INTÉRÊTS DES IMPLANTS ZYGOMATIQUES DANS LA PRISE EN CHARGE DE L’ÉDENTÉ COMPLET - Clinic n° 06 du 01/06/2022
 

Clinic n° 06 du 01/06/2022

 

Chirurgie

Implantaire

Julien GUIOL*   Alexandre LAVENTURE**   Gwénaël RAOUL***   Ludovic LAUWERS****  


*Chirurgien maxillo-facial, Service de Chirurgie maxillo-faciale, CHU Hotel-Dieu, Nantes. Exercice libéral, Quimper.
**Chirurgien oral. Exercice libéral, Nantes.
***Chirurgien maxillo-facial, PU-PH, Service de Chirurgie maxillo-faciale, CHU Lille.
****Chirurgien oral, PH, Service de Chirurgie maxillo-faciale, CHU Lille.

La réhabilitation fixe maxillaire d’un patient édenté ou chez lequel il est indiqué d’extraire les dents restantes peut se révéler complexe s’il existe une atrophie osseuse majeure étendue à l’ensemble du maxillaire. Dans ce cas, la pose de 6 implants conventionnels (IC) ou de 4 IC selon le concept de traitement All-on-4(r) Standard n’est pas possible. En effet, une pneumatisation importante des sinus maxillaires associée à une résorption sévère de l’os alvéolaire...


Résumé

La technique des implants zygomatiques permet de faire face à des situations d’atrophies osseuses maxillaires diverses et variées. Outre le fait d’éviter les greffes osseuses, c’est la possibilité de réaliser une mise en charge immédiate des implants qui est un atout majeur de la technique. L’évolution de la pratique chirurgicale vers un trajet extra-maxillaire permet d’éviter la majeure partie des complications sinusiennes. La chirurgie guidée apporte une aide dans le positionnement des implants. Une étude rétrospective de 86 patients opérés avec cette technique permet d’attester de son efficacité et de ses très bons taux de réussite. Le confort pour les patients est aussi un argument de choix en faveur des implants zygomatiques.

La réhabilitation fixe maxillaire d’un patient édenté ou chez lequel il est indiqué d’extraire les dents restantes peut se révéler complexe s’il existe une atrophie osseuse majeure étendue à l’ensemble du maxillaire. Dans ce cas, la pose de 6 implants conventionnels (IC) ou de 4 IC selon le concept de traitement All-on-4(r) Standard n’est pas possible. En effet, une pneumatisation importante des sinus maxillaires associée à une résorption sévère de l’os alvéolaire empêche fréquemment la pose d’implants [1].

Les implants zygomatiques (IZ) se sont révélés être une excellente alternative aux techniques de greffes osseuses conventionnelles. Depuis la description de cette technique par Brånemark en 1998 [2], de nombreuses études ont mis en évidence un taux de survie/succès implantaire et prothétique comparable à celui des IC avec peu de complications biologiques [3-5]. Un All-on-4(r) réalisé avec des IZ (All-on-4(r) Hybrid ou All-on-4(r) Double-Zygoma) cumule les mêmes avantages que ceux d’un All-on-4(r) Standard : une restauration de l’arcade complète avec seulement 4 implants et en une seule intervention associée à une mise en charge immédiate ; des suites opératoires plus simples et une durée de traitement courte par rapport aux techniques de greffes osseuses [6, 7].

Jusqu’aux années 2010 environ, les IZ étaient plutôt proposés en deuxième intention ou en cas de refus de greffes osseuses par le patient. Une des causes était l’émergence palatine liée à un trajet implantaire intra-sinusien – décrit dans les premières publications [2] – qui étaient associée à des complications infectieuses sinusiennes, à des manœuvres d’hygiène difficiles à réaliser par le patient et à une prothèse encombrante caractérisée par une surextension palatine importante.

Les techniques extra-maxillaires (aussi appelées extra-sinusiennes) ont permis de s’affranchir de ces compromis en diminuant le risque de sinusite postopératoire et en obtenant une émergence implantaire dans le couloir prothétique en regard de la crête osseuse [8, 9]. Actuellement, les IZ peuvent aisément être proposés en première intention, notamment grâce au développement de ces techniques plus récentes.

