Revue systématique et méta-analyse des modifications (linéaires et profilométriques) de l’architecture muqueuse péri-implantaire après augmentation des tissus mous - Clinic n° 04 du 01/04/2022
 

Clinic n° 04 du 01/04/2022

 

Revue de presse

Internationale

Martin GAUDINAT  

La thérapeutique implantaire est très fiable pour la réhabilitation d’un édentement unitaire encastré en zone antérieure. Les hauts taux de succès en termes de survie implantaire ont modifié les attentes qui se tournent aujourd’hui vers un résultat esthétique et la recherche des moyens d’amélioration et de préservation des tissus péri-implantaires durs et mous.

De nombreuses techniques d’augmentation de largeur ou de volume des tissus kératinisés existent. La...


La thérapeutique implantaire est très fiable pour la réhabilitation d’un édentement unitaire encastré en zone antérieure. Les hauts taux de succès en termes de survie implantaire ont modifié les attentes qui se tournent aujourd’hui vers un résultat esthétique et la recherche des moyens d’amélioration et de préservation des tissus péri-implantaires durs et mous.

De nombreuses techniques d’augmentation de largeur ou de volume des tissus kératinisés existent. La greffe de conjonctif enfoui, considérée comme le gold standard car ayant le recul clinique le plus long, permettrait de maintenir le volume et la stabilité du niveau moyen de la muqueuse. Le meilleur moment pour réaliser l’apport en tissus mous par rapport à la réhabilitation implantaire n’est pas encore clairement établi.

Des études antérieures ont conclu qu’il existait de faibles preuves que ces techniques augmentent l’épaisseur des tissus mous péri-implantaires. De plus, le maintien de ces apports dans le temps n’est pas non plus établi.

OBJECTIF

L’objectif de cette revue systématique était de faire une analyse complète des résultats de l’augmentation des tissus mous relatifs aux changements du niveau et de l’épaisseur de la muqueuse buccale verticale au niveau des sites d’implantation après une pose immédiate ou différée d’implants en zone esthétique.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Cette revue systématique a inclus des études jusqu’en juin 2020 sur les bases de données PubMed et Cochrane. L’index PICO a été utilisé pour cibler les études retenues ; 3 703 études ont été identifiées, 13 ont été incluses après application des critères d’éligibilité.

Les critères d’inclusion étaient les suivants :

– études rapportant les résultats de différents matériaux et le moment de la greffe chez des patients bénéficiant d’une augmentation de tissus mous péri-implantaires en zone esthétique ;

– âge supérieur à 18 ans et suivi minimal de 1 an après pose de l’implant ;

– présence d’informations détaillées vis-à-vis du changement du niveau, de l’épaisseur et du volume moyen du tissu kératinisé.

Les critères d’exclusion étaient les suivants :

– essais cliniques randomisés incluant moins de 10 patients ou séries prospectives incluant moins de 30 patients ;

– rapports de cas, études rétrospectives, avis d’experts, résumés de conférences, lettres à l’éditeur ou revues systématiques.

Deux relecteurs indépendants ont extrait et analysé les données pour réaliser les statistiques et bâtir leur analyse. Deux autres relecteurs indépendants ont classé les différentes études selon le risque de biais en trois catégories.

RÉSULTATS ET DISCUSSION

Dans le cas de la pose immédiate de l’implant, la différence moyenne pour la hauteur de la muqueuse buccale à 1 an de suivi était de 0,34 mm, statistiquement significative en faveur de l’utilisation de greffe. De plus, la différence d’épaisseur moyenne de la muqueuse à 1 an de suivi était de 0,66 mm, statistiquement significative en faveur de l’utilisation d’une greffe. Dans le cas de la pose différée de l’implant, la différence moyenne pour la hauteur de la muqueuse buccale à 1 an de suivi était de 0,17 mm, statistiquement significative en faveur de l’utilisation de greffe. Par ailleurs, la différence d’épaisseur moyenne de la muqueuse à 1 an de suivi était de 0,28 mm, non statistiquement significative.

Les changements observés sont restés stables à moyen terme. Cependant, les preuves restent insuffisantes pour recommander un moment préférable pour l’augmentation des tissus mous. De même, la préférence pour une greffe autologue ou pour un substitut ne peut être tranchée malgré une tendance pour l’autologue.

Dans le cas de la pose immédiate de l’implant, la greffe de conjonctif enfoui permet une diminution des récessions et un épaississement du parodonte. Cependant, cette greffe pourrait ne pas compenser totalement la perte de volume moyen de muqueuse causée par l’alvéolyse sous-jacente de la paroi osseuse vestibulaire liée à la pose immédiate de l’implant.

Les limites de cette méta-analyse sont principalement dues à l’hétérogénéité des designs des différentes études, notamment dans la méthode d’analyse des tissus mous. Celle-ci pourrait être standardisée au moyen d’outils digitaux.

PERTINENCE CLINIQUE

Cette méta-analyse assoit l’importance d’un geste muco-gingival en péri-implantaire, qu’il accompagne la greffe ou lui succède, sans pouvoir préciser un moment plus opportun qu’un autre. Les résultats sont en faveur de l’utilisation d’un os autogène à court terme comme matériau de comblement. Il serait intéressant de pouvoir suivre les résultats au long cours pour voir si cette tendance se confirme.

Comme souvent, cette méta-analyse est limitée dans ses conclusions du fait de l’hétérogénéité des méthodes de recueils de données. Il serait utile d’instaurer des trames instaurant des comparabilités d’études traitant de sujets similaires.