Prothèse fixée transitoire - Cahiers de Prothèse n° 118 du 01/06/2002
 

Les cahiers de prothèse n° 118 du 01/06/2002

 

Prothèse fixée

Marc Sous  

Ancien assistant hospitalo-universitaire
Section de prothèses
UFR d'odontologie
Université Victor Ségalen, Bordeaux II
3, boulevard Aragon
64000 Pau

La prothèse transitoire représente une étape importante parmi les séquences successives du plan de traitement. Outre son rôle esthétique, notamment dans le secteur antérieur, elle remplit également un rôle fonctionnel et thérapeutique qu'il ne faut pas négliger. Pour la réaliser, de nombreuses techniques sont exploitables, qu'elles soient directes ou indirectes. Parmi les techniques directes, la « block-technique » est l'une des moins décrites. Elle n'en demeure pas moins une...


La prothèse transitoire représente une étape importante parmi les séquences successives du plan de traitement. Outre son rôle esthétique, notamment dans le secteur antérieur, elle remplit également un rôle fonctionnel et thérapeutique qu'il ne faut pas négliger. Pour la réaliser, de nombreuses techniques sont exploitables, qu'elles soient directes ou indirectes. Parmi les techniques directes, la « block-technique » est l'une des moins décrites. Elle n'en demeure pas moins une excellente méthode pour les secteurs cuspidés, de la couronne unitaire au bridge de trois éléments. Elle permet au praticien de se familiariser avec l'anatomie occlusale dont le rôle est prépondérant dans la statique et la dynamique occlusale. De plus, elle demande très peu de matériel, puisque seule de la résine chémopolymérisable et quelques fraises à résine sont nécessaires.

Le but de cet article de formation pratique est de décrire cette technique en prenant comme exemple la réalisation d'un bridge de trois éléments.

Réalisation d'un bridge transitoire de trois éléments

Un bridge de trois éléments est à réaliser, suite à l'extraction de 35 pratiquée la semaine précédente. Parmi les techniques envisageables, la « block technique » a été retenue.

Après dépose des couronnes défectueuses bordant l'édentement (fig. 1), les préparations sont reprises (fig. 2). Elles sont vaselinées pour empêcher l'adhérence de la résine.

De la résine, Unifast® de GC, est préparée dans un godet en caoutchouc, en grande quantité et malaxée jusqu'à l'obtention d'une consistance pâteuse.

Un bourrelet formé entre les doigts est déposé sur les dents concernées. Le patient est alors invité à fermer en occlusion d'intercuspidie maximale (OIM) (fig. 3). À ce stade, il est conseillé de désinsérer plusieurs fois le bloc de résine, puis de le repositionner. Lorsque la résine commence sa réaction exothermique, le bourrelet est désinséré définitivement.

Il est alors possible en tenant compte des impacts occlusaux et de la position des dents préparées de déterminer la position des embrasures cervicales, la dimension mésio-distale des dents et de marquer au stylo feutre la position des cuspides (rose), celle des fosses (vert) et des embrasures occlusales (bleu) (fig. 4, 5 et 6).

On peut alors commencer le « dégrossissage » du bridge à l'aide d'une fraise en carbure de tungstène (fig. 7), montée sur pièce à main.

Cette première étape consiste à éliminer les excès de résine et à objectiver les différents volumes (fig. 8, 9 et 10).

Le bridge est repositionné sur les préparations et le patient est prié de se remettre en OIM (fig. 11). Les ajustements de l'occlusion interviennent après mise en évidence des points en surocclusion et des interférences entre OIM et occlusion de relation centrée.

Les guidages en diduction et propulsion sont harmonisés avec l'ensemble du schéma occlusal. Les embrasures sont dégagées à l'aide d'une fraise cylindroconique de diamètre plus réduit, et la face occlusale est sculptée avec une fraise cylindrique (fig. 12 et 13).

À ce stade, le bridge commence à prendre forme, mais il est nécessaire de le rebaser, car l'intrados prothétique n'est pas adapté aux limites des préparations. Il est recommandé d'enlever un peu de matière dans l'intrados à l'aide d'une fraise-boule, pour ménager un peu de place à la résine de rebasage, évitant ainsi toute surrocclusion.

Le bridge est alors rebasé (fig. 14), ce qui permet de bien visualiser les limites prothétiques (fig. 15). Les excès sont supprimés à l'aide de la fraise cylindro-conique (fig.16), les embrasures sont terminées avec un disque diamanté (fig. 17).

Le bridge est essayé en bouche, l'occlusion est vérifiée, avec des retouches minimes, puisqu'il a été sculpté en fonction de l'occlusion du patient. Les faces axiales sont corrigées pour régler les profils d'émergence et harmoniser les axes vestibulaires et linguaux. Il peut dès lors être poli (fig. 18, 19 et 20), puis scellé (fig. 21).

La figure 22 présente le bridge en occlusion. Le bridge définitif a été réalisé en s'inspirant de la morphologie du bridge transitoire (fig. 23).

Conclusion

L'indication de cette technique est à poser après évaluation des difficultés de réalisation et du temps passé face aux autres techniques (isomoulage notamment…) et aux techniques ayant recours au laboratoire de prothèse. Elle est également influencée par l'aptitude du praticien à maîtriser les exigences morphologiques et fonctionnelles pour y répondre lors de la sculpture du bloc de résine.

Temps pass :

- bridge transitoire de 3 éléments : 30 minutes ;

- élément unitaire : 20 minutes.

Avantages de cette technique :

- acte réalisé intégralement au cabinet dentaire ;

- les déterminants de l'occlusion sont pris en compte directement sur le patient, sans passer par l'utilisation d'un occluseur ou d'un articulateur.

Inconvénients :

- technique ne fournissant aucun repère de morphologie axiale ;

- demande un temps de sculpture important à évaluer en fonction du coût et du temps passé pour la réalisation de la prothèse au laboratoire.

Indications :

- pour la réalisation d'éléments cuspidés unitaires ou de bridges de faible étendue ;

- dans les cas de contexte occlusal favorable ;

- lors de destructions coronaires ayant entraîné la perte des références anatomiques (contre-indication de la technique par iso-moulage) ;

- lors du remplacement de prothèses défectueuses qui ne peuvent servir de modèle.

Matériaux et matériel nécessaires :

• résine chémopolymérisable : UNIFAST®, GC ;

• godet caoutchouc, spatule à malaxer métallique, vaseline ;

• stylos feutres de différentes couleurs ;

• fraises en carbure de tungstène pour pièce à main :

- Komet H 21.104.012 ou 014 : sculpture de la face occlusale ;

- Komet H 79E.104.050 : dégrossissage ;

- Komet H 136DF.104.016 : sculpture des embrasures ;

• disque diamanté pour pièce à main : Komet 934.104.180 ;

• nécessaire de polissage de la résine.

bibliographie

  • Farré P, Guyonnet JJ, Girard P. Couronne provisoire: Technique originale d'iso-moulage en occlusion. Cah Prothèse 2001;115:65-68.
  • Marmy O, Cioppi G, Michelini F. Restaurations transitoires. Cah Prothèse 1996;96:45-52.
  • Thépin JC, Ravalec X. La fonction thérapeutique de la prothèse provisoire fixée dans les grandes restaurations. Cah Prothèse 1998;104:29-49.
  • Vest JF, Morin F. Rôle de la prothèse transitoire dans les reconstructions prothétiques fixées de faible étendue. Cah Prothèse 1998;104:17-28.