Technologie CBCT (cone beam 3D) et chirurgie guidée - Implant n° 2 du 01/05/2010
 

Implant n° 2 du 01/05/2010

 

DOSSIER CLINIQUE

Frédéric Bousquet*   Fabien Birlé**  


*DU d’implantologie Marseille 1998
Postgraduate paro-implantologie New York 2004, 2005
82, avenue d’Assas
34000 Montpellier
**DU d’implantologie Marseille 2003
Postgraduate paro-implantologie New York 2004, 2005
3, rue Camille-Dunant
74000 Annecy

La technologie cone beam 3D (CBCT : Cone Beam Computed Tomography)1 est une réelle évolution de l’imagerie préopératoire en implantologie : plus de souplesse dans l’interprétation des résultats, moins d’irradiations et plus d’efficacité, car les investigations tomographiques sont réalisées dans le cadre de la consultation d’implantologie. Le système Accurator® utilise les qualités de la technologie pour proposer une méthode directe de planification sur modèle en plâtre. Une gouttière radiologique réalisée à partir de cette planification sur modèle permet un repérage des futurs axes de forage. L’estimation précise des couloirs de forage est effectuée à l’aide de l’explorateur 3D de la machine CBCT (Promax 3D®, Planmeca). Les éventuelles rectifications d’axe sont calculées sur l’image et se font sur le modèle en plâtre en utilisant un jeu de correcteurs d’axe conçu à cet effet. La gouttière ainsi optimisée est utilisée pour la phase chirurgicale après décontamination. Le forage directeur et le forage 3 mm peuvent être ainsi guidés par tubes guides. Le forage terminal et la pose des implants sont réalisés après dépose de la gouttière. La flexibilité du protocole permet à tout moment d’effectuer des contrôles. Cette chirurgie guidée permet la mise en œuvre, avec la sécurité nécessaire, de protocoles moins invasifs. Le ratio coût/bénéfice de cette technique est plus favorable que celui des techniques reposant sur une planification indirecte et virtuelle, ce qui permet son usage courant.

La chirurgie guidée est actuellement un des défis de la chirurgie implantaire. L’objectif est d’améliorer la précision de pose afin de mieux sécuriser les forages par rapport aux obstacles anatomiques. Les études menées sur la chirurgie guidée montrent qu’une assistance au forage améliore la précision de pose [1-7] : en moyenne, 4,2° ± 1,8° (2,3° à 11,5°) d’incertitude angulaire [5, 6] avec une assistance au forage. Une pose d’implant sans assistance révèle en moyenne une incertitude angulaire de 11,2° ± 5,6° (4,1° à 25,3°). Notons que l’incertitude angulaire moyenne sans assistance au forage (11,2°) correspond pour un implant de 13 mm de longueur à une incertitude à l’apex de 2,42 mm [5].

Le gain de précision obtenu par chirurgie guidée permet en outre de sécuriser des protocoles moins invasifs. Déjà dans les années 1970 [8-10], on constatait que la rupture de la vascularisation liée à tout lambeau n’était pas sans incidence sur les tissus. La cicatrisation était déjà définie comme une adaptation tissulaire. Le fait de lever un lambeau de pleine épaisseur entraîne une ostéoclasie réactionnelle de l’os mis à nu. L’absence de lambeau (ou le mini-lambeau) et donc le maintien au maximum du périoste sur la corticale osseuse lui conservera une voie de vascularisation.

Dans la mesure où il n’est pas nécessaire de réaliser une augmentation en volume des tissus, les protocoles de chirurgie non invasive respectent au mieux le volume initial des tissus, conservant leur vascularisation, évitant souvent un résultat esthétique déficient après cicatrisation [11-14]. En outre, les suites opératoires sont réduites.

L’assistance du forage est préparée à partir de l’imagerie lors d’une planification. Actuellement, l’assistance du forage par tube guide est la technique la plus répandue : l’élaboration préopératoire d’une gouttière (stéréolithographique ou de laboratoire) incluant des tubes guides se fait à partir de l’imagerie scanner associée à un programme de planification [1-7].

À côté du guidage par tube (méthodes statiques de guidage), des techniques de navigation peropératoire ont été décrites.

