Au service de mon pays et de ses princes - Clinic n° 08 du 01/09/2010
 

Clinic n° 08 du 01/09/2010

 

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PASSIONS

Philippe Pirnay  

Monégasque passionné par son pays, Bernard Marquet s’est lancé dans la politique : il siège au Parlement et au Conseil de l’Europe* depuis 2004. Décoré de l’ordre de Saint-Charles, la plus importante distinction monégasque, il s’intéresse particulièrement aux dossiers concernant la culture, le patrimoine, les questions sociales et l’art de vivre à Monaco.

Pourquoi êtes-vous si engagé pour la principauté ?

Je me suis toujours intéressé à la vie de mon pays. Ma famille est arrivée quand les papes se sont installés en Avignon ; elle a toujours servi notre pays et ses princes. Pour survivre, les Monégasques ont conscience qu’ils doivent tous jouer un rôle. Si j’avais été un grand sportif, j’aurais été fier de porter les couleurs de Monaco. Mais chacun doit utiliser ses propres compétences !

Vivez-vous la politique comme une passion ?

Je n’ai pas l’impression de faire de la politique… Je veux simplement mettre mon bon sens au service de mon pays. Monaco est un petit pays cosmopolite, avec un mélange subtil de respect des traditions politiques, sociales et religieuses. Mon premier souci est de transmettre aux enfants notre histoire, notre culture, notre particularisme, et de maintenir une cohésion sociale et un niveau d’excellence.

Pourquoi vous êtes-vous présenté aux élections au Conseil national de Monaco ?

Notre parlement a acquis un rôle plus démocratique qu’avant, depuis que le prince Rainier III a fait adhérer la principauté au Conseil de l’Europe en 2002. Dans ce nouveau cadre, avec toute une équipe de quadragénaires, nous avons voulu apporter des changements pour Monaco. J’ai pensé qu’il fallait rendre à mon pays ce qu’il m’avait donné.

Quelle a été votre action au Conseil national ?

Après 4 ans d’une vice-présidence très dense, j’ai rejoint la commission culture et patrimoine dont je suis le président. Quand on parle de Monaco, il est d’abord question de sécurité, ensuite de climat, puis d’offre culturelle. Nous avons des expositions, un opéra et un ballet de qualité. Nous voulons réaliser des choses exceptionnelles, comme le Grand Prix de Monaco. Pour attirer les touristes, Monaco a décidé de créer un événement international une fois par mois ; il y en a 1 500 par an et la culture n’est jamais loin… D’ailleurs, 10 % du budget de la principauté sont utilisés pour la culture. La richesse culturelle se retrouve aussi dans l’annuaire des artistes de Monaco que nous avons créé et qui présente tous les créateurs mais aussi toutes les académies et associations artistiques de la danse, du chant, de l’opéra. Et puis, Monaco n’est pas habité que par des résidents riches : il y a une mixité, un brassage de population. Nous faisons en sorte que tout le monde puisse bénéficier des équipements sportifs et des animations culturelles de haut niveau.

Avez-vous un grand projet culturel en cours ?

Oui. Aujourd’hui, nous n’avons pas d’archives nationales. Il n’existe que celles du Palais et celles du ministère d’État. Certains documents concernant notre pays ne se trouvent qu’au Quai d’Orsay à Paris. Or, pour survivre, notre pays doit être créatif et pouvoir transmettre son histoire et son patrimoine aux générations futures. C’est pourquoi je vais faire une proposition de loi pour la création d’archives nationales.

Est-il facile de représenter un petit pays dans diverses instances internationales ?

Ce n’est pas toujours un inconvénient et parfois les choses passent mieux. Par exemple, mes deux rapports sur la contrefaçon des médicaments ont abouti à une convention internationale : Medicrime. Monaco n’ayant pas une grande industrie pharmaceutique, il nous était plus facile de faire passer des idées qu’un pays plus impliqué dans cette industrie. Cette position de petit pays nous permet aussi de parler à tous les protagonistes d’un conflit sans qu’ils ressentent que nous avons un intérêt en faveur de l’un ou l’autre. C’est le cas, par exemple, du conflit israélo-palestinien.

Ce sont là des particularités d’un homme politique monégasque ?

Oui, mais il y en a d’autres ! L’homme politique monégasque doit avoir un métier en parallèle car il ne perçoit que des indemnités de représentation qui ne donnent droit ni à l’assurance sociale ni à la retraite. Et il n’a pas d’attaché parlementaire. La conséquence, c’est que je ne peux malheureusement traiter à fond qu’un nombre restreint de dossiers. Mais l’important est d’aller à l’essentiel et d’être tourné vers les autres car Monaco a une tradition d’accueil et de respect des étrangers. C’est un État très humaniste dans lequel le respect de l’autre est très important. On sait peu qu’un prince de Monaco a été à l’origine de la création de l’Organisation des Nations unies ! Ce sont aussi nos princes qui ont été les premiers à élever leur voix pour le respect de l’environnement. Au-delà de mon plaisir personnel à rencontrer des gens passionnants, de tous bords et de tous pays, il est enthousiasmant de porter des projets qui peuvent fédérer par-delà nos frontières.

Avez-vous pensé à cesser votre exercice dentaire pour vous consacrer exclusivement à Monaco ?

C’est et ce sera une question d’opportunité.

* Bernard Marquet est vice-président de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille pour Monaco au Conseil de l’Europe et membre de la commission bioéthique.

Quelles répercussions au quotidien ?

J’exerce au cabinet du lundi au jeudi, de 8 heures à 17 heures. Ensuite, je suis en réunion quasiment tous les jours ouvrés de 17 heures à 20 h 30… et parfois aussi le week-end. En période de budget, nous avons une dizaine de réunions de 17 heures à minuit. Pour le Conseil de l’Europe, je limite mes déplacements à une cinquantaine par an.