Thérapeutique paro-implanto-prothétique - Cahiers de Prothèse n° 146 du 01/06/2009
 

Les cahiers de prothèse n° 146 du 01/06/2009

 

PLAN DE TRAITEMENT

Stéphane Kerner*   Arnaud Costi**   Bruno Tavernier***   Olivier Fromentin****  


*Ancien AHU, diplôme universitaire approfondi de parodontologie et implantologie
**Ancien interne, étudiant CECSMO
***PU-PH, diplôme universitaire d’implantologie chirurgicale et prothétique
****MCU-PH, diplôme universitaire d’implantologie chirurgicale et prothétique
*****Université Paris-7 Denis-Diderot
Service d’odontologie Garancière Hôtel-Dieu, AP-HP
5, rue de Garancière
75006 Paris

Résumé

Le remplacement de 4 incisives mandibulaires, extraites dans le cadre d’un assainissement parodontal, a été accompagné d’un traitement pluridisciplinaire décrit temps par temps. Le choix des dimensions, de la position et du nombre d’implants appropriés fait l’objet d’une discussion argumentée. Dans un souci didactique, la démarche de conception du traitement, les phases chirurgicales et prothétiques sont abordées successivement, en soulignant l’importance de la maintenance parodontale qui conditionne le succès à long terme de ce type de thérapeutique.

Summary

Treatment combining prosthetics, implantology and periodontology : replacing mandibular incisors – Case reports

How to replace mandibular incisors extracted after a periodontal therapy’will be presented through a multidisciplinary case report. Decision about the number of implants, their location and dimension is discussed. Surgical and prosthetic protocols are described step by step for more clearness and highlight the importance of periodontal maintenance which conditions long term treatment success.

Key words

dental implants, implant-fixed partial denture, mandibular incisors, periodontal disease

Les parodontites sont des atteintes inflammatoires d’origine infectieuse qui aboutissent à la destruction profonde des tissus parodontaux. Leur traitement nécessite une réduction de la charge bactérienne. Cependant, en dépit de l’assainissement parodontal et des progrès constatés au niveau du contrôle de plaque, certaines dents ne peuvent pas être conservées et leur remplacement doit être envisagé.

Le but de cet article est d’exposer les difficultés engendrées par la réhabilitation prothétique d’un édentement antérieur mandibulaire, d’expliquer la démarche diagnostique, de justifier l’élaboration d’un plan de traitement et de décrire, temps par temps, les différentes séquences thérapeutiques.

Présentation du cas clinique

Anamnèse

Âgée de 50 ans, la patiente a consulté pour des douleurs à la mastication. Elle était en bonne santé et a reconnu ne se rendre qu’exceptionnellement chez le dentiste. D’un milieu socioculturel modeste, elle était néanmoins disposée à entreprendre l’ensemble des soins nécessaires pour ne plus souffrir et remettre en état sa cavité buccale. En dehors de l’urgence douloureuse, sa demande était essentiellement fonctionnelle, mais l’aspect esthétique du résultat thérapeutique ne lui était pas indifférent.

Examen clinique

Examen exobuccal

L’examen exobuccal ne montrait pas d’asymétrie faciale. Les trois étages de la face étaient équilibrés. La biprochéilie était marquée. Lorsqu’elle souriait, la patiente découvrait les incisives maxillaires et mandibulaires pratiquement jusqu’aux collets des dents (fig. 1).

Examen endobuccal

L’examen endobuccal n’a pas révélé de lésions carieuses ou de soins restaurateurs sur l’ensemble des dents. À signaler toutefois l’absence des 3e molaires et de 41 remplacée par un bridge collé. Les diastèmes observés entre 14/13, 12/11, 22/23 et 34/33 étaient apparus progressivement aux dires de la patiente.