• Le contrôle de l’axe du forage par tomographie peropératoire est une technique qui a conduit à concevoir une salle d’opération où il est possible d’intégrer, à la demande, la machine radiologique [15]. Antérieurement, la Transtomographie®, technique originale de tomographie conventionnelle [16], annexée au panoramique ProMax (Planmeca®) était utilisée pour ces contrôles peropératoires de l’axe du forage [15, 17]. Aujourd’hui, la machine Cone beam ProMax 3D que nous utilisons pour ces contrôles [15] possède la caractéristique remarquable de réunir les technologies du ProMax conventionnel pour réaliser, si besoin, un cliché panoramique et la technologie cone beam 3D pour des contrôles peropératoires dans les 3 dimensions (contrôles d’axe de forage ou contrôles des volumes de comblement).

• Le système de guidage du forage par trackers optiques [18, 19] permet, à partir des données d’un examen scanner et d’une planification, à l’opérateur oriente son foret directeur selon une position qui lui est indiquée sur une cible présente sur un écran de contrôle, la corrélation entre la main et l’ordinateur se faisant par l’intermédiaire d’un système complexe de capteurs et de rayons infrarouges (trackers optiques).

Toutes ces techniques de simulation associées à un guidage par tube ou à une navigation peropératoire guident le foret pour une position plus précise de l’axe implantaire. Ce qui n’est pas le cas avec les « guides » usuellement réalisés en fonction du projet prothétique qui renseignent approximativement sur le point d’émergence et ne donnent qu’une idée approximative de l’axe de forage en fonction du couloir prothétique.

TECHNOLOGIE CBCT (CONE BEAM 3D)

Pour un examen radiologique préimplantaire, la technologie CBCT (cone beam 3D) est actuellement l’outil le plus adapté [20, 21], offrant une variété de reconstructions planes ou courbes, en orientation coronale, sagittale, oblique, panoramique ainsi que des reconstructions tridimensionnelles. Elle apporte donc plus de souplesse qu’un dentascanner avec une irradiation moins importante [22]. La visualisation de coupes obliques se fait à l’aide d’un explorateur : outil qui permet de choisir son axe de coupe plus ou moins oblique. Un examen cone beam 3D réalisé avec une gouttière intégrant des tiges repères d’axe qui préfigurent l’axe des futurs forages permettra, à l’aide de l’explorateur, de visualiser les plans de coupe correspondant exactement au grand axe des tiges repères. Le module explorateur permet donc d’apprécier sur toute sa hauteur un couloir de forage estimé, quel que soit son axe (Fig. 1) (Planmeca Promax 3D® – image d’explorateur – logiciel Romexis®).

SYSTÈME ACCURATOR®

Ce système propose un kit de planification implantaire sur modèle en plâtre dans le but d’appliquer un protocole particulier de chirurgie guidée par tubes guides. Ce kit (Fig. 2) se compose de tubes guides de forage en alliage de titane dans leur boîte métallique de stérilisation, de répliques des tubes guides pour l’élaboration de la gouttière au laboratoire et de tiges blanches en plastique baryté pour la phase radiologique. Pour la préparation de la gouttière sur modèle, le kit contient également un foret adapté au forage du plâtre, un jeu de tuteurs droits, des gaines calibrées noires en acétal à usage unique qui assurent l’interface entre le tube guide et la gouttière et un jeu de correcteurs d’axe – 10 corrections possibles (Fig. 3) – qui permettent d’effectuer les corrections d’axe sur le modèle en plâtre.

DESCRIPTION DU PROTOCOLE DE PLANIFICATION IMPLANTAIRE UTILISANT LE SYSTÈME ACCURATOR®

TRAITEMENT D’UN SITE D’INCISIVE LATÉRALE SUPERIEURE (Fig. 4)

