Harcèlement moral au cabinet - Clinic n° 11 du 01/11/2020
 

Clinic n° 11 du 01/11/2020

 

Réglementation

Philippe ROCHER  

Les conditions actuelles d'exercice sont stressantes et fatigantes pour toute l'équipe. Des tensions peuvent en résulter et parfois certains agissements peuvent être considérés comme étant du harcèlement moral. Comment se caractérise-t-il et que faire en pareille situation ?

Ne pas confondre management musclé et harcèlement

Certaines situations peuvent se rencontrer en cabinet dentaire comme : critiquer systématiquement et indûment, donner des consignes ou des instructions et ensuite en reprocher l'application, ignorer la présence d'un travailleur ou encore proférer des injures, des menaces, des médisances, des calomnies...

Sommes-nous alors en présence d'une situation de harcèlement moral ?

Définition

Le harcèlement moral désigne la répétition d'agissements, propos ou comportements qui ont pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail du salarié. Ces actions doivent être susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou encore de compromettre son avenir professionnel. Deux points sont importants, d'une part la répétition des comportements fautifs et d'autre part la dégradation des conditions de travail.

A contrario du harcèlement sexuel, les comportements fautifs évoqués doivent avoir été répétés dans le temps. La répétition est nécessaire pour la caractérisation du harcèlement moral, mais aucune notion de durée n'est définie. Ainsi, même si les comportements fautifs sont espacés dans le temps, le caractère répétitif pourra quand même être caractérisé.

D'autre part, pour la personne qui se prétend victime de harcèlement, les comportements fautifs sont susceptibles d'entraîner une dégradation de ses conditions de travail pouvant aboutir à une atteinte à ses droits et à sa dignité, une altération de sa santé physique ou mentale, ou une menace pour son évolution professionnelle. Les juges retiennent que la simple possibilité d'une dégradation des conditions de travail suffit à caractériser le harcèlement moral. Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que l'auteur du harcèlement ait délibérément souhaité nuire à la victime pour caractériser le harcèlement.

Une difficile appréciation

La question de la preuve des actes de harcèlement moral est délicate, car ces actes sont perçus avec une forte part de subjectivité de la part des travailleurs. Ce qui peut être vécu comme du harcèlement moral par l'un ne sera pas forcément vécu comme tel par un autre. La personne s'estimant harcelée doit établir des faits « précis et concordants » permettant de présumer de l'existence d'un harcèlement. Elle apporte les preuves de la réalité de ces faits concordants, mais n'a pas à prouver que ces faits soient constitutifs de harcèlement. C'est ensuite au juge de prendre en compte l'ensemble de ces éléments et dire si l'ensemble de ces faits laisse présumer d'un harcèlement moral. S'il y a présomption de harcèlement, l'employeur doit alors apporter la preuve contraire, c'est-à-dire démontrer que ces faits peuvent s'expliquer par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Sanctions

Tout travailleur ayant commis des agissements de harcèlement moral est passible de sanctions disciplinaires prises par l'employeur. Et pour la justice, le harcèlement moral est un délit puni au maximum par 2 ans de prison et 30 000 d'amende.

Références

  • Service-Public.fr, Harcèlement moral au travail, 31 mars 2020
  • Tissot Editions, Harcèlement moral : comment le caractériser et le prouver ?, 12 février 2020