La présence significative de plaque et de tartre avec, notamment au niveau du bridge collé, un dépôt très abondant, témoignait d’une hygiène buccodentaire insuffisante (fig. 2). L’inflammation était généralisée et se manifestait par un saignement abondant lors du sondage. Ce dernier a mis en évidence la présence de nombreuses poches parodontales, d’une profondeur de 8 mm en moyenne, localisées au niveau des molaires et des incisives centrales maxillaires et mandibulaires. La suppuration concernait 11 dents sur les 27 présentes (fig. 3).

Examens complémentaires

Examen radiographique

L’examen du bilan rétroalvéolaire long cône a confirmé une alvéolyse généralisée. L’incisive 41 avait d’ailleurs été extraite 4 ans auparavant pour des raisons parodontales (fig. 4).

Examen de l’occlusion

L’examen clinique de l’occlusion, complété par le transfert sur articulateur des moulages d’étude, a montré :

– une relation de classe I d’Angle molaire et canine du côté droit et gauche ;

– un surplomb horizontal de 2 mm et un recouvrement vertical de 1 mm au niveau antérieur ;

– un guide antérieur sur des incisives vestibulo-versées ;

– une fonction canine droite et gauche avec des contacts non travaillants au niveau des molaires lors des diductions (du côté droit comme du côté gauche).

Une déglutition dysfonctionnelle avec interposition linguale interarcades a été suspectée. L’examen de la musculature n’indiquait pas de contraction et le trajet d’ouverture-fermeture buccale possédait une amplitude normale sans déviation.

Diagnostic

Les douleurs ressenties par la patiente étaient en rapport avec le développement d’une parodontite chronique généralisée sévère, vraisemblablement en phase active. La mobilité ainsi que la migration progressive des dents antérieures s’expliquaient par l’inflammation et l’affaiblissement important du support parodontal. La pulsion linguale, sans doute secondaire, était en rapport avec la nécessité de calage des arcades lors de la déglutition malgré la mobilité dentaire.

Objectifs du traitement

Le plan de traitement, en accord avec le protocole thérapeutique spécifique aux parodontites proposé par Lindhe et al. [1], s’est déroulé en 3 étapes (fig. 5) :

– la thérapeutique initiale avec pour objectif de réduire la charge bactérienne ;

– la thérapeutique correctrice, centrée sur la réhabilitation prothétique après élimination des poches résiduelles ;

– l’élimination des récidives, assurée par la phase de maintenance.

Le choix de la solution prothétique définitive a été déterminé en fonction des résultats obtenus à la fin de la séquence de la thérapeutique initiale et de la qualité de la coopération de la patiente. L’étape de réévaluation s’est avérée primordiale.

Thérapeutique initiale

Le premier temps thérapeutique a été centré sur l’urgence douloureuse et le contrôle de plaque.

Désinfection globale

Pour éviter qu’entre les séances, les poches traitées ne soient recolonisées par les bactéries des poches non traitées et par celles provenant d’autres niches de l’oropharynx (langue, amygdales…), il a été convenu d’utiliser le protocole de désinfection globale en 1 temps proposé par Quirynen et al. [2] :

– détartrage/surfaçage radiculaire complet sous anesthésie, en 2 séances espacées de 24 h ;

– irrigation sous-gingivale de toutes les poches avec un gel de chlorhexidine à 1 % pour éliminer les bactéries résiduelles ;

– brossage de la langue avec un gel de chlorhexidine à 1 % pendant 1 minute ;

– bains de bouche avec une solution de chlorhexidine à 0,2 % pendant 2 minutes et pulvérisation au niveau des amygdales ;

– poursuite des bains de bouche à la chlorhexidine à 0,2 % 2 fois par jour pendant 2 mois.

Avulsions

Les dents 16, 17, 25, 26, 27, 37, 47 qui présentaient un pronostic défavorable ont été extraites. En revanche, les incisives maxillaires et mandibulaires ont été conservées dans un premier temps.

Réévaluation à 3 mois

Le protocole de nettoyage instauré ayant été bien suivi et l’hygiène buccodentaire s’était nettement améliorée (fig. 6 et 7).

