Stress et anxiété… - Clinic n° 04 du 01/04/2011
 

Clinic n° 04 du 01/04/2011

 

RÉPONSE D’EXPERT

Philippe CASAMAJOR  

Docteur en chirurgie dentaire
MCU-PH chirurgie buccale et médecine buccale
UFR d’odontologie,
université Denis-Diderot (Paris 7)

La nouvelle législation autorisant la pratique de la sédation consciente dans les cabinets dentaires nous a permis de nous rappeler que certains patients, anxieux, stressés, phobiques ou affectés par certaines pathologies neurologiques, ont besoin de soins dentaires et peuvent être soignés avec plus de confort pour eux et pour l’équipe soignante. Sans MEOPA (mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote), il existe des médicaments traditionnels, anxiolytiques et sédatifs divers, qui peuvent être utilisés avec efficacité. Les connaissez-vous ? Les prescrivez-vous ?

Qu’est-ce que l’anxiété, le stress, la phobie et l’angoisse ?

L’anxiété est un trouble émotionnel qui se manifeste par un sentiment d’appréhension, s’accompagnant d’un état de malaise, d’agitation, de désarroi. Il s’agit d’un trouble psychique se caractérisant par la crainte de survenue d’un danger réel ou imaginaire. Elle ne doit pas être confondue avec l’angoisse qui est un sentiment d’appréhension et de profonde inquiétude.

L’angoisse peut ainsi être définie comme une sensation d’oppression de l’être accompagnée d’une peur ou d’une crainte. C’est une grande inquiétude déclenchée par certaines situations et/ou certains événements. Il s’agit d’un trouble émotionnel se caractérisant par une sorte d’insécurité qui doit être sérieusement prise en charge au-delà d’un niveau supportable où l’individu ne peut plus contrôler son angoisse.

La phobie est une crise d’angoisse déclenchée par un objet, un animal ou une situation spécifique. C’est une peur irraisonnée, instinctive et obsédante. Cette angoisse spécifique, déclenchée par un objet ou une situation n’ayant pas en eux-mêmes un caractère dangereux, disparaît en dehors de l’objet ou de la situation, ce qui entraîne des conduites d’évitement caractéristiques. Le malade reste conscient du caractère absurde de sa crainte mais demeure incapable de la résoudre.

Le stress est l’ensemble des réponses de l’organisme à des contraintes de l’environnement. Il s’agit de sa réaction vis-à-vis d’une contrainte, d’une épreuve, d’une pression ou d’une oppression. Ce terme désigne ainsi la réponse de l’organisme aux facteurs d’agression physiologiques et psychologiques ou aux émotions qui nécessitent une certaine adaptation. Le stress peut être positif ou négatif, favorable ou défavorable.

Quelle différence y a-t-il entre un anxiolytique et un sédatif ?

Les anxiolytiques sont des médicaments destinés à combattre les composants psychiques et somatiques de l’anxiété. Ils possèdent toujours, à des degrés divers, un effet sédatif. Ainsi, des médicaments comme les benzodiazépines ont des propriétés anxiolytiques et sédatives.

Quelles sont les différentes familles de médicaments prescrites pour le traitement de l’anxiété mineure ou majeure ?

Les médicaments anxiolytiques sont prescrits afin de soulager les symptômes d’anxiété aiguë, subaiguë ou chronique. On peut citer, dans cette famille de médicaments, différentes sous-familles qui sont :

• les benzodiazépines. Il s’agit de médicaments ayant pour propriétés des actions anxiolytique, sédative, myorelaxante, anticonvulsivante et amnésiante ;

• les carbamates. Ils ont des propriétés pharmacodynamiques assez semblables. Le rapport bénéfice/risque de ces substances est inférieur à celui des benzodiazépines ;

• les antihistaminiques. Certains antihistaminiques, de type H1, ont des propriétés sédatives bien connues (hydroxyzine) qui sont utilisées dans le traitement de certaines formes d’anxiété plutôt à court terme. D’autres médicaments sont utilisés dans le traitement des états anxieux, comme les agonistes des récepteurs sérotoninergiques aux effets légèrement différents des benzodiazépines, certains antidépresseurs et, enfin, certains bêta-bloquants. Ces médicaments ne sont pas prescrits dans notre spécialité.

Comment doit-on procéder pour prévenir une crise d’angoisse pendant un acte chirurgical majeur ?

Il faut le suspecter lors de l’interrogatoire préopératoire et instituer une médication sédative selon la situation clinique, en tenant compte des contre-indications et des précautions d’usage. Cela peut par ailleurs se réaliser en peropératoire si l’on est habilité à administrer du MEOPA.

En fonction du profil des patients, la prescription peut se réaliser de la façon suivante :

• une benzodiazépine (par exemple Valium® 10 mg) :

– 1 comprimé la veille au soir et 1 comprimé avant l’acte chirurgical,

– chez l’enfant, la dose est ramenée à 0,5 mg/kg à chaque prise ;

• un antihistaminique (par exemple Atarax® 100 mg) :

– 1 comprimé la veille au soir et 1 comprimé avant l’acte chirurgical,

– chez l’enfant, la dose est ramenée à 1 mg/kg à chaque prise.

Qu’est-ce qu’un effet paradoxal et peut-on l’éviter, notamment chez l’enfant prémédiqué avec un anxiolytique ?

Un effet paradoxal d’un médicament est un effet inverse de celui recherché. Il se produit dans 5 % des cas, le plus souvent chez le vieillard et l’enfant. Ainsi, chez ce dernier, l’administration d’un sédatif peut entraîner un état d’anxiété, de panique et d’agitation extrême. Cet effet paradoxal est variable et dépend de la susceptibilité de chaque individu.

À qui ne doit-on pas prescrire d’anxiolytiques ?

Les contre-indications des anxiolytiques sont certains états physiologiques et pathologiques qui sont :

• la grossesse et l’allaitement ;

• l’insuffisance respiratoire et l’apnée du sommeil ;

• les myasthénies ;

• l’insuffisance hépatique sévère.

Quelles sont les complications éventuelles de la prise d’anxiolytiques ?

Les anxiolytiques comportent un certain nombre d’effets indésirables qui sont :

• la somnolence ;

• l’amnésie rétrograde ;

• la sensation d’ébriété ou la perte de l’équilibre ;

• le risque de dépendance physique et psychique ;

• l’effet anticholinergique, la sécheresse buccale, la constipation, la rétention urinaire, le risque de glaucome (en cas de glaucome à angle fermé).

Ces effets sont plus ou moins importants selon la molécule prescrite et la durée de prise du médicament.

En quoi l’administration par inhalation du protoxyde d’azote peut s’avérer plus utile ou plus commode ?

La sédation par inhalation de MEOPA offre un effet sédatif et anxiolytique avec une remarquable rapidité d’action. Le pic d’activité est par ailleurs obtenu rapidement. La durée d’action est à la discrétion du praticien. Le temps de récupération est extrêmement court et on note très avantageusement l’absence d’effets post-sédatifs et l’innocuité pour le patient.

Lectures conseillées

Casamajor P, Descroix V. La prescription ciblée en odontologie. Rueil-Malmaison, CdP, 2009.