Phase de laboratoire

La situation clinique est reproduite en plâtre par empreinte. Sur le modèle en plâtre, on procède à un forage de 2 mm de diamètre : ce forage de référence est réalisé selon l’axe estimé du futur implant. Il tient compte du couloir prothétique, mais son orientation est déjà évaluée en fonction des données cliniques et du modèle (Fig. 5). On élabore sur le modèle en plâtre une gouttière (thermoformée ou en résine de laboratoire) qui servira pour les phases radiologique et chirurgicale. Le profil de la gouttière intègre le maximum de calage (appui dentaire et/ou muqueux) pour éviter toute imprécision dans le positionnement lors de l’étape radiologique et toute erreur de repositionnement lors de la phase chirurgicale. Un tuteur droit placé dans le puits foré dans le plâtre permet de solidariser un tube guide de laboratoire à la gouttière par l’intermédiaire d’une gaine en acétal (Fig. 6 et 7). Dans le cas de plusieurs sites implantaires sur la même gouttière, la solidarisation est réalisée de la même manière en une seule opération.

Examen cone beam 3D

La gouttière est préparée pour la phase radiologique : substitution dans chaque gaine acétal du tube de laboratoire par une tige radio-opaque. La gouttière est positionnée en bouche (Fig. 8). L’examen cone beam 3D et son module explorateur permet de visualiser les tiges radio-opaques selon leur grand axe et dans les trois plans (Fig. 1 et 9). Les tiges sont visibles sur l’image sans artéfact sur toute leur longueur, ce qui permet de matérialiser chaque futur couloir de forage par rapport au contour de la crête et aux obstacles anatomiques. La procédure permet d’estimer si une correction est à faire. Cette correction peut être angulaire, linéaire ou composée (Fig. 10). Dans le cas n° 1 de la figure 10, une correction d’axe de 10° en distal est à réaliser, car le sens transversal montre un couloir de pose satisfaisant.

Phase de correction d’axe

Cette correction s’effectuera sur le modèle en plâtre (Fig. 11). Un correcteur d’axe 10° est placé à la place du tuteur droit. Le tube guide de laboratoire est repositionné sur le correcteur d’axe et solidarisé à nouveau à la gouttière dans la nouvelle position par l’intermédiaire d’une nouvelle gaine acétal. Le tube guide intègre donc la correction à apporter de 10° en distal pour éviter, dans ce cas, la racine de l’incisive centrale.

Dans le cas n° 2 de la figure 10, une correction de 10° doit être effectuée en palatin en plus de la correction de 10° en distal. Dans ce cas, l’utilisation d’un correcteur d’axe de 20°, positionné selon l’axe de la bissectrice entre les deux plans (transversal et longitudinal), permet au guide d’intégrer cette correction composée.

Le système Accurator® propose un set de 12 correcteurs d’axe pour réaliser 10 types de rectifications :

– angulaires : 5°, 10°, 15°, 20° ;

– linéaires : ± 1 mm, ± 2 mm ;

– composées : 10° ± 1 mm, 10° ± 2 mm, 15° ± 1 mm, 15° ± 2 mm (Fig. 3).

Les 10 correcteurs d’axe proposés permettent de couvrir toutes les situations qui se sont présentées à l’usage.

Phase chirurgicale

La gouttière rectifiée est préparée pour la phase chirurgicale. Elle est décontaminée une fois la réplique de laboratoire enlevée, la gaine acétal restant figée dans la résine. La gouttière est reconstituée en zone stérile en insérant le tube guide stérile en titane dans la gaine acétal (Fig. 12). Deux types de tubes guides sont utilisés pendant la chirurgie : le premier pour guider le forage 2 mm est ensuite remplacé par le tube guide pour le forage 3 mm. Le changement de tube guide se fait sur le champ opératoire après dépose de la gouttière. Le forage terminal et la pose de l’implant se font sans assistance.

Le système Accurator® se révèle à l’usage être facile à mettre en œuvre. Son application est moins contraignante et plus flexible que les systèmes de chirurgie guidée existants. Cette flexibilité permet des contrôles visuels à chaque étape de la chirurgie.

Ce type de planification est possible avec une imagerie de type cone beam 3D qui, grâce à son module explorateur, permet le choix de l’axe de coupe en oblique. Dans le cas d’un examen dentascanner, les images DiCom® devront être traitées par un programme 3D qui autorise le choix de l’axe de coupe.

