblées par collage, destinées à restaurer une perte de substance dentaire. Ils sont principalement indiqués dans les restaurations des dents postérieures ayant des cavités de moyenne à grande étendue [2].

Cette évolution a pu se faire grâce à l’arrivée de nouveaux matériaux mais aussi grâce à des avancées techniques dans le domaine du collage.

Actuellement, différents types de céramique existent, soit des céramiques conventionnelles c’est-à-dire feldspathique stratifiée, soit les nouvelles céramiques : pressées (IPS e.max Ivoclar-Vivadent) ou frittées infiltrées (In-ceram, Vita) ou celles usinées par le procédé CFAO ; les procédés de mise en forme varient selon le matériau utilisé. Les propriétés mécaniques des armatures en céramique alumineuse (ex : In ceram Alumina™, Procera Alumina™) sont supérieures (500 à 700 MPa contre 150 à 350 MPa pour les céramiques vitreuses) mais leur aptitude au collage est nettement moins bonne car elles sont très peu attaquées par l’acide fluorhydrique et nécessitent de ce fait l’application d’un traitement tribochimique préalable comme le Rocatec™ ou le Silicoater™(3M ESPE) [3, 4]. La zircone, quant à elle, est un matériau semi-opaque très résistant qui pose également des difficultés de collage et de mise en œuvre.

Ainsi, l’utilisation de matériaux résistants est en faveur des céramiques alumineuses. Cependant l’évolution des systèmes Empress vers des vitrocéramiques plus résistantes (IPS e.max®) associée à la simplicité de leur mise en œuvre et qualité d’adhérence permet de l’indiquer pour ce type de restauration.

La fiabilité du collage conditionne la réussite et la pérennité de ces restaurations. Le collage améliore la résistance de ces restaurations indirectes en céramique en créant un corps unique entre la restauration et la dent [5, 6], ceci à tel point que la force de cohésion de la céramique feldspathique mordancée et silanée serait supérieure à celle de la jonction émail/dentine et à la cohésion propre de la céramique. L’adhérence du composite de collage est d’ailleurs plus forte à une céramique mordancée et silanée qu’à l’émail mordancé [7].

La mise en forme des préparations doit impérativement respecter les critères d’épaisseur nécessaires pour assurer la pérennité de la céramique (1,5 mm au minimum). De plus, pour ne pas favoriser d’éventuelles zones de contraintes sources de fractures, tous les angles de transition internes sont arrondis [8, 9]. Au contraire, les angles externes sont vifs et nets, ils ne doivent en aucun cas être biseautés (le biseau étant réservé aux seules restaurations métalliques). La préparation présente une dépouille importante, la rétention étant préférentiellement assurée par le collage avec les parois de dépouille de 10° (fig. 1).

Les différentes étapes du collage d’un inlay en céramique (Empress) seront illustrées par un cas clinique. colle composite sans potentiel adhésif intrinsèque à prise duale (Variolink II™ Ivoclar Vivadent).

Préparation d’Inlay

La préparation des surfaces doit toujours se faire après l’essai clinique qui entraîne inévitablement une contamination chimique. La manipulation de l’inlay est facilitée par l’utilisation d’un fouloir associé à la pâte thermoplastique ou à une cire collante (fig. 2).

La survie à long terme des armatures vitro-céramique est assurée par le mordançage de la phase vitreuse à l’acide fluorhydrique et par l’application d’un agent de couplage colle/céramique, le silane, avant l’assemblage par une résine de collage qui permet une répartition des contraintes occlusales sur la restauration [7].

L’intrados de la céramique est ainsi mordancé à l’acide fluorhydrique à 9 % pendant 1 minute pour créer une surface rétentive (fig. 3). La pièce prothétique est ensuite rincée abondamment et neutralisée dans un bain de bicarbonate de soude.

Une couche de silane est appliquée et laissée en place pendant une minute puis évaporée à l’air chaud (fig. 3). Ce silane est un agent de couplage entre la céramique et l’adhésif. La préparation de la surface de la vitro-céramique à l’acide fluorhydrique et au silane multiplie par 2 ou 3 ses valeurs d’adhérence à la colle, quelque soit le type de colle [6, 7].

Une couche d’un adhésif (le même que l’on utilisera pour la cavité) est appliquée, un spay d’air assure un meilleur étalement

Préparation de la cavité

L’essai et l’isolation du champ opératoire s’effectuent par la mise en place d’une digue unitaire qui présente en particulier l’avantage de gérer aisément l’élimination des excès de colles dans les espaces interproximaux (fig. 4).

Les étapes :

– la surface dentaire est mordancée à l’acide orthophosphorique pendant 15 à 20 secondes puis abondamment rincée (fig. 4) ;

– application de primer (fig. 4) ;

– application de l’adhésif amélo-dentinaire. Une attention particulière est portée à l’étalement de l’adhésif par un jet d’air, pour ne pas créer de surépaisseur dans le fond des cavités (fig. 4).

