Revue de synthèse de la littérature pour évaluer les effets du tabac sur les taux de survie des implants dentaires placés dans des sites de sinus maxillaires greffés - Cahiers de Prothèse n° 166 du 01/06/2014
 

Les cahiers de prothèse n° 166 du 01/06/2014

 

synthèses

Éric Robbiani  

Pourquoi ?

La perte des dents postérieures maxillaires s’accompagne fréquemment d’une perte de volume d’os alvéolaire et de la pneumatisation des sinus maxillaires. La conséquence est souvent une insuffisance de hauteur d’os pour envisager la pose d’implants dentaires dans de bonnes conditions. Le recours à des procédures d’augmentation osseuse (indépendamment des matériaux utilisés) est souvent une solution pour envisager la pose d’implants dentaires. Les...


Pourquoi ?

La perte des dents postérieures maxillaires s’accompagne fréquemment d’une perte de volume d’os alvéolaire et de la pneumatisation des sinus maxillaires. La conséquence est souvent une insuffisance de hauteur d’os pour envisager la pose d’implants dentaires dans de bonnes conditions. Le recours à des procédures d’augmentation osseuse (indépendamment des matériaux utilisés) est souvent une solution pour envisager la pose d’implants dentaires. Les taux de survie des implants placés dans ses sites greffés sont supérieurs à 85 % (Mordenfeld et al., 2012). Le tabac est un facteur bien connu qui diminue la vascularisation locale et a des effets négatifs sur les réponses immunitaires et inflammatoires ainsi que sur la cicatrisation des tissus parodontaux et péri-implantaires. Deux revues de synthèse ont rapporté des taux d’échecs des implants supérieurs chez des patients fumeurs que les non-fumeurs (Hinode et al., 2006 ; Strietzel et al., 2007).

Le but de cette étude est de déterminer si le fait de fumer du tabac diminue le taux de survie des implants placés dans des sites maxillaires après greffe de sinus.

Comment ?

La recherche a été menée sur les bases de données CENTRAL (Cochrane), Medline et Embase jusqu’à octobre 2012 sans restriction de langue selon les critères définis par Moose (2000), Prisma (2009) et la collaboration Cochrane (2008). Les critères d’inclusion des études sont précisés. Celles-ci décrivent le traitement des fumeurs et des non-fumeurs par des implants dentaires et des procédures d’augmentation osseuse sous-sinusienne ; la perte osseuse est enregistrée pour les fumeurs et non-fumeurs et les patients sont majeurs. Les critères d’exclusion sont les suivants : il n’y a pas d’augmentation osseuse ou les patients présentent des antécédents de diabète ou de maladies systémiques connues pour affecter la réponse de l’hôte (sida…). Deux des auteurs ont passé en revue les titres et résumés des articles et déterminés ceux pour lesquels l’article entier devait être analysé. Les données des études retenues ont été extraites selon une forme standardisée par les 2 auteurs et les études ont été classées selon leur niveau de qualité méthodologique à l’aide d’outils appropriés. Le risque de biais dans les études retenues a aussi été évalué à l’aide de critères définis.

Et alors ?

Sur les 3 360 articles issus de la recherche, seuls 11 ont été retenus pour une analyse complète du texte. Trois autres articles ont ensuite été exclus. Sur les 8 articles retenus pour cette étude, seuls 7 ont servi pour une méta-analyse. Au total, 1 129 patients, 1 384 sinus et 3 527 implants ont été répertoriés. Sur les 8 études, 1 présente une qualité méthodologique moyenne et 6 une qualité méthodologique faible selon l’échelle Newcastle-Ottawa (NOS). Les résultats individuels de 5 études indiquent que le taux de survie des implants est diminué chez les fumeurs (Kan et al., 2002 ; Geurs et al., 2001 ; Hetzberg et al., 2006 ; Peleg et al., 2006 ; Lin et al., 2012). De plus les pertes d’implants sont statistiquement plus fréquentes dans les sites greffés chez les fumeurs de la méta-analyse (RR = 1,87). Néanmoins, une étude d’un sous-groupe constitué des études prospectives ne révèle pas de différence statistiquement significative entre les fumeurs et les non-fumeurs pour ce qui concerne la perte d’implants. Une limite de cette revue de synthèse est la définition disparate dans les études du statut de fumeur (nombre de cigarettes, taux de nicotine…). L’arrêt temporaire du tabac au moment de l’intervention n’a pas été évalué.

La faible qualité des études incluses dans la revue de synthèse diminue la force des conclusions.

À RETENIR :

Le recours aux implants dentaires pour remplacer les dents absentes a prouvé son efficacité depuis de nombreuses années. Les taux de survie sont élevés sur le long terme. Dans les sites postérieurs maxillaires, la hauteur osseuse est souvent faible et le recours à des greffes osseuses est parfois nécessaire. La morbidité associée à ce type d’intervention peut-être plus élevée en cas de pathologie associée (diabète…) ou de conditions locales défavorables. L’influence de la consommation de tabac sur les taux de survie des implants placés dans des sites maxillaires sous-sinusiens greffés a été évaluée dans cette revue de synthèse. Une recherche bibliographique large a permis de retenir 8 études pertinentes mais néanmoins de faible qualité méthodologique. Les résultats de cette revue de synthèse indiquent que le taux de survie des implants placés dans des sites greffés au maxillaire est plus faible chez les fumeurs que chez les non-fumeurs. Le risque de perdre un implant dans un site greffé augmente de 87 % chez les fumeurs.