Prothèse supra-implantaire mandibulaire versus prothèse complète traditionnelle : étude sur 10 ans - Cahiers de Prothèse n° 135 du 01/09/2006
 

Les cahiers de prothèse n° 135 du 01/09/2006

 

Synthèses

Éric Robbiani  

Pourquoi ?

La plupart des études prospectives sur plus de 10 ans se concentrent sur les taux de survie et peu sur les suivis chirurgicaux et prothétiques. Certaines études montrent des taux de complications non négligeables (Goodacre et al., 2003), mais aucune n'a comparé le traitement implantaire avec le traitement conventionnel. Cette étude clinique prospective, randomisée, évalue sur 10 ans les temps de traitement et de suivi chirurgicaux et prothétique...


Pourquoi ?

La plupart des études prospectives sur plus de 10 ans se concentrent sur les taux de survie et peu sur les suivis chirurgicaux et prothétiques. Certaines études montrent des taux de complications non négligeables (Goodacre et al., 2003), mais aucune n'a comparé le traitement implantaire avec le traitement conventionnel. Cette étude clinique prospective, randomisée, évalue sur 10 ans les temps de traitement et de suivi chirurgicaux et prothétique nécessaires dans les deux options de traitement de patients totalement édentés à la mandibule avec ou sans implant.

Comment ?

Entre 1990 et 1992, les patients adressés par leur praticien au service de chirurgie ou de prothèse maxillofaciales de l'université de Groningen pour des motifs d'instabilité de leurs prothèses ont été sélectionnés. Les critères d'inclusion étaient : un édentement de plus de 1 an, une hauteur d'os au niveau symphysaire comprise entre 8 et 25 mm, aucun problème médical, aucun antécédent de chirurgie préprothétique et aucune radiothérapie de la tête ou du cou. Les patients ont été répartis en 5 groupes de façon aléatoire :

- groupe 1 : PSI sur 2 implants avec une hauteur d'os entre 8 et 15 mm (n = 30) ;

- groupe 2 : PAC avec une hauteur d'os comprise entre 8 et 15 mm (n = 30) ;

- groupe 3 : PSI sur 2 implants avec une hauteur d'os entre 16 et 25 mm (n = 32) ;

- groupe 4 : PAC après chirurgie préprothétique avec une hauteur d'os entre 16 et 25 mm (n = 30) ;

- groupe 5 : PAC avec une hauteur d'os entre 16 et 25 mm (n = 29).

Les traitements ont été réalisés par 2 chirurgiens et 2 prothésistes expérimentés. Les implants IMZ et Brånemark ont été utilisés de façon randomisée. Ils ont été posés en 2 temps chirurgicaux. Aucun antibiotique n'a été prescrit en postopératoire. Les patients n'étaient pas autorisés à manger avec leur prothèse pendant les 3 mois précédant la mise en place des piliers. Une barre d'Ackermann a été utilisée pour relier les 2 implants. Les prothèses maxillaire et mandibulaire ont été refaites à ce stade. Des dents en résine ont été utilisées en postérieur et des dents en porcelaine en antérieur. Aucun renfort métallique n'a été utilisé à la mandibule. Dans le groupe 4, les patients ont attendu 4 semaines après la chirurgie d'approfondissement vestibulaire avant de refaire les prothèses.

De la première consultation jusqu'à la fin de la période de 10 ans, le temps de chaque visite et de chaque intervention a été comptabilisé selon des tables de temps moyen estimé nécessaire à chaque acte. Ces temps ont été cumulés pour les 5 périodes considérées : diagnostique, chirurgicale (sauf groupes 2 et 5), prothétique, postchirurgicale et postprothétique (après 2 mois de port de la prothèse).

Et alors ?

Un total de 151 patients a débuté l'étude. Au total, 17 patients sont décédés et 1 a déménagé. Au total, 133 patients ont été suivis sur 10 ans. Sur la période considérée, 10 patients du groupe 2 et 11 patients du groupe 4 sont passés de PAC à PSI.

La phase initiale est similaire dans tous les groupes (35 min en 2 rendez-vous). La période chirurgicale est similaire pour les groupes 1, 3 et 4 : de 149 à 166 min.

Un total de 17 implants a été perdu (taux de survie de 92 %), tous ont été remplacés avec succès. La majorité était dans le groupe 3 (9/17).

En revanche, les besoins chirurgicaux postprothétiques sont plus importants dans les groupes 2 et 5 sans implants (78 min versus 40).

Les PSI nécessitent plus de temps de réalisation prothétique que les PAC (200 min versus 150). Le temps de suivi postprothétique est moins important dans le groupe 4 (plastie). Pour 15 patients, la barre d'Ackermann a été remplacée par une barre de Dolder. Les rebasages souples (Molloplast) sont plus fréquents dans les groupes 2 et 5. Le temps total de traitement et le nombre de rendez-vous sont plus importants dans les groupes implants.

Aucune information n'est divulguée sur les marques d'implants perdus.

À retenir :

La réalisation de prothèses supra-implantaires (PSI) est le traitement préconisé de l'édentement complet mandibulaire. Les taux de survie implantaire sont excellents, la satisfaction des patients très élevée. Cette étude se concentre sur le temps nécessaire à la réalisation des prothèses mandibulaires avec ou sans implants. Un total de 133 patients a été suivi de façon prospective sur une période de 10 ans. Ils avaient été répartis de façon aléatoire en 5 groupes. Le temps moyen de chaque acte et intervention a été noté pour chaque groupe selon des tableaux très détaillés. Le protocole de l'étude est très rigoureux. En moyenne, les traitements par prothèses supra-implantaires nécessitent davantage de rendez-vous et des temps de traitement plus longs que les traitements conventionnels sans implants. Les taux de satisfaction sont plus élevés avec les PSI qu'avec les PAC. Dans cette étude, 44 % des porteurs de PAC sont passés en PSI pendant les 10 ans. Ces temps de traitement plus longs (et les coûts associés) sont des éléments à intégrer dans les facteurs décisionnels de choix de traitement.