La prothèse temporaire dans le traitement implantaire - Cahiers de Prothèse n° 104 du 01/12/1998
 

Les cahiers de prothèse n° 104 du 01/12/1998

 

Implantologie

Xavier Assémat-Tessandier  

Ex-Assistant
à la Faculté de Paris-V
14, rue Pérignon - 75007 Paris

Résumé

Le traitement implantaire comprend, quel que soit le type d'implant retenu, un délai important entre la perte de la dent naturelle et la mise en place de la prothèse implanto-portée. Pendant cette période, la réhabilitation de l'édentement peut se faire par une prothèse amovible ou une prothèse fixée, mais le patient peut également envisager de ne pas restaurer son édentement. Les différentes possibilités sont abordées dans cet article, avec leurs avantages et leurs inconvénients respectifs.

Summary

Provisional prosthesis in implant treatment

The implant treatment, whatever the chosen implant is, implies an important delay between the loss of the natural tooth and the installing of implant-borne prosthesis. In the meantime, the provisional rehabilitation of the tooth missing can be done through: - a partial denture, which is a conceivable solution in all cases but which necessitates an important post-surgical maintenance and numerous prosthetic operations; - a fixed prosthesis, on natural pillars or on provisional implants, which is the most rational solution for a patient wishing a fixed implant-borne prosthesis but it is not always possible. Lastly, we must not neglect cases where the patient can think about not restoring the missing teeth, which makes tremendously easier the post-surgery follow-up, without harming the prognosis of the treatment.

Key words

bonded provisional bridge, implants, provisional fixed prosthesis, provisional partial prosthesis, transitional implants

La réhabilitation d'un édentement par une prothèse implanto-portée est une technique bien codifiée, qui permet au patient de retrouver des ancrages pour supporter, ou stabiliser, une prothèse rétablissant la fonction et l'esthétique. Le traitement comprend une étape chirurgicale de mise en place des racines artificielles, précédée par une période plus ou moins longue de cicatrisation des alvéoles des racines naturelles extraites et suivie d'une phase d'intégration osseuse de l'implant. Le délai écoulé entre la perte des dents naturelles et la réalisation de la prothèse peut s'étendre sur 6 à 10 mois, voire plus en cas de greffes osseuses ou de complications, et le praticien prothésiste se trouve confronté à la restauration temporaire de l'édentement selon les souhaits du patient pendant cette période.

Dans les premiers temps des restaurations implantaires, une prothèse amovible temporaire était envisagée dans l'attente de la restauration finale [1-4]. La plupart des patients désirant une prothèse fixée sont, bien entendu, réticents devant la perspective d'une réhabilitation amovible, même limitée dans le temps. C'est pourquoi une prothèse temporaire fixée reste la solution de choix pour ce type de traitement. Elle n'est pas toujours réalisable, en particulier dans les édentements distaux ou complets et le recours à la prothèse amovible est alors la seule solution, avec parfois même l'absence de prothèse temporaire pour la durée considérée.

Nous allons envisager les différentes possibilités :

- prothèse temporaire amovible ;

- prothèse temporaire fixée ;

- pas de prothèse temporaire.

Prothèse temporaire amovible

Selon l'édentement et sa topographie, le recours à la prothèse amovible permet de restituer l'esthétique et, en partie, la fonction dans tous les cas rencontrés. Si ce type de prothèse paraît être une solution de choix sur le plan économique par son faible coût d'élaboration et sa rapidité d'exécution, il faut modérer ce jugement par la surveillance que nécessite la prothèse amovible durant le traitement implantaire (fig. 1a, 1b, 1c, 1d, 1e, 1f, 1g et 1h). En effet, la prothèse amovible sera élaborée très rapidement après les extractions, ou mieux, avant, selon les principes de la prothèse immédiate, afin que le patient reste édenté le moins de temps possible. Le délai d'attente moyen entre les extractions et la mise en place des implants se situant autour de 2 à 4 mois, la prothèse amovible ne nécessitera que peu de d'interventions durant cette période. On procédera à des vérifications à la demande du patient en cas de blessures ou d'une gêne fonctionnelle.

