Dur et tendre à la fois

Vous connaissez le Super-Bond ? Si c’est le cas, vous allez tout de suite comprendre. Autrement, il vous faudra faire un petit effort pour me suivre. On pourrait dire que le BondFill est un produit dérivé de cette colle mythique qui, malgré la déferlante des nouveaux composites d’assemblage, se maintient à flot depuis des lustres grâce à quelques avantages uniques. Bref, ce nouveau matériau est fabriqué sur la même base, mais avec trois spécificités différentes : il adhère à la dentine grâce à un primer automordançant, il est chargé en particules de résine prépolymérisées qui augmentent sa résistance mécanique et il s’utilise comme produit de restauration, et non plus de collage, dans quelques situations particulières.

Une résine chargée

Si la présentation a évolué par rapport aux origines – le godet de mélange n’est plus en céramique mais en plastique avec des augettes jetables bien pratiques –, le concept reste le même : le monomère en flacon doit être activé grâce à une goutte de catalyseur contenu dans une seringue en verre équipée d’un piston à vis micrométrique. Le coffret de base contient deux flacons de poudre : l’un de teinte A2, l’autre A3,5. Une troisième teinte, pourtant bien utile, n’est proposée qu’en option. Dénommée « cervical », elle correspond à un A4,5. Si je dis utile, c’est que le produit est destiné en premier lieu à l’obturation des cavités de collet, qu’il s’agisse de caries de classe V ou d’érosions cervicales. Les érosions de toutes sortes entrent également dans son champ d’indications car ce matériau à prise purement chimique ne devient jamais aussi dur ni cassant qu’un composite. Il peut, de ce fait, mieux absorber, grâce à sa relative plasticité, les contraintes mécaniques subies par les dents. Les risques de décollement sont donc moindres qu’avec les composites si difficiles à maintenir dans ces zones. On applique sur la dent une couche de primer transparent grâce à une petite éponge fournie dans le coffret. Le liquide est très agréable à utiliser. Il mouille parfaitement les préparations et laisse, une fois séché, un film brillant clairement visible.

Modelage au pinceau

Pour placer la résine dans la cavité, on utilise un embout pointu en forme de pinceau emboîté dans son manche en aluminium. Comme avec le Super-Bond, la technique consiste à prélever un peu de poudre sur le pinceau préalablement trempé dans le monomère. La finesse de sa pointe et sa forme parfaite rendent l’opération très simple. Le matériau se modèle facilement tant qu’il est souple. La prise est assez lente : compter au moins 5 minutes à partir du moment où l’on a achevé la restauration. La teinte A3,5 est assez opaque pour masquer une dentine un peu sombre mais reste claire sur les dents très colorées. Une fois polymérisée, la résine ne semble pas extrêmement dure et se travaille un peu difficilement à la fraise diamantée. En revanche, elle se polit assez bien avec des cupules et des brossettes de lustrage. Ce produit conviendra parfaitement au traitement des personnes âgées, en particulier lorsque plusieurs restaurations contiguës doivent être envisagées. Car l’esthétique, certes très acceptable, n’est pas son point le plus fort. Le temps de travail, interminable pour une seule dent, devient beaucoup plus séduisant lorsque l’on doit en traiter 5 ou 6 à la fois. Reste une inconnue, sa pérennité en bouche notamment sa résistance à l’usure et le maintien de sa teinte dans le temps.