Application clinique de la caméra Condor® : réalisation d’un onlay céramique - Clinic n° 12 du 01/12/2017
 

Clinic n° 12 du 01/12/2017

 

CFAO

Bruno PELISSIER*   Kévin BOUCHIHA**   Caryl DJABARI***   Dorian BONNAFOUS****   Julien ROCHE*****   Sabine CASERTA******   Élisabeth DURET*******   François DURET********  


*UFR d’odontologie, Montpellier
**MCU-PH
Service OCE
***UFR d’odontologie, Montpellier
****Interne en médecine bucco-dentaire
*****UFR d’odontologie, Montpellier
******Interne en médecine bucco-dentaire
*******UFR d’odontologie, Montpellier
********AHU
Service OCE
*********UFR d’odontologie, Montpellier
**********AHU
Service OCE
***********Château de Tarailhan - 11560 Fleury d’Aude
************Château de Tarailhan - 11560 Fleury d’Aude
*************Château de Tarailhan - 11560 Fleury d’Aude

Cet article a pour but de montrer l’apport de l’empreinte optique dans la réalisation des restaurations partielles collées. À travers un cas clinique, les différentes étapes de la réalisation (préparation, empreinte optique et collage) d’un onlay cosmétique seront présentées, complétées par des tableaux résumant les points importants nécessaires à la pérennité des restaurations indirectes avec prise d’empreinte optique [1-4].

Un jeune patient se présente au Centre de soins et de recherches dentaires de Montpellier pour une fracture de la face vestibulaire de sa molaire supérieure gauche (26). Sa dent présente un amalgame volumineux inesthétique et inadapté avec des marges et des limites défaillantes. Le patient ne présente pas de douleurs et, à la radiographie, aucune reprise carieuse n’est visible (fig. 1).

Après dépose de l’amalgame sous digue, aucune lésion carieuse n’est présente. La perte de substance est importante et les épaisseurs des parois résiduelles sont faibles avec perte des crêtes marginales (fig. 2). L’indication d’un onlay en céramique peut être confirmée et il est donc proposé au patient pour remplacer l’amalgame et pour pallier la fracture vestibulaire.

Un composite flow avec IDS (immediate dentin sealing) est réalisé pour éviter les sensibilités postopératoires en interséance et pour faciliter la mise en forme de la préparation (fig. 3 à 5) [5, 6]. Cet onlay sera modélisé et réalisé à partir d’une empreinte optique avec la nouvelle caméra Condor®. Après modélisation, un onlay sera usiné et sera en matériau e.max® (Ivoclar Vivadent), qui présente une très bonne résistance à la fracture et une usure identique à celle des dents antagonistes avec des propriétés optiques excellentes et différentes opacités. L’usinage permet aussi d’avoir un matériau homogène, sans porosité, avec une bonne aptitude au polissage, un maquillage de surface étant réalisé dans un second temps.

Description de la caméra Condor®

La caméra Condor® [7-9] est petite : elle a la taille d’un contre-angle (fig. 6). Elle se caractérise par la présence de deux caméras à son extrémité. Elle est donc très similaire aux caméras vidéo 2D actuelles, à cette différence près qu’elle fournit une image 3D renfermant les mesures des objets qu’elle observe. Cela lui permet d’être non seulement un instrument de visualisation diagnostique grâce à la couleur et à la qualité des images mais aussi un scanner d’empreinte optique.

C’est un système totalement ouvert qui permet d’adresser des fichiers PLY et STL à tous les systèmes de conception assistée par ordinateur (CAO) dans la mesure où ils sont eux-mêmes ouverts.

Il est intéressant d’avoir un système capable d’envoyer dans tout laboratoire équipé d’appareils de conception et fabrication assistées par ordinateur (CFAO) un fichier que le prothésiste est en mesure d’utiliser avec les appareils équipant son laboratoire mais aussi un fichier pouvant être incorporé dans une chaîne de télémédecine. C’est l’objectif ambitieux qu’a atteint ce petit scanner endobuccal.

La nouvelle caméra Condor® a tourné le dos à la technologie éprouvée de projection de trames non seulement car celle-ci est chère mais aussi parce qu’elle obligeait souvent à poudrer les dents, privant de l’analyse de la vision en couleur et, enfin, parce qu’elle rendait les scanners complexes, peu évolutifs et fragiles. C’est dans l’image elle-même que les informations nécessaires aux relevés de cotes ont été trouvées par la caméra Condor®.