La thérapeutique initiale a été bénéfique et a contribué à l’assainissement parodontal. Les indices de plaque et de saignement étaient inférieurs à 20 %. Une diminution de la profondeur de poches a été constatée sauf au niveau des incisives mandibulaires (7 mm) et au niveau des molaires mandibulaires (poches″ 6 mm avec saignement au sondage). Après réévaluation du plan de traitement, l’avulsion des incisives mandibulaires et des lambeaux d’assainissement a été programmée au niveau des secteurs molaires mandibulaires.

Concernant les incisives maxillaires, la cicatrisation des tissus parodontaux s’est accompagnée de l’apparition de récessions gingivales. Leur conservation à moyen terme a néanmoins été justifiée par le fait qu’elles étaient intactes, non mobiles, modérément sollicitées lors des excursions mandibulaires et en bonne santé pulpaire. Une contention à visée prophylactique a été réalisée.

Compte tenu des résultats acquis quant à l’assainissement parodontal, la diminution des indices de plaque, du saignement et de la bonne coopération de la patiente, il a été décidé de pratiquer la première étape de la thérapeutique correctrice et de proposer différentes solutions prothétiques adaptées à la conjoncture clinique avec leurs avantages et inconvénients respectifs.

Thérapeutique correctrice

Chirurgies parodontales et avulsion de 31, 32, 42

Des chirurgies parodontales d’assainissement avec comblement des lésions infra-osseuses par de l’os autogène dans les secteurs molaires mandibulaires droit et gauche ont été réalisées. Puis, 31, 32 et 42 ont été extraites. Une prothèse immédiate temporaire en résine a été insérée le jour de l’intervention (fig. 8).

Solutions thérapeutiques prothétiques

À l’arcade maxillaire

Pour compenser l’édentement de classe I du maxillaire, trois possibilités thérapeutiques étaient envisageables.

Prothèse mixte fixée et amovible

Outre son coût financier, cette solution présentait deux inconvénients majeurs :

– nécessité d’engager un traitement orthodontique pour fermer ou diminuer les diastèmes antérieurs et éviter ainsi une largeur excessive des futurs éléments prothétiques fixés ;

– obligation de réaliser des préparations coronaires mutilantes sur les dents piliers qui sont indemnes de carie et en bonne santé pulpaire.

Prothèse fixée sur implants

Cette option a été écartée pour des raisons financières, mais pouvait être envisagée secondairement.

Prothèse amovible partielle « évolutive » à châssis métallique

Compte tenu du contexte clinique et des possibilités pécuniaires de la patiente, cette dernière option a été proposée et retenue.

En effet, ce type de prothèse a l’avantage de laisser la possibilité d’adjoindre assez facilement les dents prothétiques en fonction de la perte des incisives. L’inconvénient réside dans le contrôle des contraintes qui s’exercent sur les dents supports de crochets. La littérature a publié à ce sujet des études comparatives, statistiquement significatives, sur la recrudescence de la maladie parodontale à moyen et long terme au niveau des dents avec et sans supports de crochets [3].

Pour limiter ce risque, la qualité de l’empreinte, l’adaptation de la base prothétique aux dents et à la fibromuqueuse ainsi que le contrôle de l’occlusion devaient être optimaux. Par ailleurs, une surface d’appui maximale a été recherchée pour limiter les contraintes sur des dents au support parodontal réduit (fig. 9).

À l’arcade mandibulaire

La mandibule présentait un édentement de classe I (édentement bilatéral postérieur libre) subdivision 1 (édentement 32-31-41-42) qui s’apparentait à une classe IV de Kennedy (fig. 10).

Différentes solutions prothétiques étaient envisageables :

Prothèse amovible partielle

Ses principaux inconvénients se situent au niveau :

– de l’aspect inesthétique des éléments de rétention (crochets) ;

– de l’inconfort de la prothèse.