INDICATIONS

Les IZ représentent un outil permettant le plus souvent la réalisation d’un All-on-4(r). Selon le protocole établi par Maló, un All-on-4(r) Standard – pose de 4 IC avec angulation des implants distaux le long de la paroi antérolatérale des sinus maxillaires – peut être proposé en cas d’atrophie osseuse postérieure. Un All-on-4(r) Hybrid – pose d’IC au niveau du prémaxillaire et d’IZ en postérieur – peut être proposé en cas d’atrophie osseuse au niveau des secteurs bi-cuspidiens et postérieurs. Un All-on-4(r) Double-Zygoma ou Quad Zygoma – pose de 4 IZ – peut être proposé en cas d’atrophie osseuse généralisée à l’ensemble du maxillaire [8].

Un maxillaire édenté (ou qu’il est nécessaire d’édenter) associé à une atrophie osseuse étendue constitue donc l’indication la plus courante pour l’utilisation d’IZ. D’autres indications sont :

– les échecs de chirurgie pré-implantaire ou de réhabilitation implantaire ;

– les patients porteurs d’une malformation congénitale de type anodontie [10] ;

– les séquelles de fentes [11, 12] ;

– les défects maxillaires après traumatismes oro-maxillo-faciaux ou après traitement chirurgical de tumeurs bénignes ou malignes.

Dans ces situations, les IZ permettent de s’affranchir d’un lambeau libre osseux et de réaliser une mise en charge immédiate [13]. Dans certains cas, ils représentent une bonne alternative aux sinus lifts dans le cas d’un édentement partiel postérieur (avec, par exemple, la pose d’un IC en site d’une première prémolaire et d’un IZ en site d’une première molaire en vue de réaliser un bridge implanto-porté de 3 éléments).

PLANIFICATION

Le bilan préopératoire reprend les grandes lignes de celui de la prothèse complète maxillaire. La position de la ligne du sourire doit être notée. Si celle-ci est haute avec un découvrement gingival lors du sourire forcé, une résection osseuse devra être réalisée afin que la ligne de transition entre la fausse gencive prothétique et la vraie gencive ne soit pas visible lors du sourire lorsque la prothèse sera mise en place. Il peut être aussi décidé de réaliser un bridge à émergence dentaire (bridge FP-1 [14]) si on préfère éviter une résection osseuse et si l’espace prothétique le permet. L’inconvénient majeur de ce type de réhabilitation prothétique est en effet la gestion complexe des tissus mous. Elle est liée à la difficulté de maintenir les papilles interdentaires causant potentiellement l’apparition de « triangles noirs » lors du sourire.

L’utilisation d’un guide chirurgical traditionnel (prothèse amovible complète évidée en regard du couloir prothétique) permet d’optimiser le placement des émergences implantaires.

La planification chirurgicale est réalisée avec un logiciel adapté en prenant soin d’avoir la totalité des zygomas et des margelles infra-orbitaires dans les coupes de l’imagerie 3D (TDM ou CBCT grand champ). La technique extra-maxillaire doit être privilégiée dans tous les cas pour les raisons évoquées dans l’introduction.

La fiabilité des guides chirurgicaux de forage n’est pas suffisante compte tenu de la longueur des forets : une légère déviation du foret à l’entrée du guide sera augmentée au niveau du point d’impact dans le zygoma.

Des guides chirurgicaux matérialisant le début du trajet implantaire dans la région maxillaire s’avèrent intéressants. Ils permettent, dans les cas de Hybrid ou de Quad Zygoma, de donner au praticien un axe implantaire approximatif mais néanmoins très utile.

La chirurgie naviguée avec l’utilisation d’un système de navigation dynamique ne semble pas aujourd’hui adaptée. Elle ne permet que de se donner une idée de l’axe implantaire. Le site opératoire doit être contrôlé visuellement directement durant la chirurgie. La stabilité de la fraise boule et des forets lors de leur utilisation est largement moindre comparée aux IC. Cette instabilité est liée à la convexité de la zone à forer et à la force nécessaire pour y arriver.

