L'utilisation d'Emdogain® en complément d'un lambeau repositionné coronairement n'apporte rien pour recouvrir les récessions parodontales - Cahiers de Prothèse n° 117 du 01/03/2002
 

Les cahiers de prothèse n° 117 du 01/03/2002

 

Synthèses

Éric Robbiani  

À RETENIR :

Les lambeaux repositionnés coronairement (LRC) permettent d'obtenir un recouvrement radiculaire des récessions parodontales dans 83 % des cas. Le but de cette étude est d'évaluer l'efficacité d'une protéine de la matrice amélaire, l'Emdogain® en combinaison avec un LRC. Pour cela, une étude prospective sur 12 mois, randomisée, à l'aveugle contre placebo, le patient étant son propre témoin, a été réalisée dans 2 centres...


À RETENIR :

Les lambeaux repositionnés coronairement (LRC) permettent d'obtenir un recouvrement radiculaire des récessions parodontales dans 83 % des cas. Le but de cette étude est d'évaluer l'efficacité d'une protéine de la matrice amélaire, l'Emdogain® en combinaison avec un LRC. Pour cela, une étude prospective sur 12 mois, randomisée, à l'aveugle contre placebo, le patient étant son propre témoin, a été réalisée dans 2 centres universitaires différents. Le protocole est bien décrit et rigoureux. Les résultats indiquent que l'adjonction d'Emdogain®, lors d'un LRC réalisé pour recouvrir une récession parodontale, n'améliore pas de façon significative les paramètres cliniques. Le seul intérêt de l'utilisation d'Emdogain® est l'obtention d'une hauteur de gencive kératinisée plus importante (0,4 mm) qu'avec le placebo.

Pourquoi ?

Le recouvrement des récessions parodontales est de plus en plus souhaité par les patients pour des motifs esthétiques. Diverses techniques ont été proposées. Les greffes conjonctives donnent de meilleurs résultats en termes de recouvrement (80 à 85 %) que les greffes gingivales (43 à 53 %). Cependant, elles nécessitent un site donneur. Le lambeau repositionné coronairement permet d'obtenir un recouvrement moyen de 83 %, les techniques de régénération tissulaire guidée (RTG) permettent d'obtenir en moyenne 74 % (Wennstöm et Pini Prato, 1998).

L'utilisation de protéines de la matrice amélaire a été décrite comme favorisant la régénération parodontale. Le but de cette étude est d'évaluer l'efficacité de ces protéines (Emdogain®) en comparant les résultats obtenus avec des LRC, combinés avec l'utilisation d'Emdogain® ou d'un placebo.

Comment ?

Il s'agit d'une étude clinique prospective, randomisée, réalisée en aveugle contre placebo, le même patient servant de témoin, dans 2 centres universitaires différents. Des patients qui présentaient des récessions parodontales similaires, de plus de 3 mm, sur 2 dents controlatérales de la même arcade avec une gencive kératinisée d'au moins 1 mm ont été sélectionnés pour l'étude. Les patients retenus ne fument pas plus de 10 cigarettes par jour et n'ont pas participé à d'autres études cliniques. Tous les patients ont reçu une instruction à l'hygiène buccale et un nettoyage professionnel. Sur les 37 patients retenus, 36 ont été suivis pendant les 12 mois de l'étude.

Le traitement test consiste en un LRC selon la technique décrite par Bernimoulin en 1975 avec une application complémentaire d'Emdogain® sur la surface radiculaire exposée. Le traitement témoin est la même intervention, mais l'Emdogain® est remplacé par un placebo (propylène glycol alginate) du même fabricant (Biora, Malmö, Suède). Les deux lambeaux sont réalisés le même jour, le côté gauche du patient toujours en premier. La surface radiculaire est traitée avec un gel d'EDTA à 24 % (Prefgel®, Biora) sur 2 mm. Le chirurgien ne connaît le traitement attribué qu'après avoir préparé le premier site. Dans les 2 centres, toutes les photographies et les mesures sont réalisées par des opérateurs indépendants qui ignorent quel est le côté test.

C'est le type de protocole d'étude que l'on aimerait trouver systématiquement pour évaluer l'efficacité d'un produit.

Et alors ?

Les diminutions de hauteur de récessions étaient de 2,8 mm (± 0,8) pour le groupe test et 2,9 mm (± 0,9) pour le groupe témoin, soit respectivement 80 % et 79 %. La différence n'est pas significative entre les 2 groupes. Il en est de même pour les niveaux d'attache, les profondeurs de poches, les largeurs de récession, les niveaux de l'os alvéolaire et les indices de plaque et gingivaux. Seule la hauteur de gencive kératinisée est significativement plus augmentée avec l'Emdogain® (0,7 ± 0,9 mm) qu'avec le placebo (0,3 ± 0,9 mm).

L'adjonction d'Emdogain® lors d'un LRC réalisé pour recouvrir une récession parodontale n'améliore pas de façon significative les paramètres cliniques.