Après la mise en place des implants, il est prudent de ne pas restituer au patient sa prothèse amovible le jour de l'intervention afin qu'il ne puisse pas la porter pendant 10 à 15 jours. En effet, après la chirurgie, la zone édentée où les racines artificielles ont été placées présente un relief et un volume complètement modifiés, et la prothèse perd une partie importante de son équilibre. Il est nécessaire d'envisager une réadaptation de la prothèse à l'aide d'une résine retard (type Viscogel® de Detrey-Dentsply) ou d'un matériau souple de rebasage à base de vinylpolysiloxane (type Mucopren® soft de Kettenbach ou Rebasil® de Dexter®). La présence de fils de suture complique singulièrement la mise en place de la résine retard et le risque d'arracher des points ou de faire fuser du matériau sous la muqueuse à travers les incisions impose d'attendre la dépose des fils pour remettre en place la prothèse amovible. Cela constitue le premier inconvénient de la mise en place d'une prothèse amovible temporaire dans un traitement implantaire : le patient n'a pas de prothèse pendant les 10 à 15 jours qui suivent la mise en place des implants.

Après la dépose des fils de suture, on peut considérer que la cicatrisation primaire de la muqueuse est suffisante pour assurer l'étanchéité nécessaire à la protection de l'os et des implants en cours d'ostéo-intégration. L'intrados de la prothèse amovible est alors largement évidé dans la zone de l'intervention pour éviter un appui de la prothèse sur un ou plusieurs implants, ce qui constituerait une mise en charge immédiate de l'implant préjudiciable à sa stabilité et donc à l'ostéo-intégration. Parfois on peut observer l'apparition de la vis de couverture [5], ce qui nécessite un contrôle et éventuellement une retouche de l'intrados de la prothèse. L'espacement souhaité doit être au moins de 2 mm. Il peut être vérifié par un matériau d'empreinte silicone fluide (type Xantopren® VL plus de Heraeus Kulzer) déposé sur l'intrados de la prothèse sans application préalable d'adhésif. Après polymérisation, le retrait du matériau permet de visualiser l'espace existant et d'éventuelles retouches peuvent être pratiquées sur la prothèse dans les zones résiduelles de compression. Ces vérifications se font, dans un premier temps, la prothèse maintenue en place par le praticien, puis en demandant au patient de maintenir une pression occlusale forte, afin de s'assurer que la prothèse lors de la fonction masticatoire ne blessera pas la muqueuse. Lorsque l'espacement de l'intrados de la prothèse est correct, on applique le produit de rebasage retenu et, après sa polymérisation, un contrôle des bords suivi des retouches nécessaires permet au patient de retrouver esthétique et fonction. Dans les années 1980, nous ne disposions que de résine retard pour effectuer ce rebasage et un consensus s'était établi autour du Viscogel®, dont les qualités de conservation d'une surface lisse dans le temps sont nettement supérieures à celles de produits similaires. Cependant, une surveillance importante du matériau reste nécessaire avant de pouvoir le remplacer, au bout de 2 mois environ, par une résine acrylique permanente. Le nombre important de rendez-vous (entre 10 et 15) pour la surveillance du matériau et de la cicatrisation muqueuse a une incidence directe sur le coût du traitement. C'est pourquoi l'apparition des nouveaux produits de rebasage souple, en matériau vinylpolysiloxane, permet de réduire significativement le nombre des manipulations et donc la durée des rendez-vous de contrôle, et de supprimer le remplacement, au bout des 8 semaines, du matériau de rebasage souple par de la résine acrylique dure. Le seul inconvénient de ces matériaux est leur prise rapide (environ 5 minutes), qui impose un parfait enregistrement des bords fonctionnels de la prothèse dans un temps très court. Cela est parfois difficile lors de la mise en place de la prothèse 10 jours après la chirurgie, le patient limitant les exercices fonctionnels en raison de la gêne engendrée par la cicatrisation des tissus. Le risque de surextension des bords est alors important. L'équilibre de la prothèse est compromis, ce qui peut être préjudiciable pour la cicatrisation des tissus soumis ainsi à des tensions excessives. Il est possible, dans ces cas, de différer la mise en place de la prothèse d'une semaine, ou alors de mettre en place du Viscogel® dans un premier temps (8 à 15 jours) et de le remplacer ensuite par la résine souple, soit en technique directe en bouche, soit en technique indirecte au laboratoire. C'est le deuxième inconvénient de la mise en place d'une prothèse amovible temporaire dans un traitement implantaire : le coût initial modéré de la prothèse amovible est augmenté par la surveillance et les modifications qu'elle nécessite après la mise en place des implants.

