Les violences conjuguales
 

12/03/2019

Ne passez pas à côté d'une victime

Violences conjugales

Le chirurgien-dentiste est particulièrement bien placé pour repérer les patients victimes de violence conjugale. Dans 70 % des cas, les lésions sont situées au niveau de la face, du crâne et du cou.

Et pourtant, des études montrent que, lorsque ces signes sont présents, 88,6 % des chirurgiens-dentistes n’abordent pas leur patient maltraité. Estelle Machat, chirurgien-dentiste MCU-PU à la faculté de Clermont-Ferrand, explique comment détecter les signes de violence sur une patiente et comment aborder le problème avec elle.

On estime que chaque praticien a chaque jour dans sa patientèle une femme qui a été ou qui est victime de violences. Mais la repérer n’est pas simple car il n’y a « pas de profil particulier », explique le professeur de santé publique. Et « quand ces victimes viennent au cabinet dentaire, ce n’est pas pour parler de ce qu’elles vivent », prévient Estelle Machat. Elles sont « enfermées dans un monde de silence, de honte, de culpabilité et parfois même de déni. Elles sont dans l’idée que personne ne les comprendra ». C’est donc au chirurgien-dentiste d’aborder le sujet. Il peut être alerté sur la situation de détresse de sa patiente par différents indices.

Le motif de consultation est souvent flou : « une chute sur un trottoir », « un coup de ballon » ou le fait d’avoir «glissé sur une serpillière». La victime s’exprime peu et met généralement en avant des circonstances à l’extérieur pour ne pas identifier le lieu clos dans lequel tout s’est passé en réalité. Elle porte souvent des manches longues, un col roulé, une écharpe. Elle est pressée car surveillée.

Lors de l’examen, la victime peut signaler des maladies chroniques comme des céphalées, des douleurs abdominales, des troubles du sommeil, une fatigue chronique, des addictions, des troubles de l’alimentation, des douleurs de l’ATM ou une dépression. Des études montrent que le risque de suicide de ces femmes est multiplié  par 5.

Pendant l’anamnèse, le professionnel de santé doit systématiquement poser la question : « avez-vous subi un choc, des violences?». «Je pose cette question à tous mes patients », explique Estelle Machat ajoutant que « l’expression corporelle est presque plus importante que la réponse elle-même ». Un blanc total de la victime peut être le signe de violence vécue.


Pendant l’examen clinique, le praticien pourra relever des traumatismes dentaires, des douleurs de l’ATM particulièrement quand elles sont unilatérales, des traces de brûlures ou ecchymoses sur le crâne, la nuque et le cou. Des traces peuvent aussi apparaître sur les poignets et les avant-bras que la victime aura utilisés pour se protéger le visage. Si la patiente se confie, il est recommandé au soignant d’adopter l’attitude inverse de l’agresseur et de la laisser s’exprimer, la croire, la valoriser et lui rappeler que, dans la loi, rien ne justifie les violences.

Attention à ne pas mettre la victime plus en danger qu’elle ne l’est déjà dans le cas ou l’agresseur l’accompagne pendant la consultation ! « Gardez en tête que le moment où la victime risque le plus est celui ou elle va quitter son agresseur, d’où l’importance de l’orienter vers des associations pour qu’elle bénéficie d’un accompagnement », prévient Estelle Machat. Il est donc recommandé de prévoir des lieux où l’adresser, des associations de victimes ou des services de victimologie. Le service téléphonique national gratuit 3039 destiné aux victimes et aux témoins de violences conjugales est à rappeler en expliquant que les appels non tracés n’apparaîtront donc pas sur les factures de téléphone.

L’enquête sur la violence au cabinet dentaire est à retrouver dans la revue Clinic de mars 2019 ! Pour accéder au sommaire en ligne : cliquez ici.


Anne-Chantal de Divonne

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Les dernières réactions

  • 17/03/2019 à 07:12
    Bouba8056
    alerter
    Merci

    Dentiste ayant été victime en tant que femme et s étant formé en juridique medical psy social victimilogue emprise etc à mon modeste niveau

    Merci Bravo

    on peut ensemble s améliorer


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