Expansion de tissus mous en chirurgie pré-implantaire : à propos d’une étude prospective randomisée multicentrique - Clinic n° 04 du 01/04/2021
 

Clinic n° 04 du 01/04/2021

 

Revue de presse

Internationale

Martin GAUDINAT  

La perte osseuse alvéolaire verticale est un défi majeur en chirurgie pré-implantaire. Elle présente des problèmes liés au volume osseux mais également à la disponibilité limitée des tissus mous. Une complication fréquente des greffes verticales est la déhiscence des tissus mous menant à l’exposition du matériel greffé et à la perte de la greffe. Celle-ci serait en partie liée aux incisions de relaxation nécessaires lors du temps de fermeture. L’augmentation de tissus...


La perte osseuse alvéolaire verticale est un défi majeur en chirurgie pré-implantaire. Elle présente des problèmes liés au volume osseux mais également à la disponibilité limitée des tissus mous. Une complication fréquente des greffes verticales est la déhiscence des tissus mous menant à l’exposition du matériel greffé et à la perte de la greffe. Celle-ci serait en partie liée aux incisions de relaxation nécessaires lors du temps de fermeture. L’augmentation de tissus mous préalablement à l’apport osseux a été proposée comme une solution. Cette technique est bien établie en chirurgie reconstructive. Cette étude randomisée prospective multicentrique compare la régénération osseuse guidée (ROG) réalisée conventionnellement à une ROG réalisée après expansion des tissus mous. Les auteurs émettent l’hypothèse que la technique avancée permet une greffe plus stable et donc un résultat meilleur. Les auteurs ont cherché à évaluer l’efficacité d’un « expandeur » pour l’augmentation verticale des tissus mous, les résultats cliniques et les complications liées.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Six centres sud-coréens ont rejoint cette étude prospective. Les critères d’inclusion et d’exclusion usuels en chirurgie pré-implantaire sont rapportés. Vingt-trois patients sont répartis en 2 groupes après randomisation, un groupe contrôle ayant une intervention de ROG conventionnelle avec relaxation tissulaire à la fermeture, un groupe test ayant une ROG succédant à une expansion tissulaire de 1 mois par Expandeur autogonflable (TissueMax® Osstem) fixé par des vis d’ostéosynthèse. Les seules différences de protocole entre les groupes concernent l’emploi d’une membrane armée PTFE pour le groupe contrôle. Le critère de jugement principal est la mesure du volume de tissu mou augmenté (par caméra optique) et le volume osseux gagné (par CBCT) ; les critères de jugement secondaires sont les complications cliniques et les changements d’épaisseur de la gencive expansée (par échographie).

RÉSULTATS ET DISCUSSION

Dans le groupe test, 2 patients ont eu une sur-expansion liée à un déchirement de l’enveloppe de l’ « expandeur », sans conséquence clinique. Un patient avec des cicatrices importantes liées à une intervention préalable a eu une perforation muqueuse (traitée par le retrait de l’ « expandeur » et ROG immédiate). Dans le groupe contrôle, 2 patients ont présenté un lâchage de sutures (pris en charge avec de nouvelles sutures et sans conséquence clinique). Dans cette étude, il existe une différence statistiquement significative entre les 2 groupes concernant leur gain de tissu mou 6 mois après la ROG, que ce soit en vertical ou en horizontal. Il existe également une différence en termes de gain vertical osseux 6 mois après la ROG. Ces différences sont à la faveur du groupe expérimental. Les statistiques concernant les variations d’épaisseur des tissus expansés ne permettent pas de conclure. En s’appuyant sur leurs résultats, les auteurs discutent de l’intérêt de l’expansion au préalable afin de minimiser la quantité de résorption de matériel greffé liée à un effet stabilisateur du tissu mou gagné. Les auteurs discutent également de l’intérêt d’une chirurgie micro-invasive (gain de temps, suites plus simples). Ils évoquent la piste d’une nouvelle étude utilisant une membrane PTFE pour le groupe contrôle et le groupe test. Les difficultés de placement sur la crête de l’ « expandeur » (placement vestibulaire) ne permettent pas d’orienter majoritairement vers un gain de gencive kératinisée. Les auteurs évoquent également la nécessité d’études de suivi de ces résultats sur le long terme.

PERTINENCE CLINIQUE

Cette étude qualitative essaie d’apporter des éléments de réponse et de simplifier la question de la gestion des tissus mous en chirurgie pré-implantaire. Aujourd’hui, un apport osseux suivi d’une incision de relaxation appelle souvent un approfondissement vestibulaire plus ou moins une greffe de tissu kératinisé. Les résultats avancés sont en faveur de la méthode expérimentale ; cependant, une harmonisation dans le protocole des techniques comparées ainsi qu’une réalisation sur de plus grands édentements permettraient d’asseoir cette technique proposée. Une amélioration du placement de l’ « expandeur » sur la crête à reconstruire permettrait également de répondre à cette problématique de maintien d’un manchon kératinisé autour des réhabilitations implanto-portées.

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