Nous allons voir maintenant les indications de la prothèse amovible temporaire selon l'édentement que présente le patient.

Édentement complet

La plupart des patients édentés totaux subissent un handicap fonctionnel important et l'apport de la prothèse implanto-portée leur procure un bénéfice considérable.

Deux types de prothèses définitives sont envisageables :

- une prothèse amovible supra-implantaire ;

- une prothèse fixée implanto-portée.

Dans tous les cas, la prothèse temporaire amovible semble être la solution la plus rationnelle.

Dans le cas d'une prothèse amovible supra-implantaire, il peut être envisagé d'utiliser la prothèse amovible complète d'usage existante du patient comme prothèse transitoire. Le patient habitué à sa prothèse amovible n'aura aucune difficulté pour supporter le passage de celle-ci à une prothèse supra-implantaire, dont la stabilité est considérablement augmentée par la présence des implants. Si la prothèse existante du patient peut être conservée en prothèse d'usage, le traitement de modification de l'intrados après la chirurgie, décrit plus haut, est réalisé sur elle. Dans le cas où la prothèse du patient ne peut être conservée pour en faire la prothèse définitive, il faut analyser les raisons qui nécessitent son changement.

Parfois, le patient, dont les dents support de crochet sont condamnées, se présente avec une prothèse amovible partielle comportant un châssis métallique. Il faut savoir que ce type de prothèse est à proscrire dans le traitement postopératoire car la présence du châssis métallique limite les possibilités de retouches de l'intrados et la plupart du temps on observe des blessures du site opératoire par manque d'espacement. On est ainsi parfois dans l'obligation de supprimer le châssis métallique en ces endroits et de fragiliser la prothèse, qui se fracture pendant la période de port de la résine souple. Toute prothèse amovible présentant un châssis métallique doit être remplacée par une prothèse à base résine acrylique avant la mise en place des implants.

Dans d'autres situations, le patient se présente avec des prothèses amovibles anciennes dont la stabilité n'est pas satisfaisante. Il faut alors envisager soit une réfection de ces prothèses pour améliorer leur stabilité, soit la réalisation de nouvelles prothèses d'usage, qui seront conservées après la mise en place des implants. Le choix entre les deux options sera bien souvent déterminé par le type d'ancrage retenu pour la prothèse supra-implantaire. Dans le cas d'une barre d'ancrage sur implants, la réadaptation d'une prothèse existante sur cette barre est pratiquement impossible et les considérations financières conduiront à utiliser l'ancienne prothèse du patient, réadaptée pour obtenir une stabilité satisfaisante pendant la durée de l'ostéo-intégration des implants. Par contre, si on prévoit des attachements unitaires type bouton-pression, il est possible d'envisager la réalisation de la prothèse définitive avant la mise en place des implants, cette prothèse étant ensuite modifiée pendant la phase de cicatrisation puis lors de la mise en place des attachements dans son intrados.