CHIRURGIE

La chirurgie est habituellement réalisée sous anesthésie générale mais l’anesthésie locale peut être proposée par un opérateur expérimenté chez des patients compliants et éventuellement sédatés. Les avantages d’une intervention réalisée sous anesthésie générale sont :

– confort de l’opérateur et du patient ;

– possibilité de réaliser une intervention longue ;

– meilleure exposition.

Les avantages d’une intervention réalisée sous anesthésie locale sont :

– simplification de la procédure ;

– possibilité de réaliser un contrôle radiologique en peropératoire ;

– meilleure récupération ;

– lambeau d’accès moins important donc suites opératoires simples ;

– coût moindre.

Nous pensons que la technique extra-maxillaire/extra-sinusienne doit être privilégiée dans tous les cas. Le premier protocole chirurgical décrit par Brånemark [15] décrivait un ancrage bicortical (au niveau de la crête et au niveau du zygoma) associé à un trajet intra-sinusien. Il entraînait une émergence palatine qui présente plusieurs inconvénients :

– augmentation du risque de complications infectieuses sinusiennes ;

– difficultés des manœuvres d’hygiène augmentant le risque de péri-implantites puis de sinusites ;

– risques mécaniques prothétiques car les piliers implantaires sont à distance des dents et de l’application des forces masticatoires.

La technique extra-maxillaire [8] ou extra-sinusienne [9] permet d’éviter ces inconvénients en permettant une position de la tête de l’IZ dans le couloir prothétique. Elle permet également la réalisation d’une prothèse moins encombrante sans surextension palatine. Cette technique chirurgicale est associée à des taux de survie/succès implantaires et prothétiques très élevés. Elle minimise les risques de sinusite grâce à un plus faible trajet intra-sinusien. De plus, ce court trajet se trouve à distance du milieu buccal, au moment où l’implant entre dans le maxillaire avant d’entrer dans le corps de l’os zygomatique [3, 9]. Le délabrement osseux de la paroi antérieure du maxillaire est moindre avec cette technique, ce qui permet une bonne étanchéité entre le milieu buccal et le milieu sinusien. Cependant, une complication de cette technique est l’exposition vestibulaire de l’IZ. Elle est causée par une récession gingivale liée à un biotype parodontal fin ou par une mucosite ; cependant, la survenue de cette complication peut être anticipée par un lambeau de transposition du corps adipeux de la joue couvrant l’IZ et épaississant les tissus péri-implantaires [16]. À noter que l’apparition d’une déhiscence vestibulaire n’est pas préjudiciable pour la survie de l’implant. Elle n’entraîne pas de symptôme gênant pour le patient et ne compromet pas l’ostéo-intégration.

Concernant le protocole chirurgical, certains auteurs comme Maló et al. proposent d’ajouter au protocole recommandé par le fabricant l’utilisation d’une fraise conique de large diamètre [8]. Elle est montée sur une pièce à main droite et permet de réaliser une tranchée sur la face antérieure du maxillaire. Cette dernière sert de gouttière pour le passage des forets puis de l’implant. Elle permet de réaliser une fenêtre sinusienne qui doit juste permettre le passage de l’implant. La muqueuse sinusienne est ensuite soigneusement décollée et c’est à partir de ce moment que nous utilisons la fraise boule et le protocole classique. La paroi externe de l’os zygomatique est perforée, ce qui permet à l’opérateur d’évaluer l’exactitude de son trajet implantaire. La palpation de la sonde à travers la peau ou sa vue par voie endobuccale permet de s’assurer de sa distance par rapport à l’orbite. Lorsque l’intervention est réalisée sous anesthésie locale, un contrôle cone beam peut être réalisé s’il persiste un doute sur l’axe implantaire. Aucun indicateur d’axe n’est nécessaire puisque l’on voit bien en coupe axiale le défect osseux laissé par le forage. Cette situation est particulièrement intéressante lorsque l’on réalise un Quad Zygoma et que l’implant antérieur se retrouve à proximité immédiate de l’orbite. Elle est aussi intéressante si l’on place un implant unique mais très vertical, le plus souvent lorsque l’on veut qu’il émerge au niveau de la première molaire. Dans ce cas, l’apex de l’implant se positionne plus proche de l’orbite.

