L’épargne salariale, reine des défiscalisations - Clinic n° 05 du 01/05/2010
 

Clinic n° 05 du 01/05/2010

 

LE BONHEUR FISCAL POUR LE PRATICIEN QUI SALARIE SON CONJOINT

GÉRER

PATRIMOINE

Robert GROSSELIN  

contact@grosselin-ega.fr

Les avantages fiscaux de l’épargne salariale ne cessent de s’accroître. Pour un chirurgien-dentiste, ils dépassent largement ce que l’on peut escompter d’un investissement Scellier. Mise à jour.

Longtemps réservée aux grandes entreprises, l’épargne salariale est venue s’installer en 2002 chez les libéraux et les petits entrepreneurs (SEL) avec pour particularité de profiter aussi à l’employeur, bien qu’il ne soit pas salarié (Clinic, juin 2002).

Le principe est de ne pas soumettre à l’impôt sur le revenu et aux charges sociales divers versements de capitaux. Certes, avec des plafonds, mais au-delà des capacités des cabinets dentaires puisqu’ils s’établissent individuellement à 2 769 € (abondement), 17 310 € (intéressement) et 25 965 € (participation), ces montants se cumulant. On peut même y ajouter 5 539 € au titre du PERCO-i, cette épargne n’étant toutefois pas disponible avant la retraite, contrairement aux précédentes.

En clair, le bonheur fiscal pour le praticien qui salarie son conjoint – son profit est ainsi maximal –, sachant qu’il est rare, sauf en fin de carrière, qu’il puisse s’offrir tous ces avantages faute de bénéfice suffisant.

L’épargne salariale dans un cabinet est mise en place à l’initiative de l’employeur et elle comprend trois étages, qui peuvent être exploités simultanément ou isolément : l’abondement est un versement effectué par l’employeur en complément de son propre versement et de celui du salarié, l’intéressement constitue une prime pouvant varier d’un salarié à l’autre au sein d’un cabinet et reposant sur la réalisation d’un objectif. Enfin, la participation est la répartition d’un excédent de bénéfice, qu’il s’agisse de celui d’une SEL ou d’un praticien en BNC. Lorsque le personnel est salarié d’une SCM, en revanche, la participation ne peut pas être effectuée puisque, par nature, la SCM ne réalise pas de bénéfice.

L’efficacité sociale et fiscale de l’épargne salariale peut s’exprimer en quelques chiffres, sachant que ceux-ci ne peuvent être qu’indicatifs du fait de la variable que constitue la taxe sur les salaires. Lorsqu’un salarié coûte 1 000 € au cabinet, il lui revient 450 €. Pour le même budget, ce seront 887 € si on utilise l’ensemble du dispositif avec, en outre, un crédit d’impôt assorti à l’intéressement. En raisonnant à l’envers, pour un gain de 1 000 € dans la poche du salarié, le coût pour le cabinet est de 2 340 €, contre 1 200 € dans le cadre de l’épargne salariale.

Toute l’épargne annuelle est bloquée pendant 5 ans seulement et peut être débloquée par anticipation en fonction de certains événements de la vie, comme le divorce, le départ à la retraite ou l’acquisition de la résidence principale. Les versements sur le PERCO-i, étant consacrés à la retraite, sont en revanche indisponibles jusqu’à cette échéance.

Pour bien comprendre ce mécanisme de l’épargne salariale, il est nécessaire de maîtriser le vocabulaire. Le plan d’épargneentreprise (PEE) est la coquille administrative, réceptacle des capitaux qui seront versés tant par l’employeur que par le salarié. Ce plan d’épargne est individuel, transférable en cas de changement d’entreprise et le choix du placement des capitaux relève du titulaire du plan et non de l’employeur. Un établissement – privé – tient le compte administratif de ces plans sans s’immiscer dans les choix de gestion du titulaire. La sélection de cet organisme et son indépendance par rapport aux propositions de placement sont essentielles. Ce PEE est devenu PEI (le « i » d’indépendant) pour des raisons réglementaires et, en particulier, pour réduire les formalités administratives initiales. Dans ce PEI, il existe trois étages, accessibles séparément mais pouvant se cumuler :

• l’abondement est une somme versée par l’employeur en pourcentage du versement volontaire effectué par le salarié, avec un plafond annuel ;

• la participation, c’est la répartition d’une fraction du bénéfice annuel distribuable, celui-ci étant à déterminer avec raison pour le praticien BNC, au contraire de la SELARL dans laquelle le résultat fiscal est clair ;

• l’intéressement, 3e étage, poursuit l’objectif de rémunérer une performance (efficacité, économie, présence…) et s’inscrit dans un plan de 3 ans.

Le produit de la participation et l’intéressement reçu par le salarié peuvent naturellement se verser dans le PEI. Il existe même, depuis 2006, un complément à l’intéressement et à la participation. Il se dénomme « dividende du travail » et permet encore d’augmenter l’enveloppe défiscalisée.

En complément du PEI ainsi décliné, le PERCO-i (qui s’est substitué au PPESV de 2002) est une enveloppe consacrée à la retraite.

Mon conseil

Matthieu GROSSELIN, gestion de patrimoine – cabinet EGA

Comme toute opération financière assortie d’avantages fiscaux très significatifs, l’épargne salariale nécessite de mener une réflexion méthodique sur l’objectif poursuivi (optimisation des ressources des salariés ou de l’employeur) et sur les modalités de son application (budget, engagement pluriannuel, égalitaire ou différencié…). La mise en œuvre étant complexe, il faut s’en remettre à un interlocuteur à la compétence éprouvée du secteur des professions indépendantes, plutôt conseil en gestion de patrimoine que banquier. Il faut aussi s’assurer que l’établissement teneur du compte détient de l’antériorité et gère un volume significatif de plans (plusieurs centaines de milliers) et que le choix d’OPCVM (placement des capitaux) ne relève pas d’une société unique de gestion (architecture ouverte).

Si l’abondement est habituellement systématique, on préférera ajouter la participation avant de mettre en place un accord d’intéressement dont les caractéristiques sont délicates à déterminer, d’autant que la participation peut bénéficier d’une année de rétroactivité et ainsi porter sur un exercice clos.

La situation idéale est celle du cabinet où il y a une seule salariée et – ou seulement – le conjoint du praticien. L’enrichissement en quelques années est significatif. Attention toutefois aux plafonnements des avantages, en prenant en compte les cotisations Madelin du titulaire et le salaire annuel brut de la salariée.