Les tenons radiculaires : que dit la dentisterie fondée sur les preuves ? - Cahiers de Prothèse n° 145 du 01/03/2009
 

Les cahiers de prothèse n° 145 du 01/03/2009

 

revue de presse

Olivier Etienne*   Jean-Claude Schoeffler**  

Objectifs

À partir d’une analyse critique de la littérature, les auteurs essaient de répondre aux questions suivantes :

– doit-on ou peut-on utiliser un tenon radiculaire ?

– quel doit être le matériau de ce tenon ?

– quelle forme doit avoir le tenon ?

Méthodologie

À partir d’une analyse par mots clés spécifiques de la base de données Medline, les auteurs ont recensé 2 465 articles entre 1968 et 2008 portant sur le sujet...


Objectifs

À partir d’une analyse critique de la littérature, les auteurs essaient de répondre aux questions suivantes :

– doit-on ou peut-on utiliser un tenon radiculaire ?

– quel doit être le matériau de ce tenon ?

– quelle forme doit avoir le tenon ?

Méthodologie

À partir d’une analyse par mots clés spécifiques de la base de données Medline, les auteurs ont recensé 2 465 articles entre 1968 et 2008 portant sur le sujet des tenons radiculaires. En limitant les critères de sélection aux seuls articles rapportant des études cliniques, des études in vitro avec groupes de contrôle randomisés ou des méta-analyses sur les 5 dernières années, les auteurs n’ont retenu que 80 publications. Pour la plupart, ces études sont des études de laboratoire portant sur les tenons métalliques.

Résultats

• Indication des tenons

L’effet de cerclage de la dent par l’artifice prothétique, obtenu par la présence d’une hauteur dentinaire résiduelle de 2 mm au minimum et d’une épaisseur de 1 mm au minimum est le critère prépondérant pour le taux de survie des dents traitées endodontiquement. Cet effet de cerclage est validé avec un haut niveau de preuve pour les dents monoradiculées, quel que soit le matériau de la reconstitution et/ou la présence d’un tenon. En revanche pour les pluriradiculées, cet effet n’est pas encore validé.

L’autre constatation validée par l’analyse est que le risque de fracture radiculaire augmente avec le diamètre du tenon.

• Absence de tenon versus tenon métallique

Ce sujet reste controversé dans la littérature. Aucun effet positif ou négatif n’a pu être démontré, ni à court terme ni à long terme, sur l’influence du tenon métallique dans le taux de survie de la dent traitée endodontiquement.

• Absence de tenon versus tenon composite renforcé par fibres de verre

Une étude clinique sur des prémolaires traitées endodontiquement et présentant des cavités de classe II compare le taux de survie entre les restaurations à l’amalgame sans tenon et les restaurations par composite et tenon fibré. Les auteurs retiennent que les obturations faisant appel à une obturation adhésive sont plus sujettes à récidive carieuse, mais présentent moins de fractures et, par là même, influencent moins négativement le taux de survie.

• Tenon composite renforcé par fibres de verre versus tenon vissé

En l’état actuel des connaissances, les tenons vissés ne sont plus indiqués pour restaurer les dents dévitalisées.

• Tenon composite renforcé par fibres de verre versus tenon métallique

De nombreuses études in vitro comparant le tenon métallique Ni-Cr au tenon fibré concluent que ce dernier est moins source de fracture. Une étude clinique conclut après 2 ans de recul qu’il n’existe pas de différence entre le tenon en titane et le tenon fibré.

Aucune différence significative n’est observée selon le type de tenon fibré (Aesthetic plus, DT, FRC Postec).

• Tenon céramique versus tenon métallique

Aucune étude clinique contrôlée n’existe à ce jour.

Seule la liaison zircone-résine composite testée in vitro s’avère très insuffisante comparée au tenon métallique scellé ou au tenon fibré collé.

• Scellement des tenons

Le collage des tenons fibrés doit se faire préférentiellement à l’aide de systèmes adhésifs de type MR et de résine composite chémopolymérisable, en prenant soin d’éliminer le ciment d’obturation canalaire au préalable. Néanmoins, aucune étude clinique contrôlée et randomisée n’est encore disponible dans la littérature.

• Forme des tenons renforcés par des fibres de verre

Une seule étude clinique compare la forme cylindrique à la forme cylindro-conique sur 2 ans et ne montre aucune différence de résultats à ce court terme.

Conclusion

Cette recherche exhaustive de la littérature sur les tenons radiculaires permet de tirer quelques recommandations, en s’appuyant sur la dentisterie fondée sur la preuve (evidence-based dentistry) : plus que le matériau du tenon et de la reconstitution, le facteur capital pour la survie de la dent est le délabrement initial, et plus particulièrement la conservation possible ou non d’une hauteur dentinaire de 2 mm au-delà du congé, assurant le cerclage de la dent par la pièce prothétique. En dehors de ce critère, il faut retenir de la littérature scientifique que le diamètre du tenon métallique est facteur de fracture s’il augmente et qu’en cas de restauration non prothétique de la dent dévitalisée, le tenon fibré collé et associé à une résine composite est préférable.

En revanche, à l’instar d’autres publications comme celle de l’équipe niçoise dans Evidence-based Dentistry, les auteurs concluent qu’il n’est pas encore possible à ce jour de donner des indications formelles sur le type de matériau à mettre en œuvre selon la situation clinique. L’expérience propre du clinicien leur semble dès lors le critère de choix.

Cette étude confirme la difficulté de définir des protocoles fondés sur la preuve scientifique, tant la littérature regorge d’études incomparables, car non paramétrées. Il serait souhaitable que les équipes de recherche cliniques et de laboratoire définissent des protocoles de tests communs afin de pouvoir exploiter à grande échelle les résultats individuels.

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