Sans plus attendre - Clinic n° 01 du 01/01/2012
 

Clinic n° 01 du 01/01/2012

 

PASSIONS

CATHERINE FAYE  

Le parcours de Denis Azoulay a quelque chose d’initiatique, entre ses 20 années d’exercice dentaire à Sainte-Foy-lès-Lyon, le cancer qui a changé le cours de sa vie et sa renaissance par l’écriture. Dans son premier roman, Mal et Fils, il interroge son histoire, ses racines.

Qu’est-ce qui a déclenché chez vous l’acte d’écrire ?

En 2005, on m’a annoncé que j’avais un cancer de l’estomac. Quelques mois plus tard, cloué au lit, je repense aux propos d’Elie Wiesel que j’ai eu la chance de rencontrer : « Quand on a à témoigner, il ne faut pas perdre de temps et écrire ». Je me suis mis à noircir des pages, et c’est une sorte d’art-thérapie qui s’est mise en place. Plus j’écrivais, plus je guérissais. Une sorte de fusion s’est installée entre l’ordinateur et moi.

Qu’est-ce qui a été le plus dur dans l’annonce de votre maladie ?

Quand j’ai appris que j’étais malade, je n’ai pas eu peur, par méconnaissance certainement. Ensuite, je me suis retrouvé sur un véritable tapis roulant de déshumanisation progressive : scanner, IRM… À partir de ce moment-là, votre corps se fond dans le corps médical, la peur monte, des heures à attendre, tout se complique. J’ai néanmoins continué à exercer jusqu’au jour de mon opération.

Vous partagiez votre cabinet dentaire avec votre épouse ?

C’est sur les bancs de la faculté d’odontologie de Lyon que j’ai rencontré ma femme. Après l’obtention de nos diplômes, nous avons passé 2 années, près de Tel-Aviv, en Israël, en pleine guerre du Golfe dans des conditions difficiles… À notre retour, après la naissance de notre premier enfant, nous nous sommes associés. Omnipraticien, je faisais un peu d’implantologie ; quant à ma femme, elle s’est orientée vers l’orthodontie.

Aujourd’hui, vous n’exercez plus…

J’ai tenté de reprendre mon activité au cabinet, mais physiquement je n’arrivais pas à remettre le pied à l’étrier. De plus, dans le libéral, c’est la loi du tout ou du rien, il n’existe pas de mi-temps thérapeutique.

Cela vous manque-t-il ?

J’ai vraiment eu du plaisir à soigner. J’avais l’impression d’écrire une histoire dans la bouche de mes patients : c’est un métier fabuleux. Et puis, à un moment donné, la fraise et la plume sont devenues une même entité.

Si vous deviez choisir entre écriture et dentisterie ?

Je n’aurais pas pu écrire à 20 ans… La première partie de ma vie a été de rencontrer les autres, à travers mon métier de chirurgien-dentiste, la seconde, d’être écrivain.

Une devise ?

Ne pas attendre. Il faut réaliser ses rêves, le plus rapidement possible.