PROTHÈSE PROVISOIRE

Plusieurs techniques sont décrites pour passer de la phase chirurgicale à la prothèse provisoire.

Après la pose des implants, la prothèse amovible évidée – préalablement confectionnée par le prothésiste en tenant compte de la dimension verticale d’occlusion et des rapports inter-maxillaires enregistrés lors du bilan préopératoire – est solidarisée à des piliers provisoires transvissés sur les piliers multi-unit à l’aide d’une résine auto-polymérisable enregistrant également les tissus mous crestaux. L’occlusion est enregistrée à l’aide d’un mordu. Dans le cas d’un bridge à émergences dentaires, une empreinte supplémentaire de situation est réalisée à ciel ouvert à l’aide d’un polyéther afin d’optimiser l’adaptation de l’intrados prothétique sur la crête gingivale.

Un protocole différent est de réaliser une seule empreinte de situation à ciel ouvert après la pose implantaire pour la confection d’une maquette d’occlusion positionnable sur les piliers multi-unit. Dans ce cas, le patient est revu le jour même ou le lendemain pour enregistrement des rapports inter-maxillaires et détermination de la dimension verticale d’occlusion à l’aide de cette maquette en vue de réaliser la prothèse provisoire livrée à 48 ou 72 heures après la pose des implants.

COMPLICATIONS

Quelques complications notables peuvent survenir.

• La mucosite pouvant évoluer vers une péri-implantite puis vers une sinusite maxillaire [17]. La technique de pose extra-maxillaire facilite les manœuvres d’hygiène et réduit donc la survenue de ces complications.

• Les récessions des tissus mous au niveau du corps de l’IZ inhérentes à la technique extra-maxillaire[18]. La réalisation d’un lambeau de transposition du corps adipeux de la joue permet néanmoins de prévenir cette complication [16].

• La sinusite maxillaire d’origine iatrogène associée ou non à l’existence d’une communication bucco-sinusienne. Cette complication ne survient pas si la technique extra-maxillaire est bien menée, sauf en cas de perforation étendue de la membrane sinusienne.

• Les échecs d’ostéo-intégration. Les taux de survie implantaire retrouvés dans la littérature sont comparables à ceux retrouvés pour les IC [4].

• Les effractions orbitaires par perforation du plancher de l’orbite lors du passage des forets. Cette complication est en particulier associée au Quad Zygoma lors de la mise en place des IZ les plus antérieurs qui seront les plus proches de l’orbite. Une exposition adéquate du site est primordiale et permet d’éviter tout écart de trajectoire.

• Les troubles de la sensibilité au niveau du tiers moyen de la face par lésion des nerfs infra-orbitaires : paresthésie, hypoesthésie ou anesthésie, dysesthésie. Dans la plupart des cas, une hypoesthésie associée ou non à une paresthésie peut être remarquée durant quelques jours à quelques mois. Ces complications sont rares lorsque seulement 2 IZ sont posés en postérieur, le décollement des tissus lors de l’exposition étant moins important en regard des foramina infra-orbitaires.

• Douleurs, œdème : l’œdème posto-pératoire est systématique mais souvent peu corrélé à des douleurs. Une antalgie de palier I est suffisante la plupart du temps.

• Ecchymoses, hématome : surtout observés chez les patients et d’autant plus chez ceux qui bénéficient d’un traitement par antiagrégants plaquettaires ou anticoagulants.

• Les complications prothétiques habituelles rencontrées aussi après pose d’IC : dévissage du bridge, fracture prothétique, usure de la prothèse. Là encore, la technique extra-maxillaire liée au positionnement des émergences implantaires dans le couloir prothétique réduit le taux de survenue de ces complications.

Chrcanovic et al., à travers une méta-analyse de 68 publications – 4 556 implants zygomatiques posés chez 2 161 patients –, ont des taux de complications très faibles (2,4 % de sinusites, 2,0 % de mucosites/péri-implantites, 1,0 % de paresthésies) associés à un taux de survie implantaire sur 12 ans de 95,21 % [19].