La conservation d'une ou plusieurs racines résiduelles est un grand avantage dans le traitement implantaire d'un édentement sub-total. Les éléments radiculaires conservés le temps de l'ostéo-intégration des implants apportent un confort certain au patient ; il est bien entendu nécessaire que ces éléments ne présentent pas d'infection et ne soient pas situés, dans la mesure du possible, dans un site implantaire potentiel. Selon le degré de délabrement des éléments conservés, ils seront supports de crochets ou bien supports d'attachements temporaires de type Dalbo-Rotex® (Cendres et Métaux France). Ces attachements sont constitués par un tenon radiculaire préfabriqué en alliage de titane (Ti 6Al 4V), présentant un filetage et commercialisés en deux longueurs (6,4 et 7,9 mm). Le tenon est surmonté par une boule de 2,25 mm de diamètre (identique à celle de l'ancrage Dalbo® de Cendres et Métaux France) et la partie femelle est en plastique spécial (Galak). Ces éléments sont positionnés dans les racines conservées et assurent la stabilité de la prothèse transitoire tout en garantissant son maintien dans le plan vertical pendant toute la période du traitement. De plus, ces éléments permettent le positionnement précis des guides radiologiques et chirurgicaux, apportant une grande fiabilité dans le positionnement des implants. À la fin du traitement, lorsque la prothèse est raccordée aux racines artificielles par les moyens d'ancrage définitifs, les racines sont extraites et l'intrados de la prothèse est rebasé.

Édentement partiel postérieur

La prothèse amovible temporaire est la solution la plus simple car elle s'adapte à toutes les situations cliniques, indépendamment de l'étendue de l'édentement et du maxillaire concerné. Les contraintes sont identiques à celles de l'édentement complet, à savoir impossibilité du port de la prothèse après la chirurgie et remplacement des prothèses partielles existantes, lorsqu'elles présentent des châssis métalliques, pour les motifs cités auparavant.

Édentement partiel encastré

La prothèse temporaire fixe est la solution de choix dans ce cas d'édentement et sera envisagée plus loin. L'indication de la prothèse amovible temporaire nous paraît devoir être réservée aux édentements très étendus (quatre dents et plus) lorsqu'une solution fixe compromet l'avenir de dents intactes utilisées comme piliers transitoires (fig. 2a, 2b, 2c, 2d, 2e, 2f, 2g, 2h, 2i, 2j, 2k, 2l, 2m et 2n).

Édentement unitaire

L'indication d'une prothèse temporaire dans ce type d'édentement est exclusivement esthétique, et le recours à la prothèse amovible partielle temporaire devrait être exceptionnel. La gêne apportée au patient par l'encombrement de la prothèse, la nécessité de ne pas porter la prothèse après la chirurgie et le coût en raison du suivi qu'elle nécessite limitent le recours à la prothèse amovible pour lui faire préférer une prothèse fixée temporaire.

Prothèse temporaire fixée

Dans la plupart des cas traités en prothèse implanto-portée, les patients récemment édentés souhaitent retrouver une denture la plus complète possible, par le biais de racines artificielles remplaçant partiellement ou totalement les dents naturelles perdues. L'idée du port, même temporaire, d'une prothèse amovible est souvent ressentie comme un traumatisme, accentué par le fait que, pendant les 10 à 15 jours suivant l'intervention chirurgicale, la prothèse temporaire est supprimée. Ainsi, un très grand nombre de patients souhaitent avoir une prothèse temporaire fixée dans l'attente d'un bridge implanto-porté. Selon l'édentement à restaurer, le recours à la prothèse temporaire fixée sera plus ou moins aisé et impliquera parfois une modification du plan de traitement avec un allongement significatif de sa durée.

Édentement complet

La réalisation d'une prothèse temporaire fixée dans le cas d'un édentement complet peut sembler irréaliste, mais un certain nombre de patients se présentent avec des dents, ou des racines naturelles, dont la conservation à moyen terme ne peut être envisagée, mais dont l'extraction peut être différée. Ces éléments dentaires peuvent être utilisés comme piliers temporaires d'un bridge provisoire si leur nombre (idéalement quatre) et leur répartition sur l'arcade assurent sa stabilité. Le bridge peut être constitué par des éléments en résine acrylique, issus d'une cire diagnostique, et soutenus par une poutre métallique qui englobe les préparations dentaires par des chapes partielles. L'inconvénient de la conservation d'éléments dentaires vient de l'occupation éventuelle d'un site implantaire nécessaire à la pérennité de la restauration implanto-portée finale. Dans ce cas, le premier bridge provisoire dento-porté permet la mise en place d'un premier groupe d'implants qui, après ostéo-intégration, supporteront le deuxième bridge provisoire implanto-porté. Ce dernier permettra alors l'extraction des dernières dents et la mise en place des derniers implants. Après intégration, ceux-ci seront éventuellement mis en charge par liaison au bridge provisoire implanto-porté avant réalisation du bridge définitif.

