Ensemble, c’est tout - Clinic n° 01 du 01/01/2014
 

Clinic n° 01 du 01/01/2014

 

Équipe et Espace

CATHERINE FAYE  

Dès ses débuts dans la dentisterie, Emmanuel Cohen, diplômé de la faculté dentaire de Montpellier en 1990, aspire à exercer en plein cœur de Paris. Passionné et tenace, il va réaliser son rêve. Plus encore, il réussit un pari : partager son cabinet avec son épouse. Rencontre dans un cabinet tendance.

Idéalement situé entre les grands magasins, la bibliothèque Richelieu, les jardins du Palais-Royal et la butte Montmartre, le cabinet d’Emmanuel et de Florence Cohen domine l’un des boulevards les plus empruntés de la capitale. L’immeuble haussmannien dans lequel il se niche abrite essentiellement des bureaux. Une fois passée la porte d’entrée, le patient quitte le classicisme extérieur pour pénétrer dans un univers lumineux et tendance. Côté boulevard, les deux salles de soins et la salle de chirurgie bénéficient d’une luminosité indirecte : par temps clair, l’éclat du soleil est réfléchi par les immeubles alignés de l’autre côté de l’artère. Côté cour, les fenêtres sont exposées plein ouest.

Dès l’entrée, l’atmosphère se démarque de celle d’une salle d’attente classique. Le comptoir est un bar revisité, les murs flashy et les tableaux invitent à la détente. Sur un écran de télévision, des films informatifs et explicatifs sur les soins dentaires défilent… mais dans le cabinet des époux Cohen, l’attente est brève. Leurs deux grandes salles de soins respirent la bonne humeur et le professionnalisme. Chacune est empreinte de la personnalité de celui qui y exerce. Pour Emmanuel, des tons métal, taupe, et des jeux d’éclairages divers. Au centre de sa vaste salle de soins design, un fauteuil Planmeca Sovereign marron glacé. Doté d’un système de rotation complète et d’un microscope Optomic, c’est la « Rolls » de la marque. Pas de crachoir, le patient se rend au lavabo pour se rincer, se regarder dans le miroir. Pour Florence, du violet, du rose, apaisants et féminins. Deux univers qui se marient bien. La circulation entre salles de soins, chirurgie, stérilisation, panoramique, salle de conférences et espace détente pour l’équipe est fluide, facilitée par un couloir et de nombreuses portes.

De Montpellier à Paris

L’objectif d’Emmanuel Cohen, qui a effectué ses études secondaires en Normandie, a toujours été de s’installer à Paris. De plus, Montpellier, où il étudie, est surmédicalisé. Il effectue son service militaire à l’ENORSA (École nationale des officiers de santé des armées), en tant qu’aspirant comme tout chirurgien-dentiste appelé puis il est affecté pendant une année dans la brigade de sapeurs-pompiers à Paris : « C’était de la médecine d’urgence, je faisais des gardes, j’allais sur les sites où il y avait des accidents, des incendies, j’habitais dans la caserne. C’était dur, surtout l’aspect social, c’était du Zola et ça me touchait. » Quelque temps après, pendant un cours de CES de biologie buccale, il rencontre un étudiant qui cherchait comme lui une collaboration. Ils trouvent un cabinet de 100 m2 à Noisy-le-Grand, en région parisienne : une seule pièce équipée dans laquelle ils reçoivent les patients à tour de rôle. Un an plus tard, ils installent un deuxième fauteuil. Ils exercent ensemble de 1993 à 2001. Pendant ce temps, en 1999, Emmanuel Cohen se met à l’implantologie. Leurs chemins divergent.

Le praticien décide alors de s’installer seul et achète un local commercial à 300 mètres de son ancien cabinet : « Je n’ai malheureusement pas récupéré mon investissement initial mais j’ai pu transférer ma patientèle et retrouver mon autonomie. Mon objectif restait le même : m’installer dans Paris où j’habitais. » Fidèle à son projet, il décide d’envoyer des mails à plusieurs chirurgiens-dentistes en passe d’être retraités, installés dans le 1er arrondissement parisien où il résidait. Et force le destin.

En 2005, il réalise enfin son rêve en rachetant un cabinet rue Saint-Honoré : 50 m2, deux fauteuils et une patientèle fidélisée. Le voilà en plein cœur de Paris, en face de la Comédie-Française, place André-Malraux. Au loin, l’Opéra Garnier et, dans son dos, le Louvre. Non sans mal, il jongle encore pendant 1 an entre le nouvel espace et son cabinet de Noisy-le-Grand jusqu’à ce que celui-ci soit racheté. « Ma patientèle était plus regardante sur sa santé, son état bucco-dentaire, nous avions de bons échanges. C’est là que j’ai commencé à m’équiper et à faire de la chirurgie. » Il se lance également dans le coaching personnalisé de praticiens qui souhaitaient se former, organise des journées de chirurgie en direct, conviviales, et quelques conférences annuelles*.