Collage

Le collage s’effectue avec un composite de collage dual. Pour ce cas clinique nous avons utilisé le Variolink II, Vivadent. Ce composite de collage est appliqué sur l’intrados de l’inlay. L’inlay est ensuite inséré progressivement dans l’axe (fig. 5). Une polymérisation flash de 5 secondes peut être effectuée pour éliminer plus aisément les débordements de colle. La pression est maintenue durant l’élimination de ces excès avec la microbrossette qui assure en même temps l’étalement du composite au niveau du joint (fig. 5). Enfin, une photopolymérisation est effectuée pendant au moins 60 secondes sur chaque face (fig. 5). La parfaite élimination des excès ne doit pas s’effectuer à l’aide d’une fraise qui rayerait la surface de la céramique. Un bistouri à lame courbe peut être un moyen efficace pour gérer cette étape (fig. 5).

Il reste alors à parfaire l’intégration occlusale, contrôlée à l’aide de papiers marqueurs extrafins en occlusion statique comme dynamique (fig. 5, 5). La qualité du travail de laboratoire trouve ici tout son sens en limitant les éventuelles retouches après le collage. Si toutefois de telles retouches devaient être envisagées, elles se feraient avec des fraises diamantées à grains fins (bague rouge puis jaune) suivies d’un polissage rigoureux avec des polisseurs siliconés adaptés.

Conclusion

Le protocole de réalisation des restaurations indirectes, inlays ou onlays, en composite ou en céramique, exige une rigueur clinique du début à la fin du traitement.

Le collage de ces restaurations indirectes est incontestablement la clé de leur réussite et de leur intégration esthétique, fonctionnelle et biologique.

Le choix entre un système avec mordançage-rinçage puis adhésif (MR), ou un système adhésif automordançant (SAM) doit tenir compte des propriétés rétentives de la préparation mais aussi de la proximité pulpaire. Ainsi, les systèmes MR, associant une acidification à l’acide orthophosphorique, un rinçage et un adhésif, restent le choix de première intention car ils assurent la meilleure adhésion aux tissus dentaires et sont, par conséquent, la garantie d’une longévité des restaurations. Les SAM sont recommandés lorsque le risque de sensibilité postopératoire est important (proximité pulpaire du fait de la profondeur ou du jeune âge).

De même, l’aptitude du système e.max® au collage (mordançable par l’acide fluorydrique) permet d’assurer une liaison majorée avec l’ensemble des composites avec ou sans potentiel adhésif. Les matériaux à potentiel adhésif (Panavia, Super-Bond) ou autoadhésif trouvent plus leur indication dans les systèmes céramiques non mordançables pour majorer la rétention et palier l’inefficacité de l’acide fluorhydrique

Le respect des protocoles de collage est l’exigence le plus souvent avancée, pour le succès de ces restaurations en céramique. Ceux-ci sont actuellement bien codifiés et peuvent être facilement mis en œuvre en pratique quotidienne au prix, en revanche, d’une indication pertinente.

bibliographie

  • 1 Manhart J, Chen HY, Neuerer P, Scheibenbogen-Fuchsbrunner A, Hickel R. Three-year clinical evaluation of composite and ceramic inlays. Am J Dent 2001;14:95-99.
  • 2 Lassere JF, Clavé D, Guillon B. Les inlays-onlays de céramique collée : Aspects cliniques et de laboratoire. Art Techn Dent 1994;5(1):3-15.
  • 3 Laurent M, Aboudharam G, Laplanche O, Laborde G. Céramique sans armature métallique : quels procédés pour quelles indications ? Cah Prothèse 2002;119:7-16.
  • 4 Margossian P, Laborde G. Restaurations céramocéramiques. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Odontologie, 23-272-C-15, 2007.
  • 5 Soares CJ, Martins LR, Pfeifer JM, Giannini M. Fracture resistance of teeth restored with indirect-composite and ceramic inlay systems. Quintessence Int. 2004 Apr;35(4):281-6.
  • 6 Gutierrez-Aceves G. Bonding of IPS-Empress-2 with different surface treatments and resin cements IADR 2007.
  • 7 Guastalla O, Viennot S, Allard Y. Collages en odontologie. EMC (Elsevier SAS, Paris), Odontologie, 23-065-D-10, 2005.
  • 8 Etienne O, Toledano C. Les inlays/onlays esthétiques : procédures cliniques. Clinic, juillet 2009-vol. 30.
  • 9 Viennot S, Malquarti G, Allard Y. Économie tissulaire et esthétique : inlays-onlays métalliques ou céramiques ? Cah Prothèse, 2003;124:29-38.