ÉTUDE DE CAS

CAS CLINIQUE N° 1

La patiente âgée de 62 ans présentait un édentement en secteur 2 (25 et 26 absentes) et en secteur 3 (36 et 37 absentes). La pose de 4 implants a été décidée pour réhabiliter ces zones édentées (Fig. 13). Un protocole de pose par chirurgie guidée utilisant le système Accurator® a été planifié : le forage de référence sur modèle en plâtre a été réalisé (Fig. 14). Un thermoformage suffisamment rigide (1 mm) a été réalisé sur le modèle après neutralisation des contre-dépouilles dans la zone où la future gouttière sera prélevée par découpe au disque carborundum (Fig. 14). La solidarisation à la gouttière de chaque tube réplique de laboratoire dans sa gaine acétal a été obtenue par l’intermédiaire d’un tuteur (Fig. 14). Ensuite, la gouttière a été placée en bouche pour l’examen cone beam 3D après avoir remplacé les tubes de laboratoire par les tiges radio-opaques.

L’examen cone beam 3D a montré que l’axe devait être rectifié pour les sites de 25, 26 et 37. En zone 36, l’image montrait que le couloir de forage estimé en aval du tube était idéal (Fig. 15). Les corrections ont donc porté sur 3 zones.

• En zone 37, une rectification linéaire de 2 mm en direction vestibulaire était nécessaire pour que le forage évite la corticale linguale. On a constaté sur modèle qu’un décalage en vestibulaire de 2 mm de l’axe implantaire restait compatible avec l’axe du couloir prothétique. Le correcteur d’axe + 2 mm a ensuite été enfiché dans le plâtre et orienté en direction vestibulaire. La solidarisation à la gouttière de la réplique sur le correcteur d’axe a été obtenue par l’intermédiaire d’une nouvelle gaine acétal en injectant une résine composite à l’interface. Les figures 16 et 17 montrent radiologiquement le décalage réalisé avec le correcteur d’axe de 2 mm. Notons que la tomographie après correction d’axe a été réalisée en accord avec la patiente pour une meilleure compréhension de l’exposé.

• En zone 25, la décision a été de corriger l’axe de 15° en direction palatine avec un déport vestibulaire du point d’émergence de 2 mm (Fig. 18 et 19). La concavité vestibulaire de la crête impose un axe de forage divergent de 15° par rapport au couloir prothétique.

• En zone 26, une correction de 1 mm en direction vestibulaire a été réalisée (Fig. 20 et 21).

La figure 22 montre la correction d’axe sur modèle des zones 24 et 25 : 15° + 2 mm pour la 25 et 1 mm de déport vestibulaire pour la 26. Très souvent, nous réalisons ces corrections d’axe au fauteuil dentaire avec une résine composite à prise rapide en seringue automélangeuse en faisant attention de ne pas réaliser simultanément deux corrections trop divergentes qui s’opposeraient à la désinsertion de la gouttière. Cela a été le cas pour cette patiente.

Phase chirurgicale

Les 4 implants ont été posés le même jour selon un protocole minimalement invasif. Les deux sites ont été anesthésiés en même temps. Des incisions sur la crête en respectant les papilles des dents adjacentes ont été réalisées avec le minimum de décollement des pentes des crêtes alvéolaires. Les gouttières ont été positionnées pour les forages de 2 et 3 mm de diamètre – forets NobelGuide® de 2 et 3 mm de diamètre gradués à 17, 20 et 23 mm (Fig. 23 et 24). Les implants ont été posés (Fig. 25 et 26). Des prothèses transvissées ont été prévues après cicatrisation osseuse. À cet effet, des piliers pour prothèse transvissée ont été placés sur les implants le jour de l’intervention : en zone 25, un pilier angulé de 15° selon les directives de la planification pour rattraper le couloir prothétique (Fig. 26).

Ce protocole de chirurgie guidée a permis de sécuriser une procédure non invasive qui respecte au mieux le volume des tissus, de réaliser les deux sites en même temps avec le minimum d’inconfort pour la patiente. L’incision sur la crête a permis d’optimiser la répartition de la gencive attachée disponible (Fig. 27 à 29).

