Succession : ce qu'il faut savoir - Clinic n° 10 du 01/11/2009
 

Clinic n° 10 du 01/11/2009

 

TRANSMISSION

GÉRER

PATRIMOINE

Robert GROSSELIN  

contact@grosselin-ega.fr

En moins de 10 ans, les réformes du Code civil et de la fiscalité ont bouleversé, dans le bon sens, les usages de la transmission du patrimoine. État des lieux synthétique.

Jusqu'en 2001, seuls les enfants (descendants) étaient héritiers réservataires, c'est-à-dire incontournables. Depuis 2001, le conjoint survivant est héritier, y compris sans l'existence d'une donation au dernier vivant, celle-ci ne faisant, le cas échéant, que compléter ses droits qui sont en compétition avec ceux des descendants.

En 2007, la devenue fameuse loi TEPA (en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat) a considérablement modifié le coût des droits de succession avec pour effet de tendre vers une exonération de plus de 95 % des successions. Avec des donations préalables au décès (souvent circonscrites à la nue-propriété de biens immobiliers ou de parts de société) et une fraction significative de sa fortune en assurance-vie, on peut transmettre en franchise d'impôt la quasi-totalité de son patrimoine. L'époux survivant reçoit sans régler de droits, quel que soit le montant, et les descendants sont exonérés, chacun, sur près de 160 000 E, montant qui correspond en outre à l'enveloppe exonérée en cas de donation (par donataire) ; ces donations non fiscalisées pouvant s'effectuer tous les 6 ans.

Entre ces deux réformes - le Code civil et la loi fiscale TEPA -, il faut mentionner la réforme du divorce en 2004, parce qu'elle a eu pour effet de supprimer la révocabilité des donations entre époux. Donner c'est donner. Or, il n'est pas rare, en particulier chez les chirurgiens-dentistes mariés sous le régime de la séparation de biens, qu'un époux réalise des donations au profit de son conjoint, en cours de vie, pour équilibrer le patrimoine entre eux et optimiser sa transmission aux enfants. Le divorce fait plus de victimes que le virus H1N1, il faut le savoir.

La loi accorde au conjoint survivant le choix de recevoir la totalité de la succession en usufruit, les enfants devenant nus-propriétaires et n'ayant la véritable disponibilité de leur héritage qu'au décès de leur second parent. On comprend l'importance de l'assurance-vie, au profit des enfants, pour compenser ce choix qui peut être préjudiciable, en particulier lorsque le survivant a une longue espérance de vie. L'alternative est, pour le conjoint survivant, de prendre le quart en pleine propriété, choix que nous conseillons lorsque le survivant veut vivre son patrimoine de façon autonome.

En présence d'au moins un enfant d'un lit précédent, le conjoint survivant n'a pas de choix et reçoit un quart en pleine propriété, sauf testament augmentant (de façon encadrée) sa part, les montants transmis par l'assurance-vie n'interférant pas dans ces quotas.

Le Code civil dispose qu'une fraction de la fortune du défunt peut être attribuée à sa convenance, à charge pour le légataire de régler des droits de succession dont le barème dépend des liens de parenté. Ainsi, un concubin non pacsé réglera 60 % de droits, un neveu 55 %. Cette fraction se dénomme la quotité disponible.

La fiscalité incitative aux donations encourage la démarche avant les 65 ans, 70 ans et 80 ans du donateur. Selon les dispositions prises, la donation s'effectuera sous forme de don manuel, déclaré spontanément par le donataire aux services fiscaux, sans frais de formalités ou d'acte notarié. Ce dernier acte est au coeur de la compétence du notaire, celui-ci incitant, à juste titre, à recourir à la formalité de la donation-partage, y compris si elle intervient en deux temps, ou répare la faiblesse d'un acte antérieur, car elle évite que la donation ne soit « rapportée » lors du décès à la succession, ce rapport prenant en compte la valeur acquise (en plus ou en moins) pour assurer l'égalité entre les descendants.

