Conception d'un bloc d'implantologie - Implant n° 3 du 01/09/2019
 

Implant n° 3 du 01/09/2019

 

Chirurgie implantaire

P. BONNE   I. SECKLER   M. METZ  

Un bloc opératoire doit se concevoir selon les principes suivants :

• observation des normes pour la sécurit`é de tous ;

• respect des principes d'asepsie ;

• optimisation du nettoyage ;

• ergonomie permettant un travail en conditions optimales.

L'idée directrice est de construire une salle opératoire vide sans meubles, dotée uniquement d'un fauteuil adapté à la chirurgie et d'éléments accessoires mobiles tels que table de...


Un bloc opératoire doit se concevoir selon les principes suivants :

• observation des normes pour la sécurit`é de tous ;

• respect des principes d'asepsie ;

• optimisation du nettoyage ;

• ergonomie permettant un travail en conditions optimales.

L'idée directrice est de construire une salle opératoire vide sans meubles, dotée uniquement d'un fauteuil adapté à la chirurgie et d'éléments accessoires mobiles tels que table de pont, poubelle ou sièges [fig. 1].

La porte d'accès au bloc devrait être munie d'une ouverture automatique ou d'une poignée permettant une ouverture avec le coude [fig. 2].

Les matériaux de la salle

Les murs et le plafond sont recouverts d'un revêtement lisse et peint pour faciliter le lavage. Il est conseillé d'éviter les faux plafonds à plaques avec éclairages intégrés qui sont compliqués à nettoyer.

Le sol doit idéalement être recouvert d'un revêtement type « linoléum » constitué de lés soudés à chaud octroyant une surface homogène sans joints. Au niveau de la jonction avec les murs, il doit exister une continuité sans angles, lesquels pourraient constituer des réservoirs de poussières et de germes [fig. 3].

Traitement de l'air

Un local d'omnipratique doit être pourvu d'une fenêtre qui s'ouvre ou d'un vasistas pour permettre un renouvellement de l'air un quart d'heure toutes les deux heures. Un système de renouvellement de l'air par VMC peut être intéressant dans cet esprit car il baisse la concentration des germes par dilution, mais il n'aseptise pas pour autant l'air du bloc.

Pour un usage en bloc opératoire, un traitement plus poussé est un meilleur gage de sécurité parce que nos actes nécessitent un degré d'hygiène et d'asepsie beaucoup plus strict qu'une chirurgie soustractive comme une extraction.

On peut trouver sur le marché des appareils filtrants et destructeurs de germes fonctionnant avec présence humaine (type BW60L de chez Beewair) ou des appareils diffusant un aérosol désinfectant (type Nocospray de W&H), ceux-ci étant à utiliser hors présence humaine [fig. 4].

L'unit

Les formes du fauteuil doivent être les plus épurées possibles, avec un minimum de coutures et d'aspérités qui peuvent être des réservoirs de germes.

Les commandes doivent être intégrées dans une pédale et sa base doit se limiter à une surface réduite la plus facile à nettoyer et à désinfecter possible.

L'unit doit être dépourvu de crachoir et le système d'aspiration doit se faire par un filtrage indépendant du fauteuil.

Le système d'irrigation est lui aussi extérieur au fauteuil – en général relié au moteur – et doit être à usage unique avec des dispositifs d'eau stérile [fig. 5].

Le système de vérin du fauteuil doit être constitué de parties limitées en zone de recoins qui sont des pièges à poussières. Pour les units possédants des vérins en ciseaux, les pièges à poussière sont nombreux. Dans le même esprit, les fauteuils avec un soufflet en accordéon recouvrant le vérin sont à éviter car très difficiles à entretenir.

La têtière doit faire partie intégrante du dossier pour éviter les recoins. Si ce n'est pas le cas, elle doit être amovible et pouvoir être retirée pour un nettoyage et une désinfection complète. Le scialytique doit pouvoir être facilement manipulé et nettoyé par l'assistant(e) [fig. 6].

Les sièges opérateurs doivent respecter aussi ces critères de nettoyage.

Pour toutes ces raisons, un fauteuil d'omnipratique classique n'est pas idéal pour un bloc d'implantologie [fig. 7] et il vaut mieux porter son choix sur un unit spécifique dédié à cette pratique.

Bio-nettoyage du bloc

Il est recommandé d'utiliser des aspirateurs sans poches munis de filtres HEPA. Le filtre HEPA est un filtre à air, acronyme de l'anglais « High Efficiency Particulate Air », signifiant filtre à particules aériennes à haute efficacité [fig. 8].

Le sol doit être idéalement désinfecté avec un nettoyeur vapeur du commerce type Vaporetto, équipé de lingettes lavables en machine avec des lessives bactéricides professionnelles. Par sécurité, le sol est traité ensuite par un détergent désinfectant professionnel qui ne doit pas être essuyé pour pouvoir garder son effet de rémanence désinfectant.

