Vers une industrialisation de la chirurgie dentaire ? - Implant n° 2 du 01/05/2018
 

Implant n° 2 du 01/05/2018

 

ÉDITORIAL

Marc Baranes  

Rédacteur en chef

Nous sommes entrés dans l'ère de l'industrialisation en ce qui concerne la fabrication des prothèses dentaires et implanto-portées. Cette évolution (qui se fait hélas aux détriments du métier de prothésiste dentaire) est peut-être la première d'une longue série : le 22 septembre 2017, le Time a annoncé la première pose d'implant automatisée, à Xi'an en Chine, par un robot qui a mis en place de façon autonome des implants. Cette intervention a semblé être un...


Nous sommes entrés dans l'ère de l'industrialisation en ce qui concerne la fabrication des prothèses dentaires et implanto-portées. Cette évolution (qui se fait hélas aux détriments du métier de prothésiste dentaire) est peut-être la première d'une longue série : le 22 septembre 2017, le Time a annoncé la première pose d'implant automatisée, à Xi'an en Chine, par un robot qui a mis en place de façon autonome des implants. Cette intervention a semblé être un succès... à vérifier ! Petit à petit, nous arriverons peut-être à l'industrialisation globale de la dentisterie avec le développement de l'intelligence artificielle et de robots. Mais à quel prix ?

Nous sommes face à une mutation profonde de l'exercice de l'art dentaire. Notre pratique a évolué avec l'arrivée de nouvelles technologies et la disposition d'un plateau technique très spécialisé. Ainsi, le cone beam nous permet d'avoir des images plus précises et d'affiner nos diagnostics, le microscope opératoire est devenu incontournable dans la réalisation des traitements endodontiques et les caméras d'empreinte optique permettent d'améliorer la précision et aussi le confort pour les patients. De plus, les logiciels de planification implantaire fleurissent et les guides chirurgicaux sont fabriqués par des imprimantes 3D rapides et peu coûteuses. Ces derniers permettent d'augmenter la précision du positionnement des implants et apportent une valeur ajoutée aux techniques traditionnelles.

Bien que ces innovations nous permettent d'aller plus loin dans le diagnostic et d'améliorer la précision des gestes chirurgicaux, il semblerait que la recherche-développement des technologies prenne un tout autre virage. L'objectif ne serait plus d'augmenter les bénéfices en matière de diagnostic ou de thérapeutique pour les patients mais d'accroître la productivité, diminuant ainsi au maximum les coûts de fabrication, parfois au détriment de la qualité des soins.

Le progrès technologique dans le domaine de la santé est intéressant s'il apporte un bénéfice au patient. L'article de Mickael Samama sur la réhabilitation d'une perte de substance mandibulaire par lambeau libre de fibula en est une parfaite illustration : la phase chirurgicale est totalement anticipée et les implants sont placés en respectant le projet prothétique par l'utilisation d'un guide chirurgical stéréolithographique.

La recherche-développement doit impérativement être orientée vers l'amélioration de la qualité des traitements.

Même s'il est fortement probable que, à moyen terme, le robot remplacera l'homme pour la réalisation de certains actes, il faut garder en mémoire que le geste technique est l'aboutissement d'un diagnostic et d'une décision thérapeutique. Nous ne traitons pas une dent ou un édentement, nous prenons en charge le patient dans sa globalité. Enfin, la notion d'expérience est fondamentale dans la démarche thérapeutique.

Ni la médecine, ni la chirurgie dentaire ne peuvent être industrialisées car notre santé n'est pas un bien de consommation !