CAS CLINIQUE N° 2 : POSE DE 5 IMPLANTS MANDIBULAIRES

Le patient âgé de 38 ans présentait un édentement sur 35, 36 et 37 (secteur 3) et 45, 46 (secteur 4). La planification de 5 implants pour remplacer les 5 dents absentes a été effectuée par la technique Accurator®. Des coiffes céramo-métalliques ont été prévues après traitement endodontique des dents 34, 44 et 47 à côté de bridges transvissés céramo-métalliques sur les 5 implants (Fig. 30).

Les traitements endodontiques une fois réalisés, une empreinte du site (Fig. 31) a permis d’effectuer, sur modèle, les forages de référence. La solidarisation à la gouttière des répliques de tubes par l’intermédiaire des gaines a été obtenue à l’aide des tuteurs droits (Fig. 32). La gouttière terminée, les répliques ont été remplacées dans les gaines acétal par des tiges radio-opaques (Fig. 33) pour la phase tomographique. Les résultats de la tomographie 3D ont été analysés avec le module explorateur :

• en zone 35, aucune modification n’était nécessaire. L’apex d’un implant de 11,5 mm de longueur a été positionné en lingual de la zone du trou mentonnier en respectant une distance de sécurité (Fig. 1) ;

• en zone 36 (Fig. 34) : une correction d’axe de 10° a été décidée pour éviter toute interférence avec la corticale linguale ;

• en zone 37 (Fig. 35) : une correction d’axe de 15° a été décidée pour éviter la fuite linguale de la corticale ;

• en zone 45 : pas de rectification ;

• en zone 46 (Fig. 36) : décalage linéaire de 1 mm en direction vestibulaire pour éviter toute interférence avec la corticale linguale.

Retour sur le modèle en plâtre pour les corrections d’axe des zones 36, 37 et 46. La gouttière a été évidée dans ces 3 zones. Les correcteurs d’axe correspondants ont été placés (Fig. 37). Ils ont permis la solidarisation des répliques par l’intermédiaire de nouvelles gaines dans la nouvelle position. Attention, car les divergences d’axe n’autorisent pas de réaliser les solidarisations en même temps. Dans ce cas, 36 et 37 ont pu être réalisées en même temps et ensuite la 46. Pour ce patient, les rectifications ont été réalisées en résine transparente au laboratoire.

La gouttière a ensuite été préparée pour la phase chirurgicale (décontamination après suppression des répliques). En début d’intervention, les tubes guides de forage stériles pour le forage 2 mm ont été insérés dans les gaines acétal (Fig. 38). Une incision sur la crête a permis de transférer en vestibulaire la gencive attachée du sommet de la crête. Les forages guidés de 2 et 3 mm de diamètre ont été réalisés après avoir contrôlé gouttière en place, à l’aide d’une jauge de profondeur, la hauteur entre le sommet de la crête et le rebord supérieur de chaque tube guide. Cette manœuvre a confirmé la hauteur complémentaire de forage. Les tubes guides faisaient 6,5 mm de hauteur. La hauteur des tissus mous pour chaque forage a été calculée sur l’image. Le contrôle par jauge avant un premier pointage de l’os a confirmé la mesure sur l’image. Les forets utilisés sont des forets Nobel Guide® de 2 et 3 mm de diamètre, gradués à 17, 20 et 23 mm.

Nous réalisons toujours un pointage de l’os car il permet, par une dépose temporaire de la gouttière, de voir ce que l’on fait et donc de confirmer la précision de la planification du point d’émergence. Ensuite, nous procédons au forage directeur guidé, puis au forage guidé 3 mm. Les autres forets d’élargissement ont été passés sans guidage et les implants ont été posés (Fig. 39 à 41). Les deux secteurs à implanter ont été traités en même temps : chaque diamètre de forage a été réalisé pour les deux secteurs avant de passer au forage suivant.

EN RÉSUMÉ

Les cas cliniques présentés montrent les avantages de ce type de protocole :

– la facilité de préparation de la gouttière ;

– la fiabilité des corrections d’axe réalisées à partir de points fixes rigides (forages de référence dans le plâtre) ;

– la flexibilité en peropératoire : possibilités de contrôle à chaque étape.