Son épouse va le rejoindre. « Je pensais chercher une collaboration, c’est Florence qui est venue exercer à mes côtés », se souvient-il. Diplômée de la faculté dentaire de Montrouge, après avoir revendu son propre cabinet à la naissance de leur deuxième enfant, elle est salariée dans une mutuelle 3 jours par semaine. Dix ans plus tard, elle veut racheter un cabinet, « mais Emmanuel m’a déconseillé ce choix, lourd à gérer. Il me connaît et sait comment j’aime travailler ». Dès lors, ils partagent le cabinet de poche.

Main dans la main

Vient à nouveau le temps de bouger… « Je m’étais donné 500 mètres à la ronde pour trouver un espace plus grand. J’ai mis 1 an et demi avant d’acheter notre cabinet actuel. » Le couple décide de casser murs et plafonds et de restaurer les 150 m2 dont ils disposent. La tuyauterie est répartie dans le sol, les parois sont plombées, le réseau informatique est accessible de chaque pièce, l’espace est pensé pour l’accueil des patients handicapés, les actes dans la salle de chirurgie peuvent être filmés et retransmis en direct dans la salle de formation. « Je me suis plus penché sur l’aspect technique, Emmanuel observe. Florence s’est chargée des idées pour la décoration. » Pendant 5 mois, l’un comme l’autre viennent tous les jours suivre les travaux avec trois objectifs : ergonomie, circulation, décoration. « Nous ne voulions pas que notre cabinet soit trop aseptisé ou clinique. Il est important que les patients se sentent bien et soient détendus. » L’espace devient lieu de travail, de partage et de bien-être.

Régulièrement, la porte qui sépare les deux salles de soin laisse passer l’un ou l’autre des praticiens. Une hésitation, un conseil à demander ? Ils s’en remettent l’un à l’autre. Une façon de travailler en binôme, d’échanger, de soigner le patient dans une approche globale. L’omnipratique et l’esthétique restent le terrain de Florence, plus axée sur l’orthodontie, tandis que l’implantologie et la chirurgie sont l’apanage d’Emmanuel. « Je suis sa correspondante. Il est mon correspondant », confie-t-elle. Une entraide qui ne les empêche pas de garder leur indépendance : « Emmanuel m’envoie des SMS quand il doit me dire quelque chose, nous n’avons pas les mêmes heures de pause, et puis il travaille plus que moi. »

Chaque praticien a son assistante, chacune étant formée pour pouvoir travailler avec n’importe lequel d’entre eux. « Elles peuvent donc à tour de rôle m’assister en salle de chirurgie », explique Emmanuel Cohen. L’organisation est bien rôdée. La réputation du cabinet n’étant plus à faire, il arrive que des rendez-vous soient pris de l’autre bout du monde ou de province. « Je me souviens d’un légionnaire qui était à Paris pour une semaine. Il avait pris rendez-vous par mail, je me suis débrouillé pour le soigner », raconte-t-il. Si Florence reçoit en moyenne 15 patients par jour, Emmanuel, ses soins sont consacrés consacre plus temps aux soins consacrés à l’implantologie et à 2 actes chirurgicaux quotidien… « Hormis les contrôles d’implants qui peuvent durer 15 minutes, je garde mes patients entre 1 et 3 heures s’il le faut. » Équipé d’un appareil CEREC (Ceramic Reconstruction), qui inclut photographies 3D ainsi que conception et fabrication assistées par ordinateur, le praticien peut fabriquer des couronnes et des incrustations en céramique en une seule visite.

Organisée en société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL), la structure permet de salarier Florence : « Si je veux arrêter demain, c’est possible », explique-t-elle. Pour l’heure, elle ne manque pas de projets, a écrit une thèse sur le blanchiment et suit une formation d’orthodontie exclusive au CETO (Centre d’enseignement des techniques orthodontiques et d’orthopédie dento-faciale). « Après 20 ans d’exercice, j’ai envie de faire autre chose, de travailler autrement », confie-t-elle. La philosophie de soins du cabinet étant à la prise en charge globale de la bouche du patient, l’esthétisme n’est pas laissé de côté. La bouche est un tout.

* www.icpparis.com

ON AIME !

L’hydropulseur o-link, jet dentaire à brancher sur le robinet d’un lavabo, qu’il a créé avec des amis confrères.