Potentiel érosif des smoothies - Clinic n° 08 du 01/09/2015
 

Clinic n° 08 du 01/09/2015

 

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Contexte

Le rôle de l’érosion dans l’usure dentaire semble augmenter chez les enfants et les adultes. Environ un cinquième des enfants âgés de 5 ans présentent des signes d’érosion sur une ou plusieurs surfaces vestibulaires d’incisives maxillaires temporaires, avec une implication dentinaire dans 3 % des cas. Les taux d’érosion sont beaucoup plus élevés que ceux relevés il y a 10 ans.

La relation entre l’érosion dentaire et la consommation de sodas a...


Contexte

Le rôle de l’érosion dans l’usure dentaire semble augmenter chez les enfants et les adultes. Environ un cinquième des enfants âgés de 5 ans présentent des signes d’érosion sur une ou plusieurs surfaces vestibulaires d’incisives maxillaires temporaires, avec une implication dentinaire dans 3 % des cas. Les taux d’érosion sont beaucoup plus élevés que ceux relevés il y a 10 ans.

La relation entre l’érosion dentaire et la consommation de sodas a été amplement étudiée, montrant qu’une augmentation de la consommation de sodas et jus de fruits est réellement associée à une érosion dentaire. Boire des smoothies a été encouragé pour répondre à la recommandation suggérant de manger 5 fruits et légumes par jour pour diminuer le risque de certains cancers, maladies cardiaques et autres maladies chroniques. Les jus de fruits et les smoothies contiennent des vitamines, des antioxydants, des polyphénols et des fibres, en fonction des fruits qui les composent. Bien que les smoothies soient considérés comme bons pour la santé en raison de leur composition, une consommation excessive de ces boissons peut être dommageable pour les tissus dentaires, causant une érosion et une susceptibilité aux caries. Un modèle in situ a été adopté pour cette étude sur le pH et l’acidité titrable de diverses boissons et sur leurs effets érosifs.

Méthodes

Le pH inhérent de 6 smoothies disponibles dans le commerce, du Coca-Cola Light et de l’acide citrique à 0,3 % a été mesuré dans la partie in vitro de l’étude.

L’acidité titrable a été déterminée par titrage avec de l’hydroxyde de sodium (NaOH) pour atteindre un pH de 7. Ensuite, un modèle in situ a été utilisé, avec 14 volontaires portant un dispositif amovible maxillaire retenant 2 blocs d’émail. Les boissons testées étaient des smoothies Innocent et de l’acide citrique. Les participants plongeaient extra-oralement le dispositif dans la solution test désignée 5 fois par jour pendant 2 minutes et pendant 21 jours. La perte d’émail a été mesurée par profilométrie de surface et microdureté.

Résultats

Le pH inhérent des boissons était le plus faible pour le Coca-Cola Light avec 2,61 et le plus élevé pour le smoothie mangue-fruit de la passion avec 3,9 (tableau 1). L’acide citrique avait une acidité titrable relativement basse, requérant seulement 3,0 mol de NaOH pour ramener le pH à 7. Le smoothie mûre-fraise-cassis requérait 10,8 mol de NaOH pour atteindre cette même valeur, présentant l’acidité titrable la plus élevée.

Pour l’étude in situ, la perte de surface moyenne après exposition à l’acide citrique était de 28,43 µm. Après exposition à un smoothie, elle était de 2,88 µm. Le groupe acide citrique présentait un degré de perte de surface significativement plus élevé.

La longueur moyenne d’indentation et la microdureté amélaire avant l’exposition étaient respectivement de 66,01 µm et 327,65 KHN (Knoop hardness number) pour le groupe acide citrique. Pour le groupe smoothie, les valeurs de longueur moyenne d’indentation et de microdureté avant exposition étaient de 66,66 µm et 325,18 KHN respectivement. Après 21 jours d’exposition, le groupe acide citrique avait une longueur d’indentation moyenne de 130,34 µm et une microdureté moyenne de 85,22 KHN. De même, le groupe smoothie présentait des valeurs de 105,70 µm et 124,20 KHN. Les différences étaient statistiquement significatives. Le groupe acide citrique a présenté significativement plus d’érosion que le groupe smoothie.

Discussion

Les smoothies et l’acide citrique ont tous les deux un potentiel érosif des surfaces dentaires.Cependant, le smoothie en a un significativement plus faible que l’acide citrique après 21 jours d’exposition.

APPLICATION CLINIQUE

Les professionnels de la santé bucco-dentaire et les patients doivent être conscients aussi bien des effets bénéfiques que néfastes des smoothies. Leur taux élevé de vitamines, d’antioxydants et de fibres peut contribuer à la prévention des maladies mais leur consommation excessive peut avoir un effet préjudiciable sur les tissus dentaires. Pour éviter une mauvaise utilisation de ces boissons, les professionnels de la santé bucco-dentaire peuvent recommander que les patients réduisent la fréquence de contact de ces smoothies avec la surface dentaire. Cela passe aussi par la modification de certaines habitudes comme éviter de garder les boissons dans la bouche avant de les avaler. L’utilisation d’une paille pourra aussi réduire le contact avec les dents. Les patients ne devraient pas se brosser les dents immédiatement après avoir bu un smoothie. Au contraire, ils devraient attendre au moins 1 heure. Ils peuvent aussi se rincer la bouche avec de l’eau ou une solution fluorée pour neutraliser et diluer l’acide, mâcher un chewing-gum pour stimuler la sécrétion salivaire et boire le smoothie frappé.