Conception des châssis métalliques pour prévenir les mouvements de bascule des prothèses amovibles partielles - Cahiers de Prothèse n° 121 du 01/03/2003
 

Les cahiers de prothèse n° 121 du 01/03/2003

 

Prothèse amovible partielle

Karine Joullié *   Cyrille Nublat **   Jacques Margerit ***  


* Ancien assistant hospitalier-
universitaire

** Ancien assistant hospitalier-
universitaire

*** Maître de conférences des
universités, praticien hospitalier

Unité de prothèse
UFR Odontologie Montpellier
545, avenue du Professeur J.-L. Viala
34193 Montpellier Cedex 5

Résumé

En prothèse amovible partielle, les doléances des patients concernent essentiellement les mouvements de leurs prothèses lors de la mastication. Ces mouvements de déstabilisation prothétique se révèlent dans deux situations fonctionnelles différentes : lors de la mastication d'aliments durs, de par l'enfoncement des selles dans la fibromuqueuse, et lors de la mastication d'aliments collants, de par le décollement de la prothèse de ses surfaces d'appui. Au travers des différentes classes d'édentement, une même démarche analytique est suivie, démarche fondée sur la détermination des bras de levier qui tendent à déstabiliser la prothèse et des bras de stabilisation qui peuvent s'y opposer. Seule l'optimisation des rapports de force permet de diminuer les mouvements de bascule de la prothèse.

Summary

Metal framework design to prevent the displacement of removable partial dentures

The chief complaint of RPD patients concerns essentially denture displacement during chewing functions. These displacement problems occur in two different functional situations ; when chewing hard foods leading to excessive denture pressure on the fibromucosa and when chewing sticky foods, leading to denture dislogement. We shall follow the same analytic procedure to illustrate different edentulous situations based on the analysis of the forces which tend to dislodge the denture and their opposing stabilising forces. This study underlines the importance of factors such as the location of rests, rigidity of connectors, extension of denture bases and the application of direct and indirect retainers.

Key words

denture design, removable partial denture, denture retention

En prothèse amovible partielle, les doléances des patients concernent essentiellement les pertes de stabilité de leurs prothèses lors de la mastication [1]. Quel que soit le type d'édentement traité, la prothèse a toujours tendance à se mobiliser par rapport aux dents supports. Ces mouvements prothétiques, largement décrits dans la littérature, sont multiples : translations verticales, translations mésio-distales ou disto-mésiales, rotation dans un plan horizontal, rotation autour de l'axe de la crête, rotation autour d'un axe vertical, etc. [2, 3].

Mais les plus gênants lors de la fonction masticatrice restent les mouvements de rotation autour de l'axe passant par les dents bordant le ou les secteurs édentés [4].

Ces mouvements de déstabilisation prothétique se manifestent dans deux situations fonctionnelles très différentes : lors de la mastication d'aliments durs et lors de la mastication d'aliments collants.

Lors de la mastication d'aliments durs en raison de l'enfoncement des selles dans la fibromuqueuse : on rejoint ici le problème de la dualité tissulaire, la prothèse étant supportée à la fois par les dents restantes et par la fibromuqueuse recouvrant les crêtes. Les dents ont un déplacement axial de l'ordre de 0,1 mm [5] alors que la même contrainte occlusale transmise par les selles à la fibromuqueuse détermine une trajectoire comprise entre 0,4 et 2 mm [6].

La différence de rénitence et d'amplitude de dépressibilité de ces structures induit des mouvements de rotation de la prothèse lors de la fonction si cette dualité tissulaire n'est pas prise en compte par le clinicien.

Lors de la mastication d'aliments collants en raison du décollement de la prothèse de ses surfaces d'appui : le rôle du praticien est de concevoir un châssis qui, par son tracé, doit compenser ces forces déstabilisatrices ou, à défaut de les compenser, les réduire autant que possible.

Quel que soit le type d'édentement traité, la démarche analytique reste inchangée et il est indispensable de déterminer :

- l'aire de sustentation de la prothèse délimitée par des points d'appui muqueux controlatéraux, plus antérieurs que la plus antérieure des dents prothétiques et plus postérieurs que la plus postérieure des dents prothétiques ;

- l'axe de rotation principal ;

- le bras de levier maximal qui tend à déstabiliser le système ;

- le bras de stabilisation souhaitable en positionnant le plus judicieusement possible les éléments de rétention indirecte.

Pour chacun des différents édentements types, l'analyse raisonnée des bras de levier et des bras de stabilisation permet d'optimiser les rapports de force et, par-là même, d'optimiser le tracé du châssis. C'est l'objectif de cet article qui se limite volontairement à un aspect purement biomécanique de la conception du châssis métallique.

Édentements de classe I de Kennedy-Applegate

Ces cas d'édentements postérieurs bilatéraux sont relativement fréquents et particulièrement difficiles à gérer, notamment à la mandibule, où on enregistre les taux d'échecs les plus élevés [7].

Mastication d'aliments durs

L'aire de sustentation qui détermine la zone de prise en charge des contraintes fonctionnelles par le cadre métallique du châssis est délimitée par :

- une ligne mésiale passant en avant de la plus antérieure des dents prothétiques ;

- une ligne distale passant en arrière de la plus postérieure des dents prothétiques ;

- latéralement, les lignes faîtières de crête (fig. 1).

Toute contrainte exercée en dehors de cette surface entraîne un mouvement de déstabilisation de la prothèse [8].

Pour les classes I, les contraintes qui peuvent s'exercer en dehors de l'aire de sustentation sont dues à un montage trop vestibulaire des dents prothétiques par rapport à l'axe des crêtes. Ce type de montage entraînant un mouvement de désinsertion de la prothèse du côté opposé est à éviter autant que possible.

Dans ce type d'édentement, l'axe de rotation principal de la prothèse passe invariablement par les appuis dentaires les plus distaux ou, autrement dit, par les appuis dentaires sur les dents bordant l'édentement (fig. 2).

Lors de la mastication d'aliments durs, le bras de charge maximal est déterminé par la distance LC séparant :

- en mésial, l'axe de rotation principal ;

- en distal, les dents prothétiques les plus postérieures (fig. 3).

Ainsi, pour une intégration de ce type de prothèse, la force développée par la mastication d'aliments durs doit être parfaitement équilibrée par la force renvoyée par la fibromuqueuse comprimée, d'où la nécessité :

- d'utiliser des techniques d'enregistrement du support fibro-ostéomuqueux adaptées [9-12] ;

- de privilégier une extension maximale des selles prothétiques [13] ;

- de minimiser, quand l'occlusion le permet, le nombre de dents prothétiques [14] ;

- de vérifier régulièrement la coaptation des selles et, surtout, de les rebaser s'il y a lieu.

Mastication d'aliments collants

Lors de la mastication d'aliments collants, il n'est pas rare de voir les selles d'une prothèse à extensions libres se soulever. La prothèse a tendance à pivoter autour des extrémités rétentrices des crochets.Dans ce cas, l'axe de rotation principal passe non plus par les appuis occlusaux comme précédemment mais par les points de rétention bordant l'édentement (fig. 4) . Cet axe de rotation qui relie les extrémités rétentrices des crochets est très proche de l'axe précédemment décrit joignant les appuis dentaires. Cependant, ce sont deux axes distincts que l'on a trop souvent tendance à confondre alors qu'ils entrent en jeu dans des situations fonctionnelles totalement différentes (mastication d'aliments collants pour l'un, mastication d'aliments durs pour l'autre) (fig. 5).

Le décollement de la prothèse doit être prévenu par l'adjonction d'un élément de stabilisation antérieur, communément appelé élément d'appui indirect [15]. Cet élément est toujours une partie rigide incorporée à l'armature sous forme d'un appui dentaire isolé (fig. 6) ou d'un appui dentaire continu (barre cingulaire) (fig. 7). Il devient ainsi le nouveau centre de rotation autour duquel la prothèse tend à pivoter [16]. Rétention et appuis indirects sont ainsi étroitement liés. Les appuis indirects, pour prévenir efficacement les mouvements de bascule, doivent pouvoir compter sur une rétention directe efficace des crochets [17].

Ainsi, le principe des leviers met en application une force de déstabilisation, un axe de rotation et un point de rétention contrebalançant la force appliquée.

Une prothèse à selle libre est l'illustration parfaite d'un levier de deuxième genre [18] :

- l'appui indirect constituant le point d'appui du levier ;

- l'extrémité rétentrice du crochet constituant la résistance ;

- la force de décollement représentant la traction (fig. 8).

On ne peut intervenir que sur la longueur des bras de levier pour essayer de préserver un rapport de force le plus favorable possible à la stabilisation de la prothèse.

Les règles sont toujours les mêmes :

- minimiser le bras de levier ;

- optimiser le bras de stabilisation.

On détermine un bras de levier (LV) maximal par la force de déstabilisation due à l'application d'un aliment collant sur la dent prothétique la plus distale, c'est-à-dire la dent prothétique la plus éloignée de l'axe de rotation principal.

On détermine ensuite un bras de stabilisation (LS), si possible au moins équivalant au bras de levier (LV), pour stabiliser le système. Cette force de stabilisation doit donc s'appliquer le plus loin possible en mésial perpendiculairement à l'axe de rotation (fig. 9).

Dans le cas d'une classe I, le point d'application le plus efficace serait théoriquement le point interincisif. Pour des raisons d'interférence avec la zone phonétique et de fragilité des supports incisifs, c'est souvent l'appui mésial canin qui est privilégié.

Deux autres moyens de rétablir un rapport de force LV/LS plus favorable sont envisageables :

- en modifiant le point d'application de la force de levier (diminution de LV) : il suffit pour cela de ne pas monter de deuxième molaire ou de choisir des dents prothétiques plus étroites chaque fois que l'occlusion le permet (fig. 10) ;

- en éloignant le plus possible l'axe de rotation du point d'appui (augmentation de LS) : l'objectif est de maintenir la plus grande distance possible entre l'extrémité rétentrice du crochet et l'appui indirect. À ce titre, il est déconseillé de jumeler appuis direct et indirect, LS étant alors considérablement réduit.

Toujours dans le souci d'augmenter LS, il serait très souhaitable de déplacer au maximum en distal les points de rétention sur les dents bordant l'édentement, par exemple en utilisant des crochets barre en L. La rétention est ainsi assurée par la partie distale du crochet, ce qui permet d'augmenter LS. De même, l'utilisation d'une barre cingulaire comme élément de rétention indirecte assure un rapport de force LV/LS plus favorable en augmentant considérablement la distance LS [19]. Cependant, l'encombrement de ce dispositif est préférentiellement réservé aux dents au support parodontal affaibli, ce qui permet la répartition sur plusieurs dents des forces exercées [20].

Il faut toutefois préciser que l'efficacité des appuis indirects est totalement dépendante du nombre de dents restantes et, surtout, de la forme des crêtes. Lorsque toutes les dents restantes sont alignées, l'efficacité de l'appui indirect est fortement compromise (fig. 11).

Édentements de classe II de Kennedy-Applegate

La gestion de ces édentements postérieurs unilatéraux est très proche de celle des classes I. L'aire de sustentation est délimitée par :

- une ligne mésiale passant en avant de la plus antérieure des dents prothétiques ;

- une ligne distale passant par l'appui dentaire le plus postérieur du côté denté.

La ligne de sustentation sagittale doit donc être la plus longue possible pour agrandir au maximum l'aire de sustentation. Autrement dit, on privilégie un appui dentaire distal le plus postérieur possible du côté denté.

L'axe de rotation principal passe par l'appui dentaire bordant l'édentement et l'appui dentaire controlatéral le plus postérieur (fig. 12). La prothèse a alors tendance à amorcer un mouvement de rotation autour de cet axe diagonal. En outre, plus l'édentement est de grande étendue, plus l'obliquité de l'axe de rotation est importante et plus la nature des forces engendrées par le mouvement de rotation est nocive pour les tissus d'appui, notamment pour la dent bordant l'édentement (fig. 13) [21].

Dans le cas de la mastication d'aliments collants, on détermine le bras de levier maximal (LV) par la distance entre l'axe de rotation principal et la dent prothétique la plus éloignée de cet axe. Pour obtenir le bras de stabilisation optimal (LS), on cherche le point d'appui le plus éloigné possible mésialement et perpendiculairement à l'axe de rotation (fig. 14).

Comme pour les classes I, on peut :

- diminuer LV en réduisant le nombre de dents prothétiques chaque fois que l'occlusion le permet ;

- diminuer LV en déplaçant en distal le point de rétention sur la dent bordant l'édentement (fig. 15).

Lorsqu'une indication de prothèse fixée est posée sur les dents bordant l'édentement, les attaches de précision offrent des avantages esthétiques considérables, notamment dans la gestion de ces classes II. Sur le plan de la rétention indirecte, les dispositifs intracoronaires, en imposant un axe d'insertion très précis, laissent généralement très peu de possibilités de bascule au châssis. De même, certains dispositifs extracoronaires présentent des mécanismes permettant d'éviter la bascule. Cependant, les attaches de précision ne peuvent en aucun cas assurer à elles seules une rétention indirecte efficace. Leur emploi ne peut autoriser le praticien à s'affranchir des éléments du châssis spécialement dévolus à assurer la rétention indirecte (appuis occlusaux secondaires ou appuis corono-cingulaires) (fig. 16a et 16b).

Édentements encastrés : édentements de classe III de Kennedy-Applegate

Dans ce cas, le châssis prothétique s'inscrit parfaitement à l'intérieur de l'aire de sustentation (fig. 17). Les bras de levier et les bras de stabilisation s'équilibrent mutuellement. Toutes les dents remplacées se trouvant à l'intérieur du polygone de sustentation, la stabilité prothétique est maximale et donc, dans ce cas précis, l'adjonction d'appuis indirects présente peu d'intérêt (fig. 18).

L'adjonction d'un élément de rétention indirecte peut cependant, dans certains cas cliniques, permettre la réalisation de châssis évolutifs lorsque la perte d'un ou de plusieurs appuis dentaires postérieurs est prévisible, perte transformant la classe III en classe I ou en classe II.

Édentements de classe IV de Kennedy-Applegate

Cette classe regroupe les édentements intercalaires antérieurs répartis de part et d'autre de l'axe médian de l'arcade. Ce sont des édentements qui n'entrent pas dans le cadre classique de l'élaboration d'une prothèse amovible partielle dans la mesure où les dents prothétiques sont systématiquement en dehors de l'aire de sustentation de la prothèse (fig. 19). En effet, du fait de la courbure de la crête sur un plan horizontal, les dents prothétiques sont placées en dehors des points d'appui, la selle faisant alors office de levier.

La particularité de la classe IV tient au fait que la rétention indirecte doit contrebalancer les forces de déstabilisation générées lors de la mastication d'aliments collants (comme pour les autres classes), mais également lors de la mastication et, surtout, lors de l'incision des aliments. La stabilisation du châssis pour ce type d'édentement impose une multiplication des bras de rétention du fait des forces importantes développées en porte-à-faux lors de la mastication d'aliments durs et de l'importance du bras de levier lors de la mastication d'aliments collants [22].

Mastication d'aliments durs

Le bras de charge maximal (LC) est déterminé par la distance entre :

- le point interincisif ;

- l'axe de rotation principal de la prothèse qui passe par les appuis occlusaux les plus mésiaux.

Pour diminuer ce bras de charge, on doit placer les appuis occlusaux en bordure d'édentement.

Pour optimiser le bras de stabilisation LS qui va contrer LC, on privilégie le point d'application le plus éloigné possible de l'axe de rotation, c'est-à-dire le point d'application le plus postérieur possible. C'est pourquoi, dans ce type d'édentement, on recommande systématiquement de positionner les points de rétention les plus distaux possibles (fig. 20).

Mastication d'aliments collants

Le bras de levier (LV) est déterminé par l'axe passant par les points de rétention les plus mésiaux, d'où la nécessité de positionner les points de rétention les plus proches possibles de la zone édentée (fig. 21 et 22). Par ailleurs, le praticien ne doit pas oublier le recourt possible aux plans de guidage. Ces surfaces axiales, linguales et proximales majorent considérablement la stabilisation prothétique (fig. 23). Quel que soit le type d'édentement considéré, les surfaces de guidage sont toujours des moyens de lutte efficaces contre la rotation des selles en direction occlusale. Améliorant la rétention par friction, leur emploi est cependant limité aux cas cliniques où l'axe d'insertion de la prothèse est strictement perpendiculaire au plan d'occlusion [23].

En dernier lieu, lorsque la flèche antérieure décrite par la courbure de l'arcade est importante, la conservation de racines dentaires situées en avant de l'axe de rotation peut aider à assurer la rétention indirecte de la prothèse en augmentant considérablement la surface du polygone de sustentation et en réduisant, de ce fait, le porte-à-faux [24].

Édentements de classe V de Kennedy-Applegate

Cette classe regroupe les édentements encastrés unilatéraux dont la dent antérieure bordant l'édentement (incisive centrale ou latérale) ne peut servir de support. La canine est donc toujours absente et la stabilisation prothétique est d'autant plus difficile à assurer. Ce type d'édentement est comparable aux classes IV qui imposent une stabilisation lors de la mastication d'aliments collants mais aussi lors de la mastication d'aliments durs.

Comme pour les classes IV, les dents prothétiques sont généralement montées en dehors de l'aire de sustentation de la prothèse. En effet, il y a souvent une distance non négligeable entre la ligne de sustentation qui relie les appuis occlusaux bordant l'édentement et la courbure de l'arcade. Le bras de charge maximal (LC) est déterminé par la position de la dent prothétique la plus externe par rapport à l'axe de rotation passant par les appuis dentaires bordant l'édentement (fig. 24).

Mastication d'aliments durs

LC peut être réduit par un montage des dents prothétiques plus proche de la ligne de crête (montage en bout à bout). Le bras de stabilisation doit être le plus éloigné possible de la perpendiculaire à l'axe de rotation principal. Autrement dit, il est judicieux de concevoir le châssis en positionnant les points de rétention les plus postérieurs possibles (fig. 25).

Mastication d'aliments collants

En respectant les mêmes principes, les points de rétention doivent être les plus proches possibles de la zone édentée (fig. 26).

Cas particuliers

Dans le cas où très peu de dents subsistent sur l'arcade, c'est la position relative de ces dernières qui détermine la nécessité d'appliquer un appui dentaire ou non [25].

Deux situations totalement différentes peuvent se présenter :

- les dents prothétiques se trouvent toutes du même côté de l'axe de rotation : l'appui dentaire est recommandé. C'est le cas fréquemment rencontré lorsque ne subsistent sur l'arcade que les deuxièmes molaires (fig. 27). L'appui dentaire distal est alors conseillé, associé à l'utilisation de crochets circulaires pour avoir les points de rétention les plus antérieurs possibles. Lors de la mastication d'aliments collants, la prothèse commence à se soulever, elle tourne autour de l'appui distal ; le bras du crochet se déplace vers la ligne guide et assure ainsi la rétention ;

- les dents prothétiques se trouvent de part et d'autre de l'axe de rotation : l'appui dentaire est à proscrire.

L'exemple le plus fréquent est celui des arcades où ne subsistent que les deux canines. Des appuis classiques tels que des appuis occlusaux sur les dents restantes impliquent un mouvement réciproque de bascule. Si la charge se produit sur la selle antérieure, la prothèse bascule vers l'avant. Si la charge se produit sur la selle postérieure, la prothèse bascule vers l'arrière. En supprimant les appuis occlusaux classiques et en privilégiant sur les dents supports des couronnes fraisées avec surfaces de guidage, on élimine l'axe de rotation principal de la prothèse.

Conclusion

Lors des différentes sollicitations fonctionnelles, la prothèse amovible partielle se comporte comme un système de leviers : elle reçoit des efforts au niveau des faces occlusales des dents prothétiques, efforts qu'elle transforme, tant en intensité qu'en direction, avant de les retransmettre aux différents tissus supports.

Les leviers engendrés dépendent à la fois :

- des axes de rotation, donc du positionnement des appuis dentaires et des extrémités rétentrices des crochets ;

- des points d'application des forces déstabilisantes, donc du montage des dents prothétiques ;

- des points d'application des forces de résistance, donc du positionnement et de la conception des éléments de rétention directe et indirecte mais aussi des plans guides.

Ainsi, la compréhension du déplacement de la prothèse amovible partielle durant la fonction masticatrice (qu'il s'agisse d'aliments durs ou collants) permet d'en améliorer le tracé. Seule l'analyse raisonnée des bras de levier et des bras de stabilisation assure l'optimisation des rapports de force et la réduction des mouvements de bascule de la prothèse.

Cependant, si la notion de rétention indirecte est parfaitement intégrée dans le tracé des prothèses de classes I et II, ce n'est encore que trop souvent peu le cas pour les classes IV et V.

Du fait même de sa nature, la prothèse amovible partielle ne pourra, certes, jamais rivaliser avec l'assurance d'immobilité que confère au patient la prothèse fixée mais, grâce à l'optimisation du tracé, le praticien doit être en mesure de délivrer à son patient une prothèse « fiable » ou, autrement dit, une prothèse qui ne puisse être désinsérée que par la volonté de ce dernier.

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