Ces défauts sont rédhibitoires.

Bridge fixé conventionnel

Cette solution impliquait, en raison de la conjoncture parodontale, des préparations coronaires étendues au moins jusqu’aux 1res prémolaires. Ces délabrements tissulaires et le coût financier du traitement ont légitimé le refus de la patiente.

Bridges collés

Le remplacement, par bridge collé, de 2 incisives médiales a été décrit [4], mais ce schéma prothétique ne semblait pas justifié dans le cas présent, compte tenu du contexte parodontal, de la pulsion linguale et de l’étendue de l’édentement. De plus, la littérature a rapporté un faible taux de survie de cette solution prothétique [5].

Solution implanto-prothétique

Les restaurations implanto-prothétiques respectent les exigences de l’intégrité biologique des tissus de soutien et évitent la solidarisation prothétique aux dents restantes. La littérature a prouvé que la perte des dents en relation avec une parodontite ne constitue pas une contre-indication à l’implantologie [6].

Décision

La patiente ayant été informée de toutes les éventualités prothétiques, avec leurs avantages et leurs inconvénients, il a été possible de l’orienter, avec son consentement éclairé, vers une solution restauratrice mandibulaire qui corresponde à ses souhaits et à la situation clinique.

La solution implanto-prothétique a été privilégiée en raison de ses nombreux avantages.

Bilan préimplantaire

1re étape : montage prospectif

L’examen clinique initial a été complété pour déterminer avec précision le nombre d’implants, leur diamètre et leur situation. Au cours d’une séance d’essayage, le montage prospectif réalisé sur une base en cire a été validé sur les plans esthétique et fonctionnel. La patiente a pu visualiser le résultat final.

Les dents prothétiques de cette maquette étaient identiques à celles de la prothèse transitoire ; elles étaient ajustées sur la crête antérieure, sans fausse gencive vestibulaire. Ce procédé a permis de vérifier la hauteur des dents prothétiques, le support labial et la visibilité cervicale lors du sourire.

2e étape : guide radiologique

Cette maquette a été transformée en guide radiologique en incorporant des repères radio-opaques (gutta percha) au niveau de l’axe des futures dents prothétiques.

3e étape : examen tomodensitométrique

Le guide radiologique a été inséré dans la cavité buccale pour l’examen tomodensitométrique (fig. 11). L’analyse des coupes radiologiques a permis d’apprécier la qualité et la quantité d’os dans les 3 plans de l’espace. À noter que dans le sens mésiodistal, l’espace disponible entre les faces mésiales des canines n’était que de 20 mm (fig. 12 et 13).

Les avulsions récentes, la résorption osseuse minimale et l’espace prothétique disponible sur le plan vertical constituaient des facteurs favorables à l’élaboration d’une prothèse sur implants en harmonie avec les dents naturelles adjacentes. L’espace mésio-distal intercanin semblait plus difficile à gérer.

4e étape : choix du nombre, du diamètre et de la position des implants

En s’appuyant sur les récents travaux de Tarnow et al. [7, 8] relatifs à la préservation de la crête osseuse et de la papille interdentaire/interimplantaire, Ryser et al. [9] proposent des distances minimales à respecter entre tissu osseux, implants et dents dans les différents plans de l’espace :

• les distances mésio-distales minimales d entre 2 parois adjacentes doivent mesurer :

– entre 1 implant et 1 dent, d > 1,5 mm [9], l’idéal étant même de 3 mm [10] ;

– entre 2 implants, d > 3 mm [9], l’idéal étant de 4 mm [10] ;

• la distance verticale d′ entre le point de contact coronaire et le niveau de la crête alvéolaire doit être″ 5 mm [9].

Ne disposant que de 20 mm entre la face mésiale des 2 canines au niveau des points de contact, il était possible de mettre en place :

– soit 3 implants de diamètre réduit (3,25 ou 3,3 mm de diamètre) ;

– soit 2 implants à base standard (de 3,75 ou 4 mm de diamètre) (fig. 14 et 15).