Il est clair que cette façon de procéder rallonge singulièrement le traitement. La mise en place d'une première série, suivie d'une deuxième série d'implants, double le temps d'ostéo-intégration et multiplie les interventions chirurgicales. Le coût est singulièrement augmenté par l'augmentation du nombre de manipulations. Pendant de très nombreuses années, les extractions différées ont pourtant été la seule façon de procéder pour permettre à un patient édenté complet (ou en passe de le devenir) de bénéficier d'une restauration fixée pendant toute la durée du traitement.

Une autre méthode est décrite depuis quelques années [6-7], avec l'utilisation d'implants transitoires (MTI- MP® de Dentatus : Mini Transitionnal Implant and Modular Prosthetic Systems). Ces implants se présentent sous forme de vis autotaraudantes en titane, de diamètre réduit (1,8 mm) et de différentes longueurs (14, 17 et 21 mm), avec une tête carrée surmontée d'une extrémité conique fendue. Le puits d'ancrage des implants transitoires est réalisé avec un foret de 1,4 mm de diamètre, entre les implants permanents placés en premier lieu dans la même étape chirurgicale. L'implant transitoire est vissé à l'aide d'un tournevis spécifique monté sur le contre-angle chirurgical, puis le parallélisme des têtes est optimisé à l'aide d'un outil qui permet de plier légèrement les têtes des implants transitoires. Enfin, après suture des lambeaux, des éléments plastiques sont montés sur les têtes des implants transitoires et le bridge provisoire est positionné et solidarisé avec de la résine sur ces éléments plastiques. Après polymérisation de la résine, le bridge est retiré, retouché, poli et scellé au ciment provisoire. Après intégration des implants permanents, 4 à 6 mois plus tard, les implants transitoires sont retirés par dévissage. Cette technique est très séduisante, car elle permet de mettre en place une prothèse provisoire fixée immédiatement après la chirurgie, mais elle augmente significativement le temps chirurgical et demande une certaine dextérité pour le positionnement du bridge provisoire. Pour l'instant, ce système prometteur sort du domaine de l'expérimentation, et des études plus nombreuses sont nécessaires pour en faire une technique de routine. Il faut noter qu'un système similaire, le TRE® (Temporary Retention Element) de Nobel Biocare, est en cours d'étude clinique.

Édentement partiel postérieur

Le traitement transitoire de l'édentement partiel postérieur par prothèse fixée fait appel aux mêmes techniques utilisées pour traiter l'édentement complet. L'extraction différée, lorsqu'elle est possible, est une méthode simple d'autant plus que la dent pilier conservée est souvent postérieure, dans une zone où la présence du sinus limite les possibilités de mise en place d'implant. Elle n'oblige donc pas à différer la mise en place des implants. L'utilisation d'implants transitoires trouve également une bonne indication dans ces édentements. La mise en place du bridge provisoire implanto-porté est plus facile que dans un cas d'édentement complet, en raison du calage de la dimension verticale d'occlusion procurée par les dents restantes.

Édentement partiel encastré

La restauration provisoire de ce type d'édentement est très souvent réalisée par un bridge collé sans préparation des dents piliers. Cette technique, développée au début des années 1980 [8-12], trouve une indication de choix par son faible coût et son adaptation aux différentes situations cliniques. Le bridge collé est élaboré sur un modèle issu d'une empreinte conventionnelle et le dessin des ailettes se fait en étudiant l'espace disponible entre les dents piliers et leurs antagonistes. Les intermédiaires sont réalisés en résine, et le bridge est collé dans un premier temps avec une colle Bis GMA (Comspan de Caulk Dentsply). Le jour de la chirurgie, il peut être décollé par réchauffement des ailettes avec des meulettes de polissage (type meulette AABA de Identoflex) ; la résine de collage, très sensible aux modifications brutales de température, cède très rapidement. La résine restant sur les dents piliers est éliminée par meulage et on peut procéder à la phase chirurgicale de mise en place des implants. Pendant ce temps, l'intrados métallique des ailettes du bridge est retraité au laboratoire et, le jour suivant, on peut procéder à la remise en place du bridge. Bien entendu, en fonction des cas cliniques, on peut associer une préparation périphérique existante avec une ailette collée sur une dent naturelle indemne de toute préparation.

