L'antibioprophylaxie réduit les complications infectieuses de la chirurgie orthognatique - Cahiers de Prothèse n° 114 du 01/06/2001
 

Les cahiers de prothèse n° 114 du 01/06/2001

 

Synthèses

Éric Robbiani  

À RETENIR :

Le but de cette étude est d'évaluer l'intérêt d'une prophylaxie antibiotique lors de la chirurgie orthognatique. Une étude randomisée, en double aveugle, a été réalisée sur 54 patients qui ont subi une ostéotomie de Lefort I et diverses ostéotomies mandibulaires. Dix-huit patients ont reçu une association amoxicilline-acide clavulanique (AAC), 17 de la cefuroxime (C) et 19 un placebo (P). La cicatrisation a été contrôlée par un...


À RETENIR :

Le but de cette étude est d'évaluer l'intérêt d'une prophylaxie antibiotique lors de la chirurgie orthognatique. Une étude randomisée, en double aveugle, a été réalisée sur 54 patients qui ont subi une ostéotomie de Lefort I et diverses ostéotomies mandibulaires. Dix-huit patients ont reçu une association amoxicilline-acide clavulanique (AAC), 17 de la cefuroxime (C) et 19 un placebo (P). La cicatrisation a été contrôlée par un praticien indépendant à 3, 7 et 30 jours. Sur les 54 patients, 15 ont développé une infection postopératoire, 10 dans le groupe P, 3 dans le groupe C et 2 dans le groupe AAC. Il y a plus de risque de complications infectieuses après chirurgie orthognatique sans prophylaxie antibiotique. Cette augmentation est statistiquement significative (p < 0,004).

Pourquoi ?

La chirurgie orthognatique intra-orale est une chirurgie de classe II (propre-contaminée) pour laquelle le risque de complications infectieuses est de 10 à 15 %. Les antibiotiques permettent de diminuer ce nombre, mais leur utilisation à titre prophylactique reste controversée. Des études ont comparé les suites opératoires après une dose unique d'antibiotique préopératoire ou une administration prolongée de pénicilline. Il n'y a pas d'augmentation du risque d'infection dans le premier groupe. Le but de cette étude prospective, en double aveugle et contre placebo est de vérifier si une antibioprophylaxie modifie le taux de complications infectieuses.

Comment ?

Entre avril 1992 et février 1996, 54 patients devant subir une ostéotomie type Lefort I avec diverses ostéotomies mandibulaires associées ont été inclus dans l'étude (41 femmes, 13 hommes, âge moyen 25,5 ans). Une randomisation a été réalisée. Dix-huit patients ont reçu 2 200 mg d'une association amoxicilline-acide clavulonique (AAC), dix-sept de la cefuroxime (C), et dix-neuf un placebo (P). Chaque patient a reçu le produit dissous dans 50 ml de NaCl à 0,9 % en injection intraveineuse 30 minutes avant la chirurgie. Les interventions ont duré de 105 à 225 mn (moyenne : 143 mn).

Un praticien indépendant de l'équipe chirurgicale a examiné l'aspect de la cicatrisation à 3, 7 et 30 jours et a utilisé les 4 critères suivants : normal, œdémateux, exsudat non purulent, abcès avec exsudat purulent. Divers autres critères cliniques ou biologiques sont utilisés pour évaluer l'inflammation. Pour cette étude, est considérée comme infection toute condition inflammatoire qui oblige le chirurgien à prescrire un traitement additionnel qui ne rentre pas dans le cadre du protocole habituel.

La lenteur du recrutement a obligé les auteurs à modifier le protocole, à regrouper les 2 groupes antibiotiques et à continuer l'étude jusqu'au recrutement de 54 patients pour avoir une puissance statistique suffisante.

Et alors ?

Quinze patients ont développé une infection : 2 avec AAC, 3 avec C et 10 avec placebo.

Il y a un risque plus important d'augmentation des complications infectieuses sans prophylaxie antibiotique. Ce risque est statistiquement significatif (p < 0,004).

Une incidence plus forte (non significative) des complications infectieuses est notée sur des opérations de plus de 150 mn. Cela semble impliquer que les doses sont insuffisantes au-delà de ce temps.

Aucune différence n'a pu être mise en évidence entre les 2 molécules antibiotiques à cause d'un échantillon trop faible.

Une présentation claire et précise des résultats permet de calculer qu'il ne faut que 3 patients avec antibioprophylaxie pour éviter la survenue d'une infection. Cela confirme l'intérêt de cette prophylaxie. Calcul des NNT (number need to treat) réalisé dans Evidence-Based Dentistry 2000;2:66.

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