Chirurgie mini-invasive parodontale - Clinic n° 07 du 01/07/2018
 

Clinic n° 07 du 01/07/2018

 

CHIRURGIE PARODONTALE

Maxime GHIGHI*   Alice GUYON**  


*AHU en parodontologie, Paris
Postgraduate Européen en parodontologie
et implantologie (Paris VII)
**AHU en chirurgie orale, Paris
***Ancienne interne de l’AP-HP

La chirurgie mini-invasive a pour but de réduire l’accès chirurgical.

Elle est pratique courante en médecine et permet d’améliorer les suites opératoires et les résultats esthétiques. L’évolution des chirurgies parodontales s’inscrit dans cette démarche de réduction de morbidité mais ces techniques restent trop peu utilisées alors qu’elles présentent, selon la littérature scientifique, de nombreux intérêts. Quels sont ces techniques, leurs indications et leurs atouts ?

Créée en 1990 en chirurgie générale [1], la chirurgie mini-invasive a pour but de réduire l’accès chirurgical sans changer la finalité de l’acte. Cette approche est largement utilisée en médecine : l’appendicectomie effectuée par abord mini-invasif (laparoscopie). Elle améliore les suites opératoires et les résultats esthétiques.

En 1995 est décrite la première chirurgie dentaire mini-invasive [2] ; elle vise à traiter des lésions intra-osseuses avec un accès chirurgical réduit. Différentes techniques mini-invasives ont été décrites dans la littérature (tableau 1).

Lambeaux mini-invasifs bilatéraux [2-4]

Indications : défaut intra-osseux isolé ≥ 2 mm de profondeur avec ou sans extension vestibulaire ou linguale du défaut.

Technique (fig. 1 et 2) pour un défaut à 3 parois :

• incision intra-sulculaire au niveau des 2 dents adjacentes à la lésion, du milieu de la face vestibulaire au milieu de la face palatine/linguale ;

• incision de préservation papillaire vestibulaire [5, 6] ;

• le décollement s’arrête sans exposer les surfaces osseuses vestibulaires et/ou linguales, la dégranulation se fait sous microscope à l’aide de mini-curettes ;

• application d’Emdogain® ;

• suture : matelassier interne horizontal e-PTFE 6.0.

Pour un défaut à 1 ou 2 murs : l’incision intra-sulculaire sera étendue du côté du défaut mais pas du côté opposé pour améliorer l’accès.

Intérêts :

• efficacité clinique (réduction significative de la profondeur de poche de 5 mm en moyenne) ;

• faible récession postopératoire ;

• réduction du temps opératoire (55 minutes) ;

• réduction des douleurs per et postopératoires ;

• sensibilité radiculaire réduite ;

• facilite l’accord des patients.

Lambeaux mini-invasifs unilatéraux [7-8]

Évolution des techniques précédentes pour maximiser les bénéfices de l’approche mini-invasive.

Indications : lésion intra-osseuse jusqu’à un tiers des faces radiculaires pouvant être traitée par abord vestibulaire.

Technique (fig. 3 et 4) :

• incision de préservation papillaire vestibulaire ;

• incision intra-sulculaire vestibulaire ne dépassant pas le milieu des faces vestibulaires des 2 dents adjacentes à la lésion ;

• dissection de la papille et refoulement en lingual ;

• dégranulation mini-invasive et application d’Emdogain® ;

• sutures 6.0 ou 7.0, point de matelassier horizontal interne.

Intérêts : obtention de résultats comparables à ceux de la technique MIST (Minimally Invasive Surgery T) avec lambeau bilatéral. On obtient donc, dans la limite des indications et compétences, les mêmes résultats en réduisant fortement la morbidité (tableau 2).

Matériaux de régénération parodontale

D’après un essai clinique randomisé de 45 patients avec suivi de 12 mois comparant M-MIST seul à M-MIST + Emdogain® et à M-MIST (Mist modifié) + xénogreffe, dans le traitement des défauts intra-osseux interdentaires isolés, il apparaît que les différents matériaux n’apportent pas de bénéfices supplémentaires, rallongent le temps et le coût de l’intervention [9-11].

Conclusion

Les techniques mini-invasives se définissent par une volonté de réduire l’étendue des incisions et du décollement. Elles permettent d’obtenir des résultats similaires, voire supérieurs à ceux des techniques conventionnelles en réduisant la morbidité, la récession postopératoire, le temps d’intervention et en favorisant l’adhésion des patients.

Ces bons résultats sont dus en partie à l’amélioration de la stabilité des tissus mous, ce qui maximise le potentiel de régénération et réduit la nécessité d’utilisation d’un biomatériau et le coût de l’intervention. Il faut garder à l’esprit le champ d’application et les indications des différentes techniques.

Il sera donc impératif de prévoir l’anatomie des défauts lors du sondage préopératoire, d’évaluer la qualité des tissus et l’anatomie de la papille interdentaire. L’approche mini-invasive doit donc être réalisée systématiquement quand les conditions cliniques le permettent, comme c’est le cas en médecine.