On mesure l’objet lui-même, tel qu’il est vu dans ses microdétails. Ce point est très important car la couleur permet de débusquer les détails nécessaires à sa reconnaissance. Les deux caméras font le reste. La méthode stéréoscopique embarquée et dynamique par balayage permet le relevé des cotes et l’épuration des informations mais s’appuie aussi sur des calculs et des filtres complexes qu’Aabam a mis plus de 8 ans à élaborer. Il s’agit d’appliquer, sous une forme spécialisée et médicalisée, les relevés topographiques tels qu’ils sont mis en œuvre par les caméras embarquées dans les satellites, nouveauté et exclusivité dans le monde de la CFAO dentaire. Condor® appuie ses softwares (logiciels), donc ses mesures, sur des techniques stéréoscopiques pures en relevant ses informations dans le milieu buccal sans projection de lumière.

Pour ce qui est de la partie hardware (l’électronique et la miniaturisation de ses composants), il s’agit principalement de celle qui accompagne la téléphonie mobile, et cela a permis à Aabam de construire un scanner compact, précis et léger (qu’il a fallu alourdir artificiellement), très pratique en clinique pour la prise d’empreintes optiques [8, 9].

L’ordinateur proposé aujourd’hui est un portable MSI car il offre de hautes performances de calcul grâce à son processeur Intel® Core™ Quad et un parfait confort visuel grâce à la puissance de sa carte graphique et à la retransmission visuelle sur son grand écran 17.3’’ full HD. Ce modèle dispose à la fois d’une vitesse et d’une capacité de stockage importantes. Il est disponible avec un clavier personnalisable suivant le pays de destination (Azerty ou Qwerty).

Quelle que soit la caméra optique, il est très important d’avoir une importante phase d’apprentissage pour bien cibler les problèmes et, surtout, être en phase avec la technologie. Tous les praticiens utilisant une caméra sont unanimement d’accord sur l’importance de la préparation. Les limites doivent être visibles.

L’interface homme/machine (IHM)  –appelée couramment menu–  se compose des menus classiques demandant les noms du dentiste, du prothésiste et du patient comme pour tous les logiciels de gestion. Vient ensuite la détermination du type de prothèse. Ce tableau étant rempli, il suffit alors de cliquer sur la flèche en bas et à droite pour lancer la caméra. Après la manipulation initiale, un écran divisé en deux parties se présente. À gauche, on a une vue directe de la caméra de visualisation et, à droite, la construction 3D en temps réel, élaborée au cours de la prise d’empreinte. Lorsque l’empreinte de la première arcade est terminée, un calcul permet d’avoir la vue de l’empreinte réalisée dans toute sa précision, image 3D sur laquelle on peut zoomer pour observer les détails. Cette fonction rend caduques les caméras vidéo 2D dans la mesure où il est possible de tourner la vue dans tous les sens pour mettre en évidence des zones nécessitant des soins.

Réalisation de l’empreinte optique de l’onlay avec la caméra Condor®

Pour réaliser l’empreinte optique avec la caméra Condor®, on commence par l’arcade supérieure où se situe la préparation de l’onlay (fig. 7). Un cordonnet de rétraction gingivale a été inséré pour avoir des limites bien définies et visibles, nécessaires à l’obtention d’une empreinte optique de qualité. Un balayage continu est fait de façon régulière et sans s’attarder sur les faces occlusales, vestibulaires et palatines. Il est préférable de le suivre sur l’écran de gauche. Une fois l’empreinte validée à l’écran, on passe à l’arcade inférieure avec la même méthode. Enfin, une empreinte optique est prise en balayant les arcades en occlusion. Les dimensions de la caméra Condor® facilitent cette opération (fig. 8 à 17).

CFAO

Une fois les empreintes validées, les fichiers sont envoyés au prothésiste pour la modélisation et la réalisation de l’onlay cosmétique par usinage (fig. 18 à 20).

