Prothèse composite
Jean-Marie Cheylan * Danièle Buch **
*-Ancien assistant
hospitalo-universitaire -
Sous section « prothèses »
71, rue de Rennes
75006 Paris
**
Professeur des Universités -
Praticien hospitalier
Faculté de Chirurgie dentaire de Paris V -
Montrouge
1, rue Maurice-Arnoux
92120 Montrouge
L'association de prothèse fixée à la prothèse amovible partielle (prothèse composite) présente des avantages d'ordre mécanique, biologique, esthétique et psychologique. Ceux-ci ne se réalisent pleinement que lorsque la réalisation de la prothèse fixée est subordonnée aux impératifs d'équilibre de la prothèse amovible. La conception de cette dernière est dictée par la topographie des édentements, qui peuvent être définis comme « encastrés » ou « en extension ». En fonction de l'un ou l'autre, le tracé prospectif du châssis métallique guide la réalisation de la prothèse fixée, qui voit sa morphologie modifiée par la création d'artifices architecturaux propres à limiter les surcontours des éléments à appui dentaire de la prothèse amovible, à mieux répartir les forces aux dents restantes, à améliorer la sustentation et la stabilisation de la plaque base et à ménager l'esthétique en masquant les éléments de rétention.
The association of a fixed prosthesis with a partial removable prosthesis (composite prosthesis) show advantages in mechanical, biological, aesthetical and psychological terms. They are fully achieved only when the fixed prosthesis is realized in order to guarantee the balance of the removable prosthesis. The conception of the latter is dictated by the topography of the teeth missing areas which can be defined as `embedded' or in `extension'. According to one or the other, the prospective drawing of the metallic saddle guides the realization of the fixed prosthesis whose morphology is modified by the creation of architectural devices able to limit the overlines of the elements with dental support of the removable prosthesis, to distribute evenly the forces to the remaining teeth, to improve the support and the stabilization of the base plate, and to preserve the aesthetics while masking the elements of retention.
Lorsque la prothèse amovible partielle (PAP) est indiquée pour traiter un édentement et que des éléments fixés, scellés ou collés doivent y être associés, la morphologie de ces derniers est à modifier pour favoriser l'intégration de la prothèse amovible, d'un point de vue mécanique, parodontal, esthétique et psychique [1, 2] (fig. 1a et 1b). Ces modifications, ou fraisages, consistent à réaliser, au sein des infrastructures métalliques des prothèses fixées, des artifices architecturaux particuliers destinés à recevoir les éléments de rétention, de sustentation et de stabilisation du châssis métallique. Leur conception et leur réalisation sont toujours subordonnées à celles de la prothèse amovible partielle dont les principes d'équilibre dictent l'architecture [3-5].
La réalisation de fraisages permet de limiter l'encombrement de la prothèse amovible. En effet, l'épaisseur des éléments métalliques du châssis est une nécessité inhérente à la résistance mécanique des matériaux [6]. Leur effacement par le truchement d'un espace prévu dans la prothèse fixée favorise le confort du patient qui ne perçoit pas le volume des éléments à appui dentaire. Le maintien de la santé parodontale est garanti par une absence de surcontour sur les dents-supports. D'autre part, les fraisages favorisent la stabilité de la PAP grâce à la présence de surfaces de guidages, qui garantissent une insertion de la prothèse sans contraintes nocives pour les dents restantes et permettent une intimité de contact entre les surfaces de la prothèse fixée et de la prothèse amovible. Enfin, une morphologie judicieuse des fraisages permet de mieux contrôler la répartition des forces sur les dents restantes, en orientant les contraintes selon leur grand axe.
La conception des fraisages est impérativement guidée par la forme du châssis et par l'axe d'insertion choisi de la future prothèse.
L'architecture du châssis est établie par un tracé prospectif sur un moulage d'étude. Ce tracé répond aux principes de conception de la prothèse amovible qui ne doivent en aucun cas être contournés. Il permet d'emblée de situer la distribution spatiale des appuis dentaires en fonction du contexte « encastré » ou « en extension » (fig.2a et 2b).
Dans le cas d'un édentement encastré, les appuis bordent directement l'édentement. Pour un édentement en extension, ils sont situés mésialement sur la dent jouxtant la crête.
L'axe d'insertion prothétique est déterminé après étude des moulages au paralléliseur (fig. 3). Il permet notamment de prévoir l'orientation des surfaces de guidage réalisées sur certaines faces proximales et linguales des futures prothèses fixées [7]. Il tient compte de l'incidence esthétique de la situation des éléments métalliques. L'axe d'insertion optimal doit correspondre à celui qui impose le moins d'aménagements aux différentes structures d'appui.
La résultante des contraintes engendrées par la prothèse est essentiellement axiale et s'exerce à l'intérieur d'un polygone de sustentation défini par la position des dents restantes. La prothèse est essentiellement à appui dento-parodontal. La stabilisation transversale est assurée par les dents bordant les édentements.
• Lorsque certaines dents bordant l'édentement doivent être reconstruites, les fraisages comprennent un logement de taquet occlusal, un épaulement lingual et une surface de guidage proximale. Ainsi, les chefs vestibulaires des crochets sont extracoronaires comme sur les dents naturelles, évitant ainsi un différentiel de rigidité entre les différents piliers (fig. 4a, 4b, 4c, 4d, 4e et 4f).
• Lorsque les dents-piliers ou la totalité des dents de l'arcade doivent être restaurées, aucun degré de liberté n'est autorisé par les fraisages qui peuvent intéresser l'ensemble de la morphologie de la reconstruction fixée (fig. 5a, 5b et 5c).
Lorsque la prothèse amovible ne s'appuie sur aucune dent postérieure, un mouvement de rotation autour des dernières dents distales est à redouter, en raison de la dépressibilité muqueuse (enfoncement) et de l'absence de rétention postérieure (décollement). La stabilisation de la prothèse est alors assurée par des appuis indirects (taquets occlusaux, barre corono-cingulaire). Ils agissent comme un bras de levier assurant la réciprocité à celui qui a été créé par l'extension distale des selles prothétiques.
Pour préserver les dents bordant l'édentement de contraintes transversales en direction distale, les appuis occlusaux et la potence reliant ces derniers à l'armature sont déportés en position mésiale sans liaison directe avec la selle prothétique (fig. 2b, 6a, 6b, 6c et 6d).
La conception du châssis est dictée par l'association des critères de conception relatifs à chaque édentement pris séparément.
Des appuis directs sur les dents bordant l'édentement encastré sont associés à des appuis déportés en direction mésiale sur les dents bordant les édentements en extension. Toutefois, lorsqu'il n'y a qu'une seule dent postérieure à remplacer, une liaison distale directe est tolérée (fig. 7a, 7b, 7c, 7d, 7e, 7f et 7g).
L'intégration d'une prothèse amovible nécessite de bien connaître les impératifs de conception relatifs aux différents types d'édentement afin de transmettre au laboratoire des informations précises pour réaliser les prothèses conjointes. Le clinicien concepteur doit réaliser des préparations dentaires dont les formes de contour sont compatibles avec la morphologie souhaitable des éléments fixés. L'architecture de ces derniers est subordonnée aux impératifs d'équilibre de la PAP. Une communication entre les différents laboratoires concernés par la réalisation prothétique est indispensable. Il incombe au praticien de diriger l'ensemble des séquences d'élaboration en fournissant aux acteurs concernés les instructions nécessaires au travail de chacun.