Comme toute technique nouvelle, il y a une familiarisation à la pratique :

– sur modèle pour la manipulation des correcteurs d’axe ;

– au bloc opératoire pour l’utilisation optimale de la gouttière (pointage des tissus mous, jauge de la hauteur complémentaire de forage, pointage de l’os)

DISCUSSION

Les protocoles de chirurgie guidée sont dits statiques (tubes guides sur gouttières) ou dynamiques (navigation peropératoire) [15, 17-18]. Les applications cliniques des systèmes de navigation dynamique et leur intérêt n’ont pas actuellement été suffisamment précisés dans la littérature scientifique.

Les différents systèmes statiques par tubes guides sur gouttière [1-7] reposent sur une exploitation de l’imagerie scanner par un programme de planification. Une gouttière a été réalisée « indirectement » soit complètement à partir des données de l’imagerie (stéréolithographie), soit partiellement en utilisant les données du scannage d’un modèle en plâtre de la mâchoire du patient. Sur les 4 étapes préparatoires successives (acquisition, planification, réalisation de la gouttière, positionnement de la gouttière), les 3 premières phases (acquisition, planification, réalisation de la gouttière) ont été réalisées en fonction de données informatiques. On revient en phase réelle par le positionnement de la gouttière en bouche pour la phase chirurgicale, sans preuve d’une parfaite restitution de l’élaboration virtuelle [6, 7]. Schneider et al. [6] ont effectué une revue systématique de toutes les études parues sur la précision des planifications virtuelles par informatique avec transfert des données pour fabrication d’une gouttière (au laboratoire ou par stéréolithographie). Les déviations angulaires sont faibles : autour de 5°. En revanche, l’imprécision du point d’émergence de l’implant est de l’ordre de 1,1 mm selon les études avec des extrêmes bien supérieurs. Ils en concluent que la précision de ce type de planification n’est pas suffisante pour appliquer des procédures non invasives et qu’un transfert plus précis des données virtuelles est indispensable, notamment pour les cas de crête osseuse où 1 mm de décalage suffit à faire basculer le projet dans l’échec. Ces protocoles doivent intégrer une certaine flexibilité tout en conservant une certitude de repositionnement de la gouttière afin de permettre des contrôles à chaque étape et notamment au moment du pointage de l’os en début de forage [6]. Certains auteurs parlent aussi d’un ratio coût/bénéfice peu favorable [23]. D’autres [24] indiquent qu’une évaluation à moyen terme de ces protocoles s’impose pour confirmer leur valeur en regard du supplément d’irradiation, de l’effort préparatoire et du coût. Le coût des gouttières stéréolithographiques limite implicitement leur utilisation aux édentements de grande étendue.

Le système Accurator® développe une technique « directe » d’élaboration de la gouttière. La gouttière chirurgicale est réalisée pour la phase radiologique et non en fonction. Elle sera repositionnée le jour de la chirurgie. Ce type de planification sur modèle supprime les causes d’erreurs liées à une phase indirecte plus ou moins virtuelle d’élaboration de la gouttière chirurgicale. La planification se fait ici par étapes : modèle (forages références), contrôle radiologique, retour sur modèle pour optimisation, ce qui dilue les possibilités d’erreur.

En outre, avec la technique Accurator®, le ratio coût/bénéfice devient favorable. Avec ce type de chirurgie guidée, les implants unitaires ou l’implantation des secteurs de petite étendue sont possibles avec un « surcoût gouttière » limité.

Pour le traitement d’édentements de grande étendue, quand les appuis de la gouttière sont surtout muqueux, une vigilance particulière lors du positionnement de la gouttière pour la phase radiologique est de rigueur et cette même vigilance doit être appliquée pour le repositionnement lors de la chirurgie. Notre expérience clinique sur le système nous permet de dire que tant qu’il y a suffisamment de points d’appuis dentaires (3 au minimum), le problème ne se pose pas. Quand il y en a moins, il est possible d’en créer temporairement (mini-implants temporaires) ou de prévoir suffisamment en amont la conservation de quelques dents ou racines jusqu’à l’intervention. La conservation pendant l’intervention de 3 points d’appuis dentaires et parfois leur transfert au niveau osseux en cours d’intervention permettent de conserver la gouttière en bonne place. Citons en exemple une intervention de type All-on-four [25] à la mandibule que nous avons commencée avec 3 appuis dentaires et qui s’est continuée par extraction des 3 dents une à une et substitution des points dentaires par des points d’appuis osseux en clavetant les puits de forage réalisés (zones 32 et 42) (Fig. 42 et 43).