Un essayage de l’onlay usiné par CFAO et non maquillé est réalisé en bouche (figure 21). Les limites et l’ajustage montrent des résultats très corrects. L’occlusion peut aussi être contrôlée et légèrement modifiée (petite surocclusion distale) car le matériau a des caractéristiques mécaniques intéressantes, l’épaisseur de la céramique étant importante. Grâce à l’empreinte optique réalisée avec la caméra Condor®, on peut obtenir une restauration cliniquement correcte.

Assemblage de l’onlay en céramique

Les figures 22 à 34 illustrent cette étape.

RÉSUMÉ DE LA RÉALISATION CLINIQUE

1. Analyse du cas et radiographie rétroalvéolaire pour évaluer les pertes de substance et d’éventuelles lésions carieuses

2. Tests de vitalité pulpaire

3. Réalisation de l’anesthésie

4. Choix de la teinte

5. Contrôle des points occlusaux

6. Pose d’un champ opératoire

7. Retrait de l’ancien amalgame et réévaluation des pertes de substance

8. Hybridation immédiate : application du système adhésif et photopolymérisation

9. Application d’une couche fine de composite fluide et photopolymérisation

10. Finition des limites et polissage

11. Retrait du champ opératoire

12. Empreinte optique

13. Obturation temporaire

RÉUSSIR UNE EMPREINTE OPTIQUE

1. Phase d’apprentissage importante pour bien maîtriser la prise en main de la caméra

2. Connaître les limites des empreintes optiques (situations des limites et cas complexes)

3. Importance de la préparation : les limites doivent être bien visibles et supra-gingivales (faire une remontée de marge en fonction) : la caméra n’est pas un microscope et ne devinera pas des pseudo-limites et des préparations mal conçues. On ne mesure que la préparation elle-même, telle qu’elle est vue dans ses microdétails, pas plus !

4. Importance de la manipulation clinique et de la technologie (système ouvert ou fermé)

5. Choix de la caméra n’intervenant qu’après ces points importants

COLLAGE DE L’ONLAY EN CÉRAMIQUE

1. Essayage de l’onlay après dépose de la temporisation

2. Mise en place de la digue

3. Nettoyage de la préparation

4. Mordançage à l’acide fluorhydrique de l’intrados de l’onlay puis nettoyage aux ultrasons

5. Silane

6. Adhésif dans l’intrados

7. Conditionnement de la préparation

8. Composite de collage dans l’intrados de la restauration

9. Mise en place de l’onlay et élimination des excès en maintenant fermement la restauration

10. Photopolymérisation

11. Retrait du champ opératoire

12. Contrôle de l’occlusion

13. Finitions

Remerciements à Michel Bastide, prothésiste (laboratoire Le Lab, Castelnau-le-Lez).

Bibliographie

  • [1] Dahan L, Raux F. Pourquoi et quand faire un inlay-onlay ? Inf Dent 2010;34:19-22.
  • [2] Dietschi D, Spreafico R. Restaurations esthétiques collées composites et céramiques dans les traitements esthétiques des dents postérieures. Paris : Quintessence international, 1997.
  • [3] Étienne O, Toledano C. Les inlays/onlays esthétiques : procédures cliniques. Clinic 2009;30: 369-378.
  • [4] Raux F, Dahan L. Comment faire un inlay-onlay esthétique ? Inf Dent 2011;7:14-23.
  • [5] Keeling A, Wu J, Ferrari M. Confounding factors affecting the marginal quality of an intra-oral scan. J Dent 2017;59:33-40.
  • [6] Magne P. Immediate dentin sealing: a fundamental procedure for indirect bonded restorations. J Esthet Restor Dent 2005;17:144-154.
  • [7] Duret F, Pelissier B. How do intra-oral scanners really work ? Dent Tech 2012;96/97:45-52.
  • [8] Pelissier B, Rey P, Duret E. La caméra optique Condor : un outil clinique indispensable. Le fil dentaire 2017;125:18-21.
  • [9] Querbes O, Pelissier B, Querbes V, Duret F. Apport clinique d’une nouvelle caméra optique : la Condor. Clinic 2015;36:15-20.
  • [10] Dietschi D, Spreafico R. Evidence-based concepts and procedures for bonded inlays and onlays. Part I. Historical perspectives and clinical rationale for a biosubstitutive approach. Int J Esthet Dent 2015;10:210-227.