Les feuilles de soins sur papier épinglées - Clinic n° 04 du 01/04/2010
 

Clinic n° 04 du 01/04/2010

 

COUR DES COMPTES

ACTUALITÉS

Dans son rapport annuel, la Cour des Comptes demande la fixation rapide d’une « taxe dissuasive » appliquée aux professionnels de santé qui continuent d’utiliser des feuilles de soins papier. Les magistrats saluent le succès de la télétransmission mais montrent du doigt les « trop » nombreux professionnels de santé qui restent « réfractaires ». La CNSD se rebiffe.

Le principe d’une pénalité financière à l’encontre des professionnels de santé qui ne télétransmettent pas a été introduit dans la loi HPST votée en juillet. L’Assurance maladie voudrait appliquer à partir du mois de mai une taxe qui avoisinerait 0,50 euro par feuille de soins papier. Mais déjà d’autres moyens dissuasifs sont utilisés comme dans La Manche où les médecins doivent se rendre personnellement à la caisse primaire pour se fournir en feuilles de soins pour un maximum de 3 semaines d’activité…

Dans son rapport annuel publié le 9 février et consacré au système de cartes de l’Assurance maladie, la Cour des Comptes déplore que malgré la diffusion de la Carte Vitale, l’Assurance maladie ait encore reçu 150 millions de feuilles de soins papier en 2009. Alors que, selon la CNAMTS, le coût de traitement d’une feuille de soins papier s’élève à 1,74 euros, contre 0,27 euro dans sa version électronique. La dépense évitable aurait donc été de 200 millions d’euros en 2009.

« Trop de refractaires »

La Cour des comptes se félicite du grand pas déjà accompli puisque 84 % des professionnels de santé télétransmettent. Mais elle relève une grande inégalité selon les professions et les zones d’exercice. Si 97 % des pharmaciens télétransmettent les ordonnances, « trop de professionnels de santé sont encore réfractaires » : 41 % des spécialistes, 27 % des généralistes, 24 % des chirurgiens-dentistes, 22 % des infirmiers… À Paris en particulier, 44 % des généralistes et 60 % des spécialistes s’y refusent. Une étude de la CPAM de Paris auprès de 16 médecins classe les « réfractaires » dans 7 catégories : les « insoumis / révoltés », qui affichent leur hostilité vis-à-vis d’un système perçu comme allant à l’encontre de leur éthique médicale ; les « conservateurs / traditionalistes », qui refusent l’informatique ; les « prudents », qui refusent d’être déstabilisés par une télétransmission risquant d’entraîner un remaniement de leurs outils actuels ; les « calculateurs », qui ne veulent pas investir dans un système qui (selon eux) ne leur offre ni avantages ni bénéfices ; et enfin les « débordés ». Des motifs et des disparités de refus « pour la plupart inacceptables au regard des avantages attendus pour les assurés et des économies potentielles à réaliser », note la Cour des Comptes qui demande d’imposer une contribution dissuasive aux professionnels qui ne télétransmettent pas. D’autant qu’elle estime « important » le montant des aides à la télétransmission (12 millions d’euros aux chirurgiens-dentistes en 2008).

Contre une taxation aveugle

La CNSD s’oppose à la « taxation aveugle » des feuilles de soins papier, mise en place par la loi et appuyée par la Cour des Comptes. Le syndicat explique que l’absence de télétransmission n’est bien souvent pas de la responsabilité du praticien : soit le patient n’a pas sa carte vitale (oubli, carte défectueuse…) ; soit le chirurgien-dentiste ne dispose pas de carte CPS (Carte de Professionnel de Santé). Le syndicat relève par ailleurs que le coût annuel de maintenance atteint 600 à 1 200 euros, alors que l’aide à la maintenance accordée par les caisses n’est que de 125 euros. Pas de quoi « laisser croire que les caisses subventionnent grassement les professionnels de santé sans retour » !