Quand prescrire de l’ibuprofène ? - Clinic n° 10 du 01/11/2014
 

Clinic n° 10 du 01/11/2014

 

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Contexte

L’extraction de la 3e molaire mandibulaire incluse est une intervention chirurgicale très fréquente en dentisterie. Après l’intervention, les patients présentent souvent douleur, gonflement et trismus à divers degrés. La douleur postopératoire apparaît en raison d’altérations des systèmes nerveux central et périphérique liées au traumatisme de la chirurgie. La lésion tissulaire engendre le relargage de cyclo-oxygénase 2 (COX-2), qui induit la...


Contexte

L’extraction de la 3e molaire mandibulaire incluse est une intervention chirurgicale très fréquente en dentisterie. Après l’intervention, les patients présentent souvent douleur, gonflement et trismus à divers degrés. La douleur postopératoire apparaît en raison d’altérations des systèmes nerveux central et périphérique liées au traumatisme de la chirurgie. La lésion tissulaire engendre le relargage de cyclo-oxygénase 2 (COX-2), qui induit la libération de prostaglandines. Celles-ci sensibilisent les nocicepteurs périphériques et induisent des réponses inflammatoires. Donner un analgésique en préopératoire permet au traitement antalgique de commencer avant l’intervention et de perdurer pendant la chirurgie, ce qui est censé réduire les conséquences physiologiques de la transmission nociceptive. Il a été suggéré que la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) pourrait être plus efficace en préopératoire qu’en postopératoire. Cependant, les études à ce jour sont plus axées sur les symptômes douloureux que sur l’évaluation de l’activité anti-inflammatoire des AINS.

Méthodes

L’extraction de la dent de sagesse mandibulaire incluse de 120 patients était nécessaire. En utilisant une étude en triple aveugle, randomisée, contrôlée avec placebo, les patients ont été assignés au hasard au groupe test, recevant 600 mg d’ibuprofène per os 1 heure avant l’intervention chirurgicale puis un placebo à la fin de l’opération, ou au groupe contrôle, recevant le placebo en préopératoire et l’ibuprofène en postopératoire. Une échelle visuelle analogique (EVA) et la prise ultérieure d’analgésiques, en fonction du besoin, ont été utilisées pour évaluer la douleur. Le gonflement du visage et le trismus ont été mesurés en utilisant les références standard du visage et l’ouverture maximale de la bouche.

Résultats

Cent neuf sujets ont participé à l’étude, 53 ayant reçu l’analgésique en préopératoire et 56 en postopératoire. Le pic de douleur apparaissait 6 heures après l’inter?vention, le groupe contrôle rapportant des niveaux plus élevés que le groupe test. L’intensité de la douleur était comparable dans les deux groupes. L’analyse de la chronologie de la douleur de chaque participant a révélé une différence significative juste après la chirurgie, la douleur étant moins intense pour le groupe test que pour le groupe contrôle.

Pendant les 3 jours suivants, il n’y avait aucune différence significative dans la prise de médication de secours (à la demande) entre les deux groupes. Cependant, les patients du groupe test ont eu besoin d’une dose plus élevée de métamizole (noramidopyrine). Les mesures du gonflement et du trismus n’ont montré aucune différence significative entre les deux groupes. Ni l’ibuprofène ni le métamizole (noramidopyrine) n’ont produit d’effets indésirables.

Discussion

Comme la plupart des patients nécessitant une extraction de 3e molaire mandibulaire sont traités en cabinet dentaire, il est important qu’ils reçoivent le traitement adéquat contre la douleur. Généralement, les AINS sont suffisants pour contrôler la douleur de cette intervention. La prise d’ibuprofène en préopératoire ne semblait pas offrir un avantage significatif par rapport à une prise postopératoire en termes de diminution de la douleur, du gonflement ou du trismus.

APPLICATION CLINIQUE

L’ibuprofène est rapidement absorbé, avec un pic plasmatique maximal apparaissant, dans cette étude, 32 minutes après la prise. Cela pourrait expliquer le manque de différence entre les deux groupes. De plus, tous les patients ont reçu 600 mg d’ibuprofène 8 heures après la chirurgie. S’ils n’avaient pas pris d’AINS et si on leur avait dit à la place de n’en prendre qu’en cas de besoin, les différences entre les groupes auraient pu être plus évidentes. Cependant, il apparaît que prescrire de l’ibuprofène en préopératoire ne réduit pas significativement la douleur, le gonflement du visage ou le trismus dont les patients souffrent après l’extraction de la troisième molaire mandibulaire incluse, par rapport à une médication similaire postopératoire.