Dans certains cas favorables (fig. 3a, 3b, 3c, 3d, 3e, 3f, 3g, 3h, 3i, 3j, 3k et 3l), la réalisation d'éléments intermédiaires amovibles [13, 14] peut permettre la mise en place des implants sans avoir à démonter le bridge, mais il est nécessaire de bien dégager le champ opératoire pour que le geste du chirurgien ne soit pas limité par l'infrastructure support de l'intermédiaire. Cette technique, qui peut paraître plus onéreuse qu'une prothèse amovible partielle, est en réalité assez économique car elle limite le suivi post-chirurgical à une séance de mise en place du bridge. Elle est par ailleurs très efficace et protège parfaitement, comme toutes les solutions fixées, le site opératoire. La limite d'indication se trouve dans l'occlusion. Il est nécessaire de trouver suffisamment de surface amélaire libre de toute implication occlusale afin de ne pas interférer dans le schéma occlusal du patient et avoir à faire des réductions irréversibles.

Édentement unitaire

Le bridge collé représente le type même de la restauration temporaire indiquée pour un édentement unitaire (fig. 4a, 4b, 4c, 4d, 4e, 4f, 4g et 4h). Le mode opératoire est identique à celui décrit plus haut, avec les mêmes limites.

Pas de prothèse temporaire

Dans cet article sur la temporisation en prothèse implantaire, il nous paraît nécessaire de souligner que le port d'une prothèse pendant la phase d'ostéo-intégration des implants n'apporte rien à la cicatrisation. Lors de la première consultation implantaire, un certain nombre de patients se présentent sans prothèses restaurant leurs édentements, souvent des édentements postérieurs, et il est utile d'envisager avec eux si cette situation peut être prolongée de quelques mois : c'est plus simple, moins coûteux et le pronostic reste le même.

Conclusion

La restauration d'un édentement par une prothèse sur implants est une technique qui nécessite un délai d'environ 4 à 8 mois entre la mise en place des racines artificielles et la réalisation de la prothèse implanto-portée. La réalisation d'une prothèse temporaire doit être envisagée en fonction du désir du patient, en se rappelant qu'il n'y a pas de nécessité absolue de mettre en place une prothèse pendant cette période. Ainsi si le patient se présente sans prothèse pour un édentement postérieur unitaire ou plural, il nous semble opportun de ne pas envisager de prothèse temporaire, l'avantage étant une économie de temps de fauteuil importante associée à une économie financière due à la réalisation de la prothèse. Si le patient souhaite la compensation temporaire de son édentement, quels qu'en soient l'emplacement et l'importance, la solution la plus rationnelle sera une restauration temporaire fixée. En effet, un bridge s'appuyant sur des dents piliers, ou sur des implants temporaires assure une protection optimale du site opératoire et nécessite une surveillance réduite pendant la phase d'ostéo-intégration. De ce fait, les séances au fauteuil sont réduites et le coût de ce type de prothèse (bridge collé par exemple) peut être équivalent à une solution amovible. Enfin, le recours à la prothèse amovible temporaire est une solution qui s'adapte à tous les types d'édentement, indépendamment de leur étendue et de leur situation. Le coût modéré de sa réalisation ne doit pas faire perdre de vue son coût réel assez élevé, dû à la surveillance post-chirurgicale et aux interventions prothétiques qu'elle nécessite. De plus la prothèse amovible temporaire présente l'inconvénient de ne pas pouvoir être restituée au patient le jour même de la chirurgie, et le délai de 10 à 15 jours nécessaire à la cicatrisation primaire, est souvent l'une des contraintes qui gênent le plus les patients candidats à la restauration de leurs édentements par des prothèses implanto-portées.

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