La technique extra-maxillaire permet de réduire, voire d’éviter la plupart des complications biologiques infectieuses et prothétiques.

SÉRIE DE CAS

Nous rapportons une série de cas cliniques qui vise à illustrer cet article sans apporter d’éléments scientifiques.

Entre janvier 2016 et octobre 2021, 86 patients ont été opérés (29 hommes et 57 femmes) avec un âge moyen le jour de l’intervention de 63,7 ans (âge minimum de 16 ans et âge maximum de 81 ans). Sur 202 implants posés au total et nous avons réalisé 18 Quad Zygoma, 62 Hybrid Zygoma, 4 implants unitaires dans le traitement d’édentements complets, 1 implant unitaire dans le traitement d’un édentement encastré et 2 implants unilatéraux chez un patient dans le traitement d’un édentement complet.

Les indications étaient des échecs de traitements implantaires chez 15 patients, un édentement complet chez 36 patients, une situation dentaire terminale chez 70 patients et un édentement encastré de 3 dents chez un patient refusant une greffe osseuse.

Les interventions ont été réalisées sous anesthésie générale pour 61 patients et sous anesthésie locale pour 25 patients.

Une mise en charge immédiate ou précoce par un bridge complet a été réalisée chez tous les patients complètement édentés sauf deux (un des patients avait déjà un bridge complet sur des implants en place). De même, l’implant posé en édentement encastré n’a pas été mis en charge.

Quelques complications sont à noter.

• L’échec d’ostéo-intégration d’un implant chez un patient de 63 ans ayant une séquelle de fente labio-maxillo-palatine et pour lequel on avait indiqué la réalisation d’un Quad Zygoma. Lors de l’intervention, il n’y avait pas de stabilité primaire de l’implant. À la dépose de ce dernier à 4 mois, nous avons réalisé un comblement sinusien puis, 6 mois après, la pose d’un implant dentaire.

• La facture de la racine de l’arcade zygomatique chez une jeune patiente de 16 ans porteuse d’agénésies dentaires et pour laquelle on avait indiqué la réalisation d’un Quad Zygoma. Un comblement sinusien homolatéral a été réalisé dans le même temps et un implant dentaire a été posé 6 mois après. Le bridge provisoire a été mis en charge sur 3 implants.

• Un hématome palpébral important chez un patient de 72 ans.

• Un manque de stabilité primaire sur un implant chez une patiente de 59 ans ayant une séquelle de fente labio-maxillo-palatine et pour laquelle on avait indiqué la réalisation d’un Quad Zygoma. L’implant a été mis en charge. Au contrôle à 6 mois, l’implant était ostéo-intégré.

• Une hémorragie le soir de l’intervention chez un patient de 73 ans sous Xarelto (rivaroxaban) opéré d’un Quad Zygoma nécessitant une reprise chirurgicale pour hémostase.

• Une fracture d’un bloc de dents sur le bridge provisoire chez un patient de 81 ans.

• Une résorption gingivale importante dans les mois postopératoires entraînant un espace entre la gencive et le bridge chez une patiente de 69 ans. Un rebasage a été nécessaire.

• Quatre patients ont présenté à distance de l’intervention des épisodes de gonflements jugaux similaires à des cellulites débutantes au stade inflammatoire. Les traitements antibiotiques ont toujours été efficaces et aucun geste n’a été nécessaire. Cela correspond probablement à des infiltrations de bactéries autour des implants comparables à des mucosites.

• Au moins 3 patients ont présenté des récessions gingivales vestibulaires sur les implants zygomatiques malgré la réalisation d’un lambeau de boule de Bichat.

• Une patiente a eu une sinusite maxillaire aiguë bloquée nécessitant un drainage ainsi qu’une méatotomie. L’implant posé 18 mois auparavant en technique extra-maxillaire est très probablement en cause. Il sera déposé en cas de récidive infectieuse.

• Un patient a présenté une mucosite à 3 ans. Une exploration sous-gingivale de l’implant a montré que des résidus de matériaux d’empreintes (silicone light) en étaient l’origine. Ce matériau n’est plus utilisé à présent.

CAS CLINIQUES

Cas clinique n° 1

Patiente de 63 ans ayant une atrophie importante du maxillaire et souhaitant une réhabilitation maxillaire fixe (figure 1). La persistance d’os dans le prémaxillaire (figure 2) fait poser l’indication d’implants zygomatiques en technique Hybrid (figure 3). Les 2 implants zygomatiques sont posés avec une technique extra-maxillaire et sont recouverts par un lambeau de corps adipeux de la joue. Le bridge provisoire est fabriqué avec une barre coulée servant de renfort (figure 4). Il est mis en charge le lendemain et la patiente est revue à 15 jours pour vérifier les suites opératoires et l’occlusion dentaire. Elle bénéficie, lors de ce rendez-vous, d’une consultation dédiée à l’hygiène. En temps normal, la consultation d’hygiène est à part. Elle dure 45 minutes et est réalisée par une infirmière. Elle consiste à donner aux patients les objectifs de propreté et les moyens pour y arriver (brossettes, fil dentaire, brosse à dents et hydropulseur). À 6 mois, la patiente est revue pour le contrôle de l’ostéo-intégration (figures 5 à 7). Elle est ensuite adressée à son dentiste traitant pour réaliser le bridge d’usage.

Cas clinique n° 2

Il s’agit d’une patiente âgée de 44 ans, sans antécédents médico-chirurgicaux, non fumeuse, désirant une réhabilitation fixe au maxillaire après avoir bénéficié d’avulsions dentaires totales et d’une réhabilitation mandibulaire fixe par All-on-4(r).

Les examens clinique (figure 8) et radiographiques (figures 9 et 10) révèlent une atrophie osseuse généralisée à l’ensemble du maxillaire avec conservation d’un volume osseux dans le sens vertical au niveau prémaxillaire mais associée à une résorption majeure dans le sens horizontal contre-indiquant la pose d’IC. La solution du Quad Zygoma est donc retenue (figure 10).

Les 4 IZ sont posés en technique extra-maxillaire (figure 11). Un lambeau de transposition du corps adipeux de la joue est réalisé de chaque côté afin de couvrir le corps des implants.

Une empreinte de situation à ciel ouvert est réalisée après la pose implantaire pour la confection d’une maquette d’occlusion positionnable sur les piliers Multi-unit. La patiente est revue le lendemain en consultation pour enregistrement des rapports inter-maxillaires et détermination de la dimension verticale d’occlusion à l’aide de cette maquette. La livraison du bridge provisoire est effectuée le jour suivant (figures 12 à 16), associée aux éventuels réglages occlusaux. Le bridge est fabriqué en résine avec un fil de renfort métallique (figure 17). L’intrados prothétique est lisse et plat, voire convexe afin de faciliter les manœuvres d’hygiène et éviter toute rétention alimentaire.

La patiente est revue à J15 pour contrôle postopératoire. L’occlusion est recontrôlée lors de cette consultation et les manœuvres d’hygiène bucco-dentaire lui sont expliquées : passage des brossettes et du fil dentaire au niveau de l’intrados prothétique puis utilisation de la brosse à dents et de l’hydropulseur.

Un nouveau contrôle est effectué à 3 mois puis à 6 mois pour vérification de l’ostéo-intégration avant la réalisation du bridge d’usage par le prosthodontiste.

CONCLUSION

Les IZ doivent être considérés comme une solution thérapeutique totalement adaptée aux patients édentés présentant une atrophie maxillaire. Ils constituent une alternative valable aux greffes osseuses pour la réhabilitation fixe des maxillaires atrophiques édentés et peuvent être proposés en première intention.

La technique extra-maxillaire est une technique de choix pour optimiser au maximum le confort du patient vis-à-vis de sa prothèse et diminuer la survenue de complications biologiques.

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Liens d’intérêts

Julien Guiol déclare des liens d’intérêt avec NobelBiocare en tant qu’enseignant mais atteste que le contenu de cet article ne présente aucun conflit d’intérêts. Alexandre Laventure, Ludovic Lauwers et Gwénaël Raoul déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts.