Impact factor - Cahiers de Prothèse n° 130 du 01/06/2005
 

Les cahiers de prothèse n° 130 du 01/06/2005

 

Éditorial

Jean Schittly  

Rédacteur en chef

Actuellement, l'évaluation d'un postulant à une fonction hospitalo-universitaire en odontologie repose sur différents critères touchant les domaines de la recherche, de la pédagogie et de la clinique. Le cursus, qui le mène aux concours, lui a permis de compléter au fil des mois ses « titres et travaux ». Les activités d'enseignement, les communications et conférences, les publications d'articles cliniques ne sont pas des épreuves insurmontables.

En revanche, le volet «...


Actuellement, l'évaluation d'un postulant à une fonction hospitalo-universitaire en odontologie repose sur différents critères touchant les domaines de la recherche, de la pédagogie et de la clinique. Le cursus, qui le mène aux concours, lui a permis de compléter au fil des mois ses « titres et travaux ». Les activités d'enseignement, les communications et conférences, les publications d'articles cliniques ne sont pas des épreuves insurmontables.

En revanche, le volet « recherche » pose le plus souvent problème : outre la difficulté de trouver un laboratoire d'accueil, l'acquisition des prérequis à la soutenance d'une thèse d'Université par exemple, constitue un réel parcours d'obstacles. Comme toutes les disciplines de l'Université, l'odontologie ne peut échapper à la suprématie des modes d'évaluation américains, institués depuis plusieurs décennies.

Dans les années 60, E. Garfield a créé l'Institute for scientific information (ISI), une société privée dont la principale mission est de mettre au point des indicateurs mesurant la « consommation » des résultats scientifiques en prenant en compte les « citations ». Est née ainsi une formidable banque de données qui a enregistré plus de 13 millions de références et 150 millions de citations à partir de 4 500 périodiques couvrant toutes les disciplines scientifiques ou techniques.

Ces périodiques sont classés selon différents critères dont le plus connu est « l'impact factor ». Ce facteur d'impact mesure le prestige d'une revue en prenant en compte la fréquence moyenne avec laquelle l'ensemble des articles de cette revue a été cité sur une période donnée. De plus amples informations sur l'IF et la façon dont il est calculé chaque année sont disponibles sur : www.isinet.com/essays/ journalcitationreports/7.html/

À titre d'exemple, en 2002, Nature, une revue généraliste notoire avait un impact factor (IF) de 30,432 et la revue spécialisée New England Journal of Medicine, un IF de 31,736.

Notons que l'IF des « meilleures revues scientifiques françaises » tel le Journal de l'Institut Pasteur, est inférieur à 1.

Pour en revenir à notre domaine odontologique, il est intéressant, voire surprenant, de constater que le Journal of Prosthetic dentistry, considéré pour certains comme une référence, n'a un IF que de 0,568. Qui plus est, cette revue limite à 3 le nombre de publications en langue étrangère qui peuvent être indexées dans la bibliographie des articles qu'elle publie. Elles ne sont autorisées que si elles ont été traduites en anglais.

Ces simples constatations permettent de comprendre pourquoi nos revues scientifiques odontologiques françaises ne peuvent pas être citées et échappent ainsi aux critères du facteur d'impact. Sortir de l'hexagone est impossible. Un article scientifique en français, peu valorisant pour un candidat à un concours universitaire, une fois traduit en anglais et publié par une revue à facteur d'impact élevé, devient une marque d'exception.

Certes, des scientifiques européens s'indignent de cette situation et ne manquent pas d'arguments pour critiquer le protectionnisme et la main mise des États-Unis sur les publications internationales. Mais quels moyens ont-ils pour se soustraire à la règle établie ?

En ce qui concerne notre petite communauté odontologique, il faut bien se rendre à l'évidence : on ne peut que se fondre dans le moule.

Toutefois, en cette période où l'Europe est au cœur des débats, on se met parfois à envisager la possibilité que toutes les disciplines médicales européennes rassemblées créent une base de données comparable pour valoriser et étendre l'impact de nos revues scientifiques. Il y a cependant, à la réflexion, un obstacle majeur à franchir : comment diffuser des informations scientifiques à des populations qui parlent une vingtaine de langues différentes ?

Finalement, peut-être que l'anglais…