En appui strictement muqueux sans appuis temporaires (dentaires ou mini-implants), un appui muqueux très étendu et très fin de la gouttière sera recherché avant la phase radiologique associé à une vigilance particulière afin de détecter l’éventualité d’une bascule. Dans ces cas, pour la phase chirurgicale, nous réalisons les forages guidés sans incision (flapless) pour éviter tout défaut de position lié à un déplacement de tissus. À noter dans ce cas qu’un contrôle tomographique peropératoire après un premier forage mi-longueur [17] est un moyen de contrôle intéressant.

Une bonne étude des points d’appui de la gouttière en fonction du type d’édentement permet d’éliminer tout risque d’imprécision lors du positionnement et du repositionnement. Bien que le caractère hasardeux du repositionnement soit éliminé, des contrôles à tout moment de l’intervention sont préconisés en retirant la gouttière momentanément. Le contrôle que nous réalisons systématiquement est un contrôle du point d’émergence après pointage de l’os. Notre expérience clinique sur les contrôles après pointage de l’os nous a permis d’apprécier le degré de précision du système Accurator®. Les marques constatées après pointage de l’os au point d’émergence montrent une précision suffisante même dans les cas de crêtes fines.

Fort de ce recul clinique, nous appliquons systématiquement un certain protocole en début d’intervention afin d’effectuer deux types de contrôles : contrôle de la hauteur de forage complémentaire (hauteur du tube guide + hauteur des tissus mous) et contrôle de la zone de pointage de l’os.

Ce protocole de début d’intervention est le suivant :

– pose de la gouttière pour le marquage des tissus mous à chaque point d’émergence ;

– dépose de la gouttière pour l’incision en fonction des points de marquage et décollement selon le projet ;

– pose de la gouttière, contrôle de la hauteur complémentaire de forage à la jauge puis pointage de la corticale ;

– dépose de la gouttière pour le contrôle du pointage ;

– pose de la gouttière pour la phase de forage.

L’examen CBCT 3D est l’examen radiologique le plus adapté aux investigations préimplantaires. Il permet une exploration très complète des maxillaires en offrant une variété importante de reconstructions, notamment obliques. Les résultats sont beaucoup plus souples que ceux d’un dentascanner. C’est aussi la technologie la moins irradiante des techniques sectionnelles (5 à 30 µSv selon la zone explorée avec la technologie à rayons X pulsés la plus répandue) alors que la dose absorbée pour un dentascanner se situe entre 150 et 314 µSv selon la zone explorée et le type de scanner [20-22, 26].

La technologie CBCT est d’autant plus adaptée à l’implantologie qu’elle peut faire partie du plateau technique du praticien. Les investigations CBCT faites au cabinet d’implantologie avec une surveillance de positionnement des gouttières, couplées à une planification adaptée (système Accurator®) nous paraissent être une avancée en matière de chirurgie guidée.

À noter qu’un logiciel permettant à partir des données DiCom® d’un examen dentascanner d’appliquer le protocole de planification Accurator® est annoncé par la société Nuvatore. Ce logiciel permettra de choisir ses coupes en oblique selon l’axe des tiges radio-opaques et d’évaluer précisément les corrections d’axe à réaliser sur le plâtre.

CONCLUSION

Selon Sohat et Tac [23], la vulgarisation de la chirurgie guidée passe par une simplification. La technique Accurator® va dans ce sens. Ce système permet d’augmenter la précision de pose avec un protocole qui reste simple dont le surcoût est modéré. Les procédures minimalement invasives peuvent être appliquées avec sécurité. Notre expérience nous a amené à une utilisation systématique pour tous les forages directeurs dont on sait que, sans assistance, les erreurs de parallaxe sont en moyenne de 11,4° ± 5,6° avec un extrême de 25,3° [5].

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

PROMAX® 3D – PLANMECA – 28, boulevard Auguste-Pageot – 44000 Nantes – Tél. : 02 51 83 64 68 – E-mail : planmeca.france@wanadoo.fr

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1 Technologie de tomographie numérisée à faisceau conique.

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