Sauf situation particulière, on ne se soucie de la transmission de son patrimoine qu'à partir de 45 ans (l'assurance-décès couvrant auparavant les risques d'un décès prématuré) en privilégiant, à côté des actifs immobiliers, détenus en SCI s'ils sont locatifs, l'assurance-vie.

À partir de 55 ans, on développe l'assurance-vie et on peut prendre des dispositions particulières dans un document d'arbitrage de ses avoirs qui a valeur de testament. Sinon, c'est, pour l'essentiel, entre 60 et 65 ans que l'on fixe sa ligne de conduite et qu'on peut procéder aux premières donations.

Donation, succession, chacun doit prendre le temps d'y réfléchir et inciter les siens à la réflexion, en particulier ses ascendants qui n'ont pas toujours connaissance des réformes récentes.

RG

Mon conseil

Matthieu GROSSELIN, Conseil en gestion de patrimoine, cabinet EGA

Trois principes vont guider les époux soucieux d'organiser au mieux la transmission de leur patrimoine.

1. La prééminence du conjoint survivant : il est devenu héritier et, de plus, ne paye plus aucun droit de succession. Attention à ne pas trop charger sa barque au détriment des enfants !

2. L'assurance-vie, qui est hors succession, constitue, par sa clause bénéficiaire, une variable d'ajustement. Elle permet d'adapter, sans se démunir de son vivant, l'affectation de ses avoirs au sein du collège de ses héritiers mais aussi au profit de tiers non parents s'il y a lieu. Il est conseillé de disposer de plusieurs contrats d'assurance-vie et de vérifier la rédaction de la clause bénéficiaire pour optimiser l'attribution et la fiscalité des capitaux transmis.

3. Les donations sont fortement incitées par les dispositifs fiscaux, y compris entre époux et pacsés. Cela étant, malgré l'effet de mode, il est prudent d'être mesuré dans ses élans, les besoins personnels à venir pouvant être importants, en particulier au 4e âge.

Le décès de l'époux survivant étant de plus en plus tardif, il faut aussi savoir, lorsqu'il survient, qu'un héritier (descendant) peut « sauter son tour » au profit de ses propres enfants (petits-enfants). On peut ainsi transmettre son héritage aux siens sans frais fiscaux ou notariés supplémentaires.

Dans un article consacré à la SEL, vous avez recommandé de clôturer l'exercice le 30 septembre. Je n'en n'ai pas compris les avantages.

Nous incitons à retenir le 30 septembre pour trois raisons : pour mieux profiter d'avantages fiscaux, immédiats ou pour l'année suivante, le projet de loi de finances étant connu à l'automne ; pour décaler ou non l'imposition des dividendes, ceux-ci étant versés à votre convenance en fin d'année ou l'année suivante ; enfin, pour bénéficier d'un cabinet comptable plus disponible, l'automne étant sa période la moins chargée.

La réforme du statut LMP fait référence à l'ensemble des revenus d'activité. Mon épouse est retraitée de la fonction publique. Doit-on inclure ses pensions dans nos revenus ?

Malheureusement oui. Paradoxalement, l'Administration a précisé qu'elle considérait les allocations de retraite comme un revenu d'activité. Pour l'heure, pour rester dans le statut LMP, il faut donc réaliser au moins 23 000 E par an de recettes brutes, être inscrit au greffe et ne pas constater (c'est la nouvelle condition) des revenus d'activité, dont retraites du foyer fiscal, excédant 50 % de l'ensemble des revenus.

Mon assistante, âgée de 62 ans, veut continuer à travailler, ce qui ne me convient pas. Puis-je la mettre en retraite ?

Actuellement et jusqu'au 31 décembre 2009, un employeur peut mettre à la retraite son (ou sa) salarié(e) âgé(e) de 60 à 65 ans si l'intéressé(e) remplit les conditions pour percevoir une retraite à taux plein. Pour disposer de cette information, l'employeur peut obtenir communication de son relevé de carrière, le cas échéant, contre son gré.