LA FASCINANTE MICRO-ENDODONTIE CHIRURGICALE RACONTÉE PAR ARNALDO CASTELLUCCI 
 
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07/06/2023

LA FASCINANTE MICRO-ENDODONTIE CHIRURGICALE RACONTÉE PAR ARNALDO CASTELLUCCI 

" La microchirurgie endodontique est une spécialité fascinante, souvent beaucoup moins « invasive » que la thérapie de retraitement orthograde, plus rapide et plus amusante, et finalement aussi plus rentable. Alors, prenez votre scalpel et… amusez-vous ! "

Castellucci A. Endodontie microchirurgicale. Paris : Editions CdP, 2022.

CLINIC : Le titre de votre livre Endodontie microchirurgicale n’est pas un hasard. Il insiste sur le fait que ce type d’intervention doit toujours être réalisé par un endodontiste. En quoi l’approche intellectuelle et clinique de l’endodontiste est-elle fondamentale ?

Arnaldo CASTELLUCCI : La chirurgie péri-apicale ne devrait être pratiquée que par ceux ayant les compétences pour le faire, la connaissance de l’anatomie endodontique ainsi que les matériaux et les instruments qui, selon la littérature actuelle, garantissent des taux de réussite à long terme très élevés. La personne qui possède toutes ces compétences, ces connaissances et cet équipement est l’endodontiste. Dans le premier chapitre, j’explique la différence entre la chirurgie endodontique - qui est pratiquée par les chirurgiens pour des raisons endodontiques, pour enlever le tissu de granulation ou récurer la paroi du kyste - et l’endodontie chirurgicale - qui est un traitement endodontique réalisé par un lambeau chirurgical, fait par ceux ayant la connaissance de l’anatomie endodontique et celle de l’étiologie des lésions d’origine endodontique et qui ont les moyens et le matériel pour le faire : microscope opératoire, source d’ultrasons et inserts, matériaux biocompatibles.

Vous décrivez clairement les indications de la chirurgie endodontique, en distinguant notamment les « fausses indications » des « vraies indications ». Quelles sont les limites du traitement orthograde et de la chirurgie rétrograde ?

Je décris les indications de l’endodontie chirurgicale qui peuvent se résumer en une seule véritable indication : l’impossibilité, pour quelque raison que ce soit, de mener à bien le traitement orthograde (présence d’obstacles de toute nature), de sorte qu’il devient nécessaire d’atteindre le but final par l’approche chirurgicale. Le professeur Herbert Schilder nous a appris il y a de nombreuses années que, dans la pratique, il n’y a pas de contre-indication au traitement endodontique tant que les dents sont saines sur le plan parodontal ou peuvent l’être, tant qu’il est possible de « sceller » toutes les communications existantes entre l’endodonte et le parodonte (les foramens apicaux, que Schilder appelait les « portes de sortie de la pathologie »), quelle que soit l’approche utilisée, c’est-à-dire « avec ou sans approche chirurgicale ».

Cela signifie que le but ultime du traitement endodontique est de sceller le système canalaire, ce qui peut être réalisé à l’aide de gutta-percha par l’approche orthograde ou de matériaux biocompatibles modernes par l’approche chirurgicale. Au contraire, il arrive très souvent de voir des patients traités par différents chirurgiens qui ont réalisé l’intervention dans le seul but d’enlever le tissu de granulation ou la paroi du kyste ; ils ont peut-être placé une greffe osseuse qui, par sa radio-clarté, simule la guérison radiographique de la lésion mais sans avoir scellé par voie rétrograde le système canalaire. Il est évident que ceux qui opèrent de cette manière n’ont pas compris la cause de la lésion (bactéries à l’intérieur des canaux radiculaires) et il est tout aussi évident que ce type de chirurgie est inévitablement voué à l’échec à court terme.

Parlons des matériaux de remplissage rétrogrades. Comme vous l’expliquez, l’amalgame n’a jamais donné de résultats satisfaisants. Quelles sont les qualités à privilégier dans les différents biomatériaux disponibles aujourd’hui ?

L’amalgame n’est évidemment pas un matériau biocompatible et, comme le montre la littérature, il provoque des taux dangereux de mercure dans le sang des patients. Il n’a pas donné de résultats satisfaisants pas tant à cause du matériau lui-même mais en raison de la méthode de préparation de la cavité rétrograde qui devait le recevoir : la cavité n’est pas dans l’axe du canal radiculaire, elle est réalisée principalement, sinon uniquement, aux dépens de la paroi palatine ou linguale de la cavité elle-même, avec l’impossibilité absolue de nettoyer la partie vestibulaire de la paroi du canal radiculaire et avec le risque de perforer la paroi palatine ou linguale du canal radiculaire. En ce qui concerne les différents matériaux biocompatibles disponibles sur le marché aujourd’hui, je ne trouve pas de grandes différences entre eux, si ce n’est une plus ou moins grande maniabilité car certains doivent être mélangés sur place tandis que d’autres sont prêts à être placés dans la cavité rétrograde. À mon humble avis, ce n’est qu’une question de préférence personnelle mais, si nous parlons de biocéramiques, leur comportement et leur pronostic à long terme sont certainement équivalents.

La préparation et l’obturation rétrogrades font partie intégrante du traitement chirurgical. Quelle est votre opinion sur les préparations supérieures à 3 mm si l’on tient compte de la meilleure préparation canalaire et des éventuelles microfissures résultant de l’utilisation des ultrasons ?

Mon avis sur les préparations de plus de 3 mm est plus que favorable. Mon grand ami et collègue de Paris, le Dr Bertrand Khayat, a développé des inserts ultrasoniques spécifiques, respectivement de 3, 6 et 9 mm et toujours à utiliser en séquence, qui trouvent leur meilleure indication dans le traitement chirurgical des canaux longs et droits laissés entièrement ou partiellement vides. En ce qui concerne les microfissures, il est bien connu que les inserts à ultrasons doivent toujours être utilisés à la puissance minimale et jamais à sec, mais avec une irrigation appropriée. De plus, le « risque lointain » d’apparition de microfissures n’est pas comparable à la « certitude » de problèmes liés à l’utilisation de fraises.

Quels conseils donneriez-vous aujourd’hui à un confrère qui veut commencer à pratiquer l’endodontie chirurgicale ?

Le conseil que je donnerais est de lire le livre attentivement, du premier au dernier chapitre. Il y trouvera des conseils pratiques pour résoudre tous ces doutes ou ces incertitudes. Le texte est accompagné de plus de 30 vidéos expliquant tout, de la manière de pratiquer une anesthésie correcte pour contrôler les saignements à la façon d’enlever les sutures. Enfin, de nombreux collègues désireux d’en savoir plus sur la micro-endodontie chirurgicale ont eu l’occasion de suivre mes cours et témoignent unanimement de leur satisfaction. C’est pourquoi j’invite les jeunes collègues à ne pas avoir « peur du sang » comme certains me le disent, à s’équiper d’un microscope opératoire - car on ne peut certainement pas le faire à l’œil nu et même pas avec diverses lunettes ou casques -, à s’équiper d’une bonne source d’ultrasons et de conseils spécifiques, et ils découvriront que la microchirurgie endodontique est une spécialité fascinante, souvent beaucoup moins « invasive » que la thérapie de retraitement orthograde, plus rapide et plus amusante, et finalement aussi plus rentable. Alors, prenez votre scalpel et… amusez-vous !

Propos recueillis par Antonietta BORDONE 


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