La plupart des produits nécessaires à la désinfection des locaux et des DM sont recommandés dans la liste positive des produits désinfectants dentaires (LPPDD) de l'ADF, disponible sur le web (rubrique Publications / Conseils en stérilisation / Grille technique d'évaluation pour la prévention des infections associées aux soins).

Les dispositifs médicaux

L'ergonomie des dispositifs médicaux nécessaires à l'intervention est elle aussi spécifique.

Si un chariot est dédié aux dispositifs liés à la chirurgie, celui-ci doit être sur roulettes pour être préparé en dehors de la salle. Mais il est préférable de ne pas amener ce chariot sur le lieu de la chirurgie. Un espace attenant est donc recommandé afin de d'y placer un éventuel meuble à roulette et/ou un meuble mural fermé.

Ce meuble contient les dispositifs médicaux sous sachets stériles et le nécessaire à l'implantologie qui doit toujours être préservé des poussières et des UV pour conserver l'état de stérilité [fig. 9].

L'arrivée du patient au bloc

L'arrivée sur le lieu d'intervention doit aussi respecter un protocole spécifique.

Le port de vêtements rétentifs de poussières et autres agents polluants (pullover) est déconseillé, de même que des chaussures.

Il est demandé de ne pas se maquiller le matin de l'intervention (pas de fond de teint, rouge à lèvres, mascara, etc.). Un bain de bouche pré-opératoire (qui élimine 70 % de la charge microbienne buccale) doit être réalisé dans un local propre et indépendant du bloc. Les barbes et moustaches sont nettoyées avec une solution antiseptique le plus minutieusement possible.

Le patient est équipé d'une blouse et d'une charlotte à usage unique ainsi que de sur-chaussures [fig. 10 et 11].

L'équipe médicale doit aussi pouvoir se préparer dans un lieu spécifique et chaque intervenant porte dans un premier temps un pyjama chirurgical jetable, la blouse stérile n'étant mise par une aide (selon un protocole précis) qu'une fois le lavage chirurgical des mains effectué. Celui-ci doit être idéalement fait en dehors du bloc. Si toutefois, pour des raisons de place, le lavabo se trouve dans le bloc, il doit être conçu spécifiquement à cet usage avec un actionnement de l'eau (froide uniquement) au coude ou à la jambe et une poubelle en aluminium sur roulettes pour l'évacuation des accessoires de nettoyage [fig. 12].

La préparation de la table opératoire

Les dispositifs médicaux sont sélectionnés à l'avance selon le type de chirurgie programmée et disposés directement sur une table chirurgicale à roulettes trans-thoracique par un(e) assistant(e) qui peut être « non stérile » [fig. 13 et 14].

Une fois le patient installé, l'assistant(e) opératoire équipé(e) « en stérile » va pouvoir disposer les DM précisément sur la table trans-thoracique [fig. 15].

Le geste opératoire peut alors être démarré [fig. 16].

Les produits à utiliser pour le nettoyage des mains

Le savon doux classique : préférez toujours la forme liquide pour une meilleure efficacité.

• Les solutions hydro alcooliques (SHA) sont recommandées par la HAS et la DGS. Il est préférable de n'utiliser que des produits professionnels car ceux vendus en grande surface ne sont pas assez efficaces du fait d'une faible teneur en alcool.

Les SHA ne présentent aucun danger contrairement aux affirmations des légendes urbaines qui les concernent. En cas de démangeaisons ou de picotements, il faut changer d'émollient (qui est responsable de ces inconvénients) en changeant de marque.

Pour pouvoir utiliser efficacement les SHA, il y a 3 critères à respecter impérativement [tableau 1] :

• Les mains doivent être propres (lavées au savon doux au préalable)

• Elles doivent être sèches (sans vernis à ongle ni french manucure)

• Elles doivent être non poudrées (évitez les gants poudrés)

Les techniques sont précisément décrites dans les fiches de la DGS (disponibles sur le site de l'ONCD ou sur la grille de prévention des infections liées aux soins de l'ADF).

Pour faciliter le traitement des mains, il est recommandé de porter des blouses à manches courtes qui dégagent les avants bras, et les mains sans bijoux (ni alliance, montre ou bracelet) avec des ongles courts sans vernis.

Pour la chirurgie implantaire, les savons chirurgicaux ne sont plus recommandés car ils favorisent les gerçures et les crevasses des mains. Ils sont trop agressifs avec la flore résidente. Lorsque celle-ci est détruite, la recolonisation des surfaces est réalisée par les germes pathogènes qui se multiplient beaucoup plus vite. Ils sont alors responsables des dermites et mycoses fréquentes avec ce type de savon.

Le savon doux liquide et la double friction remplacent avantageusement le brossage énergique au savon chirurgical (selon la DGS).

Conclusion

En s'inspirant de ces principes de préparation, le chirurgien-dentiste peut se rapprocher de la conception d'un bloc d'implantologie idéal et travailler dans des conditions de sécurité optimisées qui lui permettront de se consacrer avec toute l'attention nécessaire à son geste opératoire.