Plus la limite d’une couronne scellée sur implant est sous gingivale, moins les excès de ciment sont détectables. Étude clinique prospective.
 

Les cahiers de prothèse n° 161 du 01/03/2013

 

synthèses

Éric Robbiani  

Pourquoi ?

Certaines recommandations cliniques préconisaient de placer les limites cervicales des couronnes scellées sur implants 2 mm sous le niveau de la gencive pour avoir un meilleur profil d’émergence et pour anticiper une éventuelle récession gingivale (Andersson et coll., 1998) et ceci malgré le fait que l’élimination des excès de ciment était alors rendu plus difficile à contrôler (Agar et coll., 1997). La présence de ciment en excès sous la gencive est un...


Pourquoi ?

Certaines recommandations cliniques préconisaient de placer les limites cervicales des couronnes scellées sur implants 2 mm sous le niveau de la gencive pour avoir un meilleur profil d’émergence et pour anticiper une éventuelle récession gingivale (Andersson et coll., 1998) et ceci malgré le fait que l’élimination des excès de ciment était alors rendu plus difficile à contrôler (Agar et coll., 1997). La présence de ciment en excès sous la gencive est un facteur évoqué dans l’apparition de péri implantites plusieurs années après la pose de la prothèse (Wilson, 2009). Une étude in vitro de Linkevicius en 2011 a montré que, plus la limite est enfouie, plus il y a de ciment résiduel non détecté mais aucune étude in vivo n’a confirmé cette observation. Cette étude clinique a pour objectif de déterminer la quantité de ciment non éliminé après les procédures de nettoyage des restaurations et ceci avec des limites cervicales placées à différents niveaux sous la gencive. Un autre objectif était de déterminer la fiabilité des radiographies pour mettre en évidence les excès de ciment.

Comment ?

Une série de 53 patients consécutifs, pour lesquels une restauration unitaire sur implant était indiquée, ont été inclus dans cette étude réalisée à Vilnius en Lituanie. Le traitement prothétique a débuté 2 mois après la pose de l’implant (BioHorizons Internal) à la mandibule (33 cas) et 4 mois au maxillaire (20 cas). La position du plateau de l’implant sous le niveau gingival a été mesurée en mésial, distal, vestibulaire et lingual après la dépose du pilier de cicatrisation. Des piliers standards avec un col de 1,5 mm ont été vissés sur les implants et des couronnes céramo-métalliques ont été scellées au Fuji Plus sur ces piliers après avoir bouché au composite le puits d’accès à la vis de pilier. Les excès ont été éliminés à la sonde et au super floss par un praticien expérimenté. Un contrôle radiographique a été réalisé pour vérifier l’absence d’excès de ciment. L’ensemble couronne-pilier a ensuite été dévissé et des photographies standardisées ont été prises en bouche et pour les prothèses dévissées sur leurs 4 faces. Les analyses de surfaces avec ciment ont été réalisées à l’aide du logiciel Photoshop. Après réalisation des mesures, les éléments prothétiques ont été soigneusement nettoyés, décontaminés et revissés en bouche et le puits d’accès scellé au composite. Une analyse statistique a été réalisée pour déterminer l’influence de la position de la limite prothétique sur la quantité de ciment résiduel retrouvée.

Et alors ?

Un total de 212 mesures ont été réalisées. Les restaurations étaient classées en 4 groupes : Groupe 1 : limite à moins de 1 mm sous la gencive ; Groupe 2 : limite entre 1 et 2 mm sous la gencive ; Groupe 3 : limite entre 2 et 3 mm sous la gencive ; Groupe 4 : limite à plus de 3 mm sous la gencive. Du ciment a été retrouvé sur tous les éléments prothétiques et sur une partie des tissus péri implantaires. Le test de Kruskal-Wallis montre une augmentation statistiquement significative de la quantité de ciment retrouvé en fonction de l’enfouissement de la limite prothétique. Le test de Mann-Witney montre des différences statistiquement significatives entres les groupes 1 et 2 ; 2 et 3 et 3 et 4 (p < 0,05). Le contrôle radiographique ne permet de voir du ciment que dans 4 cas en mésial et 6 en distal sur 53.

À RETENIR :

En prothèse sur implants, il y a les partisans de la prothèse scellée et les partisans de la prothèse vissée. L’avantage esthétique de la prothèse scellée, la possibilité de rattraper certains axes, une similitude avec la prothèse sur dents naturelles font que cette option est aujourd’hui la plus répandue. Les inconvénients de cette option sont la difficulté de ré-intervention et l’incertitude sur l’élimination parfaite des excès de ciment qui pourraient être à l’origine de péri implantites. Cette étude clinique prospective réalisée à Vilnius sur 53 patients consécutifs qui avaient besoin d’une restauration unitaire sur implant avait pour objectif de déterminer l’influence de la position de la limite marginale de la couronne sur la quantité de ciment qui ne peut pas être éliminé. Avec les limites de cette étude, il peut être avancé que plus la limite cervicale est enfouie, plus il y a de ciment résiduel sous la gencive et ceci à partir de 1 mm sous la gencive. La radiographie ne permet pas de mettre en évidence ces excès de ciment. Il convient donc de privilégier une limite prothétique accessible visuellement (ou alors de réaliser une prothèse vissée…).

Malgré un nettoyage soigneux, il reste du ciment de scellement autour du pilier et sur les tissus péri implantaires d’une couronne scellée. La quantité de ciment est directement liée à la profondeur d’enfouissement de la limite prothétique. La radiographie n’est pas un bon indicateur de la présence de ciment. Une limite prothétique visible est souhaitable pour une élimination parfaite des excès.