1re option : 3 implants de diamètre réduits

D’après de nombreux auteurs, les implants de petit diamètre sont indiqués dans le traitement des édentements antérieurs lorsque le volume osseux est limité avec des dents présentant un diamètre cervical réduit [11, 12]. Les résultats à 5 ans indiquent un taux de succès de 96 % [13] et une pérennité qui semble similaire à celle des implants de taille standard [14, 15].

Toutefois, Renouard et Rangert [10] mettent en exergue le risque de fracture, car ce type d’implants serait de 25 % moins résistant mécaniquement. Ainsi, dans une étude longitudinale, Zinsli et al. [16], rapportent 3 % de complications à 10 ans sur 298 implants de 3,3 mm de diamètre ; les auteurs soulignent le risque de fracture par fatigue mécanique à moyen et long terme.

Ceci expliquerait l’arrivée sur le marché d’implants monolithiques ou monoblocs, plus résistants mécaniquement, car l’implant et le pilier prothétique ne forment qu’une entité. Il y a débat autour de la pérennité de ces implants, qui présenteraient une résorption cervicale plus importante que les implants classiques [17]. La mise en charge immédiate de ce type d’implants, leur forme ainsi que leur état de surface implantaire péri-gingival ont été évoqués comme facteurs défavorables [18]. Inversement, d’autres études montrent un bon comportement osseux à court terme de ces implants étroits monoblocs [19, 20].

2e option : 2 implants standard

Renouard et Rangert [10] proposent différentes solutions pour le remplacement de 4 incisives mandibulaires en utilisant 2 implants standard :

– bridge classique sur implants supporté par 32 et 42 ;

– bridge sur implants en 31 et 41 avec 1 ou 2 extensions en fonction de l’espace disponible ;

– bridge sur implant intermédiaire, chacun des 2 implants étant situé dans l’embrasure entre l’incisive médiale et l’incisive latérale homolatérales.

Cette dernière option est la plus simple à réaliser sur le plan chirurgical puisqu’il suffit de diviser l’espace disponible en 3 et de positionner les implants au 1er et au 2e tiers de la distance séparant les 2 canines. En revanche, la situation implantaire impose une gestion délicate des volumes et des embrasures prothétiques.

Cette solution a été rejetée car, lors du sourire, la patiente découvrait largement les incisives mandibulaires.

Décision thérapeutique finale

Finalement, il a été décidé de placer des implants standard en place de 32 et 42.

L’incidence esthétique du diamètre implantaire au niveau du profil d’émergence a été évoquée avec la patiente. Un diamètre de 4,1 mm au niveau du plateau cervical de l’implant implique la réalisation d’une couronne prothétique nécessairement plus volumineuse qu’une incisive mandibulaire naturelle. Cette émergence gingivale moins esthétique au niveau des deux piliers implantaires est un inconvénient indéniable à accepter pour bénéficier d’une résistance mécanique suffisante avec un faible nombre d’implants.

L’avantage économique, du fait de la réduction du nombre d’implants, a également été un argument très convaincant pour la patiente. Cette solution a donc été adoptée.

Chirurgie implantaire

Dans un premier temps chirurgical, 2 implants (3i®) de 3,75 × 11,5 mm ont été posés en 32 et 42, à 2 mm en mésial des canines (fig. 16). Cette intervention a été pratiquée à l’aide d’un guide chirurgical confectionné à partir du guide radiologique modifié.

Les implants ont été mis en nourrice pendant 3 mois, selon un protocole classique en 2 temps.

L’intrados de la prothèse transitoire de la patiente a été évidé pour ménager un espace suffisant pour recevoir une résine méthacrylique à prise retardée qui a été changée tous les 15 jours. Au cours au moins des 2 premières semaines, l’alimentation devait être de faible consistance pour éviter de comprimer la région implantée.

Lors du 2e temps chirurgical, une greffe dite d’interposition a été réalisée pour redonner du volume à la gencive kératinisée péri-implantaire [21].

Le greffon conjonctif prélevé au maxillaire (fig. 17) a été immobilisé par un système de sutures et les vis de couverture ont été mises en place (fig. 18).

Prothèse fixée supra-implantaire

Après cicatrisation, une empreinte de situation implantaire a été réalisée à l’aide de transferts emportés (technique « pick-up ») (fig. 19) et d’un élastomère siliconé monophase. Le matériau à empreinte a été placé dans un porte-empreinte individuel adapté pour cette technique. Les répliques de laboratoire ont été positionnées dans l’empreinte avant de la traiter (fig. 20). Moulage de travail et moulage maxillaire ont été ensuite transférés sur un articulateur semi-adaptable.

Les piliers droits en titane préfabriqués ont été fraisés au laboratoire pour les adapter en hauteur. Au niveau cervical, la limite de la future prothèse a été aménagée 2 mm sous le niveau gingival. Une clé de positionnement en résine a permis de transférer en bouche la situation respective des 2 piliers fraisés (fig. 21 et 22).

L’adaptation de l’armature métallique (fig. 23), puis la qualité des biscuits non glacés ont été vérifiées avant la mise en place du bridge céramo-métallique (fig. 24).

À chaque étape, il a fallu s’assurer que les rapports d’occlusion observés en bouche correspondaient bien à ceux de l’articulateur. Le guidage canin en latéralité et le guidage incisif en propulsion ont été contrôlés afin d’éviter la création de contraintes excessives localisées sur les incisives naturelles au maxillaire ou sur les prothèses supra-implantaires (fig. 25).

Les piliers ont été finalement transvissés à l’aide de vis en alliage d’or Gold-Tite™ (3i) à travers la clé de positionnement. Une clé dynamométrique a été utilisée pour contrôler le couple de serrage de ces vis à 35 Ncm. Un matériau silicone ou composite type Systemp® (Ivoclar-Vivadent) a ensuite été placé dans les puits d’accès aux vis des piliers pour faciliter un accès ultérieur.

La restauration prothétique a été scellée à l’aide d’un ciment provisoire (Temp™ Bond-Kerr) (fig. 26 et 27).

La stabilité de la prothèse sur implants a été contrôlée une semaine après scellement, puis à 1 mois et enfin tous les 6 mois. Les risques de recrudescence de la maladie parodontale étaient réels si la patiente n’effectuait pas ces contrôles réguliers ainsi que les séances de motivation à l’hygiène. La 3e phase du traitement parodontal, dite phase de maintenance, a certainement été la plus importante pour assurer la pérennité du traitement.

Ces séances ont permis d’inspecter radiographiquement l’évolution de la pathologie parodontale, d’évaluer l’hygiène de la patiente et éventuellement d’intervenir au niveau des dents naturelles, du parodonte ou des prothèses supra-implantaires réalisées.

Conclusion

Le remplacement prothétique de 4 incisives mandibulaires peut être obtenu à l’aide de différentes solutions thérapeutiques. Respecter les exigences biologiques et proposer un traitement présentant le rapport bénéfice-risque le plus favorable sont des objectifs délicats à atteindre, particulièrement dans les cas présentant un espace prothétique limité.

La prothèse fixée supra-implantaire conçue pour cette patiente est fonctionnelle, permet un bon contrôle de plaque, tout en s’intégrant harmonieusement du point de vue esthétique. Le faible nombre d’implants autorise un coût de traitement plus réduit.

Le succès à moyen et long terme de la thérapeutique prothétique dépend avant tout du respect des contrôles réguliers et de la maintenance parodontale.

Remerciements au Pr Philippe Bouchard, au Dr Richard Levy et aux Laboratoires Sopradent